SEANCE DU 19 DECEMBRE 2000


M. le président. « Art. 38. - Les obligations nées de la fourniture de produits sanguins par des personnes morales de droit privé agréées sur le fondement de la loi n° 52-854 du 21 juillet 1952 sur l'utilisation thérapeutique du sang humain, de son plasma et de leurs dérivés qui n'entrent pas dans le champ d'application du B de l'article 18 de la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme sont transférées à l'Etablissement français du sang à la date de création de cet établissement public.
« L'application aux associations des dispositions de l'alinéa précédent est subordonnée à la condition qu'elles transfèrent à l'Etablissement français du sang leurs biens mobiliers et immobiliers acquis durant la période d'agrément et affectés à l'activité de transfusion sanguine. »
Par amendement n° 32 rectifié, M. Marini, au nom de la commission, propose :
A. - De compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
« II. - Les juridictions judiciaires sont compétentes pour statuer des actions engagées contre l'Etablissement français du sang, quelle que soit la date de leur fait générateur.
« Les dispositions du précédent alinéa ne remettent pas en cause les actions engagées à la date de promulgation de la présente loi.
« III. - L'article L. 1222-7 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'application du code du travail, l'Etablissement français du sang est considéré comme un Etablissement public industriel et commercial. Les titres Ier, II, et III du livre quatrième du code du travail s'appliquent aux personnels visés au 1° du présent article. Ces personnels bénéficient des mesures de protection sociale prévues par le code du travail pour les représentants du personnel. »
B. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention : « I. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit là d'un sujet important, mes chers collègues.
L'article 38 prévoit de transférer définitivement le contentieux lié à la transfusion sanguine à l'Etablissement français du sang.
Sur la forme, il est permis de s'interroger une nouvelle fois quant à la manière dont le Gouvernement traite le Parlement. Le 20 décembre 1999, au cours de l'examen des articles du collectif budgétaire de 1999, le Gouvernement a déposé un amendement reprenant le texte du présent article et y ajoutant une disposition sur les ordres de juridiction compétents. Il s'agissait d'un dispositif extrêmement complexe pour lequel on nous demandait de statuer de toute urgence. Le ministre de l'économie et des finances, M. Christian Sautter, avait insisté pour l'adoption de cette disposition. Le Sénat avait refusé de le suivre.
Depuis, le Gouvernement était parfaitement en mesure de déposer ce texte à l'occasion du collectif budgétaire de printemps ou du projet de loi de finances pour 2001 ; il aurait même pu le faire figurer dans le texte initial du présent collectif budgétaire. Non ! Il a fallu un amendement déposé à l'Assemblée nationale pour reprendre cette disposition prétendument urgente du 20 décembre 1999 qui n'a plus semblé l'être jusqu'au 7 décembre dernier.
Sur le fond, cet article est une mesure de simplification utile. Certains organismes, associations ou fondation oeuvraient dans le domaine de la transfusion sanguine avant la création de l'Etablissement français du sang. A ce titre, il existe un contentieux entre les structures et des victimes. L'article prévoit de le transférer à l'Etablissement français du sang, avec, en contrepartie, le transfert des actifs de ces structures, ce qui paraît logique. Les contentieux pourront donc aboutir, même si les anciennes structures ont disparu.
Je voudrais cependant attirer l'attention sur un point particulier, celui du statut de l'établissement. La question se pose à la fois pour définir la juridiction compétente, pour connaître des contentieux auxquels cet établissement est partie, mais aussi pour traiter les questions liées au personnel de l'établissement, les questions de négociations sociales, de définition de la convention collective, de gestion des ressources humaines.
S'agissant de la juridiction compétente, les anciennes structures étant de droit privé, leur contentieux relevait des juridictions judiciaires. L'Etablissement français du sang, quant à lui, a été qualifié d'établissement public administratif pour son contentieux par le Conseil d'Etat. Selon la date, les victimes doivent donc s'adresser au juge judiciaire ou au juge administratif, ce qui n'est pas très simple. Par ailleurs, les deux juridictions peuvent avoir des jurisprudences divergentes.
Il est donc proposé, dans le I de cet amendement, de simplifier les choses pour les victimes et de prévoir que l'ensemble du contentieux, sauf, bien sûr, celui qui est déjà engagé, relève de l'ordre judiciaire, plus favorable aux victimes. La question n'est pas théorique : le contentieux de l'hépatite C est amené à se développer dans des proportions considérables.
S'agissant du personnel, les employés de l'Etablissement français du sang sont pour l'essentiel de droit privé et doivent donc à ce titre se voir appliquer le code du travail ainsi que les procédures de droit privé de représentation du personnel et de droits sociaux.
L'amendement n° 32 rectifié constitue donc un tout cohérent qui donne pleinement à l'Etablissement français du sang un statut de droit privé pour le contentieux lié à son activité comme pour son personnel. Il correspond aux attentes à la fois des victimes et des employés. Son adoption sera de nature à préciser de façon utile la situation juridique de cet établissement et améliorera la visibilité sur son statut et sur ses activités.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas favorable au II de cet amendement ; ce paragraphe va en effet à l'encontre d'un très récent avis du Conseil d'Etat du 20 octobre dernier qui précise que le droit à réparation des dommages causés par une transfusion sanguine s'ouvre à la date à laquelle cette transfusion a été réalisée et que la compétence juridictionnelle s'apprécie à cette date.
En revanche, le Gouvernement est favorable au III de l'amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 32 rectifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 38, ainsi modifié.

(L'article 38 est adopté.)

Article 39