Séance du 1er décembre 1999







M. le président. Par amendement n° I-291, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 27 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« Le Gouvernement déposera, sur le bureau des assemblées, dans un délai de neuf mois à compter de la date de publication de la présente loi, un rapport décrivant, pour chaque assiette de la taxe générale sur les activités polluantes, la diminution des pollutions qui aura résulté de l'application de cette taxe. Un développement particulier sera également consacré, pour chaque assiette de la taxe, aux prévisions de diminution de ces pollutions. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par le présent amendement, nous demandons au Gouvernement de déposer un rapport. Si nous formulons cette demande au cours de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, c'est parce qu'il concerne un impôt d'Etat, alors que, tout à l'heure, il s'agissait d'un rapport sur un non-impôt, que vous escomptez bien ne jamais créer. Je le précise pour répondre à une question que l'on ne manquerait sans doute pas de me poser.
Ce rapport décrira, pour chaque assiette de la TGAP, la diminution des pollutions qui aura résulté de l'application de cette taxe. Un développement particulier devra également être consacré, pour chaque assiette de la taxe, aux prévisions de diminution des pollutions. Si c'est une écotaxe, vous devrez pouvoir répondre aux questions.
M. Jean Delaneau. Ça ne va pas être triste !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je comprends la préoccupation que vous exprimez. Ça commence mal. (Sourires.) J'estime néanmoins inopportune la publication d'un rapport décrivant, pour chaque assiette de la TGAP, la diminution des pollutions résultant de l'application de cette taxe, en raison de son caractère prématuré. Les constats contenus dans un tel rapport seraient nécessairement hâtifs et incertains dès lors que l'Assemblée nationale a décidé que la perception de la TGAP due au titre des deux premiers mois de l'année 2000 interviendrait seulement à compter du 15 avril 2000. Il serait vain, en effet, d'attendre un impact environnemental positif et immédiat en termes d'économie de pollution inhérente à cette taxe en l'espace de six mois. Ce serait irréaliste.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-291.
M. Jacques Oudin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement a créé la TGAP au nom du principe pollueur-payeur. En fait, sans le dire, vous avez totalement changé la philosophie du dispositif, car maintenant il s'agit d'une taxe producteur-payeur. C'est le producteur qui paiera. En effet, l'agriculteur qui a des problèmes de production et de rendement ne diminuera pas sensiblement la quantité d'engrais qu'il utilise.
Ce n'est pas comme pour le tabac où une augmentation importante des prix peut entraîner une diminution de la consommation des jeunes. En l'occurrence, vous n'obtiendrez pas un effet du même ordre.
C'est la raison pour laquelle l'amendement proposé par la commission des finances est tout à fait fondé. En effet, nous sommes curieux de voir ce que cela donnera pour les années à venir. S'agissant de l'an 2000, peut-être est-ce prématuré. Mais, sur le principe, vous ne pouvez pas être contre, et cela vous ne l'avez pas dit.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Je crois qu'il est bon pour le Parlement et le contrôle parlementaire que nous soyons à même de contrôler, quand il le faut, l'efficacité des mesures, en particulier des mesures de nature fiscale, au regard des objectifs qui sont poursuivis lors de leur institution. Mais ce type de bilan, qu'il appartient au Gouvernement de nous fournir, surtout si on l'exige par un article de loi, doit s'effectuer en tout cas dans une telle matière, celle des pollutions visée par M. le rapporteur général, sur une période raisonnable. Je propose donc à M. le rapporteur général, s'il souhaite que son amendement ait une chance d'être adopté à l'Assemblée nationale, de présenter une nouvelle rédaction lors de l'examen du collectif. D'ailleurs, M. Oudin vient de reconnaître lui-même que, pour 2000, c'était un peu juste. Il serait de beaucoup préférable de demander un tel rapport avant la fin de la législature ou dans deux ou trois ans, parce que ce délai est nécessaire en matière de pollution. L'effet n'est pas toujours immédiat, tout le monde le sait.
Par conséquent, monsieur le rapporteur général, si vous souhaitez, tout comme moi et le groupe socialiste, que le Sénat contribue au contrôle parlementaire dans tous les domaines, y compris dans celui-ci, et si le Gouvernement le souhaite aussi, je vous en prie, revoyez le texte de votre amendement, représentez-le à l'occasion de la nouvelle lecture du présent projet de loi de finances ou lors du collectif. Nous aurons ainsi une chance d'être suivis par l'Assemblée nationale.
La rédaction actuelle est beaucoup trop hâtive. Je n'adresse aucune critique à M. le rapporteur général qui, en période budgétaire, est l'un de ceux qui travaillent le plus dans cette maison et qui est écrasé de tâches, mais il doit revoir sa rédaction car elle ne « colle » pas. Nous qui approuvons l'objectif du contrôle, nous ne pouvons pas le voter. La déposition serait d'ailleurs inopérante. Ce serait un rapport de trois pages dans lequel il n'y aurait rien.
M. Michel Moreigne. C'est le bons sens même !
M. Jean Delaneau. Mettez trois ans au lieu de neuf mois !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je remercie vivement M. Charasse de sa sollicitude et de sa proposition. Si nous avons prévu un délai de neuf mois, c'est non pas parce que c'est le délai normal de gestation d'un rapport, mais parce que nous pouvons ainsi être éclairés par ces éléments avant la discussion de la prochaine loi de finances.
M. Michel Charasse. Mais non !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si cela arrive après, quelle utilité ?
M. Michel Charasse. La pollution, ça monte et ça descend !
M. Jean-Jacques Hyest. Ça monte !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Attendez, je n'ai pas terminé. La TGAP a déjà été appliquée tout au long de l'année 1999,...
M. Jean-Jacques Hyest. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... puisqu'elle a été créée dans la loi de finances pour 1999. Il y a donc déjà derrière nous une période d'application de cette taxe. Il y aura quelques mois de l'année 2000. Nous aurons un rendez-vous budgétaire en 2000, pour lequel nous aurons besoin d'éléments d'information.
Cet amendement est en effet perfectible.
M. Michel Charasse. Il faut le réécrire !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il devrait d'ailleurs indiquer que le rapport est présenté chaque année.
M. Michel Charasse. Et à partir de 2001 ou de 2002 !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non, à partir de maintenant, car, je le répète, la TGAP existe depuis le 1er janvier 1999. Si c'est une écotaxe, elle doit avoir des conséquences sur les pollutions dès son premier exercice de mise en oeuvre.
M. Jacques Oudin. Absolument !
M. Michel Charasse. Mais pas immédiatement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Qu'on examine les choses qui sont en devenir, qu'on les examine de manière expérimentale et qu'on étudie leur évolution dans le temps.
Cet amendement est certainement perfectible, mais, d'ici à la réunion de la commission mixte paritaire ou à la nouvelle lecture, il est tout à fait concevable de le rectifier.
Vous voyez bien, mes chers collègues, dans quel esprit il est présenté. Il fournira de premiers éléments qui pourront être utilisés lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2001, et c'est précisément pour cela que nous avons retenu le délai de neuf mois. On peut naturellement aller plus loin et prévoir, en particulier, que le rapport sera récurrent, chaque année. Il est possible de rectifier cet amendement en ce sens, ce que j'accepterais bien volontiers. Mais si nous voulons essayer de faire progresser nos travaux avant le dîner conformément au souhait de M. le président de la commission des finances,...
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Nous avons encore cinq heures de discussion !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... je suggère que l'on veuille bien voter cet article additionnel en l'état et que l'on se réserve la possibilité de l'améliorer au cours de la navette.
M. Jacques Oudin. Très bien !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je ne vous savais pas aussi écologiste, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'ai toujours été écologiste, mais aussi social, chrétien, rural...
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-291, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 27 bis .

Article 28