Séance du 06 juin 2000






ÉLOGE FUNÈBRE DE ROGER HUSSON,
SÉNATEUR DE LA MOSELLE

M. le président. Mes chers collègues, je vais prononcer l'éloge funèbre de Roger Husson. (M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)
Notre collègue Roger Husson, sénateur de la Moselle, nous a quittés le 28 avril dernier, à l'âge de soixante-seize ans. La nouvelle de sa disparition subite nous a profondément émus.
La vie de Roger Husson est un cheminement exemplaire, fait de courage et de dévouement, porté par des valeurs fortes.
Notre collègue, ami de tous, était né le 12 juin 1924, à Dieuze, dans le département de la Moselle. Plus tard, sa vie d'homme public sera entièrement dévouée à cette ville du plateau de la Lorraine.
Roger Husson était de ceux dont l'engagement s'enracine au plus profond d'une petite parcelle de la terre de France.
C'est cet attachement à son pays, transmis de génération en génération par une tradition patriotique familiale, qui suscitera son engagement volontaire en juin 1944 dans la brigade Alsace-Lorraine. Il s'y comportera en héros.
La médaille militaire, la croix de guerre et la croix du combattant volontaire illustreront son action sous les drapeaux.
Ces années de guerre ne cesseront d'habiter Roger Husson. Elles imprimeront une marque particulière à son action.
C'est à l'usine Kuhlmann, à Dieuze, que Roger Husson retourne à la vie civile, en pleine période de reconstruction de notre pays.
Elu conseiller municipal de Dieuze en 1957, il accède à la fonction de maire en 1965.
Premier magistrat pendant trente-deux ans, il est de ces maires dont l'énergie, la personnalité et l'attention aux autres permettent de triompher des clivages traditionnels.
Comme nombre de ses administrés, les activités professionnelles de Roger Husson étaient liées de façon très intime à la vie de sa région. Nommé contremaître en 1966, il est appelé en 1973 à siéger au Conseil économique et social, à la section de l'industrie et du commerce.
Sans quitter son travail, il est élu, en 1982, conseiller général et, l'année suivante, conseiller régional.
La Lorraine connaît alors des années difficiles. La terre et les hommes sont frappés par la reconversion industrielle. C'est dans leur chair que les Lorrains sont touchés par la fermeture des houillères et le déclin d'une culture ouvrière fédératrice.
En 1983, Roger Husson est élu au Sénat et parachève, avec ce mandat, sa carrière d'élu local. Il s'y fera l'apôtre de ses valeurs et de celles de sa région.
Dans l'hémicycle de notre assemblée et au sein de la commission des affaires sociales, il intervient avec force sur la crise que connaît « sa » Lorraine.
Il prône la diversification des activités, le renouvellement des infrastructures, le traitement économique d'un chômage croissant, avec comme objectif intangible l'ambition que la population lorraine garde espoir dans le renouveau de la région.
Son discours s'enflammait alors pour lutter contre la résignation.
Avec la même énergie, qui était sa marque, il combat, avec succès, pour le maintien à Dieuze du 13e régiment de dragons parachutistes.
Au nom de la commission des affaires économiques, qu'il rejoint en 1993, il est l'auteur de plusieurs rapports sur les mines et le bassin houiller lorrain. Parallèlement, son intérêt pour les questions de défense ne se dément pas.
Depuis cinq ans, Roger Husson travaillait au sein de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Son action était sous-tendue par la volonté de promouvoir l'esprit de défense et le patriotisme, en particulier chez les jeunes.
Une défense efficace pour la France, une armée moderne dotée des moyens nécessaires étaient au coeur de ses convictions.
L'indépendance de la France grâce à une industrie de défense forte rejoignait ses préoccupations en matière d'emploi.
Car c'est bien pour servir les autres que Roger Husson était entré en politique, servait la politique et honorait la politique : pour les mineurs lorrains privés d'emploi, pour les militaires risquant leur vie et leur souffrance, pour les veuves de militaires, au sujet desquelles il avait déposé puis rapporté une proposition de loi, et, plus généralement, pour une certaine idée du bien public et de celui de son pays.
Ceux qui l'ont connu ont été les témoins de la noblesse avec laquelle il s'acquittait de cette mission.
Au nom du Sénat tout entier, je voudrais rendre hommage à sa mémoire.
A son épouse et à ses enfants je voudrais apporter le témoignage de notre profonde et sincère émotion.
J'assure ses amis du groupe du RPR et ses collègues de la commission des affaires étrangères de notre émotion et de notre sympathie attristée.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux, au nom du Gouvernement, m'associer à l'hommage que vous rendez aujourd'hui à Roger Husson, qui nous a quittés le 28 avril dernier.
Issu d'une famille modeste d'ouvriers et de mineurs mosellans, Roger Husson commença sa vie professionnelle comme apprenti chez Ugine-Kuhlmann. Son expérience de l'usine, sa connaissance des hommes et du terrain, ses qualités de travailleur le firent demeurer dans l'entreprise jusqu'en 1974. D'une certaine façon, c'est la même rigueur que vous distinguiez lorsqu'il siégeait à vos côtés.
Dieuzois de souche, Roger Husson resta fidèle à sa ville natale tout au long de sa vie d'élu, c'est-à-dire pendant près d'un demi-siècle. Son engagement politique, il le mettait au service de ses concitoyens, car guidé par son remarquable bon sens et par l'expérience, Roger Husson avait gardé cette proximité et ce dévouement qui sont la marque des grands élus. Il recueillait l'estime de ses amis et le respect de ses opposants.
Mais je n'oublie pas que Roger Husson fut aussi, et peut-être d'abord, un résistant.
Engagé volontaire, il rejoignit la brigade Alsace-Lorraine, celle d'André Malraux, et se fit combattant de la liberté au service d'une certaine idée de la France.
Au nom du Gouvernement de la République, je vous adresse, madame, à vous, à vos enfants et à vos proches mes très sincères condoléances.

(A la demande du président, M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs observent une minute de silence.)
M. le président. Je vous propose, mes chers collègues, d'interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt-cinq, est reprise à seize heures trente-cinq.)