SEANCE DU 25 JANVIER 2001


M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, madame et messieurs les ministres, ma question porte sur les retraites complémentaires.
Face au véritable coup de force du MEDEF, qui a décidé de suspendre sa participation au financement des retraites complémentaires entre soixante ans et soixante-cinq ans, les cinq grandes confédérations syndicales organisent, aujourd'hui même - les membres de mon groupe reviennent de cette manifestation - une journée unitaire d'action des salariés et des retraités du secteur privé et du secteur public...
M. Hilaire Flandre. Vous, vous avez la garantie d'une bonne retraite ! (Sourires.)
M. Thierry Foucaud. ... pour défendre le droit à la retraite à soixante ans à taux plein.
L'entreprise d'intransigeance mais aussi de démolition sociale entamée par le MEDEF de MM. Seillière et Kessler, qui se durcit et se politise, menace sérieusement le paritarisme et le dialogue social dans notre pays, menant ainsi à une véritable impasse dans laquelle personne, je pense, ne trouvera son compte.
Le débat porte aujourd'hui sur le financement des retraites, mais cette question est intimement liée, on le sait, à la question des salaires et de l'emploi. La défense de la retraite à soixante ans à taux plein, qui est l'un des acquis majeurs à mettre au crédit de la gauche, passe nécessairement par une politique salariale ambitieuse : sans hausse des salaires, il n'y aura pas de défense crédible des retraites.
Madame la ministre, nous approuvons, vous le savez, la fermeté de vos déclarations et de celles du Gouvernement sur l'attitude du MEDEF. Cette riposte - c'est l'objet de notre question - doit, selon nous, se traduire concrètement sur cinq points essentiels.
Premier point : il faut affirmer dans les faits le droit à la retraite à soixante ans, ce qui nécessite une réduction du nombre des annuités demandées.
Deuxième point : il faut afficher dès aujourd'hui, sans ambiguïté, la volonté de pérenniser les retraites complémentaires sans perte de pouvoir d'achat, y compris par voie législative.
Troisième point : il faut engager dans les délais les plus brefs une revalorisation du SMIC à hauteur de 3,5 %, et je pense que l'Etat doit montrer l'exemple en prenant en compte la baisse du pouvoir d'achat dans la fonction publique.
Quatrième point : il faut abandonner la fausse bonne idée du crédit d'impôt (Exclamations amusées sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR), qui dispense le patronat d'augmenter les salaires en reportant cette charge sur la collectivité publique.
M. Alain Gournac. C'est la gauche très plurielle !
M. Thierry Foucaud. Cinquième et dernier point : il faut engager une politique déterminée de lutte contre la précarité, précarité qui brouille d'ailleurs les bons chiffres de l'emploi et qui créera, à l'avenir, de biens mauvaises surprises pour les salariés en matière de retraite.
La menace qui pèse sur notre système de retraite par répartition réside, vous le savez, madame la ministre, dans la faiblesse des salaires et du taux d'activité.
Je pose ma question. (Ah ! sur plusieurs travées du RPR.) Quelles mesures entendez-vous prendre en ce sens, madame la ministre, afin de répondre efficacement, au-delà du positionnement d'un jour, à l'offensive du MEDEF. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille et à l'enfance. Monsieur le sénateur, vous avez abordé plusieurs sujets dans votre question.
S'agissant de la lutte contre la précarité, je dirai que la première action c'est la lutte pour l'emploi et que le chômage recule ; le Gouvernement continuera dans ce sens.
En ce qui concerne les prélèvements, le débat qui est ouvert porte sur les baisses d'impôts, et je crois que tout le monde doit s'en réjouir. Il s'agit non pas, comme vous l'avez évoqué, d'un crédit d'impôt,...
M. Paul Blanc. Ah bon ?
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. ... mais d'une prime pour l'emploi, d'une aide à l'emploi (Ah ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants) qui vient compenser les allégements de cotisations annulés par le Conseil constitutionnel,...
M. Alain Gournac. Cela semble compliqué !
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. ... décision qui, je le rappelle, a été prise après une saisine par les parlementaires de droite.
M. Jean-Jacques Hyest. N'avons-nous pas le droit de le faire ? Cela fait partie du rôle du Parlement !
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. Le Gouvernement a donc rétabli, de ce point de vue, pour les plus bas salaires, un avantage que les salariés intéressés apprécieront, je pense. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean-Pierre Schosteck. C'est une « sucette » électorale !
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. Sur la question de la préservation des régimes de retraite par répartition, j'ai déjà apporté un certain nombre d'indications tout à l'heure, au nom d'Elisabeth Guigou.
Ce qui est préoccupant aujourd'hui, je le rappelle, ce sont non pas les régimes de base, mais les retraites complémentaires. Il ne faudrait pas qu'il y ait de confusion dans l'opinion publique à ce sujet. Il n'y a pas d'inquiétude à avoir sur la pérennité de la liquidation des retraites complémentaires pour ceux qui soit sont déjà à la retraite, soit y parviendront d'ici au 31 mars 2001. Ce qui est en cause, c'est le niveau des retraites complémentaires - et c'est un sujet considérable - de ceux qui partiront à la retraite après le 31 mars prochain, avant l'âge de soixante-cinq ans. C'est pourquoi le Gouvernement est très vigilant sur les discussions entre les partenaires sociaux, car il s'agit d'abord et avant tout de leur responsabilité.
Comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, le versement des cotisations fait l'objet d'une divergence juridique entre les partenaires sociaux.
Les organisations syndicales considèrent que la « déclaration commune » adoptée en septembre dernier avec les représentants des employeurs proroge le versement de ces cotisations. Le patronat estime pour sa part que tel n'est pas le cas et que cette déclaration commune ne concerne que la prorogation du versement des prestations. A ce stade, il n'appartient pas au Gouvernement de se substituer aux parties à cette déclaration pour interpréter leur volonté !
Quant à l'attitude du MEDEF, on ne peut que constater son incohérence : lorsqu'on prétend oeuvrer à la refondation sociale, on ne se livre pas à un véritable chantage. C'est là une curieuse conception de la négociation !
Sur ce sujet, je le répète, la position du Gouvernement est claire : il prendra ses responsabilités pour garantir l'avenir de la retraite des Français. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

APPLICATION DE LA CIRCULAIRE
SUR LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL SUR LES ROUTES L'HIVER