Séance du 20 décembre 1999







M. le président. Art. 2. - L'ajustement des recettes tel qu'il résulte des évaluations révisées figurant à l'état A annexé à la présente loi et le supplément de charges du budget de l'Etat pour 1999 sont fixés ainsi qu'il suit :


(En millions de francs)


RESSOURCES

DÉPENSES
ordinaires

civiles

DÉPENSES
civiles

en capital

DÉPENSES

militaires

TOTAL
des dépenses
à caractère

définitif

PLAFOND
des charges
à caractère

temporaire


SOLDE

A. - Opérations à caractère définitif


Budget général
Ressources brutes 19 351 Dépenses brutes 20 047 . . . . .

A déduire :

A déduire :

Remboursements et dégrèvements d'impôts 13 095 Remboursements et dégrèvements d'impôts 13 095 . . . .




.

Ressources nettes 6 256 Dépenses nettes 6 952 2 589 - 4 502 5 039 .




.
Comptes d'affectation spéciale 71 . 71 » » 71 .




.
Totaux du budget général et des comptes d'affectation spéciale 6 327 . 7 023 2 589 - 4 502 5 110 .






.

Budgets annexes
Aviation civile » . » » . » . .
Journaux officiels » . » » . » . .
Légion d'honneur » . » » . » . .
Ordre de la Libération » . » » . » . .
Monnaies et médailles » . » » . » . .
Prestations sociales agricoles » . » » . » .



.
Totaux des budgets annexes » . » » . » .








.
Solde des opérations définitives de l'Etat (A) . . . . . . . 1 217


B. - Opérations à caractère temporaire

Comptes spéciaux du Trésor
Comptes d'affectation spéciale » . . . . . » .
Comptes de prêts 1 555 . . . . . 500 .
Comptes d'avances » . . . . . » .
Comptes de commerce (solde) » . . . . . » .
Comptes d'opérations monétaires (solde) » . . . . . » .
Comptes de règlement avec les gouvernements étrangers (solde) » . . . . . »








.
Totaux (B) 1 555 . . . . . 500














.
Solde des opérations temporaires de l'Etat (B) . . . . . . .

1 055

Solde général (A + B) . . . . . . . 2 272



Je donne lecture de l'état A :

ÉTAT A
Tableau des voies et moyens applicables au budget de 1999
I. - BUDGET GÉNÉRAL

(En milliers de francs)

NUMÉRO

de la ligne


DÉSIGNATION DES RECETTES

RÉVISION
des évaluations

pour 1999

A. - Recettes fiscales 1. Impôts sur le revenu

0001 Impôt sur le revenu + 3 150 000
2. Autres impôts directs perçus par voie d'émission de rôles
0002 Autres impôts directs perçus par voie d'émission de rôles + 1 300 000
3. Impôt sur les sociétés
0003 Impôt sur les sociétés + 21 100 000
4. Autres impôts directs et taxes assimilées
0004 Retenues à la source sur certains bénéfices non commerciaux et de l'impôt sur le revenu + 100 000
0005 Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers - 2 250 000
0007 Précompte dû par les sociétés au titre de certains bénéfices distribués (loi n° 65-566 du 12 juillet 1965, art. 3) + 1 850 000
0008 Impôt de solidarité sur la fortune - 2 355 000
0010 Prélèvements sur les entreprises d'assurance - 445 000
0011 Taxe sur les salaires - 400 000
0012 Cotisation minimale de taxe professionnelle - 360 000
0013 Taxe d'apprentissage - 20 000
0014 Taxe de participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue - 90 000
0015 Taxe forfaitaire sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d'art, de collection et d'antiquité - 20 000
0016 Contribution sur logements sociaux - 70 000
0017 Contribution des institutions financières + 100 000
0019 Recettes diverses - 4 000
0020 Contribution de France Télécom au financement du service public de l'enseignement supérieur des télécommunications + 5 000
. Totaux pour le 4 - 3 959 000
5. Taxe intérieure sur les produits pétroliers
0021 Taxe intérieure sur les produits pétroliers + 1 892 000
6. Taxes sur la valeur ajoutée
0022 Taxe sur la valeur ajoutée - 60 000
7. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes
0023 Mutations à titre onéreux de créances, rentes, prix d'offices - 4 725 000
0024 Mutations à titre onéreux de fonds de commerce - 125 000
0026 Mutations à titre onéreux d'immeubles et droits immobiliers + 5 000
0028 Mutations à titre gratuit par décès - 600 000
0031 Autres conventions et actes civils + 350 000
0033 Taxe de publicité foncière - 20 000
0036 Taxe additionnelle au droit de bail + 200 000
0039 Recettes diverses et pénalités + 515 000
0041 Timbre unique - 150 000
0044 Taxe sur les véhicules des sociétés - 50 000
0045 Actes et écrits assujettis au timbre de dimension + 100 000
0046 Contrats de transport - 200 000
0051 Impôt sur les opérations traitées dans les bourses de valeurs - 100 000
0061 Droits d'importation - 1 000 000
0064 Autres taxes intérieures + 207 000
0065 Autres droits et recettes accessoires + 58 000
0066 Amendes et confiscations + 135 000
0067 Taxe sur les activités polluantes - 135 000
0081 Droits de consommation sur les tabacs + 871 000
0086 Taxe spéciale sur les débits de boisson - 1 000
0091 Garantie des matières d'or et d'argent + 25 000
0093 Autres droits et recettes à différents titres + 13 000
0094 Taxe spéciale sur la publicité télévisée + 7 000
0096 Taxe spéciale sur certains véhicules routiers - 31 000
0097 Cotisation à la production sur les sucres + 100 000
0098 Taxes sur les stations et liaisons radioélectriques privées + 92 000
0099 Autres taxes + 19 000
. Totaux pour le 7 - 4 440 000

B. - Recettes non fiscales
1. Exploitations industrielles et commerciales et établissements publics à caractère financier
0110 Produits des participations de l'Etat dans des entreprises financières + 626 000
0111 Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l'impôt sur les sociétés + 1 900 000
0116 Produits des participations de l'Etat dans des entreprises non financières et bénéfices des établissements publics non financiers + 1 228 000
0129 Versements des budgets annexes + 42 000
. Totaux pour le 1 + 3 796 000
2. Produits et revenus du domaine de l'Etat
0299 Produits et revenus divers + 30 000
3. Taxes, redevances et recettes assimilées
0301 Redevances, taxes ou recettes assimilées de protection sanitaire et d'organisation des marchés de viandes - 25 000
0309 Frais d'assiette et de recouvrement des impôts et taxes établis ou perçus au profit des collectivités locales et de divers organismes + 677 000
0314 Prélèvements sur le produit des jeux dans les casinos régis par la loi du 15 juin 1907 + 250 000
0315 Prélèvements sur le pari mutuel - 100 000
0339 Redevance d'usage des fréquences radioélectriques + 105 000
0399 Taxes et redevances diverses + 100 000
. Totaux pour le 3 + 1 007 000
4. Intérêts des avances, des prêts et dotations en capital
0401 Récupération et mobilisation des créances de l'Etat + 20 000
0404 Intérêts des prêts du Fonds de développement économique et social + 20 000
0406 Intérêts des prêts consentis aux organismes d'habitation à loyer modéré et de crédit immobilier - 70 000
0410 Intérêts des avances du Trésor - 2 000
0411 Intérêts versés par divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics au titre des avances + 276 000
0499 Intérêts divers - 50 000
. Totaux pour le 4 + 194 000
5. Retenues et cotisations sociales au profit de l'Etat
0502 Contributions aux charges de pensions de France Télécom - 54 000
0505 Prélèvement effectué sur les salaires des conservateurs des hypothèques + 40 000
0506 Recettes diverses des services extérieurs du Trésor - 5 000
0508 Contributions aux charges de pensions de La Poste - 159 000
. Totaux pour le 5 - 178 000
6. Recettes provenant de l'extérieur
0601 Produits des chancelleries diplomatiques et consulaires - 20 000
0604 Remboursement par les Communautés européennes des frais d'assiette et de perception des impôts et taxes perçus au profit de son budget - 160 000
. Totaux pour le 6 - 180 000
7. Opérations entre administrations et services publics
0708 Reversements de fonds sur les dépenses des ministères ne donnant pas lieu à rétablissement de crédits + 200 000
0712 Remboursement de divers frais de gestion et de contrôle + 2 000
. Totaux pour le 7 + 202 000
8. Divers
0802 Recouvrements poursuivis à l'initiative de l'agence judiciaire du Trésor. Recettes sur débets non compris dans l'actif de l'administration des finances - 20 000
0805 Recettes accidentelles à différents titres + 512 000
0806 Recettes en atténuation des charges de la dette et des frais de trésorerie - 1 859 000
0808 Remboursements par les organismes d'habitation à loyer modéré des prêts accordés par l'Etat - 200 000
0809 Recettes accessoires sur les dépenses obligatoires d'aide sociale et de santé - 3 000
0812 Reversements de la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur - 4 000 000
0813 Rémunération de la garantie accordée par l'Etat aux caisses d'épargne + 2 200 000
0815 Rémunération de la garantie accordée par l'Etat à la Caisse nationale d'épargne - 1 700 000
0899 Recettes diverses - 1 359 000
. Totaux pour le 8 - 6 429 000

C. - Prélèvements sur les recettes de l'Etat 1. Prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des collectivités locales
0002 Prélèvement sur les recettes de l'Etat du produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation - 72 524
0003 Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs - 22 727
0004 Prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit du Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle + 255 370
0005 Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle - 315 000
0007 Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale - 394 370
0009 Prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit de la collectivité territoriale de Corse et des départements de Corse + 4 600
0010 Compensation de la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle + 1 318 608
. Totaux pour le 1 + 773 957

2. Prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit du budget des Communautés européennes
0001 Prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit du budget des Communautés européennes - 2 700 000

RÉCAPITULATION GÉNÉRALE A. - Recettes fiscales
1 Impôts sur le revenu + 3 150 000
2 Autres impôts directs perçus par voie d'émission de rôles + 1 300 000
3 Impôt sur les sociétés + 21 100 000
4 Autres impôts directs et taxes assimilées - 3 959 000
5 Taxe intérieure sur les produits pétroliers + 1 892 000
6 Taxes sur la valeur ajoutée - 60 000
7 Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes - 4 440 000
. Totaux pour la partie A + 18 983 000
B. - Recettes non fiscales
1 Exploitations industrielles et commerciales et établissements publics à caractère financier + 3 796 000
2 Produits et revenus du domaine de l'Etat + 30 000
3 Taxes, redevances et recettes assimilées + 1 007 000
4 Intérêts des avances, des prêts et dotations en capital + 194 000
5 Retenues et cotisations sociales au profit de l'Etat - 178 000
6 Recettes provenant de l'extérieur - 180 000
7 Opérations entre administrations et services publics + 202 000
8 Divers - 6 429 000
. Totaux pour la partie B - 1 558 000
C. - Prélèvements sur les recettes de l'Etat
1 Prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des collectivités locales - 773 957
2 Prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des Communautés européennes + 2 700 000
. Totaux pour la partie C + 1 926 043
. Total général + 19 351 043

II. - Supprimé

III. - COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE

(En francs)

NUMÉRO

de la ligne


DÉSIGNATION DES RECETTES

RÉVISION
des évaluations

pour 1999

Compte d'emploi de la taxe parafiscale affectée au financement des organismes du secteur public de la radiodiffusion sonore et de la télévision

01 Produit de la redevance
71 470 000

. Total pour les comptes d'affectation spéciale 71 470 000

IV. - COMPTES DE PRÊTS

(En francs)

NUMÉRO

de la ligne


DÉSIGNATION DES RECETTES

RÉVISION
des évaluations

pour 1999

Prêts du Fonds de développement économique et social
01 Recettes - 45 000 000

Prêts du Trésor à des Etats étrangers pour la consolidation de dettes envers la France

01 Recettes
1 600 000 000

. Total pour les comptes de prêts 1 555 000 000


Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 32, M. Marini, au nom de la commission, propose, dans le tableau figurant à cet article, dans la rubrique : « A. - Opérations à caractère définitif du budget général », de majorer les ressources brutes de 20 000 millions de francs.
Par amendement n° 69 rectifié, le Gouvernement propose :
I. - De rédiger comme suit le tableau figurant à cet article :


(En millions de francs)


RESSOURCES

DÉPENSES
ordinaires

civiles

DÉPENSES
civiles

en capital

DÉPENSES

militaires

TOTAL
des dépenses
à caractère

définitif

PLAFOND
des charges
à caractère

temporaire


SOLDE

A. - Opérations à caractère définitif


Budget général
Ressources brutes 30 651 Dépenses brutes 23 047 . . . . .

A déduire :

A déduire :

Remboursements et dégrèvements d'impôts 13 095 Remboursements et dégrèvements d'impôts 13 095 . . . .




.

Ressources nettes 17 556 Dépenses nettes 9 952 2 589 - 4 502 8 039 .




.
Comptes d'affectation spéciale 71 . 71 » » 71 .




.
Totaux du budget général et des comptes d'affectation spéciale 17 627 . 10 023 2 589 - 4 502 8 110 .






.

Budgets annexes
Aviation civile » . » » . » . .
Journaux officiels » . » » . » . .
Légion d'honneur » . » » . » . .
Ordre de la Libération » . » » . » . .
Monnaies et médailles » . » » . » . .
Prestations sociales agricoles » . » » . » .



.
Totaux des budgets annexes » . » » . » .








.
Solde des opérations définitives de l'Etat (A) . . . . . . . 9 517


B. - Opérations à caractère temporaire

Comptes spéciaux du Trésor
Comptes d'affectation spéciale » . . . . . » .
Comptes de prêts 1 600 . . . . . 500 .
Comptes d'avances » . . . . . » .
Comptes de commerce (solde) » . . . . . » .
Comptes d'opérations monétaires (solde) » . . . . . » .
Comptes de règlement avec les gouvernements étrangers (solde) » . . . . . »








.
Totaux (B) 1 600 . . . . . 500














.
Solde des opérations temporaires de l'Etat (B) . . . . . . .

1 100

Solde général (A + B) . . . . . . . 10 617



II. - Dans l'état A annexé, de modifier les évaluations de recettes comme suit :

« I. - BUDGET GÉNÉRAL
« A. - Recettes fiscales
« 2. Autres impôts directs
perçus par voie d'émission de rôles

« Ligne 002, Autres impôts directs perçus par voie d'émission de rôles : majorer de 500 000 000 francs.

« 3. Impôt sur les sociétés


« Ligne 003, Impôt sur les sociétés : majorer de 10 000 000 000 francs.

« 7. Enregistrement, timbre,
autres contributions et taxes indirectes

« Ligne 0027, Mutations à titre gratuit entre vifs (donations) : majorer de 600 000 000 francs.
« Ligne 0028, Mutations à titre gratuit par décès : majorer de 200 000 000 francs.

« IV. - COMPTES DE PRÊTS
« Prêts du Fonds de développement économique et social

« Ligne 01, Recettes : majorer de 45 000 000 francs. »
Par amendement n° 29, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le tableau figurant à cet article, dans la rubrique : « A. - Opérations à caractère définitif du budget général », de majorer les ressources brutes de 5 000 millions de francs.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° 32.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit là d'un point central de notre débat, à savoir l'estimation réaliste des recettes fiscales de l'année 1999.
Monsieur le ministre, nous l'avons déjà dit à plusieurs reprises, la commission des finances a fondé sur l'observation de l'exécution des recettes sur une période de cinq années au moins un calcul prévisionnel selon lequel nous disposerons, au 31 décembre 1999, d'un volume de recettes supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale compris entre 30 et 40 milliards de francs.
En nous référant au principe de prudence, nous proposons donc, par le présent amendement, de majorer les ressources brutes de l'Etat de 20 milliards de francs par rapport aux estimations susvisées, ce qui nous placerait ainsi près du terme bas de la fourchette que je viens d'indiquer.
Pour ce qui est de l'affectation de cette somme supplémentaire et ainsi considérée comme disponible, la commission des finances souhaite que la moitié, c'est-à-dire 10 milliards de francs, vienne renforcer la diminution du déficit budgétaire et que l'autre moitié, soit 10 milliards de francs également, soit consacrée au financement des mesures d'abaissement des différents prélèvements fiscaux, à commencer par l'impôt sur le revenu, en rectifiant le barème de ce dernier, par exemple, pour que la composante « croissance » soit prise en compte dans l'évolution de ce barème.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 69 rectifié.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cet amendement tend à corriger l'équilibre de ce collectif budgétaire à trois titres.
Premièrement, et c'est l'essentiel, il a pour objet de relever le niveau des recettes de 11,3 milliards de francs, soit 0,7 % des recettes fiscales nettes, ce afin de tenir compte des informations les plus récentes. Cette réévaluation porte pour sa plus grande part, soit 10 milliards de francs, sur le niveau des recettes de l'impôt sur les sociétés.
Etant donné le débat que le Gouvernement a eu avec le Parlement depuis deux semaines sur ce sujet, j'ai souhaité disposer d'informations très précises en amont des encaissements définitifs du mois de décembre. Les dernières informations dont j'ai eu connaissance, et qui sont postérieures à l'échéance du 15 décembre, c'est-à-dire à la date de versement de l'acompte de l'impôt sur les sociétés - il ne s'agit pas encore d'informations comptables ; ce sont seulement des statistiques - nous laissent envisager que l'acompte de décembre sera plus important que prévu, d'où la correction des recettes que propose le Gouvernement.
Les deux autres points de l'amendement sont moins importants.
Le deuxième point tire la conséquence en temps réel, si je puis dire, de l'amendement qui vient d'être adopté sur l'initiative de M. Mariani et par lequel est supprimée la mesure d'abandon de créances de l'Etat vis-à-vis de l'Agence France-Presse. Il est donc ajouté 45 millions de francs de recettes aux comptes de prêts.
Enfin, le troisième point, qui est une réponse indirecte à Mme Beaudeau, c'est le relèvement du plafond des dépenses de 3 milliards de francs pour tenir compte des dernières mesures prises en matière de minima sociaux. Je rappelle qu'en ce qui concerne le revenu minimum d'insertion la prime sera versée dans les prochains jours par les caisses d'allocations familiales, celles-ci en demandant ensuite le remboursement à l'Etat. Une ouverture de crédits de 2 milliards de francs est prévue à ce titre, afin d'éviter de peser sur la gestion de l'an prochain.
Pour ce qui est de l'allocation de solidarité spécifique et de l'allocation d'insertion, le coût de la prime de fin d'année est évalué à 600 millions de francs. En conséquence, 400 millions de francs ont été ajoutés pour tenir compte de l'évolution de la situation du fonds de solidarité.
Si le Sénat, comme je l'espère, adopte cet amendement qui va dans le sens qu'il souhaite, le déficit, au stade du collectif budgétaire, atteindrait ainsi 226 milliards de francs.
M. le président. La parole est à Mme Borvo, pour présenter l'amendement n° 29.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, notre amendement, qui a été déposé avant que nous ne connaissions celui du Gouvernement, a trait, en réalité, aux 3 milliards de francs dont il est question dans votre amendement, vous le comprendrez aisément.
Nous considérons, nous aussi, que le niveau des recettes budgétaires de l'exercice 1999 est plutôt sous-estimé, peut-être par un excès de prudence. Les perspectives offertes par le développement de l'activité économique nous permettent de faire mieux.
En ce qui nous concerne, nous ne pensons pas, contrairement à M. le rapporteur général, qu'il convienne d'affecter de manière automatique les plus-values fiscales que l'on pourrait enregistrer à la seule réduction des déficits publics.
En ce domaine, il est vrai que la droite sénatoriale est assez peu gênée aujourd'hui de demander un tel effort, après avoir soutenu pendant quatre ans des politiques budgétaires et fiscales dont la conséquence la plus palpable a été, précisément, l'accroissement de la fiscalité et des déficits. Par conséquent, bien évidemment, nous ne sommes pas dans la même logique.
Nous nous apprêtons à passer le cap de l'an 2000 et des millions de nos compatriotes, du fait du chômage et de la précarité, sont privés du droit de vivre dignement. Pour l'instant, monsieur le ministre, les dispositions contre l'exclusion que nous avons soutenues, et que nous continuons de soutenir, n'ont pas d'effets tangibles et la reprise économique, dont les actionnaires mesurent quelques effets, ne concerne pas les plus démunis. Les chômeurs se sont fortement exprimés en ce sens ces dernières semaines.
Le Gouvernement, j'en conviens, a entendu l'urgence. Nous ne sous-estimons pas les 3 milliards de francs que vous proposez, monsieur le ministre, mais, vous en conviendrez, c'est peu.
Nous sommes persuadés, comme vous, et les personnes qui sont privées d'emplois aussi, d'ailleurs, que les solutions résident dans une logique déterminée de maintien et de création d'emplois et nous souhaitons que cette politique soit encore plus déterminée.
Nous pensons aussi qu'une réforme de l'indemnisation du chômage est absolument indispensable, puisque, aujourd'hui, plus de la moitié des chômeurs ne sont pas indemnisés. Mais nous sommes dans l'urgence. Le Gouvernement peut faire plus en matière de justice sociale quand la situation économique s'améliore.
Notre proposition est donc simple : il s'agit de procéder à une réévaluation des recettes pour répondre à cette urgence. Nous proposons donc que 5 milliards de francs de recettes soient consacrés à l'aide aux plus défavorisés. Par exemple, l'aide de fin d'année pourrait être portée à un montant plus significatif : environ 3 000 francs.
Ce n'est pas la panacée, j'en conviens, mais quand nombre de nos compatriotes s'apprêtent à fêter l'an 2000 en débouchant encore plus de bouteilles de notre breuvage national, donner 3 000 francs à ceux qui n'ont même pas ou à peine ces 3 000 francs par mois pour survivre ne serait vraiment pas un luxe.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 69 rectifié et 29 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission ne peut que se réjouir de voir M. le ministre entamer sur ce sujet, j'allais dire son chemin de Damas (M. le ministre sourit) et constater l'évidence : la réévaluation du chiffre des recettes budgétairement prises en compte.
Vous l'avez dit, monsieur le ministre, l'observation des rentrées réelles conduit à une nouvelle estimation, au demeurant, pas seulement au titre de l'impôt sur les sociétés car, en matière d'impôt sur le revenu aussi, des constatations peuvent être faites. Notre collègue Yves Fréville, me semble-t-il, relevait très justement ce matin que, selon les données qui nous ont été communiquées, à partir du 15 novembre, toutes les recettes d'impôt sur le revenu qui sont encaissées le sont au-delà du chiffre prévisionnel établi en loi de finances. Par conséquent au-delà du 15 novembre, y compris les ressources habituellement abondantes en fin d'exercice, il y a - et il faut s'en réjouir - un produit net supplémentaire pour le budget de l'Etat au titre de l'impôt sur le revenu.
Par ailleurs, vous avez observé, monsieur le ministre, comme nous-mêmes, que l'affichage qui était fait en loi de finances initiale concernant une excédent primaire de l'Etat se trouvait battu en brèche par la conjoncture économique, notamment par les phénomènes affectant les taux d'intérêt et le coût de la dette.
L'amendement que vous nous proposez permet à l'Etat de revenir en excédent primaire, alors que les chiffres du projet de collectif budgétaire tel qu'il a été établi par le Gouvernement faisaient encore ressortir un déficit primaire.
Enfin, il vous fallait bien trouver une solution - vous l'avez grâce aux excédents de recettes - pour financer les quelque 3 milliards de francs qui sont à dépenser pour des raisons sociales, dont nous ne disconvenons pas, bien au contraire. Je rappelle que, il y a déjà presque deux ans, sur ce sujet précis, c'est un décret d'avance, dès le mois de janvier 1998 si je ne m'abuse, qui avait permis le financement d'une mesure analogue prise au moment des fêtes de fin d'année.
Que faut-il penser de l'amendement qui nous est présenté par le Gouvernement ?
Cet amendement tend à majorer les recettes de 11,3 milliards de francs, dont 10 milliards de francs en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés et 1,3 milliard de francs au titre des droits de mutation et de certains impôts directs. Il doit être dit qu'il s'agit encore d'estimations par défaut, qui se situent probablement à un certain nombre de milliards de francs de la réalité, telle qu'elle sera révélée, en définitve, par le « juge de paix » qui nous départagera sans peine, monsieur le ministre : la loi de règlement. En général, ce texte ne suscite pas une très large audience au sein des assemblées, mais c'est la reddition des comptes de l'Etat. Il faudrait sans doute donner un peu plus de lustre à cette loi de règlement.
Quelles seront les conséquences de cette réestimation des recettes en ce qui concerne le niveau des prélèvements obligatoires ? Vous avez relevé, monsieur le ministre, que, lors de la discussion générale du projet de loi de finances initiale, j'avais parlé d'un « pic » à propos du taux des prélèvements obligatoires. Or il est vraisemblable que ce pic se situera un peu plus haut que les 45,3 points de PIB qui étaient affichés jusqu'ici. Et vous savez que notre hantise est que ce pic ne devienne un plateau, surtout à une telle altitude ! (Sourires.)
Par ailleurs, s'agissant des dépenses, le Gouvernement, ainsi que je le relevais, propose la majoration de 3 milliards de francs que j'ai déjà commentée.
Le collectif budgétaire, compte tenu de l'amendement, se situerait en excédent de 10,5 milliards de francs et nous nous trouverions de nouveau en excédent primaire.
Les chiffres du déficit budgétaire et la séquence en la matière me semblent appeler un commentaire. En 1998, le déficit budgétaire aura été de 257,8 milliards de francs en loi de finances initiale ; en 1999, toujours en loi de finances initiale, il était de 236,5 milliards de francs, et il serait réduit aujourd'hui à 215,4 milliards de francs. Pour 2000, le projet de loi de finances, qui va être adopté de manière définitive par l'Assemblée nationale, est fondé sur une estimation de 215 milliards de francs. Il apparaît donc, monsieur le ministre, que l'effort supplémentaire que vous avez affiché en loi de finances initiale pour 2000 est maintenant extrêmement faible.
En effet, 10 milliards de francs d'amélioration du solde budgétaire entre le 31 décembre 1999 et le 31 décembre 2000, cela semble extrêmement peu par rapport aux critères de convergence européens et par rapport aux efforts réalisés par nos principaux partenaires. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, nous avions soutenu que l'effort de réduction du déficit en 2000, compte tenu de la bonne conjoncture économique que l'on pouvait anticiper pour 2000, était insuffisant. Il l'est d'autant plus aujourd'hui : mécaniquement, dès lors que le déficit s'atténue en 1999, cet effort apparaît un objectif bien faible pour 2000.
Monsieur le ministre, à ce stade du débat - la remarque est d'importance - la réestimation des recettes de 1999 emporte, dans son principe, une réestimation des recettes de l'année 2000, car les effets conjoncturels que l'on engrange en 1999 sont, Dieu merci ! durables, et ce sont les conditions de l'équilibre budgétaire de 2000 qui se trouvent modifiées par la réestimation qu'il est raisonnable de faire aujourd'hui.
Je ne voudrais pas profiter de la situation pour ironiser, monsieur le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Ce n'est pas votre genre, en effet !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Toutefois, je citerai les première et dernière phrases du communiqué que vous avez fait diffuser, il n'y a guère qu'un mois, le 19 novembre dernier, certainement sur la foi d'éléments...
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Incontestables !
M. Philippe Marini, rapporteur général ... interprétés en toute objectivité, du moins je le suppose.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Et vous avez raison !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vous livre la première phrase : « Le rapport du Sénat sur le projet de loi de finances pour 2000 se livre à un exercice de simulation sur l'exercice fiscal 1999. » C'est vrai ! Vous m'aviez même qualifié, et j'y avais été très sensible, de « prince de l'extrapolation ». (Sourires.) C'est une appellation que je vais effectivement garder sur mes tablettes, car ce sera un excellent souvenir, monsieur le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Houdini du déficit ! (Nouveaux sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais la dernière phrase de votre communiqué mérite également d'être citée : « Les chiffres du rapport du Sénat ne sont pas fondés, puisqu'ils ignorent en particulier les phénomènes calendaires ayant affecté les recouvrements d'IR et d'IS. » L'impôt sur les sociétés, vous le réévaluez ; quant à l'impôt sur le revenu, je le dis, il faudra aussi le réévaluer !
Monsieur le ministre, en résumé, la commission des finances, après un débat significatif, a émis un avis favorable sur cet amendement dans la mesure où il va dans le sens d'un plus grand réalisme. Certes, il ne va pas tout à fait jusqu'au bout, mais nous n'en recommandons pas le rejet pour autant, considèrant que, d'ici à quelques mois, nous y verrons clair.
Simplement, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous acceptiez de vous livrer avec nous, en toute transparence, à un examen des produits fiscaux issus des différents impôts lors de la reddition des comptes de 1999. Car s'il est possible, lorsque les marges ne sont que de quelques milliards de francs, d'évoquer des effets de report ou des phénomènes de fin d'exercice, il n'en va pas de même, en revanche, lorsque les ordres de grandeur de la croissance s'amplifient pour atteindre quelques dizaines de milliards de francs. A l'évidence, on ne peut pas pousser éternellement devant soi des excédents de recettes et il faut rattacher à chaque exercice ce qui doit lui revenir. Cet effort de clarification en réalisation, sur la base des chiffres réels de 1999, impôt par impôt, semble absolument indispensable à la commission des finances. C'est naturellement sous réserve de cet exercice de transparence que la commission a émis l'avis favorable dont j'ai fait état.
Quant à l'amendement n° 29, qui partait d'un bon sentiment (exclamations amusées sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen), il a été un peu dépassé par les circonstances, et paraît dorénavant bien peu généreux. C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je saurai vous le rappeler !
M. le président. Dois-je en déduire, monsieur le rapporteur général, que vous retirez l'amendement n° 32 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, avant de confirmer cette orientation éventuelle, j'aurais souhaité entendre M. le ministre sur les différents éléments que j'ai abordés en présentant l'avis de la commission sur l'amendement du Gouvernement.
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 32 et 29 ?
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Dans ce débat de belle facture démocratique, je voudrais répondre aux interrogations de M. le rapporteur avant de m'adresser à Mme Borvo.
Sur la méthode, tout d'abord, nous avons réévalué - c'était inclus dans les 13 milliards de francs - de 5 milliards de francs le rendement de l'impôt sur le revenu. J'attire simplement votre attention, monsieur le rapporteur général, sur le fait que sont inclus dans cette ligne composite l'effet des 6 à 7 milliards de francs de droit de bail.
Je maintiens que les exercices de calcul auxquels vous vous êtes livré relèvent largement de l'extrapolation. En effet, comme je l'ai dit dans la discussion générale, il n'y a pas de raison que, d'une année sur l'autre, les recettes pour les mois de novembre et de décembre soient les mêmes, quelle que soit l'année considérée, au moins en proportion. Et j'insiste sur le fait que le « profil » de l'année 1999 a été particulièrement heurté. Je maintiens donc que vos calculs sont partis d'hypothèses à mon sens trop mécaniques pour être entièrement satisfaisantes.
Nous avons un débat sur le chemin. Pour moi, notre pays, et c'est l'essentiel, a retrouvé le chemin de la croissance de même que le Gouvernement, avec la majorité qui le soutient, a retrouvé le chemin de l'effort réussi.
Il se trouve qu'en ce 20 décembre le Gouvernement est du côté de la prudence, tandis que vous, monsieur le rapporteur général, contrairement aux usages de la Haute Assemblée, êtes du côté de l'impatience. (Sourires.) Mais comme vous l'avez dit très justement, nous nous reverrons lorsque nous disposerons des comptes complets de l'année 1999 et je suis évidemment tout disposé, avec la commission des finances, voire dans le cadre du débat d'orientation budgétaire, à examiner, impôt par impôt, l'évolution de 1999.
Vous souhaitez la transparence ? Je la souhaite aussi. Nos voeux se rejoignent donc.
Vous avez souligné l'écart entre les budgets exécutés et les budgets votés en loi de finances. C'est vrai, et il n'était pas de tradition que le solde d'exécution du budget soit, comme il l'est depuis 1997, inférieur au déficit prévisionnel. Je vous rappelle rapidement les chiffres : en 1997, le déficit prévu était de 285 milliards de francs, mais il a été constaté à hauteur de 267 milliards de francs ; en 1998, le déficit prévu était de 257 milliards de francs, mais il a été constaté à hauteur de 247 milliards de francs ; en 1999, année dont nous débattons aujourd'hui, un déficit de 236 milliards de francs a été prévu, mais le déficit constaté est de 226 milliards de francs. Pour 2000, nous verrons, mais nous avons travaillé sur une prévision de déficit de 215 milliards de francs.
Vous vous êtes inquiété des conséquences sur 2000 de cette réévaluation de la base de 1999. Vous savez que, en ce qui concerne l'impôt sur les bénéfices des sociétés, il n'y a pas d'effet de base automatique. Les 10 milliards de francs que nous venons d'ajouter ne sont donc pas reconductibles l'an prochain.
En ce qui concerne l'amendement n° 69 rectifié du Gouvernement, monsieur le rapporteur général, en toute modestie, il me paraît plus prudent que le vôtre. Je me permets donc courtoisement de vous suggérer de retirer ce dernier au profit de l'amendement gouvernemental, qui me paraît correspondre à la prudence et à la raison. Nous aurons le rendez-vous promis, comme vous l'avez souhaité, dans le courant du premier semestre de l'an prochain.
Mais je me tourne maintenant vers Mme Borvo. Les résultats de la politique menée depuis l'été 1997 en faveur de l'emploi ne sont pas négligeables. Je vous rappelle que le nombre de chômeurs de longue durée est descendu en dessous du million. C'est encore beaucoup, mais c'est moins qu'auparavant, et c'est la première fois depuis 1992. De surcroît, selon toute vraisemblance, les entreprises créeront, du fait de la croissance et du fait de la réduction négociée du temps de travail, près d'un million d'emplois d'ici à la fin de 2000. Sur une période aussi courte, notre pays n'a jamais connu une telle création d'emplois, même dans les périodes de croissance particulièrement rapide !
J'ajoute que le budget de l'emploi et de la solidarité, qui avait été quelque peu négligé antérieurement, est maintenant le deuxième budget de l'Etat, derrière l'éducation nationale mais devant les intérêts de la dette. Voilà qui prouve que le Gouvernement partage votre préoccupation et tient à consacrer l'effort de solidarité à ceux qui en ont le plus besoin, et je ne cite que pour mémoire la couverture maladie universelle et d'autres dispositifs mis en place en faveur de personnes qui méritent, il est vrai, une attention particulière.
Cela étant dit, il me semble que l'amendement gouvernemental recouvre, si je puis dire, le vôtre, que je vous recommande donc également de retirer.
M. Alain Lambert président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Ce matin, j'ai en effet regretté le déficit démocratique dont souffraient, à mon avis, les relations entre le Gouvernement et le Parlement, plus particulièrement entre le Gouvernement et le Sénat. Je me réjouis donc qu'un dialogue démocratique « de bonne facture », pour reprendre votre expression, se renoue enfin sur une question aussi capitale.
Je ne sais si vous êtes du côté de la prudence et si M. le rapporteur général est, lui, du côté de la patience, mais je sais que, au point où nous en sommes, nous devons être ensemble du côté de la sincérité des comptes. Pour vous aider à atteindre une transparence et une parfaite sincérité - je ne doute pas d'ailleurs que vos intentions soient les meilleures - je vous poserai trois questions, qui nous éclaireront mais qui vont aussi vous engager. En effet, quand je vois mon collègue M. Michel Charasse se munir du texte de notre Constitution, je me demande toujours si une question de constitutionnalité ne plane pas sur les dispositions en discussion. (M. le ministre sourit.)
Ma première question vise les notifications que vous êtes conduit à faire, et vous avez parlé tout à l'heure des documents que vous adressez à Bruxelles. A cet égard, je serais heureux que vous me disiez quel niveau de besoin de financement des administrations publiques est prévu dans votre notification, qui doit être sur le point d'être envoyée, et j'aimerais savoir à quel niveau de déficit de l'Etat est associée cette notification.
J'en viens à ma deuxième question. Lorsque votre collectif a été présenté en conseil des ministres, vous avez sans doute fait état de situations hebdomadaires. Pour ma part, je regrette que la commission des finances du Sénat ne soit pas destinataire de ces situations hebdomadaires. Dans la période actuelle, cela serait utile et, je puis vous l'assurer, le rapporteur général les examinerait à la loupe. Je souhaiterais savoir si la dernière situation hebdomadaire que vous avez pu porter à la connaissance du conseil des ministres était différente de celle qui a motivé votre décision et le dépôt de cet amendement. J'aimerais aussi que vous nous précisiez si vous êtes en mesure de nous communiquer désormais, jusqu'à la fin de l'exécution de 1999, ces situations hebdomadaires.
Enfin, il est un autre aspect qui me semble intéressant. Dès lors que nous avons plus de recettes et une trésorerie plus importante, il conviendrait de pouvoir comparer les émissions d'emprunts et celles que vous aviez annoncées. Y a-t-il un écart entre les émissions d'emprunts que vous aviez envisagées et les émissions que vous allez lancer ?
Ces trois éléments d'information seraient sans doute de nature à nous aider à prendre la décision que vous attendez de nous.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. M. le président de la commission des finances me pose sur un ton si courtois des questions si précises que je crois qu'elles appellent une réponse.
S'agissant, tout d'abord, des perspectives pluriannuelles, nous les avons faites l'an dernier ; nous allons renouveler l'exercice cette année. Comme cela a été le cas l'année dernière, nous vous proposerons de venir les présenter devant la commission des finances du Sénat, au début de l'an prochain, avant de les transmettre à l'Union européenne. Puisque vous m'avez posé une question précise, j'indique que le déficit de l'ensemble des administrations publiques, qui s'élevait à 2,3 % en 1999, atteint actuellement 2,1 %.
Ensuite, vous avez évoqué les situations hebdomadaires. Nous sommes l'un des rares pays européens à publier une situation mensuelle. C'est grâce à la publication de ces situations mensuelles que nous avons ce débat de qualité sur l'exécution budgétaire. Il existe même des situations quotidiennes sur la trésorerie de l'Etat. Les données les plus récentes montrent que, au 15 décembre, les sommes perçues au titre du troisième acompte de l'impôt sur le bénéfice des sociétés sont supérieures à nos prévisions. En effet, nous pensions que les sociétés utiliseraient plus largement la possibilité dont elles disposent d'en reporter une partie sur le solde qu'elles verseront au printemps 2000.
En ce qui concerne les émissions d'emprunts, le programme d'émissions a été réalisé comme prévu et il a été procédé à quelques rachats.
M. le président. L'amendement n° 32 est-il maintenu, monsieur le rapporteur général ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Peut-être certains de nos collègues souhaitent-ils compléter les éléments versés au débat afin que la commission soit pleinement éclairée pour prendre cette décision difficile ?
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 32.
M. Jean-Pierre Fourcade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Pendant un instant, j'ai cru être revenu quelques années en arrière et participer à un débat en commission des finances. Je suis heureux que, grâce à la courtoisie de M. le rapporteur général, il n'en soit rien et que nous revenions à un débat d'assemblée plénière. Monsieur le ministre, je vous poserai deux questions et ferai une observation.
Excusez-moi de passer d'un chiffre de 10 milliards de francs à une somme de quelques centaines de millions de francs, mais les collectivités locales sont toujours au franc près. D'ailleurs, c'est aussi grâce aux collectivités territoriales que le déficit des administrations publiques diminue.
Dans votre amendement n° 69 rectifié, vous avez dû modifier la compensation de la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle, à savoir quelque 1,3 milliard de francs. Une telle rectification était nécessaire puisque, je le reconnais, l'évaluation de cette compensation était difficile. Première question : cette rectification de 1,3 milliard de francs fera-t-elle bien partie de la base de la compensation qui sera versée aux collectivités territoriales en 2000 ? En effet, dans le projet de budget initial avait été prévue une compensation inférieure. Ce 1,3 milliard de francs serat-il pris en compte ? Autrement dit, s'agissant de la compensation, y aura-t-il, comme en matière de dotation globale de fonctionnement, un « rebasage », pour employer le jargon budgétaire ?
J'en viens à ma seconde question. Dans votre récapitulation générale, le prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit des Communautés européennes diminue de 2,7 milliards de francs. Par quel heureux hasard pouvez-vous « rempocher », si j'ose dire, ces 2,7 milliards de francs ? Cela représente tout de même un peu d'argent. Quel est l'heureux événement qui vous permet de réduire de ce montant la contribution de notre pays au budget des Communautés européennes.
Je terminerai par une observation.
Voilà dix jours, nous nous sommes opposés, monsieur le ministre, sur le problème de la prise en compte dans la DGF pour 2 000 des conséquences du recensement, essentiellement pour les communes dont la population a augmenté et qui sont réduites à la portion congrue. Or, je constate que, aujourd'hui, vous économisez 315 millions de francs sur le prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, la fameuse DCTP. Je constate également que vous économisez 394,4 millions de francs pour le prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale. L'économie est donc de l'ordre de 700 millions de francs sur les prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des collectivités locales. Voilà dix jours, nous nous battions avec le Gouvernement pour obtenir une augmentation de 285 millions de francs supplémentaires pour la DGF de l'année prochaine afin de tenir compte du recensement et d'éviter que les villes dont la population a augmenté ne soient trop pénalisées. La dureté avec laquelle le Gouvernement avait alors repoussé tous nos amendements me semble un peu battue en brèche compte tenu des 700 millions de francs qui apparaissent aujourd'hui dans la rectification.
Cela étant dit, vous avez fait un effort sérieux de réévaluation des recettes dans le collectif. Je n'ai pas de conseil à donner, mais votre amendement me paraît raisonnable. Nous verrons bien dans quelques mois qui avait raison, M. le rapporteur général ou vous-même. Cependant, faire apparaître, compte tenu de l'acompte qui devait être versé au 15 décembre, une réévaluation des recettes au titre de l'impôt sur les sociétés de 10 milliards de francs est un geste dont le Sénat doit, me semble-t-il, vous donner acte.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Il s'agit d'un débat important. Pour ma part, je situerai mon intervention à trois niveaux : le contexte économique, la technique budgétaire et la réponse apportée à l'attente sociale.
Tout d'abord, nous constatons comme vous, monsieur le ministre, et avec satisfaction, que la situation économique s'est améliorée et que le processus se poursuit. Cette évolution se traduit par un taux de croissance élevé, plus important que celui que vous aviez prévu, et les perspectives pour l'an 2000 sont bonnes. Cette évolution se traduit également par une reprise incontestable de l'emploi, une baisse du chômage et une augmentation sensible de la consommation avec, en corollaire, une augmentation assez forte des crédits à la consommation et, à la marge, une progression sensible des situations de surendettement.
Tout cela génère des recettes importantes pour les caisses de l'Etat. En effet, l'essentiel des ressources qui sont inscrites dans le présent collectif budgétaire proviennent de l'impôt sur les sociétés, soit un peu plus de 10 milliards de francs, mon collègue M. Jean-Pierre Fourcade et M. le rapporteur général l'ont dit avant moi, mais également des recettes perçues au titre de la TVA, ce qui est le signe incontestable d'une reprise de la consommation.
Monsieur le ministre, le groupe communiste républicain et citoyen et moi-même nous félicitons de ce contexte économique. A la différence d'autres gouvernements, vous n'avez pas cassé la croissance. Certains vous reprochent de vous approprier la croissance. Or, vous avez contribué à la favoriser par les mesures que vous avez prises. Je le répète : vous n'avez pas cassé la croissance, contrairement à des gouvernements antérieurs plutôt conservateurs qui, par leur politique de prélèvements, ont cassé le début de reprise économique que nous avions connu voilà quelques années.
J'en viens à mon deuxième point : la technique budgétaire. Nous constatons un surplus de recettes, ce qui est satisfaisant. Vous faites preuve de prudence, je ne peux que vous en féliciter. Cependant, je regrette, monsieur le ministre, que vous ayez procédé aussi tardivement à l'inscription de ces recettes supplémentaires qui étaient en partie prévisibles, même s'il n'était pas possible d'en connaître l'ampleur. En effet, cela n'a pas permis aux parlementaires, notamment à ceux qui siègent au sein de la commission des finances, d'en débattre.
Je le regrette d'autant plus, monsieur le ministre - mais j'anticipe peut-être sur l'intervention que fera tout à l'heure mon collègue M. Michel Charasse - que vous inscrivez ces recettes à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances rectificative au Sénat. Il me semble, sans être un constitutionnaliste averti, qu'il eût fallu en toute logique en faire état en premier lieu devant l'Assemblée nationale. En tout cas, le Sénat est honoré que vous lui réserviez la primeur de cette annonce. Nous en prenons acte.
J'en viens à mon troisième point, c'est-à-dire à l'utilisation de ces recettes supplémentaires. Certes, je suis d'accord avec vous, monsieur le ministre, il faut contribuer à réduire le déficit budgétaire et il convient, éventuellement, de retarder ou de décaler le calendrier des emprunts de l'Etat. Il n'en demeure pas moins que, en dépit de cette reprise économique, un grand nombre de nos concitoyens sont « scotchés », et ce terme n'est pas péjoratif. En effet, dans nos banlieues et dans certaines régions rurales, nombre de personnes sont, compte tenu de leur situation très précaire sur le plan social, intellectuel et moral, exclues de cette reprise économique car elles n'ont pas la possibilité à court terme de retrouver un emploi et ont des revenus sociaux dramatiquement faibles.
A l'heure où se produit la reprise économique, il est urgent que le Gouvernement, avec toutes les composantes de sa majorité, réfléchisse afin de trouver le moyen de faire sortir cette partie de la population que nous voyons dans nos villes et dans nos banlieues de la situation dramatique dans laquelle elle se trouve.
Je ne suis pas pour ma part favorable à l'attribution de primes de Noël. Je préférerais plutôt que soient revalorisés les minima sociaux, et je pense que le Gouvernement doit, de ce point de vue, travailler avec sa majorité et avec tous ceux qui s'occupent de la question sociale, parce que voir la richesse s'accumuler comme c'est le cas aujourd'hui et les valeurs boursières progresser de 40 % entre le 1er janvier et le 20 décembre 1999 tandis que certains de nos concitoyens s'enfoncent dans la misère, ce n'est vraiment pas supportable !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Très bien !
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Au risque de détonner un peu, j'indique que je suis très réservé à l'égard des deux amendements n°s 32 et 69 rectifié, non pas pour des raisons politiques, mais pour des raisons de principes.
Je voterai, s'il n'était pas retiré, contre l'amendement n° 32, sans aucune animosité à l'égard de la majorité sénatoriale et de la majorité de la commission des finances, mais pour des raisons de principes, encore une fois, que je vais exposer rapidement, et je voterai, en marche arrière si je puis dire, l'amendement n° 69 rectifié, qui me paraît poser moins de problèmes à cet égard que l'amendement n° 32.
Monsieur le ministre, je comprends bien pourquoi vous avez pris cette initiative devant le Sénat - mais vous auriez tout aussi bien pu le faire devant l'Assemblée nationale. Voilà des semaines, voire des mois, que nous assistons à une polémique sur la « cagnotte », la « cagnotte cachée », les mystères de la « cagnotte », etc. Il arrive un moment où il faut bien répondre, mais je suis plus réservé sur la méthode choisie, qui me paraît dangereuse pour l'autorité de l'exécutif et pour la préservation de son domaine.
Mes chers collègues, les évaluations de recettes relèvent du seul Gouvernement, comme le prévoient notamment les articles 31 et 37 de la loi organique, sauf, pour le Parlement, à rectifier des erreurs grossières ou à tirer les conséquences de ses propres votes. Accepter de laisser ce rôle d'évaluation au Parlement serait, me semble-t-il, revenir sur l'équilibre voulu par la Ve République.
M. Paul Loridant. Pourquoi pas ?
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Nous ne demandons qu'à être informés !
M. Michel Charasse. Les évaluations, mes chers collègues, sont faites par le Gouvernement en septembre, au moment où est « bouclée » la loi de finances de la prochaine année et en fonction des éléments dont on sait qu'ils seront pris en compte ou retenus ou inscrits dans le collectif budgétaire de fin d'année. Je ne vois vraiment pas comment ces dates pourraient être changées et varier tout au long du trimestre qui nous conduit jusqu'au vote final de ces deux projets de loi.
Mes chers collègues, le précédent que constituerait l'adoption de l'amendement du Gouvernement serait - je dis bien « serait » - le début d'un processus dangereux pour l'exécutif, car il pourrait jeter le trouble et le doute - M. le président de la commission des finances s'en est fait l'écho tout à fait naturellement, il ne pouvait pas faire autrement - sur la sincérité de la loi de finances de l'année suivante et du collectif budgétaire issu de la première lecture devant l'Assemblée nationale, puisqu'il nous arrive non rectifié de celle-ci.
Or, mes chers collègues, cette sincérité se juge au jour du dépôt des documents, qui exclut toute autre modification, sauf événement tout à fait exceptionnel.
J'ai dit que l'adoption de l'amendement du Gouvernement « serait » le début d'un processus dangereux, parce qu'il se trouve que ce que l'on nous propose consiste, au fond, à procéder à des ajustements à la marge : 10 milliards de francs d'un côté, 20 milliards de francs de l'autre, soit, dans le premier cas, un peu moins de 1 % du volume des charges et des recettes de l'Etat et un peu plus de 1 %, dans le second, ce qui représente entre 2 % et 4 % du déficit budgétaire. Donc, de ce point de vue, la démarche n'est pas « abominable », et je vois mal comment on pourrait mettre en cause la sincérité des prévisions, parce qu'une erreur de 1 % ou de 2 % est intervenue. Cela me paraît difficilement pouvoir constituer un élément à retenir par le Conseil constitutionnel pour mettre en doute la sincérité. Je le dis au passage à ceux de nos collègues de cette assemblée qui affirment que la loi de finances n'est pas sincère. Quand nous faisons nos propres budgets départementaux ou communaux, si nous ne nous trompions pas à 1 % près, nous serions véritablement - M. le président Fourcade m'approuve - les phénix des hôtes de ces bois. (Sourires.)
Par conséquent, pour une raison de principe, selon laquelle il n'est pas de compétence parlementaire de fixer les évaluations, je ne peux pas voter l'amendement n° 32, et je ne m'arrêterai même pas à la différence de chiffres qui existe entre les deux amendements.
Parce qu'il ne concerne qu'une rectification à la marge, j'accepte en revanche de voter l'amendement du Gouvernement, non pas parce qu'il émane du Gouvernement ou parce que l'autre amendement a été déposé par la majorité de la commission, mais simplement parce que je m'en tiens aux principes, étant entendu, monsieur le ministre, que si vous prenez l'habitude de vous engager dans des évaluations glissantes, vous verrez que la partie deviendra très glissante ! (Sourires.)
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Notre débat sur la nature des évaluations de recettes est très intéressant.
Pour ma part, je remarque tout d'abord la clairvoyance de la commission, qui a utilisé les nouveaux documents d'information que le Gouvernement met désormais à la disposition du Parlement. Il est exact à cet égard qu'un changement appréciable est intervenu depuis une dizaine d'années : nous pouvions bien entendu déjà consulter la situation résumée des opérations du Trésor, mais ce document était d'une lecture assez complexe, et nous recevons maintenant un état de la situation mensuelle d'exécution du budget.
Il me semble tout à fait normal que la commission tienne compte d'informations que le Gouvernement met à la disposition non seulement du parlement français, mais également de tous les étrangers qui souscrivent des titres de la dette publique française. Il est certain que ces informations doivent être prises au sérieux, et la commission était donc tout à fait dans son rôle en signalant un problème et en apportant, éventuellement, des corrections.
Si j'approuve la clairvoyance de la commission, j'approuve également la sagesse du Gouvernement d'avoir tenu compte de ses remarques. Jusqu'à quelle hauteur ? A la limite, cela n'a pas beaucoup d'importance : l'évaluation du Gouvernement, c'est l'évaluation basse, dont je disais ce matin qu'elle était conforme à un principe de précaution financière.
Il pourrait en effet être gênant que les recettes se révèlent inférieures aux estimations votées par le Parlement. Cette différence d'appréciation du montant des plus-values entre Gouvernement et commision revêt-elle toutefois une grande importance ? Nous examinons le projet de loi de finances rectificative et nous sommes le 20 décembre : je ne vois donc pas très bien quelle pourrait être la conséquence d'une augmentation des recettes, en dehors d'une réduction du déficit budgétaire. C'est cela, le signe important. Ce qui est essentiel, dans la décision du Gouvernement, c'est qu'elle indique que, à 3 milliards de francs près, les recettes supplémentaires seront affectées à la réduction du déficit budgétaire. Nous disposerons bientôt des chiffres réels, et alors nous ne parlerons plus de prévisions : le déficit sera mesuré en gestion, la rectification sera faite automatiquement et, au fond, peu importe que celle-ci porte sur 10 milliards de francs ou 15 milliards de francs, voire sur 20 milliards de francs si la plus-value supplémentaire n'est pas dépensée. Pour revenir sur ce que disait à l'instant notre collègue Michel Charasse, aucune conséquence n'est à attendre pour l'équilibre budgétaire, c'est une conséquence en termes de gestion que nous aurons à approuver.
Enfin, monsieur le ministre, je souhaite très vivement que vous amélioriez encore notre information. En effet, en ce qui concerne le budget, nous allons entrer dans une période, qui commencera le 1er janvier et durera de quatre à cinq mois, pendant laquelle nous serons privés d'informations, parce qu'il faut « boucler » tous les comptes s'agissant des dépenses. Or, je souhaiterais très vivement que les situations en matière de recettes soient communiquées indépendamment même des dépenses : nous saurions alors très exactement à quoi nous en tenir.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. J'ai trop d'amitié personnelle pour Michel Charasse pour ne pas apporter une précision à la suite de ce qu'il vient de dire.
Comme lui, je crois que la France, pour demeurer la France, doit avoir un exécutif fort. Par conséquent, dans mon esprit, et cela vaut pour l'ensemble de la commission des finances, j'en suis sûr, il ne s'agit en aucune façon d'empêcher le Gouvernement d'assumer pleinement ses responsabilités.
M. Michel Charasse. Je n'ai jamais pensé cela !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Mes chers collègues, quand on connaît l'équilibre instauré par la Constitution de la Ve République et par l'ordonnance organique de 1959 et que l'on mesure la marge de manoeuvre qui reste au Parlement pour exercer ses prérogatives, on conçoit qu'il faut vraiment que l'exécutif soit plus qu'à devoir, comme disent les juristes, pour que le Parlement soit informé !
Nous ne pouvons pas, en tout cas pas vous, monsieur Charasse, accepter de voir les gouvernements, les uns après les autres, donner systématiquement toutes les informations à la presse avant d'avoir informé le Parlement. (Applaudissements.)
M. Michel Charasse. Ah, ça !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. C'est systématique, et c'est intolérable !
On ne peut que s'inquiéter de constater, s'agissant des dépenses, que 93 % d'entre elles sont votées en un seul article, sans discussion. Si nous ne pouvons pas demander davantage d'informations sur les recettes de l'Etat, alors à quoi servons-nous ? Nous n'avons pas d'orgueil d'auteur ni d'orgueil de fonction, mais nous avons à défendre une certaine idée de la démocratie.
Lorsque le rapporteur général dépose un amendement le vendredi matin, il ne sait pas, à ce moment de la semaine, que le Gouvernement a lui-même l'intention d'en déposer un. Il s'agit pour lui d'interpeller le Gouvernement, de lui demander des explications sur l'évolution des recettes, qui est « chaotique », pour reprendre l'expression du ministre.
Le Sénat est donc vraiment dans son rôle. Je sais que vous croyez à l'équilibre actuel de nos institutions, monsieur Charasse, je sais que vous aimez le Sénat, alors ne lui reprochez pas sa vigilance. Dans cette fonction, avec la rigueur qui est la sienne, je crois qu'il est vraiment indispensable à la République. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le président de la commission des finances, je crois que, après ce débat, nous serons tous d'accord sur un point : vous avez eu la primeur des informations que le Gouvernement vous a transmises. Pour une fois, la presse, et je m'en excuse auprès d'elle (Sourires) , n'a donc pas été la première destinataire d'une information. Je tenais à souligner, par là même, que le Gouvernement a véritablement un grand respect pour la Haute Assemblée.
Cela étant dit, le Parlement peut-il toucher à l'équilibre budgétaire dès lors qu'il dispose de nouvelles informations ? Il est un fait que le 15 décembre est une échéance importante en matière de fiscalité des sociétés. Elle a apporté au Gouvernement, qui partage cette information avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, la certitude que le rendement de l'impôt sur le bénéfice des sociétés serait d'environ 10 milliards de francs supérieur au montant que nous avions inscrit dans le collectif budgétaire. Je pense que la démarche de sincérité qui est chère au Sénat, ainsi, bien entendu, qu'au Gouvernement, a pris le pas sur le principe important de primauté de l'Assemblée nationale en matière budgétaire.
A cet égard, je voudrais faire remarquer à M. Charasse que l'article 39 de la Constitution prévoit effectivement que, en matière de loi de finances, toute disposition nouvelle doit être soumise d'abord à l'Assemblée nationale. Mais ici, et ce débat est un peu technique, il est question de modifier l'article d'équilibre. Il ne s'agit donc pas d'une disposition nouvelle, puisque c'est un article qui, par définition, figure dans le projet de loi de finances rectificative. Par conséquent, il me semble que la majoration des recettes qui a été proposée par le Gouvernement doit être analysée comme étant un amendement à une disposition existante.
Mais je voudrais vous rassurer, monsieur le sénateur : il n'est pas question de nous engager dans un processus où, chaque semaine ou chaque mois, dans un dialogue continu avec le Parlement, le Gouvernement réviserait les chiffres en matière de recettes ou de dépenses. Je pense que nous vivons un moment exceptionnel eu égard au caractère très brutal du retournement de la conjoncture. Une telle évolution, aussi heurtée, est assez anormale, mais elle est heureuse puisqu'elle traduit une reprise, inattendue par sa force, de l'activité économique en France. Je pense que cela justifie que l'on apporte une correction, dont M. Charasse a souligné la modestie, puisqu'il ne s'agit que de 0,7 % des recettes de l'Etat. Là encore - et peut-être, au terme de ce débat, M. le rapporteur général acceptera-t-il de retirer son amendement au profit de celui du Gouvernement - je pense que nous avons travaillé tous ensemble dans la transparence et dans la rigueur juridique et constitutionnelle.
M. Fourcade m'a posé trois questions. Tout d'abord, monsieur le sénateur, concernant le 1,3 milliard de francs affecté au titre de la compensation de la réforme de la taxe professionnelle aux collectivités locales, cette révision à la hausse au titre de 1999 et bien entendu prise en compte en base pour le calcul des dotations du bugdet pour 2000. Ce point est clairement retracé dans les documents budgétaires - fascicules des voies et moyens - et dans le rapport sur la réforme de la taxe professionnelle que le Gouvernement a remis au début du mois d'octobre.
Vous me demandez par ailleurs par quel bonheur la contribution au budget européen est minorée de 2,7 milliards de francs. La raison en est tout simplement que le budget de l'Union européenne a été bien géré,...
M. Michel Charasse. Bien géré ? C'est une bonne nouvelle !
M. Jean Chérioux. Voilà une nouvelle !
M. Paul Loridant. C'est un scoop !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. « Mieux géré », dirai-je, si vous préférez, messieurs les sénateurs. Or, vous le savez, les contributions nationales sont appelées au fur et à mesure de l'exécution du budget de l'Union.
Monsieur Fourcade, je tiens à vous remercier pour l'appréciation favorable que vous avez portée sur l'amendement du Gouvernement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de ce débat en effet fort intéressant, la commission des finances est maintenant correctement éclairée.
Deux choses lui paraissent réellement importantes.
En premier lieu, nous progressons dans le sens de la transparence. Nous avons entendu votre engagement, monsieur le ministre, de vous livrer avec nous, lorsque les données de réalisation seront disponibles, à une analyse impôt par impôt, mois par mois, pour apprécier de manière aussi précise que possible le déroulement des choses au cours de l'année 1999, l'objectif étant d'en tirer non pas, bien entendu, un plaisir rétrospectif, mais des conséquences pour l'avenir. Et c'est le second point sur lequel je veux insister.
Qu'il s'agisse de réévaluer en baisse ou de réévaluer en hausse, comme c'est le cas aujourd'hui - Dieu merci ! - la mécanique de nos finances publiques comporte des rigidités auxquelles il faudrait mettre fin.
Il n'y a pas si longtemps, lorsque l'exécution des lois de finances se faisait en dégageant des moins-values de recettes, les gouvernements, placés dans cette situation par la conjoncture économique, étaient contraints d'opérer des réductions de crédits, des « régulations budgétaires », disait-on.
Dans ce cas de figure, mieux aurait valu que l'évaluation des recettes de l'Etat comporte deux tranches : une tranche « ferme » et une tranche conditionnelle avec, en contrepartie, des dépenses elles-mêmes conditionnelles, c'est-à-dire susceptibles de se réaliser dans la seule hypothèse où elles seraient gagées par des recettes certaines.
Dans le cas de figure inverse, comme c'est le cas avec l'exercice 1999, le même raisonnement peut s'appliquer. On peut avoir une tranche ferme, naturellement évaluée avec prudence, et une tranche conditionnelle de ressources susceptibles de se concrétiser et, si elles se concrétisent, susceptibles de conduire à des affectations dont les principes peuvent être arrêtés dès l'ouverture de l'exercice budgétaire.
Peut-être est-ce une vision d'impatience ? Je ne sais ! Peut-être une telle vision est-elle perfectionniste, peut-être est-elle inspirée par des finances publiques étrangères, comme les pratiques d'il y a quelques années aux Pays-Bas et que vous connaissez bien, monsieur le ministre ? Quoi qu'il en soit, la commission des finances considère que le débat que nous avons eu est une incitation à examiner en profondeur la méthodologie de nos lois de finances et à accélérer son processus de proposition en vue d'une rénovation, aujourd'hui indispensable, de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 portant sur les lois de finances.
Enfin, je dirai que la sincérité s'apprécie, constitutionnellement, au jour de l'approbation par le conseil des ministres, et donc, s'agissant du projet de loi de finances rectificative, le 24 novembre. Michel Charasse peut donc, à mon avis, être parfaitement rassuré à ce sujet, car, le 24 novembre, nous étions déjà très proches de la fin de l'exercice. Il était donc tout à fait légitime, en termes de sincérité budgétaire, de se poser toutes les questions dont nous avons longuement débattu.
Sous le bénéfice de ces différentes observations, et en remerciant les participants à ce débat, qui ont eux-mêmes permis de bien avancer dans ces sujets difficiles, je retire l'amendement n° 32 de la commission.
M. le président. L'amendement n° 32 est retiré.
Monsieur Loridant, l'amendement n° 29 est-il maintenu ?
M. Paul Loridant. Non, je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 29 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 69 rectifié, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 2 et de l'état A annexé, ainsi modifié.

(L'ensemble de l'article 2 et de l'état A est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 1999.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public est de droit.
Je rappelle que, en application de l'article 47 bis du règlement, lorsque le Sénat n'adopte pas la première partie d'un projet de loi de finances, l'ensemble du projet de loi est considéré comme rejeté.
Il va être procédé au scrutin public dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 28:

Nombre de votants 311
Nombre de suffrages exprimés 213
Majorité absolue des suffrages 107
Pour l'adoption 213

DEUXIÈME PARTIE

MOYENS DES SERVICES
ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE Ier

DISPOSITIONS APPLICABLES À L'ANNÉE 1999
I. - Opérations à caractère définitif
A. - Budget général

Article 3 et état B