SEANCE DU 10 JANVIER 2002


M. le président. L'amendement n° 468, présenté par Mmes Beaufils, Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 7 ter, insérer une division additionnelle ainsi rédigée : "Chapitre... . - Congé pour responsabilités associatives". »
La parole est à Mme Beaufils. Mme Marie-France Beaufils. Le débat que nous venons d'engager sur la démocratie de proximité est évidemment marqué par la question de la participation citoyenne des habitants de nos villes.
Un tel constat est fondé sur une analyse des expériences diverses qui peuvent se mener, dans de nombreuses cités de notre pays, en vue de permettre une consultation plus régulière de la population par les élus.
Mais il s'accompagne aussi d'une autre réalité : l'existence de nombreux lieux de confrontation des idées et des approches sur l'ensemble des problèmes posés par la vie de la cité.
On pourra aussi citer le domaine de l'enseignement, où existent de nombreuses structures de concertation - conseils d'école, conseils d'administration des établissements secondaire, par exemple - tandis que le domaine de la culture et du sport est souvent le lieu d'un échange direct entre élus et population ou associations.
Cent ans après le vote de la loi du 1er juillet 1901 relative à la liberté d'association, force est de constater que notre pays continue de ne pas avoir de dispositions législatives favorisant réellement l'exercice de mandats associatifs par nos compatriotes.
Si, au fil du temps, le droit syndical ou les droits politiques ont en effet gagné droit de cité et ont pu trouver quelques matérialisations dans le corpus juridique de notre pays - le présent texte peut en constituer une nouvelle étape - il n'en est pas encore de même pour le milieu associatif.
Ainsi, dans les faits, ce ne sont que les très grandes associations comptant plusieurs milliers d'adhérents qui sont aujourd'hui en mesure de permettre à leurs dirigeants de jouer pleinement leur rôle.
Nous ne contestons pas cette réalité, mais il faut cependant constater que la nécessité se pose aujourd'hui d'étendre cette faculté à un plus grand nombre de personnes, notamment au moment où nous escomptons de cette loi qu'elle favorise un nouvel essor du dialogue démocratique.
Il convient, en effet, si l'on fixe des objectifs clairs de renforcement de la démocratie comme réponse aux tensions sociales que nous pouvons connaître, de faciliter autant que faire se peut le plein exercice de l'activité des personnes mandatées par leurs associations pour les représenter.
Tel est donc le sens de cet amendement, qui préconise la mise en place d'un congé de participation à la vie démocratique, outil de reconnaissance du rôle des associations dans la vie quotidienne et de la place de leurs représentants dans les structures de concertation existantes ou à développer.
De la même manière que le présent projet de loi renforce, de manière souvent heureuse, les droits des élus dans l'exercice de leur mandat ou leurs droits à la formation, il doit comprendre des dispositions porteuses de progrès dans la prise en compte du fait associatif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. Cet amendement tend à conférer aux associations un avantage pratiquement équivalent à celui qui est concédé aux élus.
Or la nature des mandats associatifs est différente de celle des mandats électoraux. Certes, les associations méritent un soutien et, dans cette perspective, des propositions concrètes pourraient être étudiées. Cependant, en l'état actuel des choses et compte tenu du fait que c'est du code général des collectivités territoriales que nous traitons actuellement, la commission estime ne pas pouvoir donner un avis favorable sur cet amendement ; cette position et également valable pour les amendements n°s 469 et 470.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Comme M. le rapporteur, je donnerai également l'avis du Gouvernement sur les amendements qui suivent puisqu'ils ont le même objet, à savoir la création d'un congé pour responsabilités associatives.
Si le Gouvernement est conscient de l'intérêt réel d'une mesure dont l'importance ne saurait être sous-estimée, il ne peut que constater que celle-ci a peu de rapport ou, en tout cas, un rapport très ténu avec le texte en débat. Néanmoins, dans la mesure où un vrai problème se pose, je m'en remettrai à la sagesse du Sénat ; et c'est une sagesse positive !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 468.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je comprends bien les arguments et les réserves de M. le rapporteur et, par voie de conséquence, l'appel à la sagesse du Sénat formulé par M. le ministre. Cela étant, le présent projet de loi comporte suffisamment de « cavaliers » pour que l'on ne s'effraie pas de ces trois amendements, qui, ayant un seul et même objet, n'en font qu'un en réalité.
Dans ces conditions, étant donné l'intérêt de la mesure et puisque nous avons toujours tenu à favoriser le mouvement associatif, nous voterons pour cette proposition du groupe communiste républicain et citoyen, proposition dont nous le félicitons.
Mme Marie-France Beaufils. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. A l'occasion de la célébration du centenaire de la loi de 1901, nous avons été amenés à rencontrer de nombreux responsables d'associations. Ils nous ont notamment fait part des difficultés auxquelles ils se heurtent pour participer véritablement à la vie publique à laquelle nous, élus, les convions bien souvent.
C'est ainsi que, dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi de solidarité et renouvellement urbains, la loi SRU, nous sommes amenés à solliciter le point de vue d'un certain nombre d'associations qui nous accompagnent dans la réflexion et dans la discussion des plans de déplacements urbains, par exemple. De même, les comités d'usagers sont consultés pour l'application de la loi de régionalisation de la SNCF.
C'est pourquoi la proposition que nous formulons en faveur de la vie associative me semble tout à fait pertinente, et j'insiste auprès de vous, mes chers collègues, pour que vous preniez en compte cet aspect du problème en donnant aux militants associatifs les moyens de trouver du temps pour participer à la vie démocratique.
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Je veux d'abord insister sur le fait que les responsables associatifs sont souvent extrêmement fiers de leur statut de bénévole. Or, en prévoyant l'octroi de tels congés, on ne peut manquer d'attirer vers les associations des gens uniquement soucieux de profiter de tels avantages, pour qui les associations ne seront finalement que des instruments.
Mme Marie-France Beaufils. C'est l'inverse !
M. Dominique Braye. Dès lors, il ne nous sera plus guère possible d'exprimer notre gratitude, comme nous le faisons aujourd'hui dans toutes les collectivités, à ces personnes qui, par pur dévouement, se mettent au service de leurs concitoyens.
Du reste, beaucoup de mesures très favorables - pensez aux 35 heures ! - ont déjà été prises ces derniers temps. En fin de compte, il va être de plus en plus difficile de trouver une personne sur son lieu de travail, du moins s'il ne s'agit pas d'un pauvre patron de PME !
Bien sûr, on peut souhaiter que chacun puisse poursuivre des études jusqu'à l'âge de trente-six ans, de manière à voir s'élever le niveau moyen des connaissances dans notre pays, étant entendu qu'à partir de la trente-septième année seront ouverts les droits à la retraite ! C'est certain, la France sera alors un pays où il fera bon vivre, mais peut-être pas un pays parfaitement armé pour affronter la concurrence mondiale et notamment européenne.
M. Jacques Peyrat. Ce sera un pays en charpie !
M. Dominique Braye. Merci, mesdames, messieurs du groupe communiste républicain et citoyen, de nous aider, par vos propositions, à faire de la France un grand pays prêt à mener les combats de demain !
M. Louis Moinard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Moinard.
M. Louis Moinard. Je reconnais, comme tout un chacun, le travail énorme accompli par les associations, en collaboration avec les élus.
Cependant, en adoptant un tel amendement, ne risque-t-on pas de voir « fleurir » des associations dont l'objet sera plus de donner des congés à leurs membres que de servir la population ?
M. Jacques Peyrat. Très bien !
Mme Nicole Borvo. Six jours de congé par an, quelle horreur en effet !
M. André Lardeux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lardeux.
M. André Lardeux. Il nous est difficile de voter un tel amendement au nom d'un principe simple, qui est le principe d'égalité.
Il est évident que la proposition de nos collègues favorise certaines catégories dans la mesure où elle ignore totalement les professions indépendantes.
Ainsi, certaines catégories seront encouragées à militer dans les associations.
Mme Nicole Borvo. Et qu'en est-il à l'heure actuelle ?
M. André Lardeux. Certes, c'est bien ce que certains, pour des raisons idéologiques, souhaitent.
A l'inverse, d'autres catégories seront de fait complètement exclues des associations : je pense notamment aux professions qui n'ont pas les moyens de se libérer.
M. Jacques Peyrat. Et qui travaillent !
M. André Lardeux. Par ailleurs, comme l'a dit Dominique Braye, on peut se demander quand on va travailler dans ce pays ! (Rires et exclamations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 468, repoussé par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 42:

Nombre de votants 315
Nombre de suffrages exprimés 315
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 114
Contre 201

Articles additionnels après l'article 7 ter