SEANCE DU 13 NOVEMBRE 2002


PRÉSIDENCE DE M. GUY FISCHER
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi pour la sécurité intérieure.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Ladislas Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est en tant que président du groupe chasse et pêche de notre assemblée que je souhaite intervenir dans ce débat (Ah ! sur diverses travées.),...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. La pêche ne pose pas de problème ! (Sourires.)
M. Ladislas Poniatowski. ... même si le sénateur de l'Eure que je suis ne peut que se réjouir de voir le Gouvernement dans son ensemble, et vous plus particulièrement, monsieur le ministre, se mobiliser pour faire reculer cette insécurité qui menace, aujourd'hui plus qu'hier, les habitants de nos villes et de nos villages, sans exception.
L'insécurité est une bien triste réalité, qui frappe de plus en plus de nos concitoyens partout, dans nos petites villes de province comme dans nos campagnes.
Les derniers chiffres fournis par la gendarmerie parlent d'eux-mêmes : la délinquance en milieu rural a augmenté de près de 77 % pour l'année 2001.
Il est donc urgent de prendre conscience de ce fléau et de mobiliser toutes les forces vives de notre pays, comme le Gouvernement nous y engage depuis août 2002 avec la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure et maintenant avec le texte qui nous est proposé en première lecture.
L'économie générale de ce projet de loi me convient parfaitement, monsieur le ministre, car il vise en priorité à renforcer l'efficacité générale des forces de police et de gendarmerie dans la conduite de leurs actions, tout en renforçant le rôle des maires dans cette lutte contre l'insécurité.
Je ne fais pas partie, monsieur le ministre, de ceux qui dénoncent votre texte comme une loi contre les pauvres. Les nouvelles incriminations que l'on trouve dans votre texte sur les nomades ou les prostituées ne nuiront pas aux pauvres, qui sont plus souvent victimes des violences qu'ils n'en sont les acteurs.
Comme vous l'avez rappelé lors de votre visite à Strasbourg et à nouveau en début d'après-midi, les droits de l'homme s'appliquent aussi aux victimes.
En fait, votre loi a le mérite de photographier les formes nouvelles de l'incivilité et de la criminalité organisée. Elle permettra surtout à la police et à la gendarmerie d'intervenir là où les textes surannés les paralysaient. (Mme Nicole Borvo s'exclame.)
Il est indispendable de mettre un terme à la naïveté qui a prévalu pendant les cinq dernières années et qui a révolté bon nombre de nos concitoyens ; ils n'ont pas manqué, d'ailleurs, de l'exprimer à l'occasion des dernières élections présidentielle et législatives.
Cela étant, monsieur le ministre, il ne faudrait pas que nous nous trompions de cible, comme l'avait fait l'an dernier votre prédécesseur Daniel Vaillant en prenant les chasseurs, les tireurs sportifs et les collectionneurs pour les mauvais élèves d'une société dans laquelle la simple possession d'une arme ferait de son détenteur un délinquant en puissance.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Hélas !
M. Ladislas Poniatowski. Le Premier ministre de l'époque avait soutenu cet acharnement anti-chasse, afin de donner un peu de grain à moudre à sa majorité plurielle, avant, vous vous en souvenez, mes chers collègues, de reculer devant le tollé provoqué par ce véritable catalogue d'interdictions, toutes plus inutiles les unes que les autres.
De nombreux parlementaires de l'actuelle majorité avaient critiqué ces mesures, reprochant au Gouvernement d'alors de préférer se focaliser sur les armes de chasse dans les campagnes plutôt que de s'intéresser aux armes de guerre qui circulent dans les banlieues.
C'est la raison pour laquelle j'attire votre attention, monsieur le ministre, sur le titre II de votre projet de loi qui fait référence aux dispositions relatives aux armes et aux munitions.
Votre approche est, certes, pragmatique et les articles proposés sont de toute évidence très éloignés du catalogue d'interdictions de votre prédécesseur. La mise en oeuvre des mesures prévues par certains articles est même urgente si l'on veut éviter qu'une tuerie comme celle qui a eu lieu à Nanterre ne se reproduise. Il s'agit des articles 31, 33 et surtout 35, qui faciliteront la consultation des fichiers et permettront aux professionnels de la santé de fournir des informations à l'administration.
Néanmoins, les articles 30 et 32 provoquent une profonde vague d'inquiétude parmi les 1,4 million de chasseurs.
Après cinq longues années de harcèlement législatif et réglementaire de la part du précédent gouvernement et une certaine lenteur dans les réformes envisagées par la ministre de l'écologie, les chasseurs acceptent mal des contraintes nouvelles, alors qu'ils ne sont en rien responsables de la délinquance.
Les chasseurs, les tireurs sportifs, les collectionneurs et les armuriers nous ont fait savoir, monsieur le ministre, qu'ils appréciaient la méthode de concertation que vous avez engagée personnellement, afin de mettre en place des mesures acceptables pour les deux millions d'utilisateurs légaux d'armes à feu. C'est pourquoi vous ne devez pas vous tromper de cible. Il est nécessaire de ne pas rendre obligatoire la déclaration pour toutes les armes de 5e catégorie.
De la même façon, il me paraît raisonnable que la présentation d'un certificat médical soit rendue obligatoire lors du passage de l'examen du permis de chasser. C'est d'ailleurs déjà le cas pour les tireurs sportifs lors de l'obtention de la première licence.
Mais est-il réaliste de vouloir imposer un certificat médical attestant de la bonne santé physique et psychique lors de l'achat d'une arme ou lors de la validation du permis de chasser ? Sincèrement, je ne le crois pas ! Indépendamment du coût que cela représenterait pour la sécurité sociale, comment vont réagir les médecins généralistes qui devront encore une fois engager leur responsabilité à propos de la détention d'une arme par leurs patients ?
Je tiens à remercier notre rapporteur Jean-Patrick Courtois d'avoir déposé des amendements de bon sens en la matière, lesquels, j'en suis sûr, apaiseront certaines inquiétudes.
Je suis certain que de telles mesures, plus adaptées, seront acceptées par les chasseurs, qui savent mieux que quiconque qu'une arme est un instrument dangereux à tout instant.
Les fédérations départementales de chasseurs mènent d'ailleurs, depuis plusieurs années, des campagnes permanentes d'information sur la sécurité et obtiennent d'excellents résultats, tant dans le comportement à la chasse que lors du rangement des armes et des munitions au domicile.
J'ajoute, monsieur le ministre, que le monde de la chasse pourrait être une force de proposition en matière de renforcement de la gendarmerie, afin de mettre en place une véritable police rurale, par exemple, plaçant une partie de l'actuelle police de la chasse, dont l'utilisation est plus que discutable, sous la tutelle du ministère de l'écologie.
M. Philippe François. C'est très important !
M. Ladislas Poniatowski. Voilà, monsieur le ministre, une autre façon d'associer les chasseurs à des missions d'intérêt général en sortant des sentiers battus. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la répression du crime, du vol, des conduites agressives est nécessaire à la vie commune des habitants, mais elle n'est que l'ultime réponse aux conduites deviantes quand la République a mis en oeuvre la justice sociale et environnementale ainsi que l'égalité des chances.
Or votre gouvernement se désengage chaque jour de la solidarité ; il rogne les budgets des emplois aidés et de tous ceux qui oeuvrent pour les plus pauvres. Il oublie la prévention spécialisée et criminalise les populations en souffrance. Et, s'agissant de la sécurité, au-delà des accroissements des moyens de la police et de la justice, justifiés mais mal affectés, vous ne prévoyez rien en faveur des victimes, rien pour la réinsertion.
Seuls comptent à vos yeux non pas la nature des délits, par ailleurs déjà condamnables, mais la stigmatisation et l'éloignement de groupes, de populations qui se sentent considérés par essence suspects : « Cachez cette misère que je ne saurais voir. »
Mais je ne paraphraserai pas Molière ! Ecoutons plutôt la chanson ironique d'Alain Souchon :
« On peut pas être gentils tout le temps.
« On peut pas aimer tous les gens.
« Y a une sélection. C'est normal.
« (...)
« Mais comprenez-moi : c'est une migraine,
« Tous ces campeurs sous mes persiennes. »
Les gens du voyage que vous ne voulez plus voir sont de ceux-là. L'amalgame est total : roms, tziganes, gitans, réfugiés de l'Est et caravaniers de la misère. La responsabilité collective est à nouveau à l'ordre du jour d'un texte français. Un voleur... tous suspects ! Vous vous en prenez à deux éléments fondateurs de la culture des non-sédentaires, qu'ils le soient par choix ou par obligation : le lieu et le véhicule.
La majorité des communes assujetties à la loi Besson ne possèdent pas de terrain d'accueil : vous ne commencez pas par faire en sorte de donner aux maires les moyens d'appliquer la loi. En revanche, parce que vous connaissez cette carence, vous exonérez de sanction celui qui transgresse la loi dans une ville où la loi Besson n'est pas appliquée. Monsieur le ministre, au-delà du probable et souhaitable effet stimulant, est-ce une façon républicaine de dire le droit ? Diriez-vous, en tant que père, à votre enfant qu'il peut sécher les cours sans sanction au motif que l'effectif légal n'est pas respecté dans sa classe ? Ou bien vous mobiliseriez-vous, comme parent d'élève, pour que la règle soit appliquée ?
La priorité eût été que vous répondiez à la question que je vous ai posée au mois de juillet dernier : quelle est la place, en France, des gens du voyage et comment rattrape-t-on le retard pour les aires d'accueil des nomades ? Faute de ce courage, vous imaginez des mesures iniques, d'avance discréditées par leur peu de réalisme.
Saisir les véhicules ? Est-ce à la sédentarisation dans les lieux où ils sont pris en infraction que vous voulez les condamner ?
Les emprisonner ? Oui, mais qui ? Un au hasard ? Les quatre cents qui viennent d'arriver ? Les hommes ? Les femmes ? Et qu'avez-vous prévu comme lieu carcéral ? Qu'avez-vous prévu pour les enfants qui resteront seuls ? Comment distinguez-vous les réfugiés des gitans, des demandeurs d'asile et des pauvres en caravane expulsés du quartier voisin ?
Reconduite à la frontière, disent certains de vos amis ! Mais beaucoup sont Français !
Vous venez de nous dire, aujourd'hui même, que vous n'aviez pas de population cible. Pourtant, ils se sont tous reconnus dans votre texte. Et l'on n'a pas vu de manifestation de « camping-caristes » à la porte du Sénat !
Votre loi met en scène tous ceux qui, par leur simple présence dans l'espace public, vous dérangent, ceux qui, depuis des siècles, sont caricaturés par les conteurs et colporteurs pour gagner un public facile : ces prostituées « qui détournent le brave père de famille ». Ces miséreux « pas propres sur eux, qui ont sûrement des poux ou la gale » ; ces gitans « voleurs de poules et d'enfants ». (Exclamations sur les travées du RPR.)
Voilà ce que l'on disait jadis, chers collègues, et que l'on ne dit plus. Et pour cause : aujourd'hui, il n'y a plus de colporteurs, et les risques que l'on agite avec démagogie ont été actualisés.
M. Philippe François. Ringard !
Mme Marie-Christine Blandin. Aujourd'hui, ce sont les prostituées qui « ramèneraient le sida par les préservatifs usagers sur le trottoir » ; les pauvres « sûrement agressifs - vous avez vu leurs chiens ! » ; les roms « qui ont de trop belles caravanes pour ce qu'ils gagnent »...
M. Philippe François. Vous avez un siècle de retard !
Mme Marie-Christine Blandin. Cette mise en scène n'est pas digne du pays des droits de l'homme. Elle ne répondra ni aux propriétaires des voitures qui brûlent, ni aux filles agressées ou aux femmes violées.
Elle ne répondra pas aux sédentaires et aux élus choqués de voir, derrière des camps de nomades, s'accumuler déchets et résidus de démontage dans l'espace de vie commun.
Elle ne répondra pas aux gens du voyage qui ne trouvent ni adduction d'eau potable ni source d'énergie.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Donc, on ne fait rien !
Mme Marie-Christine Blandin. Elle ne répondra pas aux responsables de ces mêmes adductions, légitimement choqués de voir des vannes brisées ou des branchements électriques périlleux. Elle inscrira la crainte et le malentendu dans la durée.
Vous avez évoqué les dernières élections, monsieur le ministre. Certains ont compris, à cette occasion, qu'il fallait que le politique travaille plus et mieux avec ceux qui souffrent. Vous, vous avez fait le choix de renforcer les préjugés, de désigner des boucs émissaires.
M. Roger Karoutchi. Mais ne c'est pas possible !
Mme Marie-Christine Blandin. Ce n'est pas ainsi que l'on construit une société apaisée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Ladislas Poniatowski. C'est un raccourci simpliste !
M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors du débat relatif à la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure du 29 août 2002, je suis intervenu sur le problème de l'insécurité quotidienne, véritable source d'inquiétude et d'exaspération pour nos concitoyens et, plus particulièrement, pour nos 500 000 élus locaux qui représentent une force de notre démocratie.
Le stationnement illégal et prolongé des gens du voyage est devenu un problème difficile à surmonter pour eux tous.
A l'époque, vous nous aviez promis, monsieur le ministre, des mesures concrètes et normatives devant permettre de régler cette question grâce, notamment, à l'octroi aux forces de l'ordre de nouveaux moyens juridiques. Je constate avec satisfaction que, par le texte que vous soumettez au Sénat, vous tenez cette promesse en comblant une lacune juridique. Mais vous avez la réputation, monsieur le ministre, de tenir vos promesses.
M. Jean-Claude Carle. C'est vrai !
M. Pierre Hérisson. Aussi étonnant que cela puisse paraître, il n'existe pas, aujourd'hui, dans le code pénal d'incrimination délictuelle pour les faits consistant à s'installer de force sur un terrain appartenant à autrui, c'est-à-dire sans l'autorisation du propriétaire, en vue d'y établir une habitation. Les procédures civiles sont longues et exaspérantes, les contraintes pesant sur les pouvoirs publics, bien trop lourdes. Il en résulte, pour nos concitoyens, ce sentiment profond que le droit de propriété, droit fondamental s'il en est, n'est plus protégé par la loi, par la justice ou par les forces de l'ordre qui sont chargées de l'appliquer.
L'article 19 du projet de loi tend donc à créer un délit spécifique qui permettra de sanctionner toute occupation non autorisée d'un terrain appartenant à autrui d'une peine de six mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende, ainsi que de la saisie du véhicule lorsqu'il a servi à l'installation non autorisée. Le projet de loi prévoit également deux peines complémentaires : la suspension du permis de conduire pour une durée de trois ans au plus et, le cas échéant, la confiscation du véhicule ayant servi à commettre l'infraction.
M. Jean-Claude Carle. Absolument !
M. Pierre Hérisson. En outre - c'est un point très important pour les élus locaux - le texte vise l'installation sur un terrain appartenant à une commune qui s'est conformée aux obligations lui incombant en application de la loi Besson du 5 juillet 2000.
A ce point de mon propos, je voudrais attirer votre attention, monsieur le ministre, sur le fait que ce texte, particulièrement son article 19, s'appliquera à l'ensemble des communes figurant dans le schéma départemental dès lors qu'elles appliquent la loi Besson. Or, sur les 36 000 communes que compte notre pays, 32 000 ont moins de 2 000 habitants et, à quelques exceptions près, ces communes ne seront pas visées dans le schéma départemental. Que se passera-t-il donc si ces collectivités ont pris librement l'initiative de créer un terrain d'accueil en application de la jurisprudence Ville de Lille , permettant ainsi l'accueil des gens du voyage ?
C'est pour moi l'occasion de dire ici ce que j'ai rappelé déjà à plusieurs reprises à la tribune du congrès de l'Association des maires de France : toutes, je dis bien « toutes » les communes de France doivent l'accueil et le stationnement aux gens du voyage. Simplement, seules les communes de plus 5 000 habitants doivent obligatoirement figurer dans le schéma départemental.
Derrière cette obligation d'accueil qui s'impose à toutes les communes, il faut voir que c'est la liberté d'aller et venir qui est en cause. L'information a malheureusement été insuffisante, et beaucoup trop de maires en sont restés à l'idée que l'obligation concernait les seules communes de plus de 5 000 habitants.
Toutefois, sur le point particulier des 32 000 communes de moins de 5 000 habitants qui n'auront pas été visées dans les schémas, l'article 19 ne s'appliquera pas et les terrains communaux ne seront pas protégés.
Il y a donc lieu de réfléchir et de trouver éventuellement par amendements une solution, afin que les maires qui prennent des initiatives en ce domaine puissent bénéficier de la loi. L'attente est, je crois, très forte, monsieur le ministre. J'ai d'ailleurs constaté, en parcourant les amendements, que certains d'entre nous s'interrogent également sur ce problème.
Les dispositions que vous nous proposez me semblent être le complément nécessaire à la loi Besson qui - bien entendu - doit être maintenue, bien qu'elle ait montré ses limites. Nous devons disposer aujourd'hui, pour traiter efficacement les problèmes d'itinérance, d'un texte qui soit suffisamment dissuasif.
Il s'agit d'un problème humain, mais également d'un problème de sécurité qui doit être envisagé comme tel. Il s'agit pour nous de rétablir l'Etat de droit sur le territoire national, et ce en relation avec les pays de l'Union européenne et, au-delà, avec les pays de l'Est. Il en va de notre responsabilité, mais aussi de la responsabilité de l'Europe.
Vous le savez, monsieur le ministre, les élus locaux, et plus particulièrement les maires, sont très sensibles au renforcement des sanctions applicables aux gens du voyage qui stationnent illégalement sur les propriétés publiques ou privées, notamment la possibilité de saisir les véhicules.
Un récent sondage montre que 80 % des élus refusent d'accepter la présence prolongée de gens du voyage sur le territoire de leur commune.
On note, par ailleurs, une forte différence d'opinion suivant la taille des communes. Ainsi, 43 % des maires des villes de plus de 30 000 habitants sont prêts à accepter la présence prolongée de gens du voyage, contre 14 % seulement pour les maires des communes de moins de 2 000 habitants. Cette différence montre bien, s'il en était besoin, le désarroi et le dénuement des maires des petites communes face à de tels phénomènes. Ils ne disposent ni de moyens en personnels ni de moyens matériels pour assurer le respect de l'ordre sur le territoire de leur commune.
Ces pourcentages démontrent également qu'il est nécessaire de répondre aux problèmes d'accueil dans le cadre de la loi Besson. L'une des principales conclusions du colloque organisé à Marseille le 24 octobre dernier par l'Association des maires de France est claire : les communes vont devoir créer plus de 20 000 emplacements de caravanes pour les gens du voyage d'ici à 2005 si elles veulent utiliser les moyens législatifs contre le stationnement sauvage. Aujourd'hui, on estime que 30 000 à 35 000 caravanes circulent en France, alors qu'il n'existe que 5 000 à 10 000 emplacements légaux, dont seulement la moitié serait de nature à recevoir, dans de bonnes conditions, les gens du voyage.
Je rappelle que le principe de la loi du 5 juillet 2000 est simple : le texte renforce les obligations des communes en matière d'accueil et d'habitat des gens du voyage en prévoyant la réalisation et la gestion d'aires d'accueil. En contrepartie, les communes doivent bénéficier de moyens juridiques et financiers renforcés pour lutter contre le stationnement illicite.
Monsieur le ministe, j'attire votre attention sur le fait que la loi Besson prévoit une aide financière de 70 % pour la création d'un emplacement dont le coût est évalué à 100 000 francs. Or les estimations dont nous disposons aujourd'hui démontrent à l'évidence que, pour respecter les dispositions proposées par la Commission nationale consultative des gens du voyage, le coût moyen d'un emplacement est plutôt du double, ce qui revient, dans la réalité, à ramener le montant de l'aide financière de l'État à 35 %. Se pose donc là un problème financier que je tenais à souligner dans la mesure où les communes qui sont chargées de réaliser ces équipements ne disposent pas toujours de budgets importants pour tenir leurs obligations.
Les aires d'accueil permanentes que les communes doivent réaliser et gérer ainsi que les communes où elles doivent être implantées sont déterminées par un schéma départemental. La loi distingue les communes de plus de 5 000 habitants, qui doivent obligatoirement réaliser les aires d'accueil dans un délai de deux ans, de celles de moins de 5 000 habitants, qui n'y sont pas tenues, sauf exceptions précisées dans la loi.
J'attire également votre attention, monsieur le ministre, sur le fait qu'il est nécessaire, dès lors qu'une commune ou une intercommunalité - puisque la loi donne la possibilité de transférer cette compétence à l'intercommunalité - s'est engagée, que votre loi s'applique. Dès lors que les engagements sont pris, il ne faut pas attendre que les travaux soient terminés et que l'aire d'accueil soit disponible, quitte à ce que les communes qui ne respectent pas la loi soient pénalisées si le délai est dépassé.
En contrepartie du respect de ces principes, le texte proposé par le Gouvernement met entre les mains des maires une disposition pénale qu'est l'article 19. Comme toutes les armes, cependant, cette disposition ne vaut que si l'on n'a pas à s'en servir !
L'article 19 permet la dissuasion, et c'est bien cela que les maires attendent, parce qu'ils ont besoin d'avoir une garantie qui leur permette de rassurer les populations des communes qui sont les plus concernées. L'objectif est donc bien de dissuader, c'est-à-dire d'utiliser la crainte que le dispositif ne soit mis en oeuvre.
Enfin, dans leur grande majorité, les maires estiment que la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure votée lors de la session extraordinaire de l'été est de nature à mieux assurer la sécurité au quotidien. L'attente des élus locaux est donc très forte.
Monsieur le ministre, la sécurité est aujourd'hui leur principale préoccupation. Ils sont souvent, pour ne pas dire toujours en première ligne face à leurs concitoyens. Ils sont là, présents au nom de l'intérêt général et au nom de l'Etat parce que cela relève de leurs responsabilités. Je pense que ce texte leur apportera des solutions dans la nécessaire coproduction de la sécurité qu'exigent l'état actuel de notre société et la forte attente de nos concitoyens. L'accueil des gens du voyage doit se faire dans le respect d'un certain mode de vie mais également dans le respect de règles opposables à chacun des citoyens de notre pays, notamment lorsqu'il s'agit de la propriété.
Pour terminer, je voudrais remercier ici plusieurs personnes, et tout d'abord vous, monsieur le ministre, qui avez tenu les promesses et les engagements que vous aviez pris à cette même tribune.
Je tiens également à saluer et à remercier M. Daniel Canepa, votre directeur adjoint de cabinet, qui est venu à Marseille et a participé à notre débat avec les maires du sud de la France.
Je voudrais également saluer le courage de notre collègue Maryse Joissins-Masini, députée-maire d'Aix-en-Provence qui, après avoir expliqué comment elle gérait ce problème à Aix-en-Provence et rappelé quelles étaient les obligations des maires - ainsi que celles de l'Etat à l'égard des maires -, a conclu en ces termes : « Un maire qui n'a pas d'aire n'a qu'à se taire ! » (Sourires.)
Monsieur le ministre, la conclusion des maires de France, c'est, en quelque sorte, donnant, donnant : d'un côté, nous appliquons la loi Besson dans son intégralité, avec toutes les difficultés que cela implique ; en contrepartie, vous nous garantissez le retour à l'Etat de droit. Ainsi, nous retrouverons la considération de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. André Vallet.
M. André Vallet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme cela a été dit à maintes reprises, 4 millions de crimes et de délits ont été constatés en France en 2001. C'est non seulement intolérable mais insupportable pour les victimes.
Mme Nicole Borvo. C'est sûr !
M. André Vallet. Ce sont ceux qui éprouvent le plus de difficultés pour s'insérer socialement, avec leur famille, qui sont les plus touchés.
Ce sont ceux qui ont crié leur colère, en se réfugiant parfois dans l'abstention à l'occasion des dernières consultations électorales. Leur colère était teintée de tristesse et de désarroi face à un Etat républicain qui leur semble défaillant.
On ne comprendrait pas que le Président de la République, le Gouvernement, les parlementaires de la majorité ne respectent pas les engagements prioritaires présentés, en ce domaine, aux Français et ratifiés largement par les électeurs.
Je vous sais gré, monsieur le ministre, de tenter de répondre par ce texte à l'angoisse quotidienne de nos concitoyens, même s'il appelle de ma part quelques remarques.
Votre projet de loi sera voté, largement approuvé, mais pas assez tout de même à mon gré. Il aurait pourtant mérité un consensus républicain, ...
M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est vrai !
M. André Vallet. ... qui aurait adressé un signal fort à la nation, mais aussi aux auteurs d'actes de délinquance qui croient agir dans une quasi-impunité.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Tout à fait !
M. André Vallet. Je suis sidéré lorsque je lis certaines déclarations, lorsque j'entends certains propos devant les caméras de télévision, qui diffèrent totalement de ce que peuvent nous dire sur le terrain, la population et les élus.
Mme Janine Rozier. C'est vrai !
M. André Vallet. Il n'est pas, dans mon département, une rencontre avec un maire, de droite ou de gauche, sans que soient évoqués - parfois en termes passionnés - les problèmes liés à l'insécurité.
Les maires sont souvent exaspérés, car l'hôtel de ville, plus encore que le commissariat ou la gendarmerie, est le réceptacle de la colère des citoyens.
M. Jacques Peyrat. Tout à fait !
M. André Vallet. J'entends même des maires de gauche qui n'hésitent pas à braver les mots d'ordre de leur parti pour approuver votre projet, monsieur le ministre.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ils ont raison !
M. André Vallet. Le maire de Mulhouse a été cité.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. De Montpellier, d'Evry...
M. André Vallet. Ainsi, le maire de Montpellier a déclaré que les socialistes feraient mieux de se taire plutôt que de critiquer le projet de M. Sarkozy. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Ce n'est pas moi qui le dis, c'est M. Frêche, maire de Montpellier !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Parole d'évangile !
M. André Vallet. C'est aussi le cas de votre prédécesseur, monsieur le ministre, qui connaît bien la situation insécuritaire de notre pays...
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Eh oui ! C'est cruel, on est trahi que par les siens !
M. André Vallet. ...et qui vous reproche sans sourire ce qu'il avait lui-même prévu de faire. C'est également le cas des sénateurs du Pôle républicain qui, sans aller jusqu'à un vote favorable, ont annoncé leur désir de s'abstenir. Je me réjouis, monsieur le ministre, de votre volonté de « faire de la sécurité une réalité concrète et quotidienne pour protéger et renforcer les droits de l'homme et les libertés individuelles ». Je ne comprends pas ceux qui ne veulent pas admettre - peut-être parce que c'est vous qui le dites - que la sécurité est la première des libertés.
Comment s'opposer à l'extension du fichier des empreintes génétiques, à la visite de coffre de voiture, à la lutte contre les réseaux d'exploitation d'êtres humains, à la lutte contre ceux qui terrorisent au pied des immeubles ceux qui n'ont pas la chance d'habiter dans des quartiers plus chics ? Comment ne pas refuser la mendicité méchante, agressive et souvent organisée ? Comment ne pas sanctionner l'occupation illicite de propriétés privées ? Comment ne pas être d'accord avec un contrôle plus strict des armes ?
Monsieur le ministre, 1968 est loin, bien loin. « Il est interdit d'interdire » a montré ses limites, j'allais même dire sa stupidité. Je préférerai que nous admettions, tous ensemble, que « sans interdits il n'y a pas de libertés ».
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est vrai !
M. André Vallet. Votre texte appelle néanmoins quelques remarques.
La première, que personne n'a évoquée, concerne l'information du maire. Voulez-vous limiter l'action des maires à la présidence de comités Theodule où s'expriment de sympathiques généralités, où certaines associations semblent s'intéresser plus aux délinquants qu'aux victimes, sans que ne soient jamais traités les véritables problèmes de la cité ?
Les maires doivent être informés de ce qui se passe sur leur territoire. Monsieur le ministre, il faut que vous donniez des instructions pour que le commissaire de police ou l'officier de gendarmerie rencontre régulièrement les élus locaux, afin d'évoquer concrètement les actes de délinquance qui sont commis sur leur commune.
M. Jacques Mahéas. Cela, c'est vrai !
M. Philippe François. Tout à fait d'accord ! C'est très important.
M. André Vallet Votre texte, par ailleurs, ne précise pas suffisamment, de mon point de vue, la liaison entre la police municipale, la police nationale et la gendarmerie. Monsieur le ministre, si la police municipale n'a pas à s'immiscer dans le déroulement d'une enquête - tout le monde le comprendra - , c'est une source de renseignements qu'il serait stupide de négliger et je constate hélas ! encore beaucoup trop de réticences de la part des fonctionnaires d'Etat à leur égard. Il faudra, monsieur le ministre, clarifier leurs relations.
En outre, vous aviez prévu, à l'article 18, le délit de racolage, y compris par la tenue vestimentaire. Je crois savoir qu'un amendement a été déposé pour modifier cette rédaction.
Elle me paraissait en effet imprécise, maladroite et susceptible d'entraîner de mauvaises interprétations par les services tant de la police que de la justice.
S'agissant du proxénétisme, j'approuve la possibilité, ouverte à l'article 18 du projet de loi, de donner une carte de résident à une prostituée qui dénonce son proxénète. Mais, de grâce, monsieur le ministre, accordez-lui l'anonymat sans lequel cette mesure sera inefficace !
Je conclurai ce propos par une question qui nourrit l'actualité du jour, je veux parler des menaces terroristes qui pèsent sur la France et de la publication du rapport dit « confidentiel » des renseignements généraux dans un journal daté du 8 novembre.
Monsieur le ministre, comment ce rapport est-il parvenu à la presse ? Si l'on voulait qu'il soit rendu public, pourquoi ne pas avoir privilégié l'information du Parlement ? Enfin, et c'est la question la plus grave, celle qui hante tous les esprits, il suffit de regarder les journaux télévisés pour s'en convaincre : la France constitue-t-elle vraiment une cible privilégiée du terrorisme ?
Je voterai votre projet de loi avec la majorité du groupe du RDSE. Il vous appartiendra demain de l'appliquer avec la vigilance républicaine qui caractérise votre action. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Henneron.
Mme Françoise Henneron. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, contrairement à l'idée que tentent d'accréditer les professionnels du prêt-à-penser et du conformisme, le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui n'est pas l'acte premier du complot réactionnaire visant au retour de l'ordre moral. Non ! Il est la conséquence directe du choix des Français et de la défaite au premier tour des élections présidentielles de ces bonnes consciences autoproclamées. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Claude Carle. C'est vrai !
Mme Françoise Henneron. Il est curieux d'entendre ces soi-disant progressistes vous accuser d'attenter aux libertés publiques, eux qui ne sont jamais à court d'idées pour restreindre la liberté d'expression.
Mais on atteint des sommets quand les mêmes se regroupent à trente pour vous accuser de déclarer la guerre aux pauvres !
Voilà, le grand mot est lancé. Pour peu qu'ils se sentent en confiance, ils vont nous refaire le coup de la lutte des classes. (Exclamations amusées sur plusieurs travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
Mais ces pauvres, ces damnés de la terre, dont ces grands esprits découvrent l'existence quand ils ne sont plus aux affaires, ils ne les écoutent plus.
Mme Nicole Borvo. C'est affligeant !
Mme Françoise Henneron. Il n'est que de voir le résultat des élections présidentielles pour s'en convaincre.
M. René Garrec président de la commission. Très bien !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je suis d'accord !
Mme Françoise Henneron. La leçon du 21 avril, c'est aussi et surtout cela ! Les pauvres, les laissés-pour-compte ont massivement recherché chez les extrémistes des deux rives ce que la gauche gouvernementale ne leur proposait plus depuis longtemps.
M. Jean-Claude Carle. C'est vrai, elle a raison.
Mme Nicole Borvo. L'UMP, c'est 19 % !
M. Robert Bret. Faites attention au retour de manivelle.
Mme Françoise Henneron. Oui, mes chers collègues, et nous le comprenons tous, en vérité, ce dont nous débattons aujourd'hui, ce n'est ni plus ni moins que de l'avenir de notre société.
Allons-nous permettre que la loi du plus fort s'impose aux plus faibles de nos concitoyens ?
M. Philippe Nogrix. Non !
Mme Françoise Henneron. Allons-nous permettre que des sauveageons imposent la terreur dans des quartiers livrés à eux-mêmes ?
M. Philippe Nogrix. Non !
Mme Françoise Henneron. Allons-nous permettre que l'Etat, garant de notre pacte social, soit méprisé, ridiculisé et agressé au travers de ses agents ?
Entrons dans le vif du sujet. (Rires sur plusieurs travées.)
Monsieur le ministre, si votre projet de loi fait autant de vagues dans les cercles très restreints de la pensée unique et s'il est à ce point caricaturé, c'est qu'il est excellent ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Vos détracteurs ne forceraient pas autant le trait, au risque de prendre les Français pour des imbéciles, s'ils n'avaient vu dans vos propositions un moyen efficace de lutter contre la délinquance.
Leur inaction a placé le pays au bord du gouffre.
Et c'est en s'appuyant sur leur incapacité à régler ces questions qu'ils vous refusent le droit d'agir, qu'ils dénaturent vos intentions et vous peignent sous les traits d'un ennemi de la liberté.
Mais de quelle liberté parlons-nous ? Celle de se pencher avec commisération sur la misère humaine, comme savent si bien le faire nos professeurs de morale ?
Qu'ils se rassurent, ces esprits des beaux quartiers, leurs élucubrations seront toujours aussi accessibles et généreusement diffusées.
M. Roger Karoutchi. Très bien !
Mme Françoise Henneron. Non, leur crainte, c'est bien plutôt de voir exposé le cynisme qui leur tient lieu de doctrine.
Ils sont terrorisés à l'idée de ne plus pouvoir donner de leçons à la terre entière. (Exclamations consternées sur les travées du groupe socialiste.)
Comment peuvent-ils asséner leur vision des droits de l'homme à l'humanité et laisser s'entasser, dans le même temps, dans des hangars, de pauvres gens qui, poussés par l'espoir d'un monde meilleur, sont venus s'échouer à quelques encablures de leur eldorado supposé ?
Mme Nicole Borvo. Oh !
Mme Françoise Henneron. Telle est la terrible réalité de Sangatte. Pas moins de 28 000 étrangers ont transité par ces installations en deux ans, qui pouvaient accueillir jusqu'à 1 800 personnes, alors qu'elles étaient prévues pour 800. Le nombre de clandestins interpellés a augmenté de 134 % sur la seule commune de Fretin entre mars et avril 2002.
Mme Nicole Borvo. Quelle caricature !
Mme Françoise Henneron. Tel est le bilan du gouvernement précédent. Et on vient aujourd'hui vous reprocher de fermer le centre alors que vos services mettent tout en oeuvre pour que ces malheureux ne restent pas dehors !
Mme Nicole Borvo. Quelle honte !
Mme Françoise Henneron. On tente de faire croire le contraire à l'opinion. Dans quel but et pour quelle raison ?
Il y a, d'un côté, les professionnels de la générosité et de la contrition qui font de tout un événement propre à médiatiser leur bonne conscience. Il y a surtout, de l'autre, ces mafias de passeurs qui sont les seules à tirer un bénéfice du regroupement en un même lieu des candidats à l'immigration outre-Manche.
En fermant Sangatte et en démantelant avec efficacité leurs réseaux, vous leur avez porté un coup dur. Ce n'est pas étonnant qu'ils tentent de vous le faire payer.
Rien ne sert de disserter à l'infini sur la dynamique des fluides appliquée aux migrations humaines. Au risque d'enfoncer des portes ouvertes, rappelons que la Grande-Bretagne est une île et que rien ne l'obligera à ouvrir ses ports aux demandeurs d'asile.
Il vaut mieux soustraire ces derniers à l'avidité des trafiquants...
Mme Nicole Borvo. Et des patrons !
Mme Françoise Henneron. ... et trouver avec leurs pays d'origine les moyens de les rapatrier. Toute autre solution n'est que vaine gesticulation, qui ne fera qu'attirer de nouveaux clandestins.
Cette politique, vous avez commencé à la mener, monsieur le ministre, et ce, je vous l'assure, à la grande satisfaction de nombre d'habitants du Pas-de-Calais ; au regard des autres voies qui s'ouvrent à nous, je ne vois pas au nom de quoi on viendrait vous le reprocher.
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
Mme Françoise Henneron. J'entends vos adversaires se répandre sur votre passion supposée pour la répression et juger « liberticide » votre projet de loi.
Que contient d'effrayant ce texte ?
Il vise à rendre fonctionnel le fichier des empreintes génétiques : quelle épouvantable perspective ! Il a pour objet d'empêcher de paisibles voyous de s'approprier les halls d'immeuble : voilà bien une audace qui frise le racisme anti-jeunes ! Il tend à lutter contre la violation de propriété, le squat et la prostitution : folie liberticide ! Il permettra la fouille des coffres de voiture : quelle inadmissible atteinte au droit de « traficoter » en paix !
Mme Nicole Borvo. C'est vraiment extraordinaire !
Mme Françoise Henneron. Il permettra de mettre un terme à l'exploitation de la mendicité : vous n'aimez pas les pauvres, monsieur le ministre, c'est évident ! Enfin, il protégera plus efficacement les membres des forces de l'ordre et leurs familles : voilà qui est démagogique et superflu !
En fait, on vous reproche, monsieur le ministre, de balayer, par le biais de ce projet de loi, vingt ans d'application d'une fructueuse politique de prévention ! Cela fait vingt ans, en effet, que, entre prévention et répression, l'on tranche systématiquement en faveur de la première, sans remettre une seule fois en question le dogme de l'excuse sur lequel elle est fondée.
Voilà bien le noeud du problème : à force de tout excuser au nom de la culpabilité de la société, on rend la prévention illusoire et vide de sens. Que reste-t-il à prévenir, puisque l'on absout d'avance ? La responsabilité individuelle des délinquants se dissout dans la responsabilité collective d'une société qui n'offre, c'est bien connu, aucun espoir, et qui ne sait que rejeter les différences. La réussite est suspecte, et l'échec est élevé au rang d'art majeur ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo. De qui parle-t-elle ?
Mme Françoise Henneron. Dans ces conditions, allons-y : pourquoi se priver, puisque faute non assumée est déjà pardonnée ?
Nous avons été unanimes, sur ces travées, à condamner les drames qui ont frappé nos collègues de Nanterre et le maire de Paris. En avons-nous saisi l'exacte portée et tiré les conséquences ? Ce n'est pas certain.
Il a été décidé de renforcer notre législation relative à la détention d'armes, qui est l'une des plus restrictives qui soit. Fort bien ! Ne croyez-vous pas, mes chers collègues, que, pour lutter contre la soudaine prolifération des armes - celles-ci, soit dit en passant, sont loin d'être toutes achetées chez des armuriers patentés -, il faudrait tout d'abord se préoccuper de la sécurité des Français ?
En effet, c'est lorsqu'on a le sentiment que la sécurité n'est plus assurée par l'Etat que survient la tentation de l'assurer soi-même ; c'est lorsqu'on n'a plus confiance en la justice qu'on l'exerce soi-même.
Prenons garde, mes chers collègues, à ne pas exaspérer les victimes à force d'excuser les criminels : les droits ne sont pas d'un côté de la barre et les devoirs de l'autre. Rien n'est plus grave, pour l'Etat, qu'ignorer et abandonner une victime, dont il est bien souvent le seul et ultime recours.
Je voudrais enfin mettre l'accent sur le volet de votre projet de loi, monsieur le ministre, que j'estime fondamental.
Souvenez-vous, mes chers collègues, que, voilà un an, les fonctionnaires de police et de gendarmerie étaient dans la rue. Nombre d'entre eux avaient été agressés, et certains lâchement assassinés. Oui, je dis bien assassinés, et non abattus, comme s'il s'était agi d'un hasard malencontreux.
En effet, la culture de l'excuse qui nous a fait tant de mal est aussi véhiculée par le vocabulaire. Il me semble donc important et préférable d'appeler un chat un chat.
C'est parce que vous savez qu'il est essentiel de ne rien laisser passer afin de prévenir les grandes catastrophes que vous nous proposez, monsieur le ministre, de punir sévèrement celles et ceux qui menaceront les policiers, les gendarmes, les pompiers, les gardiens d'immeuble et les agents chargés d'une mission de service public, ainsi que leurs familles.
Tous ceux qui ont fait le choix de mettre leur vie au service de leurs concitoyens, tous ceux qui sont détenteurs d'une part de l'autorité de l'Etat seront protégés spécifiquement, ainsi que leurs familles, j'insiste sur ce point.
Votre souci d'étendre cette protection aux familles de ces personnes fait honneur à votre bon sens, monsieur le ministre. Cela permettra de surcroît à ces familles, j'en suis sûr, de se sentir soutenues par l'Etat, et, au-delà, par la nation.
M. Philippe François. Bravo !
Mme Françoise Henneron. Certaines d'entre elles ont tant eu à souffrir des sacrifices que leur a coûtés le choix fait par l'un des leurs de servir la communauté que cette reconnaissance législative est le minimum que nous puissions leur accorder.
En conclusion, je me réjouis de ce texte, qui marque le début du lent processus de guérison de ce cancer qu'est la délinquance, mal dont souffre depuis tant d'années notre pays, tant en milieu urbain qu'en milieu rural. (Mme Nicole Borvo s'exclame.)
Oui, mes chers collègues, c'est bien entre les mois d'avril et de juin 2002 que nous avons changé de siècle.
M. Paul Loridant. Ah bon !
Mme Françoise Henneron. Au seuil de ce nouveau millénaire, il nous faut balayer les scories idéologiques qui font que, au nom de principes éculés, on voit le monde, non pas tel qu'il est, mais tel que l'on voudrait qu'il fût.
Mme Nicole Borvo. Formidable !
Mme Françoise Henneron. En 1968, des nantis en rupture de ban décrétaient qu'il était interdit d'interdire. Qu'ils permettent à une femme qui, comme certains d'entre eux, avait vingt ans alors, de leur dire qu'ils n'ont cessé de faire fausse route ! Alors qu'ils prétendaient agir au nom des travailleurs pour faire sauter leur chaînes, j'ai pu mesurer, moi qui étais depuis trois ans déjà, l'un de ces travailleurs, le fossé me séparant de ces idéologues. Tout n'était pas rose pour la jeune employée d'alors, mais je n'étais l'esclave de personne, je vous le garantis !
Mme Nicole Borvo. C'est sûr !
Mme Françoise Henneron. Après trente-quatre ans de sommeil, passés à rêver un monde qui n'existait pas, il est grand temps qu'ils se réveillent ! Le monde a bougé, une crise est survenue, un mur s'est effondré et des fous sanguinaires ont précipité deux avions et leurs passagers sur deux tours jumelles.
Les schémas qui avaient cours en 1968 étaient peut-être généreux en théorie, mais ils se sont révélés calamiteux en pratique. Le reconnaître n'est pas se renier et ne rendra personne plus vieux ou plus bête.
Mme Nicole Borvo. Cela, c'est sûr !
Mme Françoise Henneron. C'est tout simplement évoluer ! Cette évolution, les Français l'ont appelée de leurs voeux en renvoyant la gauche à ses chimères.
M. Jean-Claude Carle. C'est vrai !
Mme Françoise Henneron. Ce projet, le Président de la République l'a porté, le Premier ministre s'est donné les moyens de l'élaborer ; il nous revient, monsieur le ministre, de vous permettre de le mettre en oeuvre. (Applaudissements, sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR. - « Bis ! » sur les travées du groupe CRC.)
M. Paul Loridant. Debout, les damnés de la terre !
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle.
Mme Nicole Borvo. Qu'il fasse aussi bien !
M. Robert Bret. Il va falloir qu'il se surpasse !
M. Jean-Claude Carle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de cette discussion générale, je serai extrêmement bref, d'autant que j'interviendrai lors de la discussion des amendements.
Je tiens simplement à vous remercier, monsieur le ministre, et cela pour trois raisons.
La première raison, c'est que vous avez souhaité que ce projet de loi soit d'abord discuté au Sénat. Cela marque votre attachement à la Haute Assemblée et, à travers elle, à tous les élus locaux qui vivent au quotidien les problèmes d'insécurité, d'incivilité, de délinquance, et vers lesquels se tournent en premier lieu les victimes et la population. Il est donc indispensable de leur donner les moyens juridiques et matériels d'assumer leur mission.
La deuxième raison tient à la méthode, celle-ci étant souvent un gage d'efficacité.
Ce projet de loi pour la sécurité intérieure vient compléter la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure et que nous avons adoptée en juillet dernier ; il en précise les modalités de mise en oeuvre. Cela est très important, car l'on peut bien avoir les meilleures idées et les meilleurs principes, cela n'a de sens que si l'on peut les mettre en oeuvre dans la pratique.
Enfin, la troisième raison est liée à l'objet et à la teneur mêmes de ce texte.
Ce projet de loi, monsieur le ministre, est celui du coeur et de la raison, car il conjugue éthique et réalisme.
C'est en effet la seule voie qui puisse permettre l'amélioration durable d'une situation grave, qui reste la première des préoccupations de nos compatriotes, même si, depuis quelques mois, elle s'est amendée. Vous évitez ainsi l'écueil sur lequel ont buté vos prédécesseurs, qui, au nom de l'éthique, ont, pour certains d'entre eux, feint d'ignorer la réalité.
Cette réalité, au début de l'année, révélait qu'un crime ou un délit était commis toutes les sept secondes dans notre pays, ces délits étant, pour une part, le fait de mineurs de plus en plus jeunes commettant des actes de plus en plus graves, et, pour une autre part, de bandes organisées, voire de systèmes mafieux.
Ceux qui, aujourd'hui, persistent à vouloir vous donner des leçons de morale, monsieur le ministre, ne sont pas qualifiés pour le faire, car ils ont totalement échoué. Certains d'entre eux l'ont d'ailleurs très bien compris et le reconnaissent, comme le maire de Mulhouse, Jean-Marie Bockel, qui déclarait que « l'inspiration de l'appel - il s'agit de l'appel à critiquer votre texte - n'est pas celle d'une gauche pragmatique, mais d'une gauche qui a complètement perdu contact avec la réalité vécue par les gens ».
En oubliant cette réalité que vivent au quotidien bon nombre de nos compatriotes, ils ont fait le lit de ceux qui, eux, se servent de ces seules réalités pour susciter chez nos concitoyens des sentiments de peur, voire de haine, qui sont à l'origine de l'avertissement sans précédent du 21 avril dernier.
C'est aussi le texte du coeur et de la raison s'agissant des clandestins, des prostituées et des gens du voyage, qui, comme vous l'avez fort justement dit, ne peuvent être déplacés comme de vulgaires objets, mais doivent être traités avec humanité, respect et dignité. Mais cela a un corollaire : en retour, ils doivent respecter nos lois. Nous sommes dans un Etat de droit, et notre devoir, votre devoir, monsieur le ministre, est d'assurer la sécurité des Françaises et des Français.
Permettez-moi de saluer votre volonté d'assurer la première des libertés qu'est la sécurité et d'avoir le courage de renoncer à cette vision éculée, que je qualifierai de « post-soixante-huitarde », qui oppose, à longueur de discours moralisateurs, à longueur de colonnes faussement moralisatrices, éducation et sanction, prévention et répression, alors que, au contraire, notre société, qui connaît trop souvent l'insuffisance ou la défaillance des cercles de proximité que sont la famille, l'école et la ville, exige que l'on conjugue éducation et sanction, prévention et répression.
C'est le sens de votre texte, c'est le sens de votre action. Le groupe des Républicains et Indépendants vous apporte son total soutien et votera ce texte, amélioré par le travail du rapporteur, Jean-Patrick Courtois. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre.
M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord remercier M. Jean-Patrick Courtois de son approche équilibrée et lucide de ce projet de loi, ainsi que du travail important que la commission des lois et lui-même ont effectué pour l'améliorer. J'indique d'ailleurs tout de suite à la Haute Assemblée que le Gouvernement retiendra nombre des amendements présentés.
Il faut bien reconnaître que la paternité de ce texte revient en très grande partie à M. le rapporteur et aux membres de la commission des lois du Sénat, qui ont bien voulu consacrer de nombreuses heures à son examen et ont fourni un travail minutieux et précis.
J'ai notamment relevé une formule que vous avez employée, monsieur Courtois, et que j'espère ne pas travestir : « Une procédure pénale forte pour des droits de la défense forts ». Elle me paraît parfaitement résumer ce que nous avons voulu faire.
Aujourd'hui, l'équilibre évoqué par cette formule n'existe pas. Toutes les incriminations créées que vous avez décrites, monsieur le rapporteur, ont pour objet de permettre d'agir afin de prévenir. C'est, finalement, toute la nouvelle stratégie des forces de l'ordre.
Nous voulons en effet traquer la délinquance avant qu'elle ne se manifeste, grâce notamment aux GIR où à la préposition des forces de police et de gendarmerie. Nous voulons agir avant le drame plutôt que réagir après qu'il est survenu. Et chaque fois que c'est possible, c'est ça qui doit être, me semble-t-il, la stratégie offensive. Nous aurons l'occasion de parler de vos amendements au cours de la discussion.
Vous n'avez pas été le seul à avoir évoqué la question des armes. En effet, M. Ladislas Poniatowski et bien d'autres en ont parlé, avec beaucoup de justesse. Je pense aux formalités demandées aux chasseurs et aux tireurs sportifs. M. Poniatowski a rappelé que je les avais rencontrés. Je les ai rencontrés longuement. Un membre de mon cabinet, Mme Emmanuelle Mignon, les a reçus à plusieurs reprises. Dans le cadre de la discussion, on essaiera d'améliorer les choses. Mais, d'abord, l'amalgame qu'on me demande de ne pas faire, à juste raison, avec les nomades, je ne dois pas le faire avec les chasseurs et les tireurs sportifs. J'entends en effet un certain nombre d'autorités dire : « Attention, ne faites pas d'amalgame avec les nomades, avec les prostituées, avec la mendicité agressive... » Mais que dire sur les chasseurs et les tireurs sportifs, qui ne sont absolument pas visés par ce texte ? Vous avez vous-même ouvert cette porte, ce chemin, monsieur le rapporteur, et vous aussi, monsieur Poniatowski.
En s'attelant au problème du permis de chasse, on doit pouvoir trouver une solution au certificat médical. (M. Philippe François s'exclame.)
Un mot simplement sur la question des médecins. Il ne s'agit pas de demander à un médecin de prendre la responsabilité de dire que son patient sera sain de corps et d'esprit ad vitam aeternam. Il s'agit d'apporter témoignage que, dans son livret médical, le patient n'y a pas d'antécédent psychiatrique qui le rendrait incapable d'acheter une arme ou d'obtenir un permis. C'est non pas un engagement pour l'avenir, mais une preuve pour le passé. En effet, il va de soi que nul ne peut prédire l'évolution de la santé organique, mentale ou psychiatrique de tel ou tel individu. Je suppose que nous en reparlerons. Mais je voulais le dire à M. le rapporteur.
Madame Janine Rozier, je me félicite du travail excellent de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. (Mme Nicole Borvo sourit.) Moi, les droits des femmes, cela ne me fait pas sourire,...
Mme Nicole Borvo. C'est le mot « délégation » qui me faisait sourire !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... car je pense que c'est une question essentielle. Pendant des années, cela a été un sujet de gaudriole. Or ce n'est pas un sujet de plaisanterie.
Mme Nicole Borvo. Effectivement !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est une question très importante.
Comme vous le savez, le Gouvernement a lu votre rapport et a repris nombre de ses dispositions, notamment sur la question de la prostitution. La délégation a fait un travail très utile, en particulier en ce qui concerne la définition du délit de racolage passif. J'ai apprécié les conclusions du rapport et, comme vous, je pense que les prostituées sont d'abord des victimes. (M. Michel Dreyfus-Schmidt s'exclame.) Quant à instituer un défenseur spécifique pour les prostituées, je comprends parfaitement l'esprit de votre proposition, mais il nous faut considérer que l'appareil républicain est au service de toutes les victimes sans en privilégier aucune. Nous aurons bien sûr l'occasion d'en reparler.
Ah ! monsieur Mahéas,...
M. Jacques Mahéas. Je sens votre impatience, monsieur le ministre !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... hélas ! vous ne méritez pas que je m'occupe de vous de façon trop approfondie. (Sourires sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. Jacques Mahéas. Cela vous gênerait !
M. Nicolas Sarkozy, ministre, Il y a des choses tellement outrancières dans ce que vous avez dit que ce serait vous faire beaucoup d'honneur de passer trop de temps à y répondre.
M. Jacques Mahéas. Toujours le même mépris !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Un mot cependant, monsieur Mahéas, car il y avait quelque chose de touchant dans votre intervention,...
M. Jacques Mahéas. C'est que j'ai touché juste !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... comme une forme d'aveu, qui m'a inspiré pour vous une certaine sympathie. Vous vous êtes plaint, devant la Haute Assemblée, et j'ai compris là l'ampleur de la déception, de ne pas susciter l'intérêt des micros et des caméras. (Sourires.)
M. Jacques Mahéas. Je ne les recherche pas, monsieur Sarkozy !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Visiblement, c'était un regret ! Vous avez dit : « les micros et les caméras, monsieur le ministre, s'intéressent beaucoup à vous, pas assez à moi ». Je dois dire qu'après vous avoir entendu je pourrais avoir une explication pour cette situation somme toute assez normale ! (Rires et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jacques Mahéas. C'est petit !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. M. Dreyfus-Schmidt vous le dirait, je ne suis pas un mauvais garçon. Si un jour vous voulez m'accompagner, micros et caméras s'occuperont de vous. (M. Jacques Mahéas s'exclame.) Finalement, partager est parfois bien agréable. Il est dommage qu'un tel talent reste à ce point inconnu, malgré tant d'efforts ! (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous élevez le débat !
M. Jacques Mahéas. Je l'ai dit : c'est petit !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Vous l'avez cherché, monsieur Mahéas. Vous connaissez la règle : quand on cherche, on trouve toujours. (Sourires sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Vous avez proposé une stratégie. D'abord, monsieur Mahéas, il est parfaitement exact - et c'est normal - que l'on puisse avoir des désaccords. Je ne détiens bien sûr pas la vérité...
Mme Nicole Borvo. On en a l'impression ici !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... et le Parlement, c'est le lieu du débat. Autrement dit, si jamais, dans votre discours, il y avait eu une proposition, j'aurais été heureux de procéder à une confrontation. Je l'ai dit : je viens devant la Haute Assemblée avec l'idée d'enrichir le texte d'un certain nombre d'amendements, y compris - pourquoi pas ? - de la gauche.
M. Jacques Mahéas. Nous défendrons des amendements !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Mais il est une chose, monsieur Mahéas, que je ne ferai pas, parce que cela fait trop d'années qu'on le fait, c'est, comme vous me le conseillez, la stratégie de l'immobilisme.
Vous avez décrit, avec beaucoup de talent, puisque vous nous avez dit, avec une modestie dont je ne peux pas dire si elle vous honore, que vous, vous saviez de quoi vous parliez. Le problème, c'est que vous ne savez que parler ! Car quand vous décrivez les quatre cents caravanes, vous me regardez avec des yeux tout ronds en disant : « Alors, qu'est-ce qu'on en fait de ces quatre cents caravanes ? » Puis vous passez aux rassemblements dans les halls des immeubles, et vous me regardez, avec le même regard sympathique et vous dites : « Alors, qu'en fait-on de ces rassemblements dans les immeubles ? »
M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas vrai !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Enfin, vous parlez des prostituées et vous dites : « Qu'en fait-on des prostituées ? »
M. Bruno Sido. C'est un comble ! (Sourires.)
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Eh bien, vous le voyez, monsieur Mahéas, en vous entendant j'ai tout compris ! Voilà pourquoi Jospin n'a rien fait ! Avec une majorité pareille, il était difficile d'avancer ! Ne me condamnez pas à la même peine, cela serait trop triste ! (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jacques Mahéas. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le ministre ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur le président, avant que vous ne donniez la parole à M. Mahéas, ce que j'accepte bien volontiers - puisque, visiblement, une réaction ne suffit pas, il y en aura donc une seconde ! (Sourires sur les mêmes travées) -, je tiens à préciser que lorsque M. Mahéas s'est exprimé, je l'ai, pour ma part, écouté, je l'ai respecté,...
M. Gérard Braun. Tout à fait !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... et j'ai attendu qu'il termine son discours.
M. Gérard Braun. C'est cela la politesse !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je ne pense pas que M. Mahéas ait pris beaucoup de précautions à mon endroit, ce qui était parfaitement son droit. J'accepte bien volontiers que, lorsque j'aurai terminé de répondre aux orateurs, il me réponde à nouveau. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.) Mais, après avoir écouté pendant environ quatre heures trente les différentes interventions des sénateurs, il n'est pas anormal que le ministre de l'intérieur, à qui l'on a posé des questions, puisse répondre ! Cela étant dit, monsieur le président, par courtoisie pour M. Mahéas, j'accepte bien volontiers d'être interrompu.
M. Ladislas Poniatowski. Si M. Mahéas reste courtois !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, avec l'autorisation de M. le ministre.
M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, lorsque j'ai parlé des caravanes, vous m'avez interrompu en disant : « On ne fait rien ! » Cela figurera dans le compte rendu des débats. Mais vous faites preuve de mauvaise foi. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. le président. Poursuivons dans le calme, mes chers collègues !
M. Jacques Mahéas. En effet, lorsque j'ai parlé des jeunes et des possibilités qui peuvent leur être offertes, vous avez dit : « On ne fait rien ! » Vous aviez proposé, vous-même, de mettre en place, par le biais de subventions, un certain nombre d'équipements et de salles pour les jeunes. J'ai alors indiqué que votre proposition était positive. Il est donc malvenu de me reprocher des choses que j'ai attestées, et dont je vous ai félicité.
Un sénateur du RPR. C'est un début !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur le président, je vous remercie.
Avec un argument, j'ai donc deux compliments de M. Mahéas : il a dit une fois du bien de mon texte, il a tenu à le préciser une nouvelle fois. Je vous en donne acte, monsieur Mahéas, et je m'en félicite.
M. Jacques Mahéas. Soyez de bonne foi, monsieur le ministre !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Mahéas, vous me permettrez de dire que, selon moi, votre argumentation sur le sentiment d'insécurité ne tient pas la route, et je vais illustrer mon propos par une image. C'est exactement la situation du médecin qui reçoit un malade. Celui-ci lui dit : « Je souffre, j'ai mal, la douleur est persistante. » Le médecin lui répond : « Mon vieux, c'est une douleur psychologique ! » La douleur est peut-être psychologique, mais elle fait mal ! J'aimerais que l'on m'explique en quoi la douleur psychologique est différente de la douleur organique. Ce qui compte, ce n'est pas que la douleur soit psychique, organique ou idéologique, c'est qu'elle soit !
M. Robert Bret. La réponse n'est pas la même !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Tout à l'heure, M. Roger Karoutchi y a insisté, avec des mots très justes.
Donc, qu'il y ait un sentiment d'insécurité, monsieur Mahéas - pourquoi pas ? - ou une réalité de l'insécurité, ce qui compte pour celui qui vit cela, c'est la douleur qu'il ressent. Nous n'avons pas le droit de nous substituer à lui pour lui dire qu'il se trompe parce qu'il croit avoir mal,...
Mme Nicole Borvo. Personne n'a dit cela !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... alors que lui seul sait qu'il souffre et qu'il a mal. Monsieur Mahéas, dans le courant de la discussion, nous aurons sans doute l'occasion d'en débattre de manière plus approfondie...
M. Jacques Mahéas. Absolument !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... et je serai heureux de le faire avec vous.
M. Jean-Jacques Hyest est un parlementaire qui connaît ces questions depuis longtemps et qui, me semble-t-il, s'est donné la peine de lire le texte avec beaucoup d'attention.
M. Robert Bret. C'est un bon élève !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Hyest, vous avez raison, nous faisons la même lecture des positions de M. Daniel Vaillant. A plusieurs reprises, ce dernier a dit : « Sarkozy me copie. » J'ai trouvé le jugement cruel, mais je le prends comme tel. Il me paraît curieux, d'un côté, que mon prédécesseur - que je respecte par ailleurs sur le plan humain - dise : « Attention ! mon successeur me copie », et, de l'autre, d'entendre des membres du groupe socialiste, même s'il n'est pas lui-même membre de la Haute Assemblée, attaquer mon texte en m'accusant de faire la guerre aux pauvres. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.) Car je ne peux imaginer que M. Vaillant ait jamais eu cette idée. Il faut, une fois pour toutes, que l'on se mette d'accord : ou bien je fais tout comme les socialistes, comme un copieur - c'est cruel, mais je l'accepterais -, ou bien je suis liberticide et je fais la guerre aux pauvres.
Mais faire les deux à la fois, cela me semble complexe. Le parti socialiste doit faire un petit travail d'harmonisation idéologique. (Sourires sur les mêmes travées.)
S'agissant de l'insécurité routière, vous avez mille fois raison, monsieur Hyest, mais elle ne relève pas du projet de loi, c'est une priorité du Président de la République.
Le statut des gendarmes, nous le conserverons. Vous le savez, c'est une utilisation pour emploi au ministère de l'intérieur.
En ce qui concerne le renforcement de la police judiciaire, vous avez également mille fois raison. C'est un point essentiel de la stratégie qui doit être la nôtre.
Restait un petit point de désaccord ou d'incompréhension : la réserve civile. Si vous le permettez, monsieur Hyest, je vous donnerai deux arguments. Le premier : certains fonctionnaires en retraite - car, vous le savez, dans la police on part tôt à la retraite non pas par rapport à la dureté du métier, mais par rapport à d'autres situations - peuvent avoir le désir de se rendre encore socialement utiles au titre du volontariat. Aussi, je pose la question : pourquoi s'en passer ? Honnêtement, ce sont des gens à qui on permettrait d'avoir une activité rémunérée. Je pense notamment à ce que nous a dit excellemment M. Paul Girod : c'est toute la question de la défense civile.
Imaginons que la France soit confrontée à des événements dramatiques et qu'il faille assurer la garde non seulement des centrales nucléaires, mais également d'un certain nombre d'autres bâtiments sensibles. Nous serions peut-être alors contents de pouvoir compter sur une force expérimentée et immédiatement mobilisable qui s'appellerait la « réserve civile ».
On ne peut pas me dire : « Attention ! la défense civile a été délaissée » et ne pas en tirer a contrario la conclusion que la réserve civile doit être mobilisée. Je livre cela à votre réflexion. Il s'agit donc d'un problème important, et j'accepterais bien volontiers que nous l'évoquions.
En ce qui concerne les armes, monsieur Hyest, les préfectures pourront consulter les fichiers des antécédents judiciaires et des hôpitaux psychiatriques. Donc, il y aura un meilleur contrôle des demandes. Nous mettons en place un fichier national de gestion des détentions d'armes. Mais, vous avez parfaitement raison, il faut un effort de mobilisation et de travail des préfectures en la matière. (M. Jean-Jacques Hyest opine.) Disons les choses comme elles sont : s'il fallait que je plaide coupable, je le ferais bien volontiers, étant responsable des employés de préfecture. Des délais - MM. Poniatowski et Jean-Patrick Courtois pourraient en porter témoignage - sont beaucoup trop longs. C'est un problème auquel nous allons nous attaquer.
Monsieur Bret, lorsque vous avez commencé votre intervention, je vous ai écouté en ayant à l'esprit la citation entre guillemets - mais peut-être avait-elle été tronquée ? - qui vous avait été prêtée dans un grand journal du soir. (Sourires sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.) Je me disais qu'il allait être intéressant de voir comment M. Bret allait décliner son discours. Je ne veux pas vous gêner, mais vous voyez à quoi je fais allusion, monsieur Bret ?
M. Robert Bret. Oui !
Mme Nicole Borvo. Citation tronquée ! M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'était pas la vôtre, madame ! Je m'adressais à M. Bret ; je ne vous avais pas confondus. M. Bret disait grosso modo ceci : Attention ! soyons tranquilles sur le projet de loi « sécurité » car nombre de nos compatriotes peuvent le comprendre.
Monsieur Bret, d'abord, vous avez approuvé l'objectif. J'ai trouvé que c'était déjà une première étape intéressante. Sur l'objectif au moins, soyons d'accord.
M. Robert Bret. Bien sûr !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. D'ailleurs, qui pourrait être contre ? J'ai donc trouvé que cette partie de votre exposé était intéressante. Vous n'avez pas cherché - en tout cas jusqu'aux deux tiers de votre intervention - la caricature. Cela s'est un peu gâté sur la fin (Rires sur les travées du RPR), en tout cas vu de mon point de vue !
M. Robert Bret. Vous me rassurez !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Mais je me suis dit : « Dans le fond, les deux tiers du discours, c'était M. Bret lui-même, le dernier tiers, c'était pour l'« organisation » ! (Rires et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.) Enfin, c'est ainsi que je l'ai considéré. Peut-être me suis-je trompé ? En tout cas, n'y voyez pas malice, car je ne voulais surtout pas être désagréable. Toujours est-il que j'ai trouvé beaucoup de choses intéressantes dans les deux premiers tiers de votre exposé, me demandant même si on ne pourrait pas faire un bout de chemin ensemble. Evidemment, la langue de plomb, c'était pour le dernier tiers !
Il y a cependant un point sur lequel je ne peux pas vous laisser dire certaines choses : je veux parler de l'affaire du DAL, ...
M. Robert Bret. Point positif !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... et je veux m'en expliquer devant la Haute Assemblée.
Oui, monsieur Bret, j'ai reçu le DAL - vous m'en avez donné acte - à deux reprises. Savez-vous ce que m'a déclaré le président du DAL quand il est venu me voir avec sa petite délégation ? « Monsieur Sarkozy, je veux d'abord vous dire que c'est la première fois qu'un ministre de l'intérieur nous reçoit au ministère de l'intérieur » !
M. Robert Bret. C'est vrai !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'ai été touché par ces propos. Les membres de la délégation sont venus me voir avec une préoccupation : la question des squats. Ils m'ont demandé si j'avais dans l'idée de pouvoir expulser plus rapidement des gens qui sont en situation de dénuement complet et qui se trouveraient à la rue si l'on pénalisait la procédure au sens du droit pénal. Je leur ai promis d'étudier la question.
J'ai pris huit jours pour réfléchir, et j'ai repris le texte avec mes collaborateurs. J'ai considéré que la formule que j'avais proposée pouvait susciter des malentendus. Voyez-vous, monsieur Bret, cela ne me gêne pas de reconnaître que, sur ce point, cette formule n'était pas adaptée. J'ai donc préféré la retirer. Je le reconnais bien volontiers, pensant que seuls les faibles n'admettent pas s'être trompés. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Par ailleurs, monsieur Bret, quelle idée peut-on avoir d'un ministre qui, devant le Parlement, affirmerait que son texte est gravé dans le marbre et qu'il ne reculera pas ou n'acceptera aucune modification ?
Mme Nicole Borvo. On a connu cela, pourtant !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas cela, la démocratie ! Par conséquent, revoyant les représentants du DAL, je leur ai expliqué cela. Je dois dire qu'ils étaient quelque peu étonnés, peut-être même dans le bon sens ! Voyez-vous, monsieur Bret, j'étais content de leur montrer que l'on pouvait aussi discuter avec un ministre de droite et qu'ils n'étaient pas condamnés à un tête-à-tête avec le parti communiste. (M. Robert Bret s'exclame.) Je me suis fait un petit plaisir en leur montrant cela ! (Sourires.)
Finalement, monsieur Bret, cela a évité un malentendu. Cela a peut-être évité aussi que vous vous serviez d'un argument !
Enfin, nous avons un vrai point de désaccord qu'il nous faut purger. Vous m'avez dit devant la Haute Assemblée : « Le danger, c'est le pouvoir que vous allez donner à la police. » Eh bien nous, nous n'avons pas la même conception de la police républicaine. (M. Robert Del Picchia applaudit.)
M. Gérard Larcher. Eh oui !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est votre choix et non le mien ! Je ne pense pas que la gendarmerie nationale, que la police républicaine aient jamais, si peu que cela soit, mis en cause la République et la démocratie, en tout cas depuis le lendemain de la guerre.
J'ajoute que je ne dirai pas aux organisations syndicales de la police ce que vous avez laissé entendre !
M. Robert Bret. C'est dans le Journal officiel !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Elles risqueraient en effet, y compris la CGT, de ne pas comprendre pourquoi certains élus communistes craignent de voir s'accroître les pouvoirs confiés à la police. (M. Robert Bret s'exclame.) Entre les délinquants et les forces de l'ordre, j'ai tranché, et sans état d'âme ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Nous aurons l'occasion d'évoquer la question des fichiers. Beaucoup de choses ont déjà été dites. Je suis prêt à approfondir le débat avec vous...
M. Robert Bret. Il ne fait que commencer !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... et - pourquoi pas ? - à retenir certaines de vos propositions.
Monsieur Peyrat, il m'est difficile de répondre à votre intervention parce que, grosso modo, je suis d'accord sur tout ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Ce n'est pas un drame !
M. Robert Bret. Il a ciré les pompes !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. A certaines heures, après avoir écouté certains discours, cela fait plaisir d'en entendre d'autres !
M. Robert Bret. C'est un baume au coeur !
Mme Nicole Borvo. Suivons l'exemple de la Côte d'Azur, alors !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'ajoute que le maire de Nice a beaucoup de choses à nous expliquer, car cette ville de Nice a longtemps été sinistrée du point de vue de la délinquance tant elle était abandonnée par les autorités de l'Etat.
M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement. Absolument !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'ai beaucoup apprécié et ai été très intéressé par la description extrêmement précise et argumentée qu'a faite M. Peyrat du nombre des prostituées, de leur origine, du comportement et de la situation que cela engendrait dans sa ville.
M. Robert Bret. Il a oublié les réseaux mafieux !
Mme Nicole Borvo. La mafia de la Côte d'Azur !
M. Jacques Peyrat. La mafia, c'est éculé ! Arrêtez un peu !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Face aux témoignages du terrain, il y a toujours deux réactions.
Soit on ne veut pas retenir ce que dit le maire, on ne le croit pas, cela gêne ! C'est Nice, c'est Jacques Peyrat, c'est la droite !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'extrême droite !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il ne faut alors pas se dire représentant des communes de France.
M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat. Exactement !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Soit la Haute Assemblée est à l'écoute du témoignage des élus, mais de tous les élus dans leur diversité et dans leur authenticité.
Quand le maire de la cinquième ville de France tient le propos qu'il a tenu, on est quand même en droit de tenir compte de ce qu'il dit. Quand il déclare que les Niçois ne peuvent plus supporter d'être envahis, comme ils le sont depuis quelques années, par des prostituées venant systématiquement de l'étranger et qu'il s'adresse au ministre de l'intérieur, ce dernier est dans son rôle en disant qu'il va proposer une solution, au moins pour endiguer l'inflation exponentielle du nombre des prostituées d'origine étrangère.
C'est, me semble-t-il, une façon de faire de la politique et d'être au Gouvernement qui tranche heureusement avec les pratiques d'un passé qui n'était d'ailleurs pas que récent. Nous aussi avons connu des périodes où nous avions le sentiment de ne pas toujours nous faire entendre. Nous savons où cela nous a menés, et nous constatons que cela vous conduit au même endroit ! (Rires ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas gentil pour Pasqua !
M. Robert Bret. Et Pandraud, le pauvre ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'ai apprécié que Paul Girod fasse allusion à Sangatte, dossier particulièrement complexe et difficile.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ah oui !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je ne prétends pas du tout avoir trouvé la solution. Simplement, je sais qu'il serait catastrophique de continuer dans l'immobilisme, et que la seule façon de traiter humainement Sangatte c'est d'agir.
L'immobilisme, depuis quatre ans, a en effet conduit à une forme de catastrophe humanitaire dont on constate aujourd'hui les impasses, notamment, comme l'a très bien et très courageusement dit le président de la Croix-Rouge. Je veux une nouvelle fois rendre hommage au dévouement des quatre-vingts permanents de la Croix-Rouge qui, depuis quatre ans, ne parlent pas de Sangatte mais gèrent ce dossier au quotidien. Comme l'a déclaré, à juste raison, le président de la Croix-Rouge, M. Gentilini, dans une dépêche tombée cet après-midi, certaines associations - pas toutes, naturellement - utilisent la misère du monde pour la manipuler. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Ce ne sont d'ailleurs pas des choses que la droite peut penser. Je veux rendre hommage à l'attitude du maire communiste de Calais, M. Jacky Hénin, qui a une position parfaitement responsable et respectable sur le sujet, comme Jack Lang et Michel Delebarre.
Quand je vois ces malheureux, enfermés dans ce qui n'est même plus une église, puisqu'elle est désaffectée, et poussés par quelques-uns à rester contre toute évidence dans cet endroit,...
M. Michel Charasse. Enfermés dans une église, c'est horrible ! (Sourires.)
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... je me dis que la différence entre les irresponsables et les responsables - je n'accuse personne ici, bien sûr - se fait rapidement.
Bien sûr, monsieur Girod, il ne faut pas faire preuve d'indulgence pour les abus de pouvoir ! Comme je l'ai dit, je n'accepterai aucune bavure. La défense civile doit être une priorité.
Bernard Plasait a fait une démonstration - de mon point de vue éloquente et compétente - reprenant tous les arguments déployés contre le texte et démontrant leur parfaite inanité, qu'il s'agisse de l'accusation de liberticide ou de l'accusation contre les pauvres. Il m'a assuré qu'une large majorité des Français approuvait les mesures ; je crois pouvoir dire que nombreux sont ceux qui le pensent.
Alex Türk nous a fait une démonstration magistrale ...
M. Jean-Jacques Hyest. Et excellente !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... sur la question des fichiers. Le président Dreyfus-Schmidt ne m'en voudra pas de dire qu'une grande partie de ce qui pouvait lui être répondu sur la question des fichiers tient dans la démonstration extrêmement compétente de M. Türk : vous avez lu le texte, vous l'avez compris et analysé au titre de vos participations à d'autres instances parce que vous connaissez la question des fichiers. Les grands principes de finalité, de proportionnalité et de droit à l'oubli sont des principes cardinaux que j'ai intégralement repris dans le texte.
Sur l'application de la loi de 1978, oui, nous nous inscrivons dans le cadre des principes de cette loi.
S'agissant du droit à l'oubli, nous le respectons, et les décrets d'application sur les fichiers de police prévoiront les durées, notamment les durées maximales, de conservation. Nous aurons l'occasion de parler du casier judiciaire dans le cadre de la discussion. C'est vrai, entre les fichiers et le casier judiciaire, certaines procédures doivent être harmonisées.
J'en viens à l'intervention de M. Dreyfus-Schmidt. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Je ne vais pas me laisser aller parce que je connais votre talent et votre technique !
Parfois, vous employez des arguments auxquels vous ne croyez pas vous-même, simplement en espérant que votre interlocuteur va un peu sortir de ses gonds, faire « monter la mayonnaise ». Je m'en voudrais de compliquer une discussion qui partait si bien ! Ne comptez pas sur moi pour polémiquer ! (Sourires sur les travées du RPR.) Nous réalisons un travail sérieux.
J'évacue donc d'un revers de main tout ce qui a manifestement dépassé votre pensée. (Rires sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) C'est ainsi, quand on a du talent, on se laisse parfois aller - cela m'est arrivé, monsieur Dreyfus-Schmidt ! (Cela oui ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Je l'accepte bien volontiers de votre part. Je n'y répondrai donc pas parce que le piège qui m'était tendu est si accueillant que je n'ai nullement l'intention de m'y laisser prendre. (Sourires.)
En revanche, la déclaration d'urgence mérite une explication, et je m'en voudrais de ne pas vous la donner.
Vous êtes choqué par le recours à la déclaration d'urgence. C'est votre droit. Mais, monsieur Dreyfus-Schmidt, j'imagine qu'un homme de conviction comme vous est choqué par l'urgence non parce que c'est moi qui l'ait demandée mais par principe !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Oui ! Je le suis toujours.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Toujours et en tout temps ! Vous l'êtes par principe, parce que l'urgence, ce n'est pas bien ! Alors, expliquez-moi un peu pourquoi l'urgence a été déclarée par M. Jospin à quarante-huit reprises pour quarante-huit projets de loi au cours de ces cinq dernières années. (Eh oui ! sur les travées du RPR.)
M. Michel Charasse. Il ralait de la même manière.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Mais, mieux que cela, en cinq ans, le gouvernement Jospin a présenté dix-sept textes sur la sécurité.
M. Jacques Mahéas. Beaucoup a été fait !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'ai plaisir à rappeler à M. Dreyfus-Schmidt, qui ne m'en voudra pas, que, sur les dix-sept textes proposés par ses amis, onze l'ont été avec la procédure de l'urgence ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.) On est donc à 65 %.
M. Hilaire Flandre. Quelle honte !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Sur les deux textes que j'ai proposés, un seul l'a été avec la procédure de l'urgence : cela fait une moyenne de 50 %. Monsieur Michel Dreyfus-Schmidt, c'est mieux !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et avant ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Vous connaissez ce proverbe : quand je m'ausculte, je m'inquiète ; quand je me compare, je me rassure. Grâce à vous, je termine bien la soirée ! (Sourires et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Et il s'agit non pas de polémique, mais de faits !
M. Michel Dreyfus-Schmidt m'a exhorté à être de bonne foi. M. Mahéas me l'a également dit, m'invitant à reconnaître ce que la gauche a fait, parce que - M. Michel Dreyfus-Schmidt l'a rappelé également - la gauche a fait des choses. Il faut avoir le courage de le reconnaître.
Et parmi les exemples de ce que la gauche a fait, il est possible de relever un exemple probant : M. Michel Dreyfus-Schmidt attire mon attention sur un point dont je me demande encore comment j'ai pu l'oublier, à savoir le colloque de Villepinte ! (Rires sur les travées du RPR.)
Oui, je vous en donne acte : Lionel Jospin a organisé le colloque de Villepinte !
M. Ladislas Poniatowski. Et après ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est un fait incontestable. Mais on s'en est tenu là ! Monsieur Michel Dreyfus-Schmidt, j'ai essayé de ne pas être plus sévère avec Lionel Jospin qu'il ne l'avait été lui-même avec lui-même !
Qui a dit : « J'ai été naïf avec la délinquance » ?
Qui a dit : « Je me suis trompé, je pensais qu'avec le retour de la croissance et la création des emplois la délinquance reculerait» ?
C'est M. Jospin, à la télévision, qui a fait cet aveu extrêmement émouvant - et c'est à son honneur - dans un moment d'une grande authenticité.
Alors, M. Dreyfus-Schmidt, j'aimerais qu'on m'explique pourquoi, alors que le candidat socialiste a reconnu lui-même son échec patent sur la question, six mois après, vous voudriez, vous, avocat de talent, lui faire dire ce que lui-même ne pensait pas de son propre bilan ! Comment celui qui a été associé à une action peut-il juger cette action plus favorablement que celui-là même qui l'a conçue et qui a reconnu devant les Français qu'il s'était trompé ?
Votre discours aurait été, me semble-t-il, plus percutant si vous aviez déclaré : « Oui, nous nous sommes trompés. Maintenant, c'est à vous d'essayer. Nous vous accompagnerons lorsque nous serons d'accord ; nous vous combattrons lorsque nous ne serons pas d'accord. » Si vous aviez dit cela, nous pourrions engager la discussion sur de meilleures bases.
Pour le reste, je dois dire que j'ai peu goûté votre passage sur la prostitution parce que, à mes yeux, ce n'est pas un sujet qui prête à rire.
Je n'ai pas trouvé d'une élégance extraordinaire la lecture que vous avez faite des articles de mode et la comparaison complaisante que vous avez établie entre le drame de l'esclavage que vivent des filles, à qui l'on impose des rencontres sordides, et la frivolité des défilés de mode, chez Dior ou chez Karl Lagerfeld. Franchement, je ne vois pas le rapport, monsieur Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je vous l'expliquerai !
M. Jacques Mahéas. Le rapport, c'est votre texte qui le suggère.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je pense d'ailleurs, monsieur Dreyfus-Schmidt, que vous vous êtes laissé emporter par le feu de votre discours.
Alors, je me suis demandé comment le remarquable parlementaire que vous êtes, toujours assidu aux débats, comment l'avocat qui connaît parfaitement ces questions pouvait se laisser aller à une telle violence verbale. Car vous ne pouvez tout de même pas croire une minute à ce que vous dites sur mon texte !
J'ai réfléchi et j'ai finalement compris !
Il n'est pas facile en effet, mes chers amis, d'être l'orateur du groupe socialiste lorsqu'on a en tête que le porte-parole de Lionel Jospin lui-même, le maire d'Evry, M. Manuel Valls, a déclaré à un grand journal : « Ce que fait Sarkozy, nous aurions dû le faire ! ».
Il n'est pas facile d'être l'orateur du groupe socialiste quand on sait que le dernier ministre de l'intérieur socialiste, proche parmi les proches de Lionel Jospin, a déclaré : « Sarkozy me copie ! »
Il n'est pas facile d'être l'orateur du groupe socialiste - et il faut y penser avec un peu de charité ! (Rires sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste) - quand le maire socialiste d'une grande ville, M. Frêche, dit : « Si nous avions fait 10 % de ce que fait Sarkozy, Jospin aurait gagné. »
Et comment n'évoquerais-je pas aussi le maire de Mulhouse, M. Bocquel ? Vous ne l'aimez peut-être pas mais, parmi les maires socialistes, il a fait partie de ceux qui ont été réélus !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il n'a pas été réélu député !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Quand il m'a invité à Mulhouse, il m'a avoué : « Sur la mendicité agressive, vous avez raison. Sur la prostitution, vous avez raison. »
Evidemment, de telles contradictions peuvent expliquer une certaine violence dans le propos !
Cela ne m'empêchera pas, monsieur Dreyfus-Schmidt, d'étudier les amendements du groupe socialiste avec beaucoup d'intérêt, d'autant que, dans votre discours, il y a un passage que j'ai beaucoup apprécié. Si c'était pour être gentil, pour me faire plaisir, c'est réussi ! « Dans le fond, m'avez-vous dit, votre texte n'est pas un texte sur la sécurité, c'est un texte sur la tranquillité publique. »
Si vous préférez « tranquillité » à « sécurité », pourquoi pas ? (Nouveaux rires et applaudissements sur les mêmes travées.)
Mme Nicole Borvo. Ce ne serait pas juste !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est déjà pas si mal ! Cela voudrait dire que, selon vous, sur certains points, nous ne sommes pas assez efficaces, mais qu'au moins un certain nombre de mesures vont permettre de rétablir la tranquillité publique.
Par ailleurs, monsieur Dreyfus-Schmidt, vous me reprochez de m'attaquer à ce qui se voit. Ça, c'est extraordinaire ! Voulez-vous dire que ce qui se voit n'existe pas ? (Rires sur les mêmes travées.) Parce que s'attaquer à ce qui se voit, si cela existe, ce n'est pas si mal ! (Nouveaux rires sur les mêmes travées.)
Et pourquoi voudriez-vous que je m'attaque à ce qui ne se voit pas ? Est-ce que, dans votre esprit, ce qui ne se voit pas existe plus que ce qui se voit ? (Nouveaux rires sur les mêmes travées.) Quel étrange raisonnement !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est du Devos !
M. Jacques Mahéas. Vous jouez l'ingénu ! C'est très drôle !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Mais, monsieur Mahéas, cela me permet de vous démontrer que j'ai gardé une fraîcheur qui vous a fait un peu défaut dans votre intervention ! (Nouveaux rires et applaudissements sur les mêmes travées.)
Quoi qu'il en soit, monsieur Dreyfus-Schmidt, monsieur Mahéas, j'aurai un très grand plaisir à continuer à discuter avec vous au cours du débat ! (Sourires.)
Monsieur Zocchetto, merci de souligner la cohérence entre la LOPSI et la LSI. Merci aussi de reconnaître que les délais d'examen étaient suffisants.
Permettez-moi une remarque sur la question de l'« indice faisant présumer », qui fait l'objet de l'article 4 du projet de loi. Il faut, me semble-t-il, la régler une fois pour toutes !
M. Jean-Jacques Hyest. Et pour cause !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. M. Hyest en a parlé aussi.
L' « indice faisant présumer » était le critère qui permettait la garde à vue. Cette notion a également été utilisée pour d'autres dispositions de procédure, comme les contrôles d'identité.
Or elle est incontestablement moins forte que celle d'« indice grave ou concordant », qui est le critère, entre autres, de la mise en examen.
La loi du 4 mars 2002, dite « loi Lebranchu », a déjà remplacé la notion ...
Mme Nicole Borvo. Hélas !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le Sénat était contre à l'unanimité !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Rassurez-vous, je défendrai modérément Mme Lebranchu ! (Sourires sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.) Si c'était votre crainte, n'ayez plus aucun doute sur le sujet ! (Rires sur les mêmes travées.)
La loi du 4 mars 2002, disais-je, a déjà remplacé la notion d'« indice faisant présumer » - que l'on appelle aussi « indice simple », par opposition aux indices « graves et concordants » - par la notion de « raisons plausibles de soupçonner », cette fois-ci pour la garde à vue.
Pour ma part, je pense qu'il faut se montrer logique et poursuivre ce toilettage du code de procédure pénale chaque fois que le problème se pose. Cela revient en effet à reprendre la même notion que celle qui est inscrite à l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme. (Eh oui ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Il s'agit d'un glissement sémantique qui ne change pas la portée du droit en pratique.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est ce que disait Mme Lebranchu !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas, je l'avoue, sans une certaine malice que, puisqu'on me reproche de ne pas respecter les droits de l'homme, je vous renvoie à l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme ! Il ne faudrait pas que vous rejetiez cette convention quand elle ne vous arrange pas et que vous vous en réclamiez quand vous pensez qu'elle pourrait me gêner ! Mais nous aurons, là aussi, l'occasion de reprendre ce débat lors de la discussion des articles.
Monsieur Autain, ...
M. Jacques Mahéas. Mention bien ! (Sourires.)
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Mieux que cela, monsieur Mahéas ! Car il ne s'agit pas d'accorder une simple récompense scolaire à un homme qui a fait preuve de courage.
M. Jacques Mahéas. Vous distribuez des bons points et des mauvais points !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Non, monsieur Mahéas ! Voyez-vous, quand M. Autain monte à la tribune de la Haute Assemblée pour dire qu'il est vrai que l'angélisme a existé à gauche, pour reconnaître qu'il l'a connu et admettre qu'il a fait fausse route, eh bien, la fonction politique en sort grandie !
M. Jacques Mahéas. Cela vous arrange !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas parce que cela va dans mon sens que c'est courageux. C'est courageux tout simplement parce que c'est rare.
Vous dites, monsieur Autain, qu'il y a un espace entre l'angélisme et le tout-sécuritaire. Je vous réponds oui et le Gouvernement vous propose que nous nous engagions ensemble dans cet espace. En effet, si la sécurité est, aux yeux des Français, la première des priorités, chacun d'entre nous a intérêt à trouver la bonne solution. Ainsi, à l'issue de cette discussion à la Haute Assemblée, ce n'est pas la droite qui aura gagné sur la gauche, c'est l'ensemble des élus qui auront gagné parce qu'ils auront, pour une fois, tenu compte des problèmes des Français tels que ceux-ci qu'ils les expriment.
Par conséquent, monsieur Autain, le Gouvernement prend votre abstention comme un encouragement, et j'espère que nous pourrons, dans le cours de la discussion, aller plus loin sous forme de précisions que vous nous demanderiez, vous et vos amis du Pôle républicain, au nom duquel vous êtes intervenu.
Ce n'est pas parce que nous sommes certains de la parfaite unité de la majorité que, sur des questions aussi importantes, nous boudons des soutiens qui pourraient venir d'ailleurs, esquissant ainsi les bases d'un consensus.
D'ailleurs, monsieur Mahéas, même pour vous, il y aurait une petite place si jamais vous reveniez à de meilleurs sentiments ! (Rires.)
M. Jacques Mahéas. Quelle générosité !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. A-t-il droit à une mention bien ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ah non, il ne l'a pas encore méritée ! (Nouveaux rires.)
Monsieur Karoutchi, vous avez, me semble-t-il, admirablement démontré les incohérences d'une certaine gauche, non pas de toute la gauche.
Je pense que votre argumentation était particulièrement pertinente et utile, parce que nos compatriotes ne doivent pas mettre toute la classe politique dans le même sac. Nombreux sont ceux qui nous regardent pour voir si nous allons être à la hauteur du défi. Votre intervention était à cette hauteur. Je voudrais vous dire combien je l'ai appréciée. Je vous en remercie et je vous recommande, si vous me le permettez, de diffuser ce message le plus largement possible.
M. de Montesquiou nous demande d'aller plus loin sur les gardes statiques. Pour Paris, les chiffres sont impressionnants : nous allons, avec 300 fonctionnaires en unité mobile, faire davantage que ce que nous faisions avec 1 000 fonctionnaires.
MM. Jean-Jacques Hyest et Philippe Nogrix. Très bien !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ainsi dans le ressort de la préfecture de police de Paris, ce sont 700 fonctionnaires qui, à terme, au lieu de s'abêtir avec des gardes statiques inutiles et nullement valorisantes,...
M. Philippe Nogrix. Exact !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ...vont pouvoir être réaffectés à la sécurité quotidienne.
Dimanche dernier, j'ai installé les vingt premiers fonctionnaires de cette unité mobile. Ils correspondent à 150 postes de garde statique.
Ce matin encore, je recevais les représentants d'organisations syndicales de la police : ils étaient unanimes à considérer qu'on ne s'engage pas dans la police pour faire des gardes statiques.
Faut-il que les magistrats se déplacent lorsqu'il s'agit de détenus particulièrement dangereux à transporter ?
M. Jean-Jacques Hyest. Oui !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Nous sommes un certain nombre à penser que ce serait intéressant. Cela pose d'autres problèmes, et je souhaite que nous puissions en parler de façon très sereine.
M. de Montesquiou me demande s'il y a des guerres internes aux services de police. Est-ce que, depuis six mois, vous avez entendu parler d'une guerre des chefs ou d'une guerre des services ? Avant, oui ! Plus maintenant !
Du reste, vu la situation grave dans laquelle se trouvent actuellement toutes les démocraties, une quelconque guerre des chefs ou des services serait parfaitement irresponsable.
Nous allons renforcer les services de renseignement. M. de Montesquiou a déposé un amendement demandant la fusion de la DST, la direction de la surveillance du territoire, et de la DCRG, la direction centrale des renseignements généraux. Vous comprendrez certainement que ce n'est pas à l'occasion de la discussion d'un projet de loi au Parlement que l'on va fusionner des services de renseignement, surtout dans la période actuelle.
Cela dit, je suis à la disposition de la Haute Assemblée pour réfléchir sur les responsabilités respectives de la DGSE, la direction générale de la sécurité extérieure, de la DST ou de la DCRG.
M. Michel Charasse. C'est du domaine réglementaire !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Oui, mais cela peut tout de même intéresser les parlementaires.
Monsieur Ladislas Poniatowski, merci de votre soutien.
Oui, les pauvres sont les victimes. Je crois vous avoir répondu sur les chasseurs et sur les tireurs sportifs. Nous aurons l'occasion, lors de la discussion des articles, de retenir un certain nombre d'amendements déposés par M. le rapporteur sur toutes les questions que vous avez opportunément soulevées.
Madame Blandin, pardonnez-moi mais, par moments, on a bras et jambes sciés par la mauvaise foi !
Vous affirmez que ma politique, c'est : « Je ne veux plus voir les nomades ! ». Eh bien, je tiens à vous le dire bien en face, c'est un mensonge !
Madame Blandin, ce n'est pas la peine de répéter que les femmes ont un discours plus pragmatique, plus transparent, plus honnête, plus vrai, moins partisan pour vous laisser aller à une caricature de cette nature !
La parité, moi, j'y crois tellement que je vais vous répondre comme si vous étiez...
Mme Marie-Christine Blandin. Un mec !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... un homme, oui, bien sûr, parce qu'il n'y aucune différence à faire !
Madame Blandin, où avez-vous vu que j'ai stigmatisé les nomades ?
Mme Marie-Christine Blandin. Ce n'est pas moi qui le dis, ce sont eux qui le disent.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Madame Blandin, je les ai reçus peut-être plus souvent que vous ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jacques Mahéas. A Neuilly-sur-Seine ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Attention, monsieur Mahéas !
Savez-vous ce qu'on dit à la campagne ? La grêle peut tomber deux fois de suite, et sur les mêmes têtes ! (Rires sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.) A Neuilly-sur-Marne, on ne connaît peut-être pas ce proverbe, mais je peux vous le servir !
Madame Blandin, pour moi, être nomade, c'est avoir un certain mode de vie, un mode de vie qui est un patrimoine.
Ils s'appellent « roms », « gitans », ou « gens du voyage ». Entre eux, il y a des différences, mais la dénomination « gens du voyage », ils ne la ressentent pas comme blessante. Leur mode de vie, c'est un patrimoine, c'est une liberté. Nous devons les protéger, nous devons les respecter.
J'ai même prévu que la loi Besson, qui a pourtant été votée par une autre majorité que la nôtre, serait renforcée. En tirer la conclusion que nous voudrions, nous, Gouvernement, ne plus voir les nomades, c'est un mensonge éhonté, c'est une caricature partisane, et je ne veux pas vous laisser dire cela ! (M. Michel Charasse s'exclame.)
Vous pouvez être en total désaccord avec la politique que nous proposons, mais ce désaccord ne vous autorise pas, madame Blandin, à travestir à ce point la vérité. (Mme Marie-Claude Beaudeau proteste.)
Et ce n'est certainement pas aux Verts que je vais demander comment garantir la sécurité de nos concitoyens...
M. Josselin de Rohan. Ni aux trotskistes !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... ni en France ni ailleurs.
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est inadmissible !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Hérisson, j'ai trouvé que votre intervention, qui renvoie à celle de Mme Blandin, était pleine d'humanité.
Vous dites : « Les communes doivent l'accueil ». Vous avez parfaitement raison. C'est d'ailleurs l'esprit de ce texte, comme vous l'avez noté.
Vous nous proposez de parler de la question du soutien financier, notamment (M. le ministre s'étonne que Mme Marie-Christine Blandin converse avec ses collègues dans les travées.) ...
Mme Marie-Christine Blandin. Vous en avez profité pendant que je parlais, alors je me permets également quelques distractions !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ne protestez pas quand cela fait mal (Sourires.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. Mais qu'est-ce que cela veut dire ?
M. Jacques Mahéas. Un peu de courtoisie, monsieur Sarkozy !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. A propos des nomades, des gens du voyage, la question du soutien financier aux petites collectivités se pose effectivement, monsieur Hérisson. Et c'est justement parce que nous voulons sanctionner des comportements irresponsables que nous voulons protéger les autres. (Mme Nicole Borvo s'esclaffe.)
Et il est vrai que beaucoup de membres des associations de nomades, de roms que j'ai reçus étaient blessés. Ils avaient en effet le sentiment, au travers des déclarations des responsables politiques, mais surtout dans la représentation politico-médiatique, d'être tous mis dans le même sac.
Ils m'ont dit : « On ne peut plus trouver d'emplacements. On ne nous reçoit pas. »
Je leur ai alors posé la question : « Mais, messieurs, - puisqu'en l'occurrence c'étaient des hommes - si la situation que vous vivez depuis cinq ans était si parfaite, pourquoi vous trouvez-vous en butte à cet amalgame ? Pourquoi craindre ma loi, alors que c'est l'immobilisme lié à l'application de la loi actuelle qui vous met dans cette situation ? »
Nous voulons sanctionner, punir, décourager ceux qui ne respectent pas la loi et nous voulons que ceux qui la respectent puissent être considérés comme des hommes et des femmes, avec tous les droits qui s'attachent à leur personne. (Mme Marie-Claude Beaudeau proteste. - Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Il ne devrait pas être difficile, autour d'un objectif comme celui-là, de se rassembler.
M. Jacques Mahéas. Améliorez le texte !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. D'ailleurs, monsieur Dreyfus-Schmidt, l'été dernier, j'ai été saisi d'autant de demandes de maires socialistes ou de maires communistes...
M. Michel Charasse. Absolument !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... que d'élus de l'UMP.
Ce n'est tout de même pas une question socialiste ou une question UMP ! C'est une question de bon sens !
Ne pouvons-nous pas tous ensemble trouver la solution aux problèmes que posent les gens du voyage ? Ce n'est pas si difficile que cela !
Ce projet de loi comporte peut-être des imperfections, améliorez-le ! Mettez-nous au défi d'accepter nos propositions ! (M. Jacques Mahéas et Mme Nicole Borvo s'exclament.)
Mais, de grâce, laissons de côté les procès d'intention sur cette question parce qu'ils ne sont pas à la hauteur du dialogue que nous engageons.
La formule de M. Pierre Hérisson me paraît excellente : c'est le donnant-donnant. De chaque côté, on donne. Un contrat exige d'ailleurs le respect d'obligations réciproques, sinon il est léonin, donc illégal.
Monsieur Vallet, vous avez commencé votre intervention en soulignant que personne ne comprendrait qu'on ne respecte pas l'engagement du Président de la République.
Mme Nicole Borvo. Ah bon !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est sûr ! La sécurité a fait l'objet d'un débat unanime pendant la campagne électorale. La sécurité et le chômage ont été les deux questions majeures.
Mme Nicole Borvo. Pour l'instant, on s'est beaucoup occupé de la sécurité !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Mais il y a une différence entre les deux : le chômage dépend beaucoup de la situation économique internationale, alors que la sécurité dépend de notre volonté de prendre des décisions. Et personne n'aurait pu comprendre qu'on perde du temps pour traiter de la sécurité !
Par ailleurs, monsieur Vallet, selon vous, ce projet de loi aurait mérité de recueillir un consensus. Pour ma part, je ne désespère pas que, sur certains articles au moins, on puisse faire un bout de chemin ensemble.
J'ai pris l'exemple, lors de mon intervention liminaire, des portables volés. Je ne vois vraiment pas pourquoi la majorité et l'opposition devraient s'opposer sur ce thème.
Mme Marie-Claude Beaudeau. On l'a dit !
M. Jacques Mahéas. Absolument !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je suis persuadé qu'il y aura d'autres sujets sur lesquels nous vous rejoindrons...
M. Jacques Mahéas. On va y arriver !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... peut-être même sur les armes !
Après le drame de Nanterre - et je profite de cette occasion pour rendre hommage au comportement remarquable de Mme Fraysse, son maire communiste - il a été question des armes. Je ne crois pas que ce soit un sujet qui oppose la droite à la gauche.
C'est un sujet sur lequel nous pouvons être unanimes, dans vos circonscriptions, que vous soyez de gauche ou de droite, vous êtes interrogés par les uns et les autres, par les chasseurs ou les tireurs sportifs. Nous devons pouvoir ensemble formuler sur ces questions des propositions de bon sens.
Monsieur Vallet, vous m'avez interrogé sur l'action des maires. C'est peut-être notre seul point de désaccord, mais je m'opposerai - je l'ai toujours pensé - à toute municipalisation de la police nationale.
M. Jean-Claude Carle. Bien sûr !
Mme Nicole Borvo. On est au moins d'accord sur un point !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je ne dis pas que c'est ce que vous demandez, monsieur le sénateur, mais je veux vraiment que ce soit clair.
M. Michel Charasse. Très bien !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je n'y crois pas. Dans un pays qui compte 36 000 communes,...
M. Gérard Braun. Tout à fait !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... il n'est pas concevable d'imaginer, si peu que cela soit, la municipalisation de la police nationale. (M. Pierre Hérisson applaudit.)
En revanche, il y a beaucoup à faire, et c'est l'objet de toute la partie du texte portant sur les pouvoirs de la police municipale, avec la reconnaissance de nouveaux pouvoirs aux maires et de moyens pour les policiers municipaux.
J'ajoute que j'ai donné des instructions très fermes, prévues dans le cadre de la LOPSI, pour que vous bénéficiiez de ces informations dont il est scandaleux que les maires n'aient pas été destinataires systématiquement.
Cela a existé dans certaines communes parce que le maire avait exercé des responsabilités, ou parce qu'il entretenait de bons rapports avec le commissaire, mais pas partout.
Vous avez demandé si la France était une cible du terrorisme. Oui, hélas !
Est-elle une cible particulière ? Non ! la France est une cible du terrorisme comme toutes les démocraties. Nous aurons l'occasion, hélas ! de reparler de ce sujet.
Madame Françoise Henneron, je dois dire qu'à cette heure tardive, entendre des idées fortes émises par une personnalité authentique, qui monte à la tribune donner sa part de sincérité, cela fait grand plaisir. (Rires sur les travées du CRC.)
Je ne vois pas pourquoi certains rient, parce que toutes les sincérités sont respectables.
Mme Nicole Borvo. Mais pas les caricatures !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Reconnaître la passion que quelqu'un met dans son combat politique c'est primordial. Je suis de ceux qui pensent depuis bien longtemps que se reconnaître de la droite républicaine et modérée, il n'y a aucune raison d'en être complexé. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et du RDSE.)
Madame Henneron, votre témoignage était éminemment touchant, car il vient d'une personne qui vit au milieu de ses concitoyens...
Mme Nicole Borvo. Ce que nous n'acceptons pas, c'est votre prêchi-prêcha.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... et qui est bien décidée à ne pas se laisser intoxiquer par le prêchi-prêcha d'un petit milieu qui, trop longtemps, a confisqué nos élites et est responsable de l'éloignement d'une partie de nos compatriotes à l'égard du monde politique.
Je voudrais rappeler qu'un Français sur deux ne vote pas et que, s'il y avait plus de témoignages aussi authentiques que ceux de Mme Henneron, cela changerait peut-être.
Je ne sais si ce que vous avez dit fait plaisir à tout le monde mais, à moi, cela m'a fait très plaisir.
Enfin, monsieur Carle, je vous remercie de votre soutien et votre remarque m'offre une belle conclusion : « C'est le projet du coeur et de la raison ».
Que l'on m'aime ou que l'on ne m'aime pas, le problème n'est pas là,...
Mme Nicole Borvo. L'amour n'a rien à voir !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. ...que l'on juge ce texte pertinent ou non, que l'on ait son idée sur la sécurité ou non, je voudrais que chacun comprenne que ces idées que je suis venu défendre devant vous, j'y crois profondément.
J'y crois si fortement que je suis prêt à en débattre et à les amender. Je suis en effet persuadé que ce que nous faisons ici est plus important que le projet de loi lui-même, plus important que la situation d'un ministre ou d'une majorité. C'est quelque chose de fort, car il s'agit de prouver la capacité de responsables politiques à répondre à un cri de détresse lancé par des millions de Français.
C'est une noble mission ; j'aimerais tellement que nous soyons au rendez-vous de cette attente en essayant de construire un débat qui fasse non pas honte, mais honneur à chacun de nous. J'aimerais tellement entendre demain les gens dire qu'il s'est passé quelque chose à la Haute Assemblée, et que nous avons été capables de discuter sérieusement d'un sujet prioritaire. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Exception d'irrecevabilité