SEANCE DU 23 JANVIER 2002


M. le président. « Art. 58 bis . - Le II de l'article L. 514 6 du code de l'environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elles ne sont pas non plus applicables aux décisions concernant les autorisations d'exploitation d'installations classées concourant à l'exécution de services publics locaux ou de services d'intérêt général pour lesquelles le délai de recours est fixé à un an à compter de l'achèvement des formalités de publicité de la déclaration de début d'exploitation transmise par l'exploitant au préfet. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 631, présenté par MM. Dreyfus-Schmidt et Bel, Mme Blandin, MM. Collomb, Debarge et Domeizel, Mme Durrieu, M. Frécon, Mme Herviaux, MM. Lagauche, Le Pensec, Marc, Masseret, Mauroy, Peyronnet, Picheral, Raoul, Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 58 bis . »
L'amendement n° 201, présenté par M. Lassourd, au nom de la commission des affaires économiques est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 58 bis :
« I. - Le 2° du I de l'article L. 514-6 du code de l'environnement est ainsi rédigé :
« 2° par les tiers, personnes physiques ou morales, les communes intéressées ou leurs groupements, en raison des inconvénients ou des dangers que le fonctionnement de l'installation présente pour les intérêts visés à l'article L. 511-1, dans un délai de six mois à compter de l'achèvement des formalités de publicité de la déclaration de début d'exploitation ou de mise en service transmise par l'exploitant au préfet. »
« II. - En conséquence, supprimer le II de l'article L. 514-6 du code de l'environnement. »
L'amendement n° 155, présenté par M. Hoeffel, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par l'article 58 bis pour compléter le II de l'article L. 514-6 du code de l'environnement, remplacer les mots : "un an" par les mots : "six mois". »
La parole est à M. Peyronnet, pour défendre l'amendement n° 631.
M. Jean-Claude Peyronnet. Cet amendement tend à la suppression de l'article 58 bis. En effet, l'on ne voit pas pourquoi les installations classées concourant à l'exécution de services publics locaux présenteraient moins de dangers que les autres installations classées.
Nous souhaitons donc la suppression de la disposition qui introduit une dérogation au délai de recours des tiers, le ramenant à un an dans le cas d'installations concourant aux services publics locaux contre quatre ans dans le droit commun. Cette disposition, qui a été introduite par l'Assemblée nationale, nous semble sans fondement. Nous demandons donc le retour, pour ce type d'établissements, au droit commun.
M. le président. La parole est à M. Lassourd, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 201.
M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis. Les dispositions de l'article L. 514-6 du code de l'environnement organisent un triple délai de recours à l'encontre de tous les actes ou décisions individuelles concernant les dispositions relatives aux installations classées.
Ces trois délais de recours sont les suivants.
Premièrement, les demandeurs d'autorisation ou les exploitants d'une installation peuvent attaquer les mesures individuelles les concernant dans le délai classique de deux mois.
Deuxièmement, pour les tiers et les personnes morales ou physiques, le délai de recours est de quatre ans à compter de la publication ou de l'affichage de l'acte.
Troisièmement, dans le cas des autorisations d'exploitation de carrières, le délai de recours est fixé à six mois à compter de l'achèvement des formalités de publicité de la déclaration de début d'exploitation transmise par l'exploitant au préfet.
La rédaction de l'article 58 bis rend plus complexe la réglementation en vigueur, en fixant à un an le délai de recours des tiers à l'encontre des décisions d'autorisation d'exploitation d'installations classées.
Cela ne se justifie guère au regard des intérêts qui sont visés à l'article L. 511-1.
Il vous est donc proposé, mes chers collègues, d'harmoniser le délai de saisine des tiers en le fixant à six mois, ce délai étant décompté à partir de la mise en activité ou en exploitation de l'installation classée.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 155 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 631 et 201.
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. La commission des lois retire son amendement n° 155 au profit de l'amendement n° 201, qui va dans le sens de l'harmonisation des délais de recours contre les décisions d'autorisation d'exploitation d'installations classées.
De ce fait, la commission est défavorable à l'amendement n° 631, qui va en sens opposé.
M. le président. L'amendement n° 155 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 631 et 201 ?
M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Ces amendements, qui sont en effet antinomiques, concernent le délai de recours des tiers contre les arrêtés préfectoraux.
Ce délai de recours, qui est actuellement de quatre ans pour les installations classées, a pour objet de permettre aux tiers de connaître l'impact réel de l'exploitation sur l'environnement. Si, éventuellement, ces tiers décident de contester l'autorisation afin de faire cesser l'exploitation, ils peuvent le faire en connaissance de cause.
Si ce délai était réduit à six mois, il y aurait vraisemblablement - on connaît tous les pratiques de certaines associations - des recours tous les six mois au lieu de tous les quatre ans, et donc une multiplication par huit des contentieux. Je ne suis pas sûr que cette possible conséquence de l'amendement n° 201 soit de nature à favoriser la lisibilité du système !
En matière de décharges, par exemple, certains types de nuisances, comme la production de biogaz, n'interviennent pas au début de la mise en exploitation de la décharge, mais peuvent apparaître au bout d'un, deux ou trois ans. Nous aurons d'ailleurs l'occasion de reparler bientôt des décharges puisque la loi de 1992 nous impose une échéance au mois de juillet 2002.
Dans la défense de votre amendement, vous avez invoqué, monsieur le rapporteur pour avis, le cas des autorisations de carrières, pour lesquelles le délai de recours est de six mois. Mais rien ne justifie qu'un délai dérogatoire soit légalement appliqué aux autres catégories d'installations. En effet, les carrières sont soumises à la loi spécifique du 4 janvier 1993, qui s'explique pour des raisons historiques. Avant d'être incorporées, en 1993, dans le droit des installations classées, les autorisations de carrières étaient soumises, au titre du régime minier, à un délai de recours encore plus bref puisqu'il était de deux mois.
En fait, l'amendement n° 201 va à l'encontre de l'objectif poursuivi par la législation, qui vise à assurer la protection des tiers. Il ne s'inscrit pas dans l'esprit de la présente loi. Il risque, en outre, d'avoir un effet pervers en multipliant les contentieux de précaution tous les six mois de la part des riverains.
J'ai fait référence à l'actualité dramatique de l'usine AZF à Toulouse. En effet, non seulement les Toulousains, mais l'ensemble de nos concitoyens sont encore très sensibilisés à la cohabitation avec des usines à risques.
Ainsi, la disposition contenue dans votre amendement, monsieur le rapporteur pour avis, n'irait pas dans le bon sens ; elle serait de nature à rendre les implantations plus difficiles.
En revanche, le Gouvernement est très favorable à l'amendement n° 631, qui porte à quatre ans le délai de recours.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 631, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 201, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 58 bis est ainsi rédigé.
Mes chers collègues, il est dix-neuf heures cinquante-cinq. Il m'a été indiqué qu'il serait souhaitable que toute la partie du texte qui relève de la compétence du ministère de l'environnement soit traitée avant la suspension.
Il reste encore huit amendements à examiner. Aussi, mes chers collègues, si vous voulez que nous en ayons terminé dans un laps de temps raisonnable, j'invite chacun à un effort de concision.

Article 58 ter (priorité)