SEANCE DU 22 NOVEMBRE 2001


M. le président. La parole est à M. Joyandet. (Ah ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Alain Joyandet. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adressait à M. le Premier ministre.
Un sénateur du RPR. Il est absent !
M. Alain Joyandet. Des dizaines de milliers de policiers ont manifesté hier leur malaise et leur sentiment d'abandon.
M. René-Pierre Signé. Leurs femmes !
M. Alain Joyandet. Nos gendarmes se désespèrent aussi. Je voudrais leur adresser, à eux et à leur famille, qui paient un trop lourd tribut depuis le début de l'année, nos sentiments de totale solidarité et leur dire à quel point nous savons qu'ils assurent leur difficile mission avec dévouement et abnégation.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Alain Joyandet. L'année 2000 a été marquée par une hausse sans équivalent des crimes et délits - plus de 9,45 % - et ce jusque dans les plus petites communes, puisque la délinquance en zone rurale a augmenté de plus de 10 %.
Depuis quelques semaines, le Gouvernement fait beaucoup de déclarations. Mais une politique se juge en actions, en décisions, budgétaires notamment. Or les chiffres parlent : 33 milliards de francs pour la police nationale, 18 milliards de francs pour la gendarmerie et 30 milliards de francs pour la justice, soit, au total, à peine plus de 80 milliards de francs pour la sécurité.
M. René-Pierre Signé. C'est mieux que vous !
M. Jacques Mahéas. Il n'y a pas de comparaison !
M. Alain Joyandet. Parallèlement, pour 2002, vous consacrez plus de 100 milliards de francs aux 35 heures obligatoires. (Applaudissements sur les travées du RPR. - Protestations sur les travées socialistes.)
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Claude Estier. Les 35 heures, c'est votre obsession !
M. Alain Joyandet. Voilà vos choix politiques : 100 milliards de francs pour la réduction obligatoire du temps de travail, alors que les gendarmes n'ont jamais autant travaillé, et ce dans des conditions qui deviennent intolérables.
Dans le même temps, on apprend que ceux qui doivent assurer notre sécurité n'ont même pas un gilet pare-balles, chacun, et on sait que les emplois supplémentaires annoncés pour la police ne couvriront même pas les besoins pour faire face aux 35 heures.
Au-delà des moyens alloués, c'est votre approche permissive teintée d'angélisme...
M. Jean Chérioux. C'est surtout cela !
M. Alain Joyandet. ... qui a conduit à la situation que nous connaissons. A force de faire des délinquants des victimes de la société, de leur accorder par la loi plus de droits qu'aux victimes (Protestations sur les travées socialistes), Vous participez...
Un sénateur du RPR. Eh oui !
M. René-Pierre Signé. La question !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie. Veuillez poursuivre, monsieur Joyandet.
M. Alain Joyandet. Merci, monsieur le président. Je souhaiterais pouvoir aller jusqu'au terme des deux minutes trente qui me sont imparties.
Vous participez, disais-je, coupablement au sentiment bien réel d'impunité chez tous les délinquants, notamment les multirécidivistes.
Mme Danièle Pourtaud. C'est la campagne électorale !
M. Alain Joyandet. Il est urgent de changer de politique, de passer de l'incantation à l'action. (Très bien ! sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Michel Bécot. Oui !
M. Alain Joyandet. Messieurs les ministres, quels efforts réels comptez-vous entreprendre pour doter notre police et notre gendarmerie des moyens dont elles ont besoin pour accomplir leur mission et garantir notre sécurité ?
Au-delà des moyens budgétaires, qui, nous le savons, ne sont pas tout, que comptez-vous faire pour redonner confiance à nos gendarmes et à nos policiers...
M. René-Pierre Signé. La question !
M. Alain Joyandet. ... qui doutent aujourd'hui de la République ?
M. le président. Concluez, monsieur Joyandet.
M. Alain Joyandet. J'en termine, monsieur le président.
Que comptez-vous faire pour qu'ils se sentent soutenus,...
M. Alain Gournac. Oui !
M. Alain Joyandet. ... défendus et estimés, eux qui ont la redoutable mission d'assurer en des temps perturbés ce qui devrait rester la première action sociale de tout gouvernement, celle qui consiste à garantir la sécurité de tous et notamment des plus vulnérables ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Danièle Pourtaud. Il a dépassé le temps dont il disposait !
M. le président. ... de dix secondes.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, je voudrais tout d'abord vous demander de bien vouloir excuser M. le Premier ministre, qui clôture le congrès de l'Association des maires de France et qui est accompagné par le ministre de l'intérieur, M. Daniel Vaillant.
Mme Nelly Olin. Ah ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Le ministre de la défense, M. Alain Richard, qui est présent au banc du Gouvernement, pourrait aussi répondre à votre question.
D'abord, vous avez voulu faire parler les chiffres, monsieur le sénateur. Il ne faut pas se payer de mots. Je vais citer, devant la Haute Assemblée et en présence des téléspectateurs puisque cette séance de questions fait l'objet d'une retransmission télévisée, les chiffres réels.
Au temps des gouvernements de droite - MM. Pasqua et Debré ont été successivement ministre de l'intérieur - le budget de la police était compris entre 27 milliards et 28 milliards de francs. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Alain Vasselle. C'est facile !
M. Josselin de Rohan. C'était bien avant !
M. Alain Gournac. Les policiers n'étaient pas dans la rue !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Il avait même diminué en 1997, au moment de la dissolution de l'Assemblée nationale. Le budget de la gendarmerie s'élevait à 21,5 milliards de francs. (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Gournac. Et maintenant ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Nous en sommes aujourd'hui, dans le projet de budget que vous examinez, à plus de 33 milliards de francs en ce qui concerne le budget de la police et à plus de 25 milliards de francs s'agissant du budget de la gendarmerie.
M. Michel Bécot. Comparez ce qui est comparable !
M. Alain Gournac. Les policiers sont dans la rue !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Cela signifie que les augmentations ont été plus fortes, au cours de ces années, que la moyenne du budget.
Mme Nelly Olin. C'est pour cela que les policiers sont dans la rue !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Comme vous avez pu le lire dans un grand journal économique publié ce matin, La Tribune, pour le citer, les effectifs de la police ont augmenté...
Mme Nelly Olin. Vous plaisantez ?
M. Jean-Jacques Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... de 6,2 % au cours de la période 1998-2002,...
Mme Nelly Olin. Nous n'avons plus personne dans nos banlieues !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... alors que pendant la période où vos amis étaient au gouvernement, ils n'ont augmenté que de 4,8 %.
M. Philippe Nogrix. Où sont les 35 heures ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Puisque vous avez voulu faire parler les chiffres, moi, je les fais parler ! (Protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie.
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Le Gouvernement a décidé de faire un effort exceptionnel dans le domaine de la police, en particulier avec un plan d'action renforcée contre la violence, avec la dotation d'équipements pour les policiers, qu'il s'agisse du renouvellement d'armes ou de gilets pare-balles (Exclamations sur les travées du RPR)...
M. Alain Gournac. C'est pourquoi les policiers sont de nouveau dans la rue !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... et, sur le plan juridique, avec des instructions qui rappellent les dispositions pénales qui sont applicables en cas d'agression contre les détenteurs de la force publique, sans oublier un plan d'action contre les trafics d'armes dans la loi relative à la sécurité quotidienne.
Mme Nelly Olin. Venez dans les banlieues !
M. Alain Gournac. Oui, venez voir ce qui se passe dans les banlieues !
M. Philippe Nogrix. Où sont les 35 heures ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Toujours en ce qui concerne les policiers, nous avons prévu et inscrit le doublement de l'allocation de maîtrise pour les gardiens de la paix,...
M. Jean Arthuis. 11 % !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... une revalorisation indiciaire pour les officiers de police et l'attribution d'une nouvelle bonification indiciaire pour les commissaires.
M. Philippe Nogrix. 11 % !
M. Raymond Courrière. Cela devrait vous faire plaisir !
M. Philippe Nogrix. Et les 35 heures ?
Mme Nelly Olin et M. Alain Gournac. Pourquoi les policiers sont-ils dans la rue ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Voilà donc, dans le cadre des négociations, ce qui est engagé.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. La police et la gendarmerie ont droit à toute l'estime de la représentation nationale pour le travail que les forces de sécurité font dans nos villes et nos villages. Cette action représente pour le Gouvernement une priorité nationale. Nous la mettons en oeuvre.
En ce qui concerne la loi sur la présomption d'innocence, le Premier ministre vient de charger M. Julien Dray (Ah ! sur les travées du RPR et de l'Union centriste)...
Mme Nelly Olin. Nous sommes sauvés !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... d'une mission parlementaire pour faire le point sur les conditions de fonctionnement et d'application de ses dispositions. (Exclamations sur les mêmes travées.)
M. Claude Estier. Vous avez voté ce texte !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Ce texte, que vous avez voté, en effet, avait été adopté à la quasi-unanimité à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées socialistes.) Rappelons la réalité, les chiffres et la vérité ! De ce point de vue, sachez que le ministre de l'intérieur comme le ministre de la défense sont en concertation avec les organisations syndicales ou professionnelles dans la gendarmerie qui représentent les différents corps. A cet égard, nous ne payons pas de mots, monsieur Joyandet : le Gouvernement agit en matière de sécurité ! (Protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Michel Bécot. C'est faux !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Comparez ce que nous avons fait avec ce que vous avez fait antérieurement, et nous verrons à ce moment-là ce qu'il en est, notamment en ce qui concerne les non-recrutements dans la police. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
Mme Nelly Olin. Vous plaisantez ? Les contrats locaux de sécurité sont un leurre !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie. Je vous appelle à la sérénité et donc à ne pas multiplier les interruptions.
M. Patrick Lassourd. Il faut le dire à M. Signé !

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