SEANCE DU 18 DECEMBRE 2000


M. le président. Par amendement n° 46, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 18, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le quatrième alinéa de l'article 158 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Ce crédit d'impôt est égal au tiers des sommes effectivement versées par la société. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement se situe dans le droit-fil des positions que nous exprimons de manière constante depuis plusieurs lois de finances.
La réforme de notre fiscalité appelle, en effet, une remise en question de nombre de dispositions qui, au fil des ans, ont rendu cette fiscalité illisible, incompréhensible pour nos concitoyens, et ont mis en cause son caractère équitable.
Nous avons d'ores et déjà indiqué, ne serait-ce que lors de la discussion du projet de loi de finances initiale pour 2001, que le rééquilibrage de notre système de prélèvements passait en particulier par un accroissement de la fiscalité des revenus de capitaux, jusqu'ici épargnés par la rigueur de la loi.
Nous nous sommes d'ailleurs, en temps utile, félicités des mesures prises depuis 1997 concernant l'avoir fiscal des entreprises, qui semblent avoir largement contribué, dans la période récente, à l'accroissement du produit de l'impôt concerné.
Mais nous restons quelque peu sur notre faim en ce qui concerne l'avoir fiscal versé aux particuliers, notamment dans la mesure où la modification des tranches du barème progressif réduit d'autant le taux moyen d'imposition et accroît donc l'effet de l'avoir fiscal à 50 %. (M. Chérioux lève les bras au ciel.)
Pas la peine de lever les bras au ciel, monsieur Chérioux !
M. Jean Chérioux. Quand j'entends des choses pareilles, si !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Rien, dans les faits, ne vient justifier - pas plus aujourd'hui qu'hier et moins que demain, d'ailleurs - que l'avoir fiscal demeure fixé à 50 %, lorsque le taux de l'impôt sur les sociétés s'approche du retour à 33,3 % et ne constitue, au mieux, que de 15 % à 20 % du résultat d'exploitation des entreprises assujetties.
Par cet amendement, nous proposons donc de réduire nettement et franchement le taux de l'avoir fiscal, ce qui permettra à l'Etat de dégager de nouvelles marges de manoeuvre pour atteindre deux des objectifs essentiels de toute politique budgétaire.
Le premier, c'est d'opérer la réduction des déficits, qui sera sûrement mieux obtenue ainsi. Les tenants de titres ouvrant droit à l'avoir fiscal ont largement les moyens et de notre point de vue, le devoir de participer à l'atteinte de cet objectif. Si la réduction des déficits appelle quelques efforts ou sacrifices, il faut, à notre avis, partager ces derniers équitablement.
Le second, c'est de répondre aux besoins collectifs par la dépense publique. La situation d'exclusion que continuent de vivre un trop grand nombre de nos compatriotes, les problèmes pour se loger que rencontrent de nombreux jeunes et les difficultés à se soigner imposent - si l'on ne s'en tient pas, bien sûr, à la seule arithmétique budgétaire - , de mettre en oeuvre des moyens significatifs d'intervention publique.
La réduction de l'avoir fiscal, entre autres indispensables mesures, participe de cet effort de réponse aux besoins collectifs, dans un souci évident de justice fiscale et sociale.
Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Franchement défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne peut pas être favorable au durcissement de l'avoir fiscal pour les personnes physiques, car cette mesure irait à l'encontre de la politique qui consiste à inciter les ménages à investir leur épargne dans les fonds propres des entreprises. De nombreux ménages non imposables, notamment un certain nombre de petits retraités, obtiennent, vous le savez, le remboursement de l'avoir fiscal.
Par ailleurs, vous avez également noté que, s'agissant des actionnaires personnes morales, le Gouvernement va au-delà de la proposition que vous formulez, puisque le projet de loi de finances pour 2001 prévoit de fixer le taux de l'avoir fiscal à 25 %. Ce taux sera ramené à 15 % en 2002.
Pour toutes ces raisons, madame Beaudeau, je vous demande de retirer l'amendement n° 46.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 46.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Il est dommage que Mme Beaudeau méconnaisse totalement le problème. L'avoir fiscal n'est pas un cadeau ! C'est le montant que l'actionnaire en tant que contribuable peut déduire de l'impôt sur le revenu ou sur les sociétés, cela afin d'éviter une double imposition.
Outre le fait que l'avoir fiscal n'est pas un cadeau, il s'agit d'un remboursement potentiel pris en compte dans le calcul de l'impôt sur les sociétés et de la CSG, ce qui vous fera encore plus plaisir, madame Beaudeau !
Il faut donc remettre les choses dans leur contexte. Ce n'est pas, comme vous le dites, et sans doute comme vous le présentez aussi à vos électeurs, un cadeau de 50 % ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. Les pauvres malheureux dont vous parlez !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 46, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 19