SEANCE DU 16 JANVIER 2002


M. le président. L'amendement n° 312, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
« La première phrase du second alinéa du I de l'article L. 122-1-2 du code du travail est complétée par les mots : "sauf s'il s'agit du remplacement d'un salarié qui cesse son activité professionnelle pour exercer son mandat d'élu auquel cas le terme maximal est celui du mandat dudit élu". »
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Cet amendement vise à améliorer la situation des élus locaux, afin notamment de faciliter leur réintégration dans la vie active lorsqu'ils ont décidé de se consacrer entièrement à leur mandat et d'abandonner leur activité professionnelle. Certains élus, en effet, bénéficiaient, avant de se présenter à une élection, d'un contrat à durée déterminée, puis, lorsqu'ils sont entrés dans la vie politique, ils ont choisi de se consacrer à temps plein à leur mandat électoral, d'exécutif local éventuellement, et donc d'abandonner leur vie professionnelle pendant ce temps. Je propose donc, dans ces cas spécifiques, de prolonger la durée du contrat à durée déterminée des élus jusqu'à la fin de leur mandat afin de leur permettre, si d'aventure leur mandat n'était pas renouvelé lors de l'élection suivante, de réintégrer la vie professionnelle dans des conditions satisfaisantes, sans avoir à subir les conséquences des dispositions actuelles de la loi, qui ne le leur permettrait pas.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. J'ai écouté attentivement M. Vasselle. Je lui répondrai sur deux points. Le premier est une question de forme. Voilà un an, sur proposition du rapporteur M. Jean-Paul Delevoye, nous avons adopté un ensemble de dispositions qui concourent à un statut de l'élu local.
La commission des lois a décidé d'émettre un avis favorable sur les dispositions adoptées à cet égard, voilà un an, à une très large majorité.
Mon second argument porte davantage sur le fond. L'amendement n° 312 tend à prévoir une dérogation à la durée maximale du contrat de travail à durée déterminée valable pour tous les salariés remplaçant les élus locaux ayant cessé leur activité professionnelle pour l'exercice de leur mandat en fixant la durée maximale de ce contrat à la durée du mandat.
Je m'interroge sur ce point : est-il opportun, pour des raisons psychologiques, pour ne me limiter qu'à cela, de prévoir maintenant une dérogation et un statut particulier pour une catégorie de salariés, au bénéfice des personnes remplaçant des élus dans l'entreprise ?
Je crois pouvoir m'en remettre à la sagesse de notre collègue M. Vasselle pour considérer que la réponse à la question que je viens de poser ne peut être positive.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Les dispositions actuelles du code du travail s'appliquent automatiquement à la situation des salariés remplaçant des élus ayant suspendu leur activité professionnelle pour exercer leur mandat. Dès lors, l'amendement qui dérogerait au code du travail pour modifier la durée du droit commun du contrat à durée déterminée n'est pas utile.
Le Gouvernement propose donc le retrait de l'amendement, comme le suggérait M. le rapporteur, si j'ai bien compris ; à défaut, il demanderait le rejet du texte.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 312.
M. Eric Doligé. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Doligé.
M. Eric Doligé. Cet amendement me fait penser à une autre question, elle aussi compliquée : la situation des titulaires et des contractuels dans les collectivités locales. Pourquoi, par conséquent, ne pas élargir notre réflexion à ce problème ? Lorsque les collectivités locales cherchent à recruter du personnel, on leur impose en général de ne pas établir de contrats de plus d'un an, ce qui leur cause un certain nombre de difficultés. En effet, elles ne peuvent embaucher de contractuels que pour un an, en ne pouvant garantir la reconduction du contrat, alors même que, parfois, les personnes recrutées ont dû se déplacer géographiquement pour occuper le poste. Et les préfets, en général, sont très attentifs à la durée des contrats...
Dans le cas particulier d'un fonctionnaire qui serait élu à l'Assemblée nationale, au Sénat ou ailleurs - cela arrive -...
M. Jean Chérioux. Si peu !
M. Eric Doligé. Il y a des exceptions, parfois !
... peut-être pourrait-on prévoir que, lorsqu'une collectivité locale embauche un contractuel à un poste quel qu'il soit, la durée du contrat pourrait être supérieure à un an et que le remplaçant d'un fonctionnaire élu pourrait également bénéficier d'un contrat exceptionnellement allongé.
Voilà le problème que je soulève à partir de l'amendement qui vient de nous être soumis.
M. le président. Monsieur Vasselle, l'amendement n° 312 est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. Je tiens à souligner une nouvelle fois les nombreuses qualités de rapporteur de M. Hoeffel, son important pouvoir de conviction ainsi que sa grande diplomatie dans l'expression de l'avis de la commission des lois sur une question aussi sensible que celle-ci.
M. Jean Chérioux. « Ah ! Qu'en termes galants ces choses-là sont mises ! »
M. Alain Vasselle. Je comprends bien les problèmes que la disposition présentée pose au regard du droit du travail.
Mon amendement était, dans une certaine mesure, un texte d'appel visant à attirer l'attention sur la précarité dans laquelle risquent de se retrouver, si aucune disposition législative n'est adoptée, un certain nombre d'élus qui, au moment de leur élection, avaient un contrat à durée déterminée, précarité à laquelle ne sont absolument pas confrontés les fonctionnaires. Nous aurons certainement l'occasion d'en débattre.
Actuellement, en fonction du statut professionnel dont vous bénéficiez, il est plus ou moins facile de se lancer dans l'aventure d'une carrière politique : quand vous exercez une profession indépendante ou libérale, l'aventure est plus grande que lorsque vous êtes retraité ou fonctionnaire !
Je vais donc retirer cet amendement, bien que le débat ne soit à mon avis pas clos sur le sujet.
Permettez-moi, monsieur le rapporteur, de faire maintenant un petit rappel.
Si, effectivement, le Sénat s'est prononcé de manière unanime sur le rapport de M. Delevoye, je tiens cependant à profiter de l'occasion pour rappeler que c'est grâce au président du Sénat, M. Christian Poncelet - et je tiens à nouveau à le remercier solennellement -, que nous avons pu débattre du statut de l'élu, examinant une proposition de loi dont j'étais le premier signataire et qui avait été cosignée par quelque 70 ou 80 sénateurs.
Et c'est à la suite de cette proposition de loi qu'est intervenu le rapport de M. Delevoye et que toute une série de dispositions concernant le statut de l'élu ont été adoptées par le Sénat M. Vaillant, qui était déjà ministre de l'intérieur, nous a alors renvoyés, en donnant l'avis du Gouvernement, au texte que nous examinons aujourd'hui, indiquant que le projet de loi relatif à la démocratie de proximité intégrerait la quasi-totalité des propositions que j'avais présentées dans ma proposition de loi, que M. Delevoye avait reprises dans son rapport et que le Sénat avait adoptées.
Cela étant dit, je m'en remets à votre sagesse, monsieur le rapprteur, et je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 312 est retiré.
Nous allons maintenant examiner les amendements n° 458 et 459, présentés par le Gouvernement.
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, je demande, au nom du Gouvernement, la réserve des amendements n°s 458 et 459, déposés par le Gouvernement, jusqu'à la fin de l'examen du projet de loi. En effet, ces amendements n'ont pas leur place dans le titre II relatif aux conditions d'exercice des mandats locaux, car ils portent sur un tout autre sujet.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cette demande de réserve ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. Favorable.
M. le président. La réserve est donc ordonnée.

Article 16