Séance du 30 novembre 1999






PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles de la première partie, nous poursuivons l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 7.
Je suis tout d'abord saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-236 rectifié, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Gaillard, Joyandet, Ostermann, Tregouët, Murat, Leclerc, Braye et Le Grand proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Au premier alinéa de l'article 151 septies du code général des impôts, les mots : "le double de" sont remplacés par les mots : "deux fois et demie".
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du code général des impôts. »
Par amendement n° I-274 rectifié, MM. Fréville, Amoudry, Branger et Baudot proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 151 septies du code général des impôts, les mots : "le double de" sont remplacés par les mots : "deux fois et demie".
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par une majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Oudin, pour défendre l'amendement n° I-236 rectifié.
M. Jacques Oudin. Monsieur le président, mes chers collègues, nous avons eu ce matin une longue discussion à propos de la revalorisation de certains montants qui, fixés il y a de nombreuses années, n'ont pas été ajustés en fonction de l'évolution de l'inflation.
Cet amendement concerne plus précisément les professions libérales, qui ont été particulièrement oubliées depuis deux ans.
Les seuils de recettes en deçà desquels les plus-values professionnelles réalisées par les contribuables exerçant leur activité depuis cinq ans bénéficient d'une exonération dont les seuils sont restés inchangés depuis 1988. Cela fait donc plus de dix ans. Or, au cours de cette période, l'inflation s'est accrue d'un peu plus de 26 %.
Afin de restituer son plein effet à la mesure décidée à l'époque par le législateur, et toujours dans le souci qu'a souligné M. le rapporteur général de respecter la volonté initiale du législateur lorsqu'il a été amené à fixer des seuils, il conviendrait d'ajuster les différents plafonds et de les revaloriser dans les mêmes proportions.
Tel est l'objet du présent amendement.
M. le président. La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° I-274 rectifié.
M. Yves Fréville. Mon amendement est similaire à l'amendement que vient de défendre notre collègue M. Oudin.
Il s'agit de participer à l'effort de « peignage » des seuils que la commission des finances a brillamment entamé ce matin. Comme cela vient d'être dit, il faut tenir compte de l'inflation que nous avons connue depuis 1988 et de relever le seuil d'exonération à deux fois et demie les limites du forfait.
Je tiens à préciser que je parle sous le contrôle de la commission des finances. En effet, mon amendement n'a de valeur que si ce forfait n'a pas été lui-même réévalué ! Sous cette réserve, nous améliorerons le sort non seulement des professions libérales, mais également de certaines autres professions, les professions agricoles par exemple, qui sont concernées par le relèvement de ce seuil.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-236 rectifié et I-274 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission remercie MM. Oudin et Fréville de cette contribution à l'effort qu'il faut absolument réaliser pour actualiser des seuils qui, fixés depuis longtemps, ont quelque peu perdu leur sens initial.
Par conséquent, il convient de soutenir ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Aujourd'hui, les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale par des contribuables dont les recettes n'excèdent pas le double des limites du régime des micro-entreprises sont exonérés d'impôt sur le revenu, à condition que l'activité ait été exonérée pendant au moins cinq ans.
Ce n'est pas un dispositif marginal ! Ce matin, M. le président de la commission des finances s'inquiétait du champ de ces dispositions et s'étonnait de ne voir qu'une petite poignée d'entreprises en bénéficier. En vérité, j'ai mis à profit la suspension de séance pour faire vérifier ce point : en réalité, ce sont plus de 800 000 entreprises qui en bénéficient, soit 60 % des entreprises individuelles. Il faut donc redire ici combien le champ de cette disposition fiscale favorable est étendu.
Je ne propose pas, contrairement aux auteurs des amendements, d'aller plus loin : le coût budgétaire d'une telle mesure serait prohibitif et le régime des plus-values à long terme serait mis en cause par ces amendements.
Je propose donc d'en rester là et je demande au Sénat de ne pas adopter les amendements n°s I-236 rectifié et I-274 rectifié.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-236 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 7, et l'amendement n° I-274 rectifié n'a plus d'objet.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-65, M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 163 quinquies D du code général des impôts est complété par un paragraphe rédigé comme suit :
« V. - Les titres des sociétés ayant leur siège dans un Etat membre de la zone euro sont éligibles aux plans d'épargne en actions. »
« II. - La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée à due concurrence par le relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-255, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Joyandet, Ostermann et Tregouët proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 163 quinquies D du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les titres des sociétés ayant leur siège dans un Etat membre de l'Union européenne sont éligibles aux plans d'épargne en actions. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du code général des impôts. »
Par amendement n° I-290, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 2 du I de l'article 2 de la loi n° 92-666 du 16 juillet 1992 relative au plan d'épargne en actions est ainsi rédigé :
« 2. Les émetteurs des titres mentionnés aux a et b doivent avoir leur siège dans un Etat membre de l'Union européenne.
« Lorsque, à la suite d'une opération d'offre publique d'échange, de fusion, de scission ou d'absorption, les titres reçus lors de l'échange ne répondent plus à la condition énoncée à l'alinéa précédent, ils doivent être inscrits dans un compte ordinaire. Cette opération n'entraîne pas la clôture du plan d'épargne en actions.
« II. - Le f du I de l'article 125-0 A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« f) Titres admis aux négociations sur les marchés réglementés de valeurs de croissance de l'Espace économique européen. La liste de ces marchés est déterminée par arrêté.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° I-65.
M. Denis Badré. Cet amendement élargit les plans d'épargne en actions, les PEA, aux titres des sociétés ayant leur siège social dans la zone euro et non plus seulement en France. Il a, pour nous, un intérêt financier et économique évident puisqu'il rendra plus actif le marché unique en renforçant les échanges entre la France et ses partenaires.
J'ai plaisir à lui donner également - et je pense que vous m'y autoriserez - une force de symbole au terme de cette première année de vie de l'euro.
M. le président. La parole est à M. Oudin, pour défendre l'amendement n° I-255.
M. Jacques Oudin. On est parfois surpris que certaines évidences ne soient pas admises par tous ! Tout à l'heure, nous avons évoqué la revalorisation de certains plafonds, qui ont été fixés il y a dix ou quinze ans, en fonction de l'inflation. Le Parlement - du moins de Sénat - souhaite qu'un ajustement, qui semble d'une élémentaire justice, soit effectué. Et on nous le refuse !
Avec cet amendement n° I-255, il s'agit simplement de faire en sorte que les PEA, qui restent actuellement réservés aux seules actions françaises, puissent désormais être ouverts aux actions de nos partenaires européens. Il s'agit donc d'autoriser la souscription directe de titres européens sur les plans d'épargne en actions, et notre ami Denis Badré a parfaitement indiqué qu'il y avait, derrière tout cela, non seulement un intérêt économique et financier évident, mais aussi un intérêt symbolique.
Comment justifier, à l'heure actuelle, l'ostracisme où se trouveraient des investissements en titres européens alors même que nous venons de créer l'euro ? Je n'arrive pas à le comprendre et j'attends avec le plus grand intérêt la réponse de M. le secrétaire d'Etat.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-290 et donner l'avis de la commission sur les amendements n°s I-65 et I-255.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article additionnel que nous proposons a lui aussi pour objet d'apporter certains aménagements indispensables, s'agissant non seulement des plans d'épargne en actions mais aussi des contrats d'assurance vie dits « DSK », afin de tenir compte à la fois des exigences européennes et du contexte économique de l'Union européenne et monétaire.
Vous le savez, mes chers collègues, aujourd'hui, les sommes versées sur les PEA doivent être investies en valeurs éligibles : actions de sociétés françaises, bons de souscription et droits d'attribution attachés à ces mêmes actions, actions de SICAV détenant au moins 60 % d'actions françaises, parts de fonds communs de placement dont l'actif est composé au minimum de 75 % d'actions françaises.
S'agissant des contrats d'assurance vie dits « DSK », ces derniers doivent être investis au moins pour 50 % en actions françaises et au moins pour 5 % dans des titres d'entreprises non cotées ou du nouveau marché.
Ces dispositions sont clairement, d'un côté comme de l'autre, en contradiction avec le droit européen puisqu'elles introduisent une double discrimination, d'abord entre les sociétés françaises et les autres sociétés européennes, puis entre le marché boursier français et les autres bourses de l'Union européenne.
Il convient de rappeler que la bourse européenne des valeurs de croissance, dite « EASDAQ », a déposé une plainte auprès de la Commission européenne à l'encontre des contrats d'assurance vie dits « DSK ». Cette dernière a adressé, à ce titre, un avis motivé à la France en date du 15 octobre dernier à propos des discriminations dont il s'agit. Or la même analyse est susceptible d'être conduite à tout moment pour les plans d'épargne en actions !
Par ailleurs, se pose aussi le problème de la rigidité des critères d'éligibilité aux PEA, révélé par plusieurs opérations de restructuration récemment intervenues au niveau européen.
Chacun sait que Dexia, naguère Crédit local de France, va devenir, par la voie d'une offre publique d'échange, Dexia Belgium, de droit belge ; que Pechiney va se fondre dans une nouvelle société de droit canadien ; que la SEITA va devenir Altadis, de droit espagnol ; et personne ne peut ignorer qu'Aerospatiale-Matra-DASA, société dans laquelle l'Etat continue de détenir une participation significative, est en train de devenir une société de droit néerlandais.
En perdant leur nationalité française, les titres de ces sociétés perdent leur éligibilité au PEA, et les actionnaires qui vont recevoir de tels titres en contrepartie de titres français éligibles se trouveront pénalisés si nous ne faisons rien.
Il est clair qu'une telle rigueur est tout à fait dépassée dans l'optique de l'instauration de la zone euro. Afin d'éviter une éventuelle condamnation de la France - à mon avis, elle est d'ailleurs inévitable - mais aussi pour adapter dans un esprit constructif la législation française à l'union économique et monétaire, il est indispensable d'agir.
S'agissant des plans d'épargne en actions, la commission des finances vous propose, mes chers collègues, de les étendre franchement aux titres émis par des sociétés ayant leur siège dans un Etat membre de l'Union européenne. Cette solution présente le double avantage d'éliminer toute distorsion entre les sociétés françaises, d'une part, et les sociétés européennes, d'autre part, et de résoudre le problème de l'éligibilité des titres au régime fiscal du plan d'épargne en actions lorsqu'il s'agit de situations telles que celles qui ont été citées tout à l'heure et qui résultent d'offres publiques d'échange.
Toutefois, les opérations de fusion n'ont pas lieu qu'à l'échelle européenne ; elles ont également lieu, beaucoup plus largement, à l'échelle internationale. A cet égard, il est clair que le régime fiscal du PEA ne doit s'appliquer qu'à l'intérieur du périmètre de l'Union européenne.
La commission des finances vous propose donc d'adopter cette solution et, chemin faisant, de l'appliquer aussi aux contrats d'assurance vie dits « DSK ».
Désormais, le souscripteur de ces contrats s'engagerait à investir au moins 50 % de son épargne en actions de sociétés ayant leur siège dans un Etat de l'Union européenne et 5 % dans des titres d'entreprises non cotées ou cotées sur les marchés réglementés de valeurs de croissance de l'Espace économique européen.
Il est important, monsieur le secrétaire d'Etat, de donner un signal clair sur ces sujets, et ce dans l'intérêt de la politique de l'épargne et du développement de la place financière de Paris. Mieux vaut s'adapter franchement à un contexte que l'on a délibérément choisi plutôt que d'y être contraint et forcé par des procédures et d'avoir l'air de traîner les pieds. En effet, si l'on estime que l'union économique et monétaire constitue un progrès, il faut en accepter toutes les conséquences.
Les amendements n°s I-65 et I-255 vont assurément dans le bon sens. Toutefois, je souhaiterais que leurs auteurs acceptent de les retirer au bénéfice de l'amendement n° I-290, dont le dispositif est plus complet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-65, I-255 et I-290 ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je dois d'abord rappeler quel est le format, la dynamique du PEA et combien il coûte au contribuable.
La dépense fiscale qui correspond au régime de faveur du plan d'épargne en actions est de 7,5 milliards de francs pour l'an 2000. Elle est supportée exclusivement par les résidents en France. Il est donc logique d'assurer à cet effort fiscal important ce que l'on pourrait appeler « un retour sur investissement », en favorisant principalement les entreprises françaises, qui sont les plus à même d'investir et de créer des emplois et des richesses en France.
Par ailleurs, vous le savez, les plans d'épargne en actions, qui utilisent la faculté qui leur est offerte d'investir dans les OPCVM, les organismes de placement collectif en valeurs mobilières, peuvent déjà détenir des titres émis par des sociétés ayant leur siège dans l'Union européenne dans la limite de 25 % de leurs actifs pour les fonds communs de placement et de 40 % pour les SICAV. Les épargnants peuvent donc diversifier leur portefeuille au-delà des seules entreprises françaises.
J'ajoute - mais vous allez voir que je vais aller ensuite dans le sens des auteurs des amendements - que la France n'a reçu aucune demande de la Commission concernant le plan d'épargne en actions, contrairement à ce que certains peuvent penser.
M. Denis Badré. On peut prendre des initiatives de temps en temps !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Tout à fait ! Nous pouvons prendre une initiative, monsieur le sénateur, d'autant plus que nos convictions européennes sont fortes.
Le Gouvernement est conscient que de récentes opérations de places ont mis en évidence des situations particulières dans lesquelles se trouvent les contribuables titulaires d'un plan d'épargne en actions qui, en échange d'actions françaises, reçoivent des actions de sociétés européennes et qui ne peuvent les réemployer et les inscrire dans le compte titres de leur plan d'épargne en actions. Il y a là une lacune du droit.
C'est pourquoi, lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 1999, le Gouvernement proposera au Parlement de tenir compte des fusions européennes en permettant aux épargnants de garder au sein de leur plan d'épargne en actions les titres ainsi reçus en échange. Le projet de loi de finances rectificative comportera donc, monsieur le rapporteur général, une disposition identique à celle que vous proposez, voire plus large.
Vous avez évoqué, à travers votre amendement, le cas des contrats d'assurance vie investis en actions. Tout d'abord, je salue le soutien que vous apportez aux contrats DSK. Le Gouvernement a décidé de vous proposer la conformité du dispositif DSK aux règles communautaires dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 1999. Ce sera l'article 11 du projet de loi, dont l'objet est plus large que celui de votre amendement, puisqu'il traite des marchés réglementés européens, de la transposition de la condition d'assujettissement à l'impôt sur les sociétés pour les sociétés européennes, en particulier.
J'ajoute que nous ne devons pas avoir de complexe quant à notre situation à l'égard du PEA puisque nombre de nos partenaires européens disposent de mécanismes comparables, avec la même limitation de leurs effets favorables aux entreprises résidentes.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut les attaquer !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Un mouvement de convergence est en effet nécessaire, et nous devrons l'organiser en concertation avec nos partenaires. Laissez-moi prendre deux exemples. En Italie, le prélèvement libératoire de 12,5 % est appliqué aux intérêts des obligations supérieures à dix-huit mois de maturité cotées en Italie.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n'est pas correct ! Il faut les attaquer !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, les plans PEP sont exonérés des intérêts des plus-values sur l'obligation émise par des sociétés résidentes au Royaume-Uni. Et nous pourrions multiplier les exemples.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut les attaquer !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Plutôt que de les attaquer, monsieur le rapporteur général,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Faites respecter le droit européen !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... nous préconisons de faire converger les pratiques et les droits fiscaux des différents Etats par une concertation dynamique, ce qui nous permettra, en tout cas pour ce qui nous concerne, de montrer le chemin et d'ouvrir la voie, comme vous l'avez souhaité et comme les auteurs des autres amendements, pour un cas quelque peu différent des contrats DSK, l'ont souhaité pour les PEA.
Je vous propose de tenir compte de toutes ces remarques dans le prochain projet de loi de finances rectificative. Nous irons plus loin, sans doute, que ce que vous souhaitiez pour les contrats DSK, mais nous irons dans la direction proposée par les auteurs des autres amendements.
En conséquence, pouvons-nous attendre le projet de loi de finances rectificative ? La réponse est oui. Je vous propose donc de retirer vos amendements puisque vous aurez satisfaction par un texte qui est déjà déposé sur le bureau des assemblées et dont vous discuterez dans quelques jours.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Dans un mois et demi !
M. le président. Monsieur Badré, l'amendement n° I-65 est-il maintenu ?
M. Denis Badré. Sur cette question, nous devons, comme le rappelait M. le secrétaire d'Etat voilà un instant, être irréprochables et donner l'exemple. C'est la meilleure manière d'être en situation soit d'attaquer nos partenaires, soit de les appeler à converger avec nous dans le bon sens.
Sous réserve de cette observation générale et après avoir insisté sur l'intérêt de mon amendement n° I-65, qui est identique à l'amendement n° I-255 de mon collègue Jacques Oudin, je me rallie à l'amendement n° I-290 de la commission, souhaitant qu'il puisse être adopté dès aujourd'hui. En effet, pourquoi attendre demain pour faire ce que nous pouvons faire dès aujourd'hui, alors même qu'un débat nous a permis d'aller au fond de la question ?
Je voterai donc l'amendement n° I-290, dont le champ est plus large que celui de l'amendement n° I-65. J'espère simplement, au moment de retirer ce dernier, que les dispositions de l'amendement n° I-290 ne visant pas les PEA ne risquent pas de tout faire « capoter », ce qui entraînerait alors la disparition de ma proposition.
Sur cette réserve, je retire l'amendement n° I-65 au bénéfice de l'amendement n° I-290.
M. le président. L'amendement n° I-65 est retiré.
Monsieur Oudin, l'amendement n° I-255 est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin. Adoptant bien entendu la même position que notre ami Denis Badré, je retire l'amendement n° I-255 au profit de l'amendement n° I-290.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je m'étonne toujours d'entendre dire que ce qui n'est pas possible aujourd'hui le sera dans quelques semaines, en l'occurrence lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative. Si ce sera possible dans quinze jours, pourquoi ne le serait-ce pas tout de suite ? Il suffit de vous rallier à l'amendement de notre excellent rapporteur général pour que les choses puissent avancer et converger !
M. le président. L'amendement n° I-255 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-290, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 7.
Par amendement n° I-256, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le second alinéa du III de l'article 199 terdecies OA du code général des impôts est abrogé. »
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Cet amendement tend à dynamiser les investissements.
Les contribuables bénéficiant de la réduction d'impôt pour souscriptions en numéraire au capital des sociétés non cotées ne peuvent pas faire figurer ces actions ou parts dans un plan d'épargne en actions. Il convient donc de supprimer cette impossibilité et, à vrai dire, de repenser un peu l'ensemble du dispositif des plans d'épargne en actions.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons par ailleurs relevé les plafonds d'investissement au titre de la loi Madelin. Les préoccupations exprimées par les signataires de l'amendement sont intéressantes et fondées. Mais le dispositif proposé mériterait une étude complémentaire, surtout afin de s'assurer qu'un même investissement ne cumule pas plusieurs avantages fiscaux.
Au bénéfice de ces observations et en attendant un approfondissement de la question, il serait préférable, à ce point du débat, que M. Oudin accepte de retirer l'amendement n° I-256.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je partage l'avis de M. le rapporteur général.
M. le président. L'amendement n° I-256 est-il maintenu, monsieur Oudin ?
M. Jacques Oudin. Je me rallie aux avis convergents de la commission et du Gouvernement, et je retire donc mon amendement.
M. le président. L'amendement n° I-256 est retiré.
Par amendement n° I-21 rectifié, M. Marini, au nom de la commision des finances, propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 762 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 762. - I. - Pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit, la valeur de la nue-propriété et de l'usufruit est déterminée par une quotité exprimée en pourcentage de la propriété entière, en fonction de l'âge de l'usufruitier, conformément au barème ci-après :

A^GE DE L'USUFRUITIER

BÉNÉFICIAIRES



Usufruit

Nue-

propriété

Moins de 25 ans 80 20
De 25 ans à moins de 30 ans 75 25
De 30 ans à moins de 35 ans 70 30
De 35 ans à moins de 40 ans 65 35
De 40 ans à moins de 45 ans 60 40
De 45 ans à moins de 50 ans 55 45
De 50 ans à moins de 55 ans 50 50
De 55 ans à moins de 60 ans 45 55
De 60 ans à moins de 65 ans 40 60
De 65 ans à moins de 70 ans 35 65
De 70 ans à moins de 75 ans 30 70
De 75 ans à moins de 80 ans 25 75
De 80 ans à moins de 85 ans 20 80
De 85 ans à moins de 90 ans 15 85
De 90 ans à moins de 95 ans 10 90
Plus de 95 ans révolus 5 95



« Pour déterminer la valeur de la nue-propriété, il est tenu compte des usufruits ouverts au jour de la mutation de cette nue-propriété ainsi que des usufruits successifs éventuellement stipulés au contrat.
« II. - L'usufruit constitué pour une durée fixe est estimé aux deux dixièmes de la valeur de la propriété entière pour chaque période de cinq ans de la durée de l'usufruit, sans fraction et sans égard à l'âge de l'usufruitier. »
« II. - Les dispositions du I s'appliquent aux donations effectuées et aux successions ouvertes à compter du 1er juillet 2000.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus est compensée par le relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous avez dit, dans une autre phase du débat, qu'un bon impôt était un vieil impôt.
M. Jacques Oudin. Ou pas d'impôt du tout !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais il faut parfois chercher un peu dans l'histoire des finances publiques l'origine des dispositions toujours en vigueur.
Mes chers collègues, je vous invite quelques instants à vous livrer à un exercice d'archéologie financière. (Sourires.)
L'utilisation du démembrement du droit de propriété, c'est-à-dire sa séparation en nue-propriété et en usufruit, est fréquente dans le cadre des politiques patrimoniales susceptibles d'être conduites par les agents économiques. Mais, bien entendu, ce démembrement suppose de savoir évaluer les droits ainsi démembrés : la nue-propriété, d'un côté, l'usufruit, d'un autre côté. Pour ce faire, il existe deux méthodes, l'une dite économique et l'autre dite fiscale, déterminée par l'article 762 du code général des impôts.
En termes économiques, le droit d'usufruit d'un bien correspond au flux de revenus futurs distribués par ce bien pendant la durée de vie de l'usufruit ou le temps convenu pour terme du démembrement.
Pour évaluer l'usufruit, deux paramètres doivent donc être connus : le rendement du bien et la durée de l'usufruit, qui est assimilée à la durée de vie de l'usufruitier, dans le cas où l'usufruit est viager, c'est-à-dire limité à la vie de son bénéficiaire. Cet élément peut être défini à partir des tables d'espérance de vie publiées par l'INSEE.
L'article 13 de la loi du 25 février 1901 - je dis bien 1901 - portant fixation du budget général des dépenses et des recettes de l'exercice 1901 a créé le barème fiscal de l'actuel article 762 du code général des impôts, toujours en vigueur.
Ainsi, ce barème est fondé sur les tables d'espérance de vie de la période 1898-1903 et évalue, par ailleurs, à 2 % le rendement des biens détenus en usufruit.
Or, il n'échappera à personne que ces paramètres sont aujourd'hui - à vrai dire depuis fort longtemps - complètement obsolètes : l'espérance de vie, inutile d'y insister, a, au cours de ce siècle, quelque peu augmenté - de plus de 60 % en moyenne - tandis qu'un écart significatif - hélas, ce n'est pas la parité ! - s'est creusé entre les hommes et les femmes.
Par ailleurs, le postulat d'un rendement uniforme de 2 % est complètement hors de la réalité.
L'utilisation de tels paramètres conduit, dans les faits, à surévaluer la nue-propriété, et les conséquences économiques peuvent être significatives. Selon les informations que j'ai recueillies, cette surévaluation peut dépasser 70 % de la nue-propriété, pour des investissements d'un rendement égal ou supérieur à 10 %.
Or, l'obsolescence du barème n'est pas neutre fiscalement. En cas de donation ou de donation-partage avec réserve de l'usufruit, elle se révèle pénalisante pour les contribuables lorsque l'assiette de l'impôt est maximisée par une sous-estimation artificielle de la valeur de l'usufruit.
C'est pourquoi nous prenons l'initiative, au nom de la commission des finances, de vous proposer de réactualiser le barème. Le taux de rendement du bien retenu est de 4 %. La durée de l'usufruit est calculée en fonction de l'espérance de vie constituée à partir de la table de mortalité 1990-1992 établie par l'INSEE et qui se substituerait donc à la table analogue de la période 1898-1903. En outre, les tranches d'âge sont fixées de cinq ans en cinq ans.
Je tiens à ajouter, enfin, que la rectification qui a été apportée à notre amendement ne modifie en rien les principes que je viens d'énoncer. Il s'agit simplement d'appliquer le nouveau barème aux donations effectuées et aux successions ouvertes à compter du 1er juillet 2000 afin de laisser au contribuable le temps de prendre en compte les conséquences de ce nouveau barème sur leur stratégie de transmission du patrimoine.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ces remarques, que nous avons formulées à partir de dispositions qui sont d'application quasi quotidienne chez les professionnels, mais qui sont complètement obsolètes, doivent logiquement nous conduire à moderniser, à adapter notre législation.
En conclusion, je m'étonnerai que l'administration, simplement par inattention ou par paresse, n'ait jamais pris l'initiative de faire remarquer les effets pervers auxquels nous avions abouti.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Ce problème de l'application de l'article 762 du code général des impôts qui fixe les valeurs respectives de l'usufruit et de la nue-propriété lors des transmissions à titre gratuit, dont la propriété est démembrée, est un vrai problème. Trois questions se posent à cet égard et je suis d'accord avec vous, monsieur le rapporteur général, l'archéologie ou l'histoire fiscale a toute sa place dans nos réflexions pour éclairer nos décisions.
Tout d'abord, il est légitime de s'interroger sur l'adéquation de ce barème instauré au début de ce siècle - vous avez parlé des années 1898 - 1903 et des tables de mortalité de l'époque - au regard de deux évidences : le rendement des actifs patrimoniaux a changé et l'allongement de la durée de vie humaine a modifié les tables de mortalité : nous gagnons un trimestre d'espérance de vie par an.
Les données ne sont donc plus ce qu'elles étaient en 1903, et c'est la raison pour laquelle je suis favorable à engager une réflexion de fond afin d'examiner dans leur globalité les difficultés que pose l'application de l'article 762 du code général des impôts.
Pour autant, cette réflexion ne peut être résumée ni cantonnée au seul aspect de l'actualisation du barème lui-même.
Ainsi, outre l'aggravation de la situation fiscale du conjoint survivant dont la valeur de l'usufruit serait majorée par la révision du barème, il est indispensable de s'interroger sur l'incohérence de la situation d'aujourd'hui dans laquelle la méthode d'évaluation des biens démembrés est différente selon que ces biens sont transmis à titre onéreux ou à titre gratuit.
Par ailleurs, la réflexion semble devoir également porter sur le maintien de l'article 1133 du code général des impôts, qui prévoit une exonération d'impôt lors de la réunion de l'usufruit à la nue-propriété.
Vous conviendrez, monsieur le rapporteur général, que ce sujet complexe, pour lequel une réponse précontrainte et systématiquement identique avait été faite depuis des années et des années, chaque fois que le sujet était évoqué devant le Parlement par les gouvernements successifs, mérite d'être approfondi et qu'il suppose de ne pas traiter de manière autonome l'indexation et l'adéquation du barème sans évoquer les autres aspects, en particulier les deux aspects fondamentaux que je viens de mentionner.
Je peux vous donner l'assurance que ce chantier sera ouvert en l'an 2000, que nous le traiterons avec ouverture et dans le souci de faire évoluer une situation devenue, c'est vrai, mesdames, messieurs les sénateurs, largement absurde. Je vous demande donc de prendre patience, de nous faire confiance, et de nous laisser revoir cette question devant vous dès que l'occasion s'en présentera en l'an 2000. M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez expliqué la problématique de cette révision du barème, en reconnaissant qu'il n'est pas totalement invraisemblable de se préoccuper de l'actualisation d'un barème qui a un siècle.
Vous avez dit que modifier ce barème ainsi que nous le préconisons risquerait d'instaurer un équilibre différent entre la valeur de l'usufruit et celle de la nue-propriété ; le barème actuel a tendance à sous-évaluer la valeur de l'usufruit et à surévaluer celle de la nue-propriété.
L'effet mécanique de cette révision serait, nous dites-vous, de majorer fiscalement la valeur reçue par les conjoints survivants mais, en contrepartie, de diminuer la valeur fiscale réputée reçue par les nus-propriétaires.
Il conviendrait donc, si nous voulons travailler de manière constructive, que vous fassiez « tourner vos ordinateurs » et que vous nous fassiez connaître les effets d'une telle mesure, en prenant par exemple la moyenne des successions.
Il est d'ailleurs assez difficile d'obtenir des renseignements complètement éclairants sur un tel sujet. Mais un fait mérite cependant d'être souligné : aujourd'hui, sur le plan civil, les parties, c'est-à-dire l'usufruitier et le nu-propriétaire, lorsqu'elles veulent évaluer les droits, que ce soit sur l'usufruit ou sur la nue-propriété, ne tiennent plus aucun compte du barème fiscal parce qu'il n'a plus aucune réalité économique ; elles se trouvent dans une situation extrêmement difficile à gérer puisque le traitement fiscal est différent de celui des conventions qu'elles passent entre elles sur le plan civil.
Il est donc absolument indispensable que la réalité fiscale puisse rejoindre la réalité civile, étant entendu qu'il faut également que s'écoule un certain délai entre le moment où le barème est institué et celui où il entre en vigueur afin que nos concitoyens n'aient pas le sentiment que cette mise à jour du barème est faite contre eux, dans l'intention de les surprendre, d'engendrer des effets secondaires qu'ils n'auraient pas pu anticiper.
A cet égard, M. le rapporteur général, avec beaucoup de sagesse, a eu raison de rectifier son amendement de façon à rendre opérationnel son dispositif à compter du 1er juillet 2000 seulement, ce qui permettra à tous les redevables, à tous les contribuables de se préparer à une majoration de la valeur de l'usufruit et, en contrepartie, à une minoration de la valeur de la nue-propriété. On ne peut donc pas arguer simplement de l'effet négatif de cette disposition : elle sera négative pour certains redevables mais positive d'autres.
Que constatons-nous lors de l'ouverture d'une succession ? Dans la plupart des cas aujourd'hui, s'agissant d'une famille de condition moyenne, le conjoint survivant n'est pas redevable de droits de succession, mais en revanche les enfants nus-propriétaires le sont car la nue-propriété est surévaluée avec le barème actuellement en vigueur. Que se passe-t-il alors ? C'est le conjoint survivant qui est tout simplement obligé d'avancer les droits de succession, puisqu'ils ne peuvent pas être payés par les nus-propriétaires.
Nous ne pouvons pas nous satisfaire de cette situation. Je ne sais pas quel sort M. le rapporteur général, dans son immense sagesse, fera à son amendement mais, en tout état de cause, il conviendrait, sur un sujet de cette importance, que le Gouvernement ne se contente pas de travailler en laboratoire de son côté, mais qu'il travaille dans la plus grande concertation.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, il faut faire confiance aux jeunes, aux nouvelles générations, bien entendu. La mesure que nous proposons est une mesure qui est en effet structurellement favorable aux nus-propriétaires plutôt qu'aux usufruitiers. Mais naturellement, tous ces aménagements qui nécessitent des simulations sont complexes et il faut y veiller de près.
Je crains un peu, si nous ne votons pas cet amendement, que la bonne volonté que vous exprimez, qui est tout à fait réelle et qui n'est, bien entendu, pas un instant mise en doute, ne se perde dans la multiplicité des problèmes, des réunions et des arcanes fiscaux ou économiques.
Dans la mesure où vous pourriez nous assurer qu'un travail technique, concerté et sérieux sera engagé immédiatement et mené à son terme pour la fin du premier semestre 2000, c'est-à-dire en temps utile pour que vous puissiez élaborer de nouvelles dispositions à soumettre au Parlement à la rentrée parlementaire de 2000, je pourrais alors, dans le souci d'une bonne compréhension réciproque et en vue d'une analyse suffisamment fouillée de cette disposition retirer notre amendement.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je voudrais donner l'assurance à M. le rapporteur général, au président de la commission des finances ainsi qu'à chacun d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement procédera par simulations et par une observation attentive de la réalité, en concertation permanente avec le Sénat et l'Assemblée nationale.
C'est une question difficile, et j'ajoute, en réponse à vos interrogations, que, comme l'a fort bien remarqué M. le président de la commission des finances, il faudra veiller à ce que les personnes concernées par ce partage entre l'usufruit et la nue-propriété puissent adopter leur propre stratégie. Il faudra donc ménager des transitions et prévoir des périodes d'adaptation. Certes, cette réforme est attendue depuis de nombreuses années, vous l'avez rappelé fort pertinemment tout à l'heure, mais nous ne pouvons pas de manière brutale, par une mutation inconsidérée, rompre le paysage dans lequel s'exerce la nue-propriété et l'usufruit.
Il faut être patients et conscients de la difficulté d'une telle transition. Nous reviendrons donc sur ce problème au cours du premier semestre 2000, avec tous ceux qui, au sein de la commission des finances, s'y intéressent. Vous pouvez compter sur l'engagement du Gouvernement, il sera strictement tenu.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Dans ces conditions, je retire l'amendement n° I-21 rectifié. M. le président. L'amendement n° I-21 rectifié est retiré.
Par amendement n° I-22, M. Marini, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - I. - Dans la troisième phrase du cinquième alinéa du e du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, les mots : ", un ascendant ou un descendant" sont supprimés.
« II. - Dans la première phrase du sixième alinéa du e du 1° du I dudit article, les mots : "ou de ses descendants et ascendants" sont supprimés.
« B. - I. - A la fin de la deuxième phrase du troisième alinéa du g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, les mots : ", un ascendant ou un descendant" sont supprimés.
« II. - Dans la dernière phrase du même alinéa, les mots : "ou de ses descendants et ascendants" sont supprimés.
« III. - Dans la deuxième phrase du troisième alinéa du 2 du g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, les mots : ", un ascendant ou un descendant" sont supprimés.
« C. - Le e et le g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le locataire est un ascendant ou un descendant du contribuable, celui-ci ne peut bénéficier des dispositions du 2° du II de l'article 156 au titre de la pension alimentaire versée au locataire. »
« D. - La perte de recette résultant pour l'Etat de l'extension du dispositif en faveur des logements donnés en location aux ascendants et descendants du bailleur, est compensée à due concurrence par la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avec cet amendement, nous revenons sur un point qui a été évoqué, voilà un an, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1999 et lors de la mise en place du dispositif dit « Besson ». Ce dispositif est certes moins bon que le système « Périssol », mais il a le mérite d'exister.
Nous avons alors approuvé le principe de la création d'un secteur locatif intermédiaire et nous nous sommes réjouis - cela a été dit ce matin - d'un certain rééquilibrage en faveur du logement ancien, que nous avions, à de nombreuses reprises, appelé de nos voeux.
Des améliorations avaient toutefois semblé nécessaires et le Sénat y a pris sa part. Notre assemblée a ainsi obtenu l'an dernier que les investisseurs puissent amortir jusqu'à 65 % de la valeur de l'immeuble neuf, contre seulement 50 % dans le projet initial du Gouvernement.
Nous n'avions pourtant pas eu gain de cause sur un point qui nous paraissait important, il s'agissait de la suppression de l'interdiction faite à l'investisseur de louer à un ascendant ou à un descendant. Selon le Gouvernement, représenté alors par M. Christian Sautter, il s'agissait d'éviter des abus.
Considérant que le dispositif fiscal s'accompagne de nombreuses conditions relatives en particulier aux revenus du locataire, la commission des finances a estimé que les cas d'abus devraient être exceptionnels et que l'administration ne serait, au demeurant, dans ce cas de figure comme dans d'autres, pas démunie de moyens d'action pour mettre en valeur, dénoncer et poursuivre de tels abus.
Il apparaît en outre que l'interdiction de louer à un ascendant ou à un descendant peut être contournée, notamment lorsque l'ascendant ou le descendant partage le logement avec une autre personne, qui peut être titulaire du bail.
La commission estime qu'il n'y a pas de raison qu'un contribuable ne puisse bénéficier d'un avantage fiscal s'il loue à un membre de sa famille dont les ressources ne sont pas élevées, c'est-à-dire dans le cadre du plafond du dispositif dit « Besson », et à condition que la personne en cause ne soit pas membre du foyer fiscal, cela afin de ne pas accumuler des avantages fiscaux différents, et si le bailleur ne dispose pas par ailleurs de la déduction au titre du versement d'une pension alimentaire.
Mes chers collègues, l'encouragement à l'investissement locatif conventionné est d'autant plus important que la reprise du marché immobilier est en train de créer de nouveau des tensions sur le marché locatif. Rendre le dispositif fiscal pour le logement intermédiaire encore plus incitatif apparaît comme un objectif prioritaire, d'autant plus que nous sommes bien dans une phase de reprise du marché immobilier.
Il vous est donc proposé d'adopter cet article additionnel, dont le coût pour l'année 2000 devrait être modeste.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement qui a déjà été discuté et repoussé l'année dernière par le Parlement.
Vous souhaitez que soit supprimée l'interdiction faite aux contribuables de bénéficier du statut de bailleur conventionné neuf ou ancien si le logement est loué ou sous-loué à l'ascendant ou au descendant, à condition, dans le même temps, que le propriétaire s'interdise de lui verser une pension alimentaire.
La location à des membres de la famille a déjà été admise dans le passé, au bénéfice de certains régimes d'incitation fiscale. Mais l'expérience concrète a montré que, par ce biais, les avantages fiscaux étaient détournés de leur objet et servaient à constituer à moindre coût un patrimoine familial et non à financer des biens destinés à être mis de manière effective et durable en location sur le marché. Des abus tout à fait condamnables ont été notés.
La mesure d'incitation fiscale - nous en avons beaucoup parlé ce matin - est la contrepartie du risque pris par les investisseurs. Il y a un avantage, donc il y a forcément une contrepartie. S'il y a avantage, c'est qu'il y a risque et l'on ne peut pas accorder des avantages sans risque réel. C'est un principe de droit fiscal.
Vous conviendrez avec moi, monsieur le rapporteur général, que, lorsqu'un lien familial unit le locataire et le propriétaire, l'orientation sociale du dispositif se trouve très largement contredite, au minimum édulcorée. La modération des loyers dans le cadre d'un lien familial ne constitue pas un réel sacrifice pour le bailleur. La mesure d'incitation fiscale perd, dès lors, toute justification et constitue ce que l'on appelle très souvent « une aubaine » pour le propriétaire bailleur.
Je sais bien que, dans le même temps, la commission prévoit, par une fausse fenêtre, de rétablir un équilibre entre l'avantage et la contrepartie, d'interdire au propriétaire de verser une pension alimentaire à l'ascendant ou au descendant locataire du logement. Mais l'alternative entre déduction d'un amortissement et versement d'une pension alimentaire n'est pas recevable, car ce qui est choquant ce n'est pas que le contribuable verse une pension - il peut par ailleurs y être contraint par des obligations civiles - c'est qu'il puisse utiliser le mécanisme de l'amortissement à des fins purement patrimoniales et d'optimisation fiscale sans qu'il y ait une contrepartie réelle.
C'est là que pèche votre raisonnement parce qu'une fois de plus - nous avons vu une foultitude d'amendements du même type - si nous sommes disposés, les uns et les autres, à admettre l'avantage fiscal pour encourager une certaine vision, d'autant plus qu'il s'agit le plus souvent d'encourager une vision sociale des choses, nous ne pouvons, s'il n'y a pas de contrepartie réelle, si la mesure est déséquilibrée et si l'avantage ne sert qu'à accroître le patrimoine sans que la contrepartie dynamique soit au rendez-vous de l'équilibre du dispositif, cautionner cette sorte d'abus ; en tout cas, le Gouvernement ne souhaite pas l'encourager.
Par conséquent, ayant démontré, avec, je crois, bonne foi et clarté, le fait que cet amendement était déséquilibré, j'en demande le rejet. Mais peut-être, monsieur le rapporteur général, convaincu par mon argumentation, accepterez-vous de le retirer.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-22, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 7.

Article 7 bis