SEANCE DU 29 MAI 2001


M. le président. La parole est à Mme Heinis, auteur de la question n° 1074, adressée à M. le ministre délégué à la santé.
Mme Anne Heinis. Madame le secrétaire d'Etat, j'ai l'honneur d'attirer votre attention sur les revendications formulées par les personnels soignants de la polyclinique du Cotentin, sise à Equeurdreville, petite commune qui jouxte Cherbourg, dans le département de la Manche, dont je suis l'élue.
Depuis de nombreuses années, la polyclinique du Cotentin est un des pivots incontournables du secteur sanitaire de Cherbourg et du Nord Cotentin, puisqu'elle réalise 68 % des interventions chirurgicales dans des domaines de compétences exclusives telles que la chirurgie vasculaire, et même 80 % pour l'ophtalmologie.
Toutefois, ces derniers mois, la détérioration de la situation sanitaire dans le Nord Cotentin s'est accélérée brutalement et de façon très préoccupante et cela pour plusieurs raisons : la faiblesse de la démographie médicale et la pénurie de médecins praticiens, qui touchent particulièrement la Manche mais, nous venons de l'entendre, également d'autres départements ; la fermeture des services de chirurgie et de maternité de l'hôpital de Valognes ; la fermeture anticipée de l'hôpital des armées René-Lebas.
Mais surtout, et comme la majorité des établissements d'hospitalisation privée sur le territoire national, la polyclinique du Cotentin se trouve confrontée à un problème grave, celui de la pénurie importante des personnels infirmiers et aides-soignants, qui préfèrent être employés dans un hôpital public, en l'occurrence l'hôpital Louis-Pasteur de Cherbourg, où les rémunérations sont de 20 % à 30 % supérieures à celles du secteur privé, et cela à compétences et à qualifications égales.
Aussi, madame le secrétaire d'Etat, je vous demande si vous entendez stopper la dégradation du service hospitalier privé, service qui est absolument nécessaire, par une amélioration des conditions de travail du personnel soignant et, surtout, par une augmentation suffisante du prix de journée pour revaloriser les salaires, tant par des augmentations conventionnelles immédiates que par des rattrapages par étapes selon des engagements et un calendrier précis. C'est dans notre département, je me permets de vous le rappeler, que les prix de journée sont les plus bas de France !
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Madame la sénatrice, l'hospitalisation privée, en particulier la polyclinique du Cotentin, joue, comme vous le soulignez, un rôle important dans la réponse aux besoins de la population. La diversité des missions qui sont confiées aux établissements de santé privés par les agences régionales de l'hospitalisation, en application des schémas régionaux d'organisation sanitaire, est croissante.
L'extension à ces établissements de la prise en charge de l'urgence est symbolique de cette évolution. Elle témoigne non seulement de leur implication dans la prise en charge sanitaire quotidienne de nos concitoyens, mais aussi de la reconnaissance de la complémentarité de leur rôle par rapport au service public.
Dans ces circonstances, l'action du Gouvernement vise à prendre en compte la situation économique des établissements de santé privés. Un fonds pour la modernisation de ces cliniques a été mis en place. Il est destiné à accompagner des opérations de modernisation au sein de ce secteur. Sa dotation est portée à 150 millions de francs en 2001.
Par ailleurs, pour la première fois, le taux d'augmentation pour 2001 de l'objectif quantifié national a été fixé à un niveau équivalent à celui des établissements publics, soit une progression de 3,3 %.
Sur cette base, l'accord signé le 4 avril dernier avec les fédérations de cliniques privées détermine les taux de progression pour 2001 des tarifs de ce secteur. Il intègre une enveloppe de 600 millions de francs pour les augmentations générales, soit une hausse moyenne des tarifs de 2,30 % et une autre enveloppe de 600 millions de francs pour des augmentations ciblées sur certaines activités, ce qui porte l'augmentation à près de 4 %.
A ce titre, l'attention portée au secteur de l'obstétrique est renforcée et amplifiée au travers d'une enveloppe de 100 millions de francs, ce qui permet une hausse des tarifs de ce secteur de 8 %. Ces montants traduisent un effort marquant par rapport aux accords précédents.
Cet accord vise également à renforcer la complémentarité d'activités de l'hospitalisation publique et privée. En particulier, il assure la prise en charge des urgences par certains établissements privés.
Il prévoit la création d'un dispositif d'observation destiné à améliorer le suivi du secteur.
Enfin, cet accord prend en compte le financement des augmentations de salaires des différentes catégories de personnel des établissements de santé privés. Ces hausses de rémunération font l'objet de négociations entre les partenaires sociaux de ce secteur en vue d'aboutir prochainement à une refonte des grilles de rémunération. Cet engagement s'inscrit dans un cadre pluriannuel visant à assurer la cohérence entre les rémunérations des différents secteurs de l'offre hospitalière et un comité de suivi est mis en place.
Madame la sénatrice, cet accord devrait, selon nous, permettre une résorption progressive des différences de salaires, telles que vous les constatez dans votre département.
Mme Anne Heinis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis. Je vous remercie, madame le secrétaire d'Etat, des précisions que vous m'avez données et qui vont incontestablement dans le sens de nos voeux.
Dans la répartition des fonds, qui sont globaux à votre niveau, je souhaite que vous portiez une attention toute particulière aux secteurs qui ont été jusqu'à présent sous-dotés et à ceux qui présentent des risques spécifiques.
Comme je l'ai déjà fait à plusieurs reprises depuis quelques années, mais sans aucun succès, je veux à ce titre attirer une nouvelle fois votre attention sur le problème des urgences auquel nous sommes confrontés dans le nord du département de la Manche.
En effet, entre les villes de Cherbourg et Saint-Lô, qui sont distantes de quatre-vingts kilomètres, qui couvrent une population de 240 000 personnes et où circulent sur une simple route à quatre voies, en sus des véhicules locaux, 1 500 000 véhicules étrangers en provenance ou à destination de la Grande-Bretagne, nous n'avons aucun service d'urgence.
Celui qui existait à Valogne a été fermé. Il ne reste plus qu'un modeste service d'accueil.
Si un accident grave survenait, je ne sais pas comment nous pourrions porter secours aux blessés. Quand j'en ai parlé au directeur de l'agence régionale, que cela n'a pas eu l'air de beaucoup troubler, il m'a répondu que l'on mettrait en oeuvre les moyens nécessaires. Mais lesquels ? C'est un réel problème, sur lequel je voulais attirer de nouveau votre attention, car je me fais énormément de souci pour la sécurité sanitaire des habitants de cette partie de notre territoire à la suite de la décision irresponsable de fermer les établissements que j'ai cités.
Le service des urgences de l'hôpital Pasteur de Cherbourg est débordé. Les patients y attendent souvent plusieurs heures, quand ils ne sont pas renvoyés à quatre-vingts kilomètres de là. Ce fait est exact et peut être vérifié. Simultanément, la polyclinique du Cotentin a accueilli 6 000 personnes pour des consultations d'urgence alors que, pour le moment, cela ne relève pas officiellement de ses missions.
En conclusion, il faut, me semble-t-il, madame le secrétaire d'Etat, aller dans le sens d'une complémentarité entre les établissements « survivants », si vous me permettez cette expression.

MANQUE DE MOYENS
DES ASSOCIATIONS INTERMÉDIAIRES