SEANCE DU 16 JANVIER 2001


M. le président. La parole est à M. Signé, auteur de la question n° 945, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. René-Pierre Signé. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur un problème très sensible pour un département rural comme la Nièvre : je veux parler des modalités d'intervention de la direction départementale de l'équipement, ou DDE, pour les communes et leurs groupements. Il ne s'agit rien de moins que de l'avenir des services publics de proximité dans notre pays, peut-être même de leur pérennité.
Considérons tout d'abord les travaux d'entretien des voiries communales. Ces travaux, menés par les personnels d'exploitation de la direction départementale de l'équipement, sont sollicités sur devis par les communes, et ce en dehors du champ des marchés publics. Mais les communes regroupées en communautés, bénéficiant du transfert de la compétence en matière de voirie, donnent souvent lieu à des masses annuelles de travaux supérieures à 300 000 francs, somme qui représente le seuil de passation de ces marchés publics.
Les services de la DDE craignent ainsi que tous les travaux communaux sur les voiries ne leur échappent.
Un autre sujet est lié à cet enjeu central de la cohésion territoriale et sociale de notre pays en général et des zones rurales en particulier. Ce sujet concerne les missions d'ingénierie publique, notamment d'assistance, d'études et de suivi, etc. La prééminence d'une logique concurrentielle est inquiétante.
En conséquence, je voudrais savoir, monsieur le ministre, quelles mesures le Gouvernement peut engager afin d'assurer la continuité des travaux de voirie comme compétence des services de la DDE. Je souhaiterais, par ailleurs, connaître votre point de vue sur les enjeux et les conséquences de la réforme des missions d'ingénierie publique.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, vous avez raison de soulever la question de l'ingénierie publique, qui est très importante et qui fait actuellement l'objet de débats et de propositions. Vous connaissez d'ailleurs l'attachement du Gouvernement, et le mien en particulier, aux services publics de proximité.
Comme vous le savez, l'ingénierie publique s'exerce pour le compte de l'Etat ou des collectivités locales.
Pour les collectivités de taille modeste, sans services techniques, il s'agit d'un service public de proximité et de solidarité. Pour les autres, c'est un appui à des projets et à des territoires porteurs d'enjeux prioritaires des politiques publiques. C'est aussi un moyen de diffusion de l'innovation technique.
Les principaux services de mon ministère y participent, que ce soient les DDE, les services maritimes, les services de la navigation et des bases aériennes, ou le réseau scientifique et technique.
Le cadre de ces missions datait des années cinquante. En liaison avec mon collègue de l'agriculture, M. Jean Glavany, dont les services font aussi de telles missions, j'ai lancé un plan de modernisation de l'ingénierie publique pour mieux répondre aux attentes des collectivités, aux enjeux des territoires et aux priorités du service public.
En outre, pour rompre définitivement tout lien entre cette activité et les rémunérations perçues par les fonctionnaires, les rémunérations accessoires des personnels des DDE et des DDAF, les directions départementales de l'agriculture et de la forêt, ont été budgétisées.
Sur le plan juridique, nous devons tenir compte des directives européennes et de l'évolution du droit de la concurrence. Certaines missions devront être attribuées dans le cadre des règles de la commande publique. Mais, en tout état de cause, les collectivités locales garderont la possibilité de faire durablement appel aux services de l'Etat dans des conditions juridiques sécurisées, sans complication inutile.
Pour ne pas restreindre la possibilité de choix des collectivités locales, je m'attache donc à redonner des fondations plus solides et durables à ces missions, par des dispositions législatives, quand c'est nécessaire, et par des dispositions réglementaires, dans le cadre du code des marchés publics.
Soyez assuré, monsieur le sénateur, que, comme les élus et les personnels de mon ministère, le Gouvernement est très attaché au maintien de ces missions d'appui technique dont bénéficient les collectivités locales.
M. René-Pierre Signé. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Signé.
M. René-Pierre Signé. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Votre attachement à la notion de services publics de proximité n'est pas pour me surprendre.
Je voudrais simplement souligner qu'il convient de bien distinguer modernisation pertinente et libéralisation pénalisante. Le rôle de l'Etat comme aménageur d'espace doit évoluer ; cela implique de préciser, ainsi que vous l'avez dit, les priorités pour l'ingénierie publique, notamment en ce qui concerne les enjeux d'aménagement, les missions de solidarité envers les petites communes et la diffusion de l'innovation technique. Mais je pense que la qualité des projets, la nécessité de répondre aux enjeux de solidarité et d'aménagement ne peuvent être garanties totalement par la mise en place d'une logique concurrentielle hégémonique...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je suis d'accord avec vous !
M. René-Pierre Signé. ... d'autant que ces travaux communaux viennent largement abonder les crédits départementaux, et qu'ils maintiennent personnel et matériel.
Le marché ne saurait suffire à tout. Les services publics, a fortiori dans les zones rurales, jouent un rôle très important dans la cohésion économique, sociale et territoriale. J'ai voulu le réaffirmer ce matin et vous transmettre les inquiétudes du personnel de la DDE, que je vous remercie d'avoir prises en compte.

LIAISON FERROVIAIRE LYON-LIMOGES