SEANCE DU 17 JANVIER 2002


M. le président. La parole est à M. Puech.
M. Jean Puech. Ma question porte sur l'insécurité en province, et plus précisément dans nos campagnes. (Marques d'impatience sur les travées socialistes.) Elle complétera la question posée tout à l'heure par notre collègue Alain Gournac.
Nous citons régulièrement les mauvais chiffres de la délinquance en nous limitant essentiellement à la capitale, qui a vu son taux de délinquance augmenter de 5,6 % pendant l'année écoulée. Mais les territoires ruraux ne sont pas épargnés, et nos concitoyens ainsi que les élus doivent faire face à des situations nouvelles que nous n'avions pas encore connues : véhicules incendiés, casses de vitrines par voitures bélier, distributeurs automatiques de billets descellés et emportés. Par ailleurs, les rave-parties se développent sur des territoires insuffisamment surveillés, avec la circulation de drogue que vous imaginez.
M. Gérard Larcher. Oui !
M. Jean Puech. Nous n'avions jamais connu cela dans le passé !
Après les manifestations, vous le savez, des mesures ont été prises en faveur des policiers et des gendarmes. Vous les avez annoncées, monsieur le ministre, et, selon M. le Premier ministre lui-même, la mise en oeuvre de ces mesures se fera par redéploiement. Cela signifie que vous allez augmenter les effectifs en milieu urbain, en diminuant fatalement les effectifs en milieu rural.
Mme Nelly Olin. Eh oui ! M. Jean Puech. C'est ce que vous avez fait, en réalité, depuis trois ou quatre ans dans un département que je connais bien : dans l'Aveyron, nos quarante-huit brigades de gendarmerie - je sais qu'elles ne dépendent pas de vous - comptaient jusqu'à présent six gendarmes chacune. Aujourd'hui, on ne compte plus que quatre ou cinq gendarmes par brigade...
M. Bruno Sido. Oh !
M. Jean Puech. ... complétés par des adjoints de sécurité qui n'ont pas la capacité d'intervention des gendarmes. En trois ans, nous avons donc perdu une cinquantaine de gendarmes.
Par ailleurs, il est annoncé des créations d'emplois dans la police. Elles restent cependant insuffisantes et ne concernent pas les quelques commissariats des départements ruraux qui sont menacés de disparation.
M. René-Pierre Signé. Sur le plateau du Larzac, il n'y a que des moutons !
M. Jean Puech. La situation, déjà grave, empire. Que comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour ne pas la laisser se dégrader...
Mme Nelly Olin. Des promesses !
M. Jean Puech. ... et pour juguler cette insécurité qui progresse de façon alarmante, y compris en milieu rural ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Dominique Braye. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, comme chaque année à pareille époque, vous exprimez, avec plusieurs de vos collègues de l'opposition, votre impatience de connaître les chiffres de la délinquance, chiffres sur lesquels, d'ailleurs, vous semblez avoir déjà quelques idées.
Cette impatience va trouver une réponse à travers la publication prochaine, comme chaque année, des chiffres de la délinquance, aussi bien en zone de police qu'en zone de gendarmerie. En effet, comme vous l'avez souligné vous-même, il y a effectivement deux manières d'assurer la sécurité dans notre pays, et vous savez que ces chiffres sont regroupés et publiés par le directeur général de la police nationale, fin janvier ou début février, même si j'ai tenu, par souci de transparence,...
M. René-Pierre Signé. Très bien !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. ... à ce que, dès le mois de juillet, nous disposions du chiffre semestriel, ce qui nous permettra ainsi de comparer les deux semestres de l'année 2001.
M. Dominique Braye. Comparez !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Je ne puis préjuger les résultats car, pour l'instant, je ne connais pas encore les chiffres de la gendarmerie, sur lesquels vous êtes pourtant intervenu.
M. Dominique Braye. Nous, nous les connaissons !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. La violence dans la société, monsieur le sénateur, est un sujet qui mérite effectivement, en particulier au regard des statistiques, de disposer d'un outil plus objectif et moins contesté que celui dont nous disposons ajourd'hui.
Tel est le sens de la mission qui a été confiée aux députés Caresche, de la majorité, et Pandraud, de l'opposition, afin que cette question des statistiques ne revienne pas de manière permanente pour être exploitée, particulièrement quand arrive le moment des élections. (Protestations sur les travées du RPR.)
M. René-Pierre Signé. Bravo !
M. Jean Pépin. Ce n'est pas un problème d'exploitation !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. En effet, je crois que cette question mérite mieux que l'exploitation, les surenchères et la démagogie, et j'espère effectivement que, pour l'avenir, nous aurons un outil incontestable...
M. Dominique Braye. C'est nul !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. ... parce qu'il me paraît nécessaire de connaître le chiffre vrai de la délinquance plutôt que de s'en tenir à la capacité des forces de sécurité à agir. En effet, même si c'est paradoxal, la délinquance augmente alors qu'il y a plus de policiers : nous en mettons plus sur le terrain que vous n'en mettiez, puisque vous aviez réduit les effectifs et que nous les avons augmentés, puisque nous avons créé les contrats locaux de sécurité pour organiser le partenariat,...
M. Dominique Braye. Et la délinquance ?
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. ... puisque nous avons mis en place la police de proximité, comme vous l'avez reconnu vous-même, monsieur Puech, tout à l'heure.
Nous avons pris des décisions à l'automne, aussi bien mon collègue Alain Richard pour la gendarmerie que moi-même pour la police, qui vont dans le sens d'une présence de policiers et de gendarmes plus importante sur le terrain...
M. Alain Gournac. Vive les 35 heures !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. ... pour assurer la sécurité de nos concitoyens.
Bien sûr, aujourd'hui, la violence est dans la société, et nous devons combattre cette violence...
M. Dominique Braye. Voyez les chiffres !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. ... et ses causes. La police et la gendarmerie sont en première ligne...
M. Dominique Braye. C'est facile de dire cela !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. ... avec la justice pour assurer l'efficacité de la chaîne pénale. Mais vous reconnaîtrez que cette question est posée à tous...
Mme Nelly Olin. Il a tout compris !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. ... et que chacun a sa part de responsabilité.
M. Dominique Braye. Non !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Cela devrait donc vous engager à être plus responsables sur ce sujet que vous ne l'êtes ! (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Dominique Braye. Donc vous êtes content. Pas nous !
M. le président. Je demande une dernière fois à tous les intervenants, qu'ils soient membres du Gouvernement ou sénateurs, de bien vouloir respecter leur temps de parole...
M. René-Pierre Signé. Ils crient tout le temps ! (Sourires.)
M. le président. ... pour que chacun puisse intervenir au cours de la présente séance de questions.

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