SEANCE DU 1ER DECEMBRE 2001


M. le président. Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant la communication.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Weber.
M. Henri Weber. Madame la ministre, vous nous présentez aujourd'hui le dernier budget de la communication de cette législature, et ce doit être pour nous l'occasion de mesurer le chemin parcouru.
Entre 1993 et 1997, la droite procédait à une privatisation rampante des grandes chaînes publiques, en réduisant régulièrement leur financement public et en augmentant au contraire leur financement par la publicité. (Protestations sur les travées du RRP.) Ayant entendu votre collègue du RPR s'exprimer ce matin, j'en déduis que ce prurit l'a repris ! (M. Karoutchi s'exclame.) En 1997, France 2, par exemple, était financée à 52 % par les recettes publicitaires.
M. Roger Karoutchi. Les chaînes cryptées, c'est la gauche !
M. Henri Weber. Catherine Trautman et vous-même avez stoppé, puis inversé cette tendance : les ressources de l'audiovisuel public ont augmenté de 35 % en cinq ans, la durée maximale des écrans publicitaires a été réduite à huit minutes par heure ; la part du financement public est remontée à 77 % ; les exonérations de redevance consenties par l'Etat ont été intégralement remboursées ; un milliard de francs supplémentaires ont été accordés pour financer le passage à la télévision numérique de terre.
Ainsi, la paupérisation de la télévision publique, prélude à sa privatisation, a cessé et son financement public s'est sensiblement amélioré. (Exclamations sur les travées du RPR.)
Il faut poursuivre et amplifier cet effort. Le service public de l'audiovisuel fort que nous appelons de nos voeux a besoin d'un financement stable, assuré et en expansion.
Ces moyens supplémentaires que vous avez obtenus sont principalement destinés à l'amélioration des programmes et au financement des nouvelles chaînes numériques. Ainsi en ont décidé les récents contrats d'objectifs et de moyens de France Télévision.
Conformément à la volonté du législateur, vous avez exigé également que la conquête d'une large audience par France Télévision comme par Radio France s'effectue dans le respect de leurs missions de service public, à savoir une information pluraliste et exigeante,...
M. Roger Karoutchi. On l'attend !
M. Henri Weber. Des fictions de qualité, des magazines et documentaires diffusés à des heures de grande écoute, des divertissements qui ne tirent pas le téléspectateur vers le bas.
Le pôle public de l'audiovisuel doit pouvoir équilibrer le pôle commercial privé sans tomber dans la « télévision de caniveau ».
M. Roger Karoutchi. Pitié !
M. Henri Weber. L'Etat actionnaire et la représentation nationale doivent veiller à ce que les engagements soient tenus.
Votre volonté d'émanciper les chaînes publiques de la « dictature de l'audimat » s'est traduite par la substitution d'un « baromètre de qualité et de satisfaction des téléspectateurs » à la traditionnelle mesure quantitative de l'audience exigée par les annonceurs.
Le succès de Radio France, qui recueille une forte audience tout en atteignant un bon niveau de qualité, montre que c'est en faisant « entendre sa différence » que le service public peut gagner en rayonnement.
Vous avez voulu aussi que l'audiovisuel public joue un rôle moteur dans le passage à la télévision numérique de terre, la TNT.
Sur cette question, je note que la majorité sénatoriale, qui bouillait d'impatience, il y a trois ans, de nous voir démarrer, se montre aujourd'hui en proie au doute et même, pour beaucoup, à un noir pessimisme, qui débouche sur un refus plus ou moins assumé.
Le passage à la TNT mettra pourtant enfin un terme à cette autre « anomalie française » qu'est la pénurie de chaînes dont souffrent 75 % de nos concitoyens. Dans ce chantier décisif de la télévision de demain, votre ministère ne s'est jamais départi, n'en déplaise à la majorité sénatoriale, d'une attitude ferme et pragmatique : ferme vis-à-vis des intérêts particuliers qui militent pour le maintien du statu quo, c'est-à-dire une réception de cinq chaînes seulement pour les trois quarts de la population ; pragmatique, car il s'agit d'un saut dans l'inconnu qui met en relation de nombreux acteurs et qui appelle la concertation.
De nombreux opérateurs privés, les fameux « nouveaux entrants », ont répondu à l'appel à candidatures lancé par le CSA et ont déposé des projets de chaînes, dont une quinzaine de projets de chaînes gratuites. C'est un démenti cinglant à ceux qui présentent le passage à la TNT comme une chimère qui ne tenterait que peu d'entrepreneurs.
Parmi les trois chaînes nouvelles présentées par France Télévision, il y a la chaîne régionale stucturée en huit stations. C'est une première réponse à la carence en télevision de proximité dont souffre notre pays. Il faudrait en plus - et, sur ce point, notre collègue Belot a raison - faire une place aux télévisions locales, financées en partie par les secteurs aujourd'hui interdits à la publicité, ainsi qu'aux télévisions associatives, financées par un fonds d'aide spécifique, comme le furent autrefois les radios associatives. Je sais, madame le ministre, que vous allez déposer prochainement sur ces questions un rapport qui servira de base à des réformes concrètes.
S'agissant de la question cruciale de la distribution des chaînes numériques hertziennes payantes, nous saurons bientôt si la désignation d'un distributeur unique, qui apparaît en effet comme la solution économiquement la plus souhaitable, est comptatible avec notre droit de la concurrence, et à quelles conditions. Que ferons-nous toutefois, madame la ministre, si les réponses apportées par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou par les autorités de Bruxelles sont négatives ?
Le passage à la télévision numérique de terre est une bonne nouvelle, enfin, pour les entreprises de production de programmes audiovisuels. L'arrivée de Hachette, de Pathé, de Bolloré, d'AB Productions, de NRJ, mais aussi, à terme, de certains grands quotidiens régionaux et des télévisions citoyennes, va desserrer l'oligopole que constituent les quatre opérateurs historiques existants et élargir le marché.
Les PME de l'audiovisuel ont bénéficié dans une certaine mesure - insuffisante selon leurs syndicats, mais il sont dans leur rôle... - des moyens nouveaux alloués depuis 1998 par le budget de l'Etat. Elles ont bénéficié aussi de l'augmentation des recettes résultant des quotas de production et de la croissance des chiffres d'affaires des chaînes publiques et privées.
Les taux des obligations d'investissement dans la production audiovisuelle ont été augmentés. Une meilleure fluidité des droits a été négociée, favorisant l'émergence d'un véritable second marché.
Tout cela vise à instaurer des rapports contractuels mieux équilibrés entre diffuseurs et producteurs et à favoriser le développement d'une industrie dynamique des programmes.
Le passage à la télévision numérique de terre, enfin, crée des conditions favorables à la modernisation et à la rationalisation des entreprises publiques de l'audiovisuel. La création de la holding France Télévision, si décriée à l'origine, s'est avérée excellente à l'usage, de même que l'extension du mandat de son président à cinq ans et la mise en oeuvre des « contrats d'objectifs et de moyens ».
Ce processus de rénovation et de rationalisation doit être pousuivi au cours de la prochaine législature. La transparence des comptes doit être assurée. La garantie que l'argent public est bien employé doit être apportée : c'est la contrepartie de l'effort accru de financement déjà consenti et la condition des efforts nouveaux qu'il nous faudra accomplir.
Nous sommes conscients, madame la ministre, du chemin qu'il nous reste à parcourir pour doter notre pays d'un audiovisuel public à la hauteur de ses besoins et de son ambition. Mais nous sommes conscients aussi du chemin considérable parcouru dans ce sens au cours de cette législature. C'est donc bien volontiers et avec fierté que nous voterons votre bon budget. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Nelly Olin. C'est un scoop !
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Madame la ministre, autant le dire clairement et d'emblée, ce budget est un bon budget. (Exclamations amusées sur les travées du RPR.)
D'ailleurs, alors que l'examen du budget est, cette année, l'occasion pour la mauvaise foi politicienne de la droite sénatoriale de se déchaîner,...
Mme Nelly Olin. Je vous en prie, élevez le débat !
Mme Danièle Pourtaud. ... la position de sagesse qu'a prise le rapporteur de la commission des affaires culturelles en est une preuve éclatante.
Mme Nelly Olin. Ce sont les orateurs socialistes qui font un concours de mauvaise foi !
Mme Danièle Pourtaud. Le budget de l'audiovisuel public pour 2002 enregistre une hausse de 3,4 % par rapport à 2001, soit un taux supérieur à celui de la progression générale du budget de l'Etat, qui s'élève à 2 %.
Puisqu'il s'agit du dernier budget de cette législature,...
M. Roger Karoutchi. Et de ce gouvernement !
Mme Danièle Pourtaud. ...je ne peux résister au plaisir de rappeler que, depuis 1997, les ressources publiques de l'audiovisuel ont augmenté de 35 % ; et je vais revenir un instant sur les choix qui ont marqué la politique du gouvernement de Lionel Jospin en la matière.
Vous savez, madame la ministre, nous avons restructuré le secteur public et nous l'avons restauré dans sa légitimité et ses moyens.
La limitation à huit minutes de publicité par heure est, bien sûr, un élément de confort du téléspectateur, mais surtout, elle libère le service public de l'emprise des annonceurs sur l'élaboration de la grille des programmes. Souvenons-nous des tunnels de publicité qui atteignaient parfois quinze minutes ! J'espère que les Français les ont encore en mémoire et ne souhaitent pas que cela recommence.
J'espère néanmoins que l'augmentation des écrans de parrainage, que nous n'avons pas limités dans la loi, ne viendra pas brouiller cette image. Vous connaissez, madame la ministre, mes interrogations sur ce sujet.
Je rappelle, un an après cette réforme, que la diminution de la publicité a été intégralement compensée sur le plan financier.
En outre, les moyens des chaînes publiques ont été augmentés, consolidés.
C'était l'inverse avec le dernier budget de M. Juppé qui obligeait France 2 à tirer 51 % de ses ressources de la publicité et du parrainage.
M. Roger Karoutchi. A l'époque, les programmes de France Télévision étaient encore regardés !
Mme Danièle Pourtaud. Eh oui, cher collègue, il y a des choses désagréables à entendre ! Pour 2002, en revanche, le financement public de l'ensemble des chaînes publiques est de l'ordre de 76,87 % ! Il est donc totalement faux, monsieur Karoutchi, de dire que rien ne change.
M. Roger Karoutchi. Quels sont les taux d'audience ? Plus on paie, moins on regarde !
Mme Danièle Pourtaud. Plus globalement, les ressources publiques pour l'ensemble des entreprises de l'audiovisuel, qui sont constituées de la redevance et du remboursement des exonérations que vous avez enfin obtenu de Bercy, madame la ministre, n'en déplaise à M. Belot, sont ainsi passées de 12,1 milliards de francs en 1997 à 16,3 milliards de francs pour 2002.
La compensation de la diminution de la publicité, d'une part, et la consolidation du financement public, d'autre part, doivent permettre au service public audiovisuel rassemblé au sein de la holding France Télévision de se renforcer pour accomplir ses missions. Je rappelle les trois principales, à mes yeux.
Premièrement, rassembler et créer du lien social dans une société de plus en plus éclatée. Le service public doit être principalement généraliste et s'adresser à tous les publics. C'est la mission de France 2 et de France 3, mâtinée d'une thématique régionale.
Deuxièmement, informer et offrir un espace au débat démocratique.
Troisièmement, enfin, garantir la démocratisation de l'accès à la culture, le soutien à nos industries culturelles et aux évolutions industrielles du secteur.
J'en viens maintenant au deuxième grand chantier que vous avez su ouvrir, madame la ministre, chantier dont la réussite est le défi majeur pour le paysage audiovisuel français des prochaines années, la télévision numérique terrestre.
Aujourd'hui, 75 % des Français ne reçoivent que six chaînes hertziennes, et la télévision numérique terrestre permettra, à terme, à nos concitoyens d'en recevoir trente-trois, dont la moitié sera gratuite.
Depuis quelques mois, des inquiétudes plus ou moins légitimes et des polémiques se sont développées sur ce sujet.
Je les évoquerai rapidement pour tenter d'y mettre un terme. Je dirai ensuite quelques mots de la chance de développement que constitue le numérique terrestre pour les télévisions locales.
A propos du calendrier de lancement de la télévision numérique terrestre, des doutes ont été émis encore ce matin sur la volonté du Gouvernement de s'y tenir. Je crois, madame la ministre, que vous pourrez nous rassurer sur ce sujet.
Mme Nelly Olin. Pas de problème ! (Sourires.)
Mme Danièle Pourtaud. S'agissant ensuite de la faisabilité économique du projet, d'autres inquiétudes ont été formulées quant à la montée en charge de l'équipement des ménages. L'offre que représente le numérique terrestre doit être attractive pour déclencher chez nos concitoyens l'envie de s'équiper massivement, car nous savons bien que le coût des équipements sera fonction de la rapidité avec laquelle les téléviseurs numériques entreront dans les foyers.
Personnellement, je crois en l'attractivité des programmes gratuits et je plaide pour un démarrage rapide des trois chaînes publiques supplémentaires. Mais sur le reste des offres gratuites, on ne peut ignorer les difficultés de ressources rencontrées étant donné les aléas du marché publicitaire.
C'est pourquoi il est probable que les opérateurs de chaînes payantes auront également un rôle majeur à remplir pour inciter les Français à s'équiper. Des chaînes payantes de qualité existent en France ; c'est également pour elles une occasion de développer leur audience.
Le problème du distributeur est au coeur des polémiques actuelles. Faut-il un distributeur unique ou un consortium ? Je me contenterai de rappeler les principes qui doivent guider notre réflexion sur le sujet.
Pour nous, l'objectif de la télévision numérique terrestre est d'accroître et de diversifier l'offre. Pour atteindre cet objectif, nous sommes persuadés qu'il faut décartéliser le paysage audiovisuel français. Quelle que soit la formule choisie, il est nécessaire que de nouveaux éditeurs de programmes puissent trouver leur place, et je pense en particulier - mais pas uniquement - aux programmes locaux et aux programmes associatifs.
Donc, pour moi, un consortium serait sans doute un meilleur garant de l'égalité d'accès des éditeurs aux téléspectateurs. En tout cas, le cahier des charges du distributeur devra très clairement fixer l'obligation de pluralisme et d'égalité de traitement. L'étude que le ministère de l'économie et vous-même avez demandée aux services de la concurrence nous éclairera sans doute sur ce sujet.
Enfin, la télévision numérique terrestre doit permettre de combler notre retard en matière de télévision locale, alors que, nous le savons bien, la demande d'informations de proximité et de services est considérable.
Le développement des télévisions locales publiques et privées est souhaitable, mais se heurte à deux difficultés. Les télévisions privées locales ne pourront probablement pas réunir les budgets nécessaires sans une ouverture de la publicité au secteur de la grande distribution. Mais cette ouverture devra se faire de manière ciblée et progressive pour ne pas déstabiliser les radios généralistes, déjà affaiblies, et la presse quotidienne régionale.
Par ailleurs, le problème de la concentration multimédia devra être étudié attentivement, bassin d'audience par bassin d'audience. De ce point de vue, je ne suis pas certaine que nos règles soient parfaites.
Il est également important de garantir la présence du secteur public et du secteur associatif. Il faut, d'une part, renforcer le développement régional et local de France 3. Il est, d'autre part, souhaitable que les télévisions associatives puissent occuper une part significative des fréquences au niveau local. Dans la loi du 1er août 2000, nous leur avons garanti une existence pérenne.
Mais, pour qu'elles puissent durer, il faut leur donner les moyens d'exister. C'est pourquoi je suis convaincue, cela ne vous surprendra pas, madame la ministre, de la nécessité de créer un fonds de soutien, comme il en existe un pour les radios associatives.
Sur les perspectives de développement des télévisions associatives et, en particulier, sur leur financement, la loi du 1er août 2000 prévoyait qu'à l'été 2001 le Gouvernement devrait rendre un rapport au Parlement pour ouvrir sur cette question le débat qui s'impose. Peut-être pourrez-vous, madame la ministre, nous dire où en est ce rapport.
Faute de temps, je m'en tiendrai là.
Pour conclure, je voudrais revenir sur des sujets d'actualité.
Télé-poubelle, télé-réalité, confiscation par surenchères folles sur les droits sportifs : je serais tentée de profiter de cette tribune pour faire appel à la responsabilité des opérateurs privés de notre paysage audiovisuel français. On entend trop souvent : « Ce n'est pas nous qui avons commencé... » ou encore : « Si nous ne suivons pas, nos parts de marché déclineront... ».
S'il fallait une seule justification, voilà ce que doit être le service public : un môle de responsabilité, de dignité, un espace civique de liberté de création et d'indépendance d'esprit, dont toutes les démocraties ont besoin.
Mais ce rôle suppose qu'il reste durablement une référence en termes d'audience aussi. Or c'est nous, les parlementaires, et vous, madame la ministre, qui pouvons lui en donner les moyens. C'est l'ambition que nous continuerons à soutenir en cette période où tous les regards se tournent vers les échéances électorales.
C'est pourquoi le groupe socialiste salue vos efforts en faveur du redressement du service public en France et de ce grand projet que constitue la télévision numérique terrestre pour le paysage audiovisuel français. Il vous soutiendra pour que le service public obtienne les moyens nécessaires à son développement sur le numérique de terre. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite. Puisque mon collègue du groupe communiste républicain et citoyen qui devait intervenir est empêché, c'est moi qui vais maintenant m'exprimer sur le sujet qui nous réunit.
Pour ma part, je souligne d'emblée que nous sommes confrontés à la structuration d'un secteur clé de l'économie du xxie siècle qui a pour objet la gestion des représentations de l'information et de l'imaginaire. En vérité, comme le disait dans d'autres enceintes Mme la ministre, nous sommes confrontés à la question de savoir qui gérera, au sens artistique du terme, le socle même de la vie humaine.
Actuellement, nous avons un secteur public - ses problèmes viennent d'être évoqués - et un secteur privé. Et, pour être très précis, il faut, à mon avis, évoquer, transversalement à ces deux secteurs, les grands groupes transnationaux qui se sont créés depuis deux ans, le groupe AOL Time Warner et, pour rester en France, le groupe Vivendi Universal.
Je suis toujours un peu surpris de n'entendre dans les débats sur l'audiovisuel aucune allusion à ces groupes. Pourtant, Vivendi, c'est la liaison d'une dizaine de millions d'abonnés et de centaines de milliers de droits sur les oeuvres. C'est un immense ensemble qui coiffe la totalité de l'audiovisuel, avec les films Universal, avec la musique Universal. Ce groupe procède d'ailleurs actuellement à des prises de responsabilité dont certaines ont une allure un peu décorative - je pense au festival d'Aix-en-Provence. D'autres opérations, il est vrai, sont plus stratégiques, comme l'achat du music-hall l'Olympia ou à la prise de participation au capital d'UGC.
De quelque côté que l'on trousse la question, on rencontre donc ces grands groupes. Certes, il ne s'agit pas de partir en disant : « C'est tout mauvais », mais autant j'ai été contre le tout-Etat, autant j'ai crainte maintenant d'un tout-privé.
La notion de responsabilité publique, nationale, européenne et internationale, renvoie donc à une grande question d'actualité, la question des oeuvres.
Le Centre national du cinéma, par décision administrative, et le CSA, par délibération, avec trois voix contre, viennent de décider de transformer une émission Popstars , en « oeuvre », c'est-à-dire de lui ouvrir l'accès au fonds de soutien, de lui offrir la possibilité d'être comptabilisée dans les quotas. En somme, c'est ébrécher, réduire ce qui a fait que la France, en se battant, a obtenu la directive « Télévision sans frontière », qui a précisément garanti des quotas d'oeuvres.
Vraiment, je suis gêné, comme l'année dernière au moment des cartes d'abonnement UGC, que le CNC et le CSA décident qu'une oeuvre, c'est autre chose qu'une oeuvre telle qu'elle était entendue jusqu'à présent. Délibérons sur cette question puisque certains la posent ! Mais trancher ainsi à l'avance, c'est préoccupant.
Ainsi, à côté de la « couverture » dominante par ces grands groupes dont j'ai parlé, je vois apparaître une sorte de « mitage » qui contrarie les initiatives et les options politiques de ce gouvernement, notamment de Mme la ministre de la culture dans le domaine audiovisuel. Voilà ce que je voulais dire pour le moment. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - Mme Pourtaud applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de finances pour 2002, dernière année de la législature, confirme, à la fois pour l'audiovisuel public et pour la presse, l'importance que le Gouvernement accorde à ce secteur.
Monsieur Karoutchi, ce ne sont pas les budgets de 1995 à 1997 qui ont préparé l'avenir de l'audiovisuel !
Mme Danièle Pourtaud. Exactement !
Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication. Ils l'ont, au contraire, handicapé. On comprend mieux aujourd'hui, monsieur Karoutchi, que vous privilégiiez - sans tabou, dites-vous - une option pour la réduction du périmètre, et pourquoi pas la privatisation partielle.
M. Roger Karoutchi. C'est vous qui le dites, je n'ai pas dit cela !
Mme Danièle Pourtaud. Mais si, vous l'avez dit !
Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication. Heureusement, il me semble qu'un tel choix n'est pas celui de toute la majorité sénatoriale.
Je commencerai par le budget de l'audiovisuel public. Le projet de budget pour 2002 conclut un parcours de cinq années qui a permis de renforcer de manière déterminante les moyens du service public.
Son budget aura en effet augmenté de plus de 35 % en cinq ans, bénéficiant ainsi de 4,3 milliards de francs supplémentaires, soit 655 millions d'euros.
Ces moyens ont rendu possibles, d'une part, la diminution des ressources publicitaires - elles représentent aujourd'hui environ le quart du budget de l'audiovisuel - d'autre part, et surtout, le renforcement des moyens consacrés aux programmes. Ils permettent, au total, une stratégie offensive et identifiée du service public.
Après deux années de hausses particulièrement importantes - 4,8 % en 2000 et 6,1 % en 2001 - notre projet est donc fondé sur une base fortement revalorisée, et le projet de budget pour 2002, en progression de 3,2 %, consolide ces évolutions.
Les ressources publiques augmentent, quant à elles, de 3,4 % - cette évolution se traduit par une légère revalorisation de la redevance, qui devrait augmenter en 2002 de 1,76 %, après deux années de stabilité.
Les entreprises publiques disposeront ainsi de 2,49 milliards d'euros de deniers publics, pour un budget total qui s'élèvera à 3,24 milliards d'euros.
Je tiens, bien sûr, à répondre sur la redevance. Comme MM. les rapporteurs, je souhaite son maintien, et je les remercie d'avoir souligné l'importance de cette ressource.
Répondant à M. de Broissia, je veux rassurer ceux qui auraient pu être troublés en lisant que les choix du Gouvernement pourraient conduire à fixer la redevance à 1 000 francs à l'horizon 2005. Une double confusion a été commise. D'abord, parce que c'est le Parlement qui fixe et fixera ce montant. Ensuite, parce que la progression spontanée de l'assiette, liée au parc de téléviseurs permettra une augmentation beaucoup plus modérée du taux de la redevance. Le montant prévisible en 2005 sera donc très en deçà de celui qui a été avancé dans la presse.
La question du remboursement des exonérations est bien évidemment liée à celle de la redevance. M. Belot a évoqué l'ajustement qui vient d'être décidé pour 2001. Nous le savons tous, l'évaluation de la portée des diverses exonérations se fait forcément avec une marge d'erreur qui n'est pas, en soi, critiquable. L'ajustement budgétaire récemment décidé par le ministre de l'économie et des finances n'a pas d'autre signification que cet ajustement entre évaluation et réalisation constatée. Bien entendu, cela ne remet pas en cause le principe des excédents conservés par l'audiovisuel public.
Les 80,7 millions d'euros supplémentaires proposés pour le secteur permettront aux entreprises de renforcer les deux axes majeurs que nous avons fixés avec elles : les programmes, d'une part, et la modernisation du fonctionnement des structures, d'autre part. Ainsi, monsieur de Broissia, il ne s'agit pas d'un budget de fin de parcours, mais bien, grâce à ce gouvernement, d'une vraie perspective pluriannuelle, qui ne fera évidemment pas l'économie du débat budgétaire annuel au Parlement.
J'en viens au budget des différentes sociétés.
Le budget de France Télévision augmente de 3,1 %, soit 57,46 millions d'euros, dont 32,8 millions d'euros seront affectés aux programmes. Le financement des nouvelles chaînes du numérique terrestre sera assuré par la première tranche - 350 millions de francs - de la dotation en capital de 1 milliard de francs que le Premier ministre, Lionel Jospin, a décidé d'attribuer au groupe public pour lui permettre de réaliser le lancement et le développement de ce projet. Il faut en effet assurer la mise en place de ces chaînes d'ici à la fin de l'année 2002, pour une diffusion qui commencera, comme pour l'ensemble des chaînes candidate à la TNT, à la fin de 2002 ou au début de 2003.
S'agissant d'Arte France, une progression de 3,4 % du budget est proposée, ce qui représente un supplément de 5,48 millions d'euros, dont 3,49 millions seront consacrés aux programmes. La préparation de la grille de journée, destinée, à terme, au numérique terrestre, est l'une des priorités de ce budget.
Les moyens de RFO progresseront de 3,16 %, et ceux de RFI de 4,8 %. Ces augmentations seront consacrées essentiellement à la modernisation de l'organisation du travail dans ces deux entreprises.
Par ailleurs, le budget de Radio France augmente de 3,9 %, ce qui permettra la poursuite des trois chantiers stratégiques majeurs que sont le plan Bleu, la numérisation de la production et la modernisation de l'organisation du travail.
Puisque vous avez évoqué RFI, je veux dire quelques mots de l'audiovisuel extérieur, qui préoccupe à juste titre les rapporteurs et M. Weber. Je ne parlerai pas de TV 5 aujourd'hui puisque son financement est assuré sur les crédits du ministère des affaires étrangères.
S'agissant de RFI, je crois, comme vous, que son rôle est essentiel sur le plan de l'information, l'actualité nous le rappelle avec force.
Nos entreprises de l'audiovisuel extérieur ont aussi une mission capitale dans l'expression de notre culture à l'étranger. Je m'inscris donc dans une perspective de participation active de la redevance au financement de RFI, qui n'a, à aucun moment, été traitée comme une entreprise secondaire et qui ne le sera pas davantage dans son contrat d'objectifs.
Quant à l'INA, son budget s'inscrit d'ores et déjà dans le contrat d'objectifs et de moyens signé avec l'Etat en avril 2000. Autour d'un axe stratégique prioritaire consacré à la numérisation des archives, le budget de l'INA progresse de 0,6 %, pour une augmentation des ressources publiques de 7,7 %.
Comme le montre l'exemple de l'INA, c'est dans une démarche d'avenir, renouvelant radicalement la nature des relations entre l'Etat actionnaire et les entreprises publiques, que s'inscrit ce projet de budget pour 2002. Il constitue en effet la première marche budgétaire de l'édifice pluriannuel que constituent les contrats d'objectifs et de moyens.
Il s'agit, de manière très novatrice pour le secteur audiovisuel, de définir les orientations stratégiques de chacune des entreprises pour une durée de quatre ou cinq ans. Il s'agit aussi d'associer à ces objectifs des indicateurs précis qui permettront aux ministères de tutelle et au Parlement de suivre les résultats obtenus, selon une méthode plus dynamique que l'exercice de la tutelle classique. Ces indicateurs permettront également de donner aux entreprises et à leurs équipes dirigeantes, en contrepartie de cet effort de transparence et de projection dans l'avenir, une visibilité plus grande sur les moyens financiers dont elles pourront bénéficier.
Je crois utile de rappeler la teneur des décisions prises par le Gouvernement pour France Télévision. Bien entendu, ces décisions devront être validées année après année par le Parlement.
A partir de 2003, l'entreprise pourra bénéficier, en sus d'une part fixe de progression de la ressource publique de 3,1 %, d'une part variable allant de 0,4 % à 0,6 % qui sera attribuée en fonction des résultats obtenus par l'entreprise au regard de ses objectifs. La progression des ressources publiques sera de 3,5 à 3,7 % par an. Cette progression régulière et importante permettra à France Télévision d'organiser sereinement son développement et de s'inscrire pleinement dans une véritable démarche stratégique d'entreprise.
Elle devra s'y consacrer avec un double souci lié à la spécificité du service public.
Le premier est un souci éditorial. Les engagements que prend le groupe visent à rendre plus lisible la spécificité du service public, qui doit rester attaché à la diversité de son offre à toutes les heures de programmation, ainsi qu'au rôle particulier qu'il joue en faveur de la création audiovisuelle.
Je saisis l'occasion de l'arrivée du terme « création » dans notre débat pour dire à M. Ralite que rien, à ce jour, n'est tranché en ce qui concerne la définition de l'offre. Tout comme lui, je suis préoccupée de l'élargissement de l'approche de la définition. Je lui indique que nous aurons à travailler ensemble, CSA, CNC et professionnels de la création, sur les éventuels ajustements de nos définitions.
Il convient, en second lieu, de souligner le souci gestionnaire. La rigueur et le dynamisme de sa gestion devront permettre à France Télécom de contribuer, avec le soutien de son actionnaire, au financement des investissements indispensables à son développement, notamment pour les nouvelles chaînes numériques.
C'est à la lumière de ce double objectif, éditorial et gestionnaire, que je veux répondre à vos questions à la fois sur les droits sportifs et sur le financement pérenne du secteur public.
En ce qui concerne les droits sportifs, sur lesquels M. de Broissia m'a longuement interrogée, à juste titre, compte tenu de la vivacité du débat qui s'est déroulé dans la presse ces derniers jours, je tiens à dire que l'annonce de l'achat des droits de la Coupe du monde par TF 1 ne m'a inspiré ni colère ni indignation, encore moins détestation, comme en attestent d'ailleurs l'intégralité de mes propos enregistrés par France Info. J'ai seulement, simplement et calmement, exprimé une préoccupation que je crois sérieuse.
L'accord signé marque en effet une étape nouvelle dans les relations entre le sport et la télévision. Il consacre d'abord une inflation des prix dangereuse pour l'équilibre global de l'activité audiovisuelle. C'est la première fois en effet qu'une Coupe du monde de football fait l'objet d'un tel accord de retransmission.
Je n'ai mis en cause aucun diffuseur et surtout pas celui qui, au fond, a joué sa carte sur le marché.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Heureusement !
Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication. Je veux encore moins opposer secteur privé et secteur public. J'estime cependant que cette relation exclusive pose réellement un problème tant au monde des médias qu'au monde du sport.
Jusqu'à ce jour, s'agissant du football, dont l'importance populaire n'est contestée par personne, une concertation entre opérateurs était de mise et avait contribué à freiner les surenchères.
M. Michel Pelchat. Il fallait mieux l'organiser !
Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication. J'ai donc exprimé ma préoccupation.
Il est est légitime que le Gouvernement s'interroge sur l'évolution des grands équilibres de l'offre audiovisuelle. Ce qui est en cause, c'est donc non pas le principe de l'exclusivité sur certains programmes dont nous savons qu'elle se pratique dans divers genres, mais bien les conditions dans lesquelles cette exclusivité s'exerce sur ce type de programmes et, surtout, les conditions financières dans lesquelles elle s'acquiert. Ce sont ces conditions financières qui, de fait, interdiront à de nombreuses chaînes privées ou publiques, partout dans le monde, de se porter acquéreurs de tout ou partie des droits pour de tels événements.
Pour ce qui concerne France Télévision, son contrat d'objectifs et de moyens prend, en matière de programmes sportifs, un engagement de diversité qui doit faire partie de l'identité du service public.
Ma préoccupation de l'évolution des équilibres économiques du secteur audiovisuel conduit évidemment le Gouvernement à réfléchir sur l'évolution du financement global du service public. La nécessité que j'ai exprimée tout à l'heure de maintenir la redevance se double de la nécessité, non moins impérieuse, de définir pour l'avenir d'autres ressources dynamiques, complémentaires.
Quant aux ressources propres de France Télévision, nous avons limité le recours à la publicité en volume horaire et non en volume financier. C'était, je crois, la seule méthode pertinente.
Pour les ressources de parrainage, le choix a été fait de ne pas fixer de limites. Ces recettes s'avèrent, elles aussi, très dynamiques et très fluctuantes.
Vous craignez, madame Pourtaud, une dérive, et je suis sensible à votre préoccupation. Je crois pourtant que rien de tel ne peut se lire encore dans les chiffres : ce type de recettes est en réalité aussi lié à des événements exceptionnels qui entraînent des rentrées, elles aussi, très fortes. Ce fut le cas en 2000 comme en 1998. Mais, en 2001, les recettes de parrainage n'ont augmenté que de 7 % par rapport à l'année précédente.
ll faut, en tout état de cause, être vigilant. Je vous signale à ce titre qu'en fin de contrat, la ressource publique continuera de représenter environ 75 % du budget de France Télévision.
J'en viens à un dossier qui a beaucoup animé les débats dans votre assemblée et à l'Assemblée nationale, celui de la TNT. Ce projet ambitieux qui a des composantes multiples - techniques, entrepreneuriales, économiques et programmatiques - ouvre de vraies perspectives de développement pour tout le secteur et répond aux attentes des Français. Il inquiète aussi parfois, mais sur la base d'idées reçues ou d'informations tronquées.
Je tiens à apaiser plusieurs de ces inquiétudes.
La première interrogation concerne l'équilibre entre les chaînes historiques et les futurs nouveaux entrants.
Nous devons intégrer les apports des nouveaux opérateurs qui le souhaitent, car il n'est pas envisageable de réserver aux seuls opérateurs historiques l'organisation et le déploiement de la TNT. Si nous avions fait ce choix, je pense que nous aurions perdu une réelle occasion de diversifier l'offre.
Si les acteurs historiques, publics ou privés, ont un rôle majeur à jouer, nous avons fait aussi le choix de la diversité avec de nouveaux acteurs et au profit de nouveaux formats. Je pense, en particulier, aux chaînes régionales et locales et aux télévisions associatives.
La loi du 1er août 2000 fixe les principes qui permettent cette ouverture. Je sais que le Conseil supérieur de l'audiovisuel est lui aussi attentif à ce partage et le sera dans l'attribution des fréquences.
Depuis lors, et pour concrétiser ces orientations, le gouvernement de Lionel Jospin a fait preuve de pragmatisme et de réalisme économique en s'appuyant sur les études qui avaient été réalisées, en écoutant les remarques des opérateurs candidats et en ajustant sur cette base le cadre réglementaire nécessaire à la construction, pas à pas, de cet édifice nouveau.
Autres questions, autre inquiétudes ! Vos rapporteurs se sont ainsi fait l'écho du prix prévisionnel - sans doute 1 000 francs - des décodeurs.
M. Michel Pelchat. Plutôt 1 500 francs !
Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication. Certains pensent que cette estimation serait sous-évaluée, mais on parle maintenant, en Grande-Bretagne précisément, d'un décodeur à environ 600 francs.
D'autres, enfin, posent la question de la distribution. Nous avons justement entrepris d'en débattre dans le cadre du droit de la concurrence et sur la base d'une analyse demandée à la DGCCRF, le CSA ayant, pour sa part, commandé une étude sur le même sujet.
Monsieur Weber, si l'hypothèse d'un distributeur unique devait être écartée, il reviendrait aux opérateurs de trouver la structure juridique correspondant à leur propos commercial et à la nécessité de ne pas aller, bien sûr, vers une situation qui aurait été reconnue comme portant en germe une position de monopole.
M. Louis de Broissia tout comme Mme Pourtaud ont évoqué l'idée d'un consortium. C'est un choix qui appartiendra aux opérateurs, encore une fois, en fonction des données des règles de la concurrence.
Au total, malgré la complexité des divers éléments, ce chantier de la TNT me paraît désormais bien engagé. Nous nous sommes mis, aussi bien du côté du Gouvernement que de celui du CSA, en capacité de tenir les délais prévus.
Le cadre réglementaire sera examiné dès la semaine prochaine par le Conseil d'Etat.
Vous vous préoccupez aussi de la couverture, parce que c'est là, bien sûr, que nos concitoyens verront la réalité de cette offre nouvelle.
L'appel à candidature lancé par le CSA permet, dans un premier temps et dès le lancement de la TNT, de couvrir 50 % de la population. La couverture se fera ensuite progressivement pour atteindre 80 % de la population dans les trois ans. Les modes de diffusion alternatifs - le satellite notamment - gardent donc, pour certaines zones, toute leur utilité.
Quant à la date de fermeture des fréquences analogiques - problème soulevé par M. de Broissia - la question sera débattue au Parlement, comme la loi l'a prévu, à la fin de l'année 2003, au vu des progrès alors réalisés.
Je sais tout de même que les opérateurs qui travaillent sur ce dossier évoquent l'hypothèse d'une échéance de sept à dix ans, mais ce n'est qu'une hypothèse pour le moment.
Quant au développement de la télévision de proximité, la direction du développement des médias me remettra, avant la fin de l'année, un rapport qui fera, comme l'a prévu la loi du 1er août 2000, l'objet d'un débat au Parlement. Nous pourrons ainsi apporter des réponses concrètes aux questions que se posent les candidats à une autorisation.
Nous aurons donc de nouvelles occasions de débattre des questions audiovisuelles, fondamentales à mes yeux, puisque, au-delà du projet de budget pour 2002, elles engagent une part très importante de notre vie quotidienne et de la vie culturelle de notre pays.
J'en viens au second volet du budget de la communication, celui des aides à la presse.
Nos débats pouvant donner le sentiment que nous l'oublions un peu, je rappelle en préambule qu'il s'agit - et c'est heureux - d'entreprises privées, auquelles l'Etat ne saurait se substituer. Il lui incombe, en revanche, de les soutenir dans l'intérêt de la liberté et du pluralisme.
Les moyens publics que le Gouvernement destine à la presse écrite avoisineront, en 2002, les 68 millions d'euros, soit 450 millions de francs, ce qui représente une croissance de 7,2 % par rapport à 2001, et d'environ 80 % par rapport à 1997.
Le Parlement devrait reconduire le mécanisme de l'article 39 bis du code général des impôts pour cinq ans.
Le budget des aides à la presse est, en 2002, marqué par la création d'une nouvelle aide. Le fonds de modernisation créé en 1998, sur l'initiative de Jean-Marie Le Guen, a permis déjà de distribuer près de 500 millions de francs et contribue de manière décisive et reconnue par tous à la modernisation de l'outil industriel ainsi qu'à l'amélioration du contenu rédactionnel des titres concernés.
Je veux vous rassurer, monsieur Belot, pour 2001, les subventions non utilisées sont de 50 millions de francs. Cela tient au report du comité de décembre demandé par la presse elle-même. Quant au solde des avances, j'ai bien noté que votre commission ne souhaite pas qu'il soit utilisé à autre chose que des aides aux projets de modernisation, ce qui est fidèle à la création de ce fonds.
La distribution de la presse est, bien évidemment, une clef essentielle.
La création d'une aide à la distribution des quotidiens nationaux d'information politique et générale vous est proposée en 2002. Le principe et les modalités de cette aide ont fait l'objet d'une très large concertation au sein de la profession réunie en table ronde, ainsi que de discussions avec le Gouvernement.
Sa mise en place vise à accompagner la modernisation du système de distribution groupée et renforcer le système coopératif conformément aux principes issus de la loi Bichet, à la lecture des conditions économiques d'aujourd'hui. Les perspectives d'évolution tracées par M. Belot sont d'ailleurs à l'examen de la table ronde.
L'opérateur Hachette, la direction des Nouvelles messageries de la presse parisienne, les NMPP, et les éditeurs sont engagés, aux côtés de l'Etat, dans ce remodelage du système de la distribution. L'Etat apportera donc une aide directe pour une durée de trois ans, de 2002-2004, durée du plan de modernisation.
Dès 2002, nous mobiliserons, pour financer cette aide, 12,2 millions d'euros, soit environ 80 millions de francs, par la ressource budgétaire, mais aussi grâce au dynamisme dont témoigne désormais la perception de la taxe instaurée en 1997.
Autre modification, qui concerne cette fois le premier guichet, le Gouvernement a repris la proposition issue de l'Assemblée nationale et a accepté que la répartition entre avances et subventions soit modifiée au bénéfice des subventions, qui désormais représenteront 80 % de l'ensemble des sommes disponibles.
Cette mesure répond à vos préoccupations, monsieur le rapporteur, et prend en compte le contexte économique actuel plus difficile de la presse.
Vous avez à juste titre remarqué le choix opéré par le Gouvernement depuis 1997 de redéployer l'effort public vers la presse d'information politique et générale. Parce que informer, c'est s'adresser au citoyen, nourrir sa capacité de jugement, diversifier ses sources d'information ; parce que informer, c'est développer le débat démocratique, le Gouvernement a fait ce choix et il l'assume.
Je mettrai l'accent également sur l'aide à la distribution des quotidiens nationaux, l'aide au portage, qui a augmenté de plus de 250 % entre 1997 et 2002 et qui concerne principalement la presse en région, qui bénéficiera en 2002 d'une dotation budgétaire de 13,72 millions d'euros, soit 90 millions de francs. Cette dernière a fait l'objet - je le précise, car vous vous interrogiez à ce propos - d'une convention annuelle avec la SNCF. Dans la convention 2001, il est prévu de réaliser un audit reconnu nécessaire.
Si l'on ajoute à toutes ces mesures l'aide postale à hauteur de 290 millions d'euros, soit 1,9 milliard de francs, on peut parler d'une véritable politique de soutien à la presse et à son lectorat.
Vous vous êtes préoccupé également, monsieur le rapporteur, du fonds multimédia.
Depuis 1997, ce sont 8,03 millions d'euros, soit 52,7 millions de francs d'aides, qu'il a accordés.
Sur 2002, indépendamment des reports de crédits qui pourront lui être affectés, de l'ordre de 1,5 million d'euros, le remboursement des avances déjà consenties doit lui permettre de disposer de 1,2 million d'euros et, par conséquent, de fonctionner normalement sur cet exercice et de répondre aux besoins des éditeurs.
Enfin, je souligne, pour répondre à la préoccupation de Mme Pourtaud, qu'entre 1997 et 2002 le fonds d'aide aux quotidiens à faibles ressources publicitaires a progressé de plus de 93 %.
J'en arrive à un dossier très important, celui de l'AFP.
Je me réjouis que vous ayez pu, monsieur le rapporteur, constater le travail accompli par cette grande entreprise. Les abonnements de l'Etat à l'AFP représenteront 95,89 millions d'euros, soit 629 millions de francs, et une augmentation de 2,60 % par rapport à la loi de finances initiale 2001. Jeudi dernier, le conseil d'administration de l'agence a adopté son budget 2002, ce dont je me réjouis !
Dans le contexte économique devenu plus incertain du secteur des médias en France et dans le monde, ce budget sérieux permet de poursuivre le développement de l'agence, sans réduction d'emploi ou remise en cause d'activités existantes.
Pour sa part, dans le respect de l'indépendance de l'agence, l'Etat accompagne son développement et soutient, en particulier, ses développements sur le plan international.
Une vraie grande agence de presse a en effet absolument besoin de développer les volets de son activité internationale, à la fois pour son équilibre économique et sa crédibilité dans le monde.
A cet instant, je voudrais rendre hommage au travail de tous les journalistes de l'AFP et des autres médias qui se sont mobilisés d'une façon exemplaire sur les événements internationaux actuels, en particulier enAfghanistan, et cela au péril de leur vie, pour nombre d'entre eux, comme ce fut le cas pour Johanne Suton et pour Pierre Billaud.
Pour conclure, je veux souligner la démarche globale que traduit ce budget de la communication.
L'Etat, garant de la diversité et des équilibres qui la constituent, accompagne les investissements des sociétés publiques, définit et consolide le cadre dans lequel tous leurs efforts prennent une plus grande efficacité.
Cela supposait - et nous l'avons fait - de renforcer les moyens. Cela supposera encore, à l'avenir, d'accompagner sur le plan financier la modernisation du secteur, car c'est en définitive la condition du pluralisme. Je remercie M. Weber d'avoir souligné le chemin parcouru. C'est en effet le choix qu'a fait notre Gouvernement, comme notre majorité. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Nous allons maintenant examiner l'article 47 puis les lignes 38 et 39 de l'état E annexé à l'article 43.

Article 47