Séance du 6 mai 1999







M. le président. « Art. 21. - Les caisses d'épargne et de prévoyance existant à la date de publication de la présente loi sont transformées en sociétés coopératives dans les conditions ci-après :
« I. - Les caisses d'épargne et de prévoyance disposent au plus tard quatre mois à compter de la publication de la présente loi d'un capital initial composé de parts sociales au sens de l'article 11 de la 1oi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée ainsi que, en tant que de besoin, de certificats coopératifs d'investissement au sens du titre II ter de la même loi.
« Le montant total du capital initial des caisses d'épargne et de prévoyance est égal à la somme de la dotation statutaire de chacune des caisses, telle que cette somme figure dans les comptes consolidés du groupe des caisses d'épargne arrêtés au 31 décembre 1997. Pour les exercices clos jusqu'au 1er janvier 2004, les certificats coopératifs d'investissement entrant dans la composition du capital initial des caisses d'épargne et de prévoyance ne peuvent pas représenter plus de 25 % de ce capital. La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance est chargée de veiller au respect, à tout moment, de cette proportion. L'article 19 decies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée ne s'applique pas à ces certificats coopératifs d'investissement.
« II. - La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance fixe le capital initial de chaque caisse d'épargne et de prévoyance au plus tard deux mois après la publication de la présente loi, après avis du conseil d'orientation et de surveillance de la caisse d'épargne et de prévoyance, en tenant compte notamment du montant de la dotation statutaire telle qu'il figure dans le bilan de la caisse d'épargne et de prévoyance arrêté au 31 décembre 1997, du montant total des fonds propres et du montant total du bilan de la caisse d'épargne et de prévoyance au 31 décembre 1997. Ce capital initial est notifié au ministre chargé de l'économie. A défaut, ce capital est fixé, au plus tard quatre mois à compter de la publication de la présente loi, par décret en Conseil d'Etat, en fonction des mêmes critères.
« III. - Le conseil d'orientation et de surveillance de chaque caisse d'épargne et de prévoyance fixe le montant nominal des parts sociales de cette caisse dans les limites définies par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance.
« IV. - Au plus tard cinq mois à compter de la publication de la présente loi, le conseil d'orientation et de surveillance de chaque caisse d'épargne et de prévoyance fixe le nombre des parts sociales de cette caisse à souscrire par chacun des groupements locaux d'épargne de sa circonscription territoriale, en fonction notamment de l'importance de la population comprise dans le territoire qu'ils couvrent. Chaque groupement local d'épargne souscrit les parts sociales lui revenant grâce à un prêt sans intérêt, d'un montant égal à la valeur totale de ces parts, que lui consent la caisse d'épargne et de prévoyance. Ce prêt est amorti au fur et à mesure de la souscription des parts sociales qui constituent le capital du groupement local d'épargne par les sociétaires.
« IV bis. - Jusqu'au 31 décembre 2003, les collectivités territoriales sont autorisées à détenir ensemble 10 % au maximum de la valeur totale des parts sociales revenant à chaque groupement local d'épargne en application du IV du présent article.
« V. - Jusqu'au 31 décembre 2003, les parts sociales acquises par les groupements locaux d'épargne ne sont cessibles qu'avec l'accord du directoire de la caisse d'épargne et de prévoyance. La propriété de ces parts sociales ne peut être transférée qu'à d'autres groupements locaux d'épargne exerçant dans le même ressort territorial, et moyennant le transfert, pour un montant égal, d'une fraction du prêt octroyé par la caisse d'épargne et de prévoyance au groupement local d'épargne qui transfère.
« VI. - Au 31 décembre 2003, chaque caisse d'épargne et de prévoyance rembourse à chaque groupement local d'épargne affilié les parts sociales représentatives de son capital détenues par celui-ci, à hauteur du montant restant dû par ledit groupement local d'épargne sur le prêt que lui a consenti la caisse d'épargne et de prévoyance et du montant des parts sociales détenues ensemble par les collectivités territoriales au-delà de la limite de 10 % du capital du groupement local d'épargne au 31 décembre 2003. Le montant du remboursement des parts est utilisé par les groupements locaux d'épargne pour l'amortissement intégral de la fraction restant due du prêt de la caisse d'épargne et de prévoyance et pour le remboursement aux collectivités territoriales des parts sociales qu'elles détiennent ensemble au-delà de la limite de 10 % du capital du groupement local d'épargne. A cette même date, il est procédé à l'annulation des certificats coopératifs d'investissement non souscrits.
« Le capital de la caisse d'épargne et de prévoyance est réduit à concurrence du montant total des certificats coopératifs d'investissement non souscrits et des parts sociales remboursées aux groupements locaux d'épargne affiliés à la caisse d'épargne et de prévoyance. Ces opérations n'ont aucun effet sur le résultat des groupements locaux d'épargne ni sur celui de la caisse d'épargne et de prévoyance et ne sont pas soumises à la présomption prévue à la deuxième phrase du 1° de l'article 112 du code général des impôts.
« VII. - Les dispositions de la présente loi n'emportent pas, pour les caisses d'épargne et de prévoyance, changement dans la personne morale.
« Les caisses d'épargne et de prévoyance qui, au 1er janvier 2000, sont agréées par le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement sont réputées être agréées en tant que banques coopératives. »
Au sein de cet article, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 136.
Par amendement n° 136, MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le III de l'article 21, après les mots : « dans les limites définies », d'insérer les mots : « , après avis du ministre chargé de l'économie, ».
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Cet amendement vise à répondre à une inquiétude.
Si chaque caisse décide du montant nominal des parts, cela risque d'entraîner de profondes différences d'une caisse à l'autre ; cela présente surtout le danger d'un écrémage de clientèle par certaines caisses du fait d'une fixation haute du montant des parts.
Le projet de loi prévoit d'ailleurs que la Caisse nationale d'épargne et de prévoyance fixe des limites. Nous pensons toutefois qu'il convient de prévoir un dispositif encadrant plus fortement encore ce montant.
La meilleure solution serait que ce montant soit décidé après avis de la Fédération nationale. Mais celle-ci ne sera pas encore mise en place, me semble-t-il, à la date de décision des caisses.
Au vu de l'importance de cette décision, il nous semble opportun de prévoir l'avis du ministre de l'économie et des finances.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Cet amendement a pour objet de soumettre la fixation du montant nominal des parts sociales à un avis du ministre chargé de l'économie.
Le texte que nous avons voté ce matin donne au ministre chargé de l'économie le pouvoir, dans certaines conditions, et sous certaines limites dont nous avons longuement discuté, de fixer le montant du capital à mettre sur le marché.
Il s'agit en l'occurrence d'une mutualisation, et notre collègue, M. Angels, suggère que le ministre donne son avis sur le montant nominal des parts.
J'ai bien noté qu'il ne s'agit que d'un avis et que la décision sera prise par la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance.
La commission a donc émis un avis favorable sur l'amendement n° 136. Mais elle ne voudrait pas être plus royaliste que le roi et, s'agissant de compétences dévolues à M. le ministre, elle est naturellement intéressée par son point de vue.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je suis favorable à l'amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 136, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 19, M. Marini, au nom de la commission, propose de remplacer les paragraphes IV, IV bis , V et VI de l'article 21 par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les caisses d'épargne et de prévoyance disposent d'un délai de huit ans, à compter de la publication de la présente loi, pour placer les parts sociales représentatives de leur capital initial auprès des sociétaires. Dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'économie, des bons de souscription de certificats coopératifs d'investissement peuvent être attachés à ces parts sociales. A l'issue du délai de huit ans, le capital initial de chaque caisse d'épargne et de prévoyance est réduit à concurrence du montant des parts sociales qui n'ont pas été souscrites.
« Au cours de la période mentionnée à l'alinéa précédent, les parts sociales des caisses d'épargne et de prévoyance qui n'ont pas été souscrites ne confèrent aucun droit. Elles entrent toutefois dans la composition des fonds propres pris en compte pour déterminer les ratios prudentiels.
« Les sociétaires réunis en assemblée générale extraordinaire peuvent décider l'émission de certificats coopératifs d'investissement. Par dérogation aux dispositions de l'article 19 sexies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée, l'émission des certificats coopératifs d'investissement s'effectue par augmentation du capital correspondant au nombre de parts sociales souscrites à la clôture de l'exercice précédant cette émission. Les sociétaires détenteurs de bons de souscription de certificats coopératifs d'investissement peuvent alors exercer leur bon. »
Cet amendement est assorti de quatre sous-amendements présentés par M. Bourdin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
Le sous-amendement n° 121 tend à supprimer la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 19.
Le sous-amendement n° 122 vise à rédiger comme suit la dernière phrase du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 19 : « A l'issue du délai de huit ans, les parts sociales qui n'ont pas été souscrites sont annulées. »
Le sous-amendement n° 123 a pour objet de supprimer le dernier alinéa du texte présenté par l'amendement n° 19.
Enfin, le sous-amendement n° 199 est ainsi rédigé :
A. - Compléter in fine le texte présenté par l'amendement n° 19 par l'alinéa suivant :
« Les opérations rendues nécessaires par l'application du présent paragraphe n'ont aucun effet sur le résultat de la caisse d'épargne et de prévoyance et ne sont pas soumises à la présomption prévue à la deuxième phrase de l'article 112-1° du code général des impôts. »
B. - Pour compenser les pertes de recettes éventuelles résultant des dispositions du paragraphe A ci-dessus, compléter le texte de cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
« Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées, à due concurrence, par une augmentation des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Les trois amendements suivants sont présentés par MM. Angels, Carrère, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 137 tend, dans le paragraphe IV bis de l'article 21, à remplacer le millésime « 2003 » par le millésime « 2004 ».
L'amendement n° 138 vise, dans le paragraphe V de ce même article, à remplacer le millésime « 2003 » par le millésime « 2004 ».
Enfin, l'amendement n° 139 a pour objet, dans le paragraphe VI de cet article de remplacer le millésime « 2003 » par le millésime « 2004 ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 19.
M. Philippe Marini, rapporteur. C'est un amendement important car il explicite les conditions du placement des parts sociales représentatives du capital des caisses d'épargne.
Après nous être interrogés ce matin sur le montant à placer, nous abordons maintenant un autre point, celui du délai du placement.
A titre conservatoire, nous souhaitons que le délai de huit ans soit fixé au lieu et place du délai de quatre ans.
Dans l'intervalle, le montant du capital correspondant aux parts non souscrites sera porté par les caisses d'épargne et entrera en ligne de compte pour la détermination des ratios prudentiels.
Les parts sociales non souscrites ne confèrent toutefois aucun droit. Et, à l'issue de la période de huit ans, terme des opérations de placement, les parts sociales non souscrites auront vocation à être annulées, le capital initial étant donc réduit à due concurrence.
De plus, le présent amendement prévoit la faculté pour les caisses d'épargne d'émettre des certificats coopératifs d'investissement pendant la période de souscription de leur capital. Les caisses d'épargne qui souhaitent recourir à cette faculté pourront d'ailleurs attacher des bons de souscription de certificats coopératifs d'investissement à leurs parts sociales.
Nous avons ajouté cet élément, monsieur le ministre, parce que nous avons confiance dans ce procédé qui nous paraît efficace pour faciliter la diffusion des certificats coopératifs d'investissement et, donc, pour faciliter le recours des caisses d'épargne à des augmentations de capital sur le marché.
Des bons de souscription attachés aux parts sociales, des bons de souscription qui peuvent donc être accordés à la clientèle à des conditions symboliques, cela nous semble techniquement tout à fait possible et de nature à mieux organiser l'accroissement des fonds propres des caisses en fonction de leurs besoins ultérieurs.
Monsieur le ministre, je souhaite saisir l'occasion de la discussion de cet amendement pour réaffirmer que les caisses d'épargne - j'y ai déjà fait allusion à un autre stade de la discussion des articles - pourront parfaitement émettre des certificats coopératifs d'investissement tout en étant des sociétés coopératives à capital variable.
Je terminerai cette présentation en revenant d'un mot sur le débat que nous avons eu ce matin. Monsieur le ministre, le présent projet de loi s'analyse, me semble-t-il - au moins sur le plan économique - comme une opération simultanée, en un instant de raison en quelque sorte, de nationalisation et de mutualisation, de nationalisation et de privatisation, car il faut bien décider - c'est ce que fait la loi - à qui appartiennent les fonds propres des caisses d'épargne.
On s'interroge sur ce point depuis le duc de La Rochefoucauld et depuis Benjamin Delessert, sans apporter de réponse juridiquement précise. On pouvait donc prétendre que les fonds propres étaient en autocontrôle et que les caisses s'autopossédaient, et cette théorie a été longtemps défendue.
Le Gouvernement n'a pas choisi cette voie, qui n'aurait pas été complètement impossible, et il a proposé le dispositif que nous examinons.
De ce fait, dans le même instant, on décide que ces fonds propres appartiennent à la nation et qu'ils ont vocation à être divisés en parts sociales et à être diffusés dans le public dans le cadre d'établissements de crédit de nature coopérative.
M. le président. La parole est à M. Bourdin, pour défendre les sous-amendements n°s 121, 122, 123 et 199.
M. Joël Bourdin. L'amendement n° 19 que vient de présenter M. le rapporteur est, bien évidemment, un amendement de qualité, mais je propose d'essayer de l'améliorer encore.
Avec le sous-amendement n° 121, je suggère de supprimer la référence aux bons de souscription des parts sociales.
Je ne suis pas contre les bons de souscription ; c'est un produit financier de grande qualité et, que ce soit sur le plan théorique ou sur le plan pratique, ces bons rendent bien des services. Toutefois, ils n'ont d'utilité que s'ils sont cotés sur un marché.
Il existe certes un marché des bons de souscription d'actions. Mais je ne vois pas l'intérêt de prévoir des bons de souscription pour les parts sociales, car ce genre d'opération me paraît relativement complexe pour un système coopératif.
L'émission de bons de souscription signifie l'engagement, bien sûr, de créer à terme des certificats coopératifs d'investissement.
En outre, comment ces bons de souscription pourraient-ils être valorisés ? Or l'intérêt d'un bon de souscription est de permettre à celui qui l'a acheté de bénéficier de son pari avec un marché qui le sous-tend. Là, je vois mal comment pourrait fonctionner un marché de bons de souscription.
Le sous-amendement n° 122 prévoit qu'à l'issue du délai de huit ans les parts sociales qui n'ont pas été souscrites sont annulées alors que l'amendement de M. le rapporteur fait état d'une réduction de capital, ce qui n'est pas du tout la même chose. Il dispose que les parts qui ne sont pas souscrites ne constitueront pas le capital et n'entraîneront donc pas de complications administratives et fiscales. Je souhaiterais que cette précision fût inscrite dans l'amendement de M. le rapporteur.
Le sous-amendement n° 123 consiste, quant à lui, à supprimer le dernier alinéa du texte proposé par M. le rapporteur. En effet, dans la mesure où le projet de loi pose le principe de l'existence d'un capital initial, c'est le droit commun, défini par la loi du 10 septembre 1947, qui doit s'appliquer, en particulier son article 19 sexies.
Le sous-amendement n° 199, enfin, tire la conséquence d'un sous-amendement précédent.
Dans l'éventualité d'une annulation des parts non souscrites et dans la mesure où le mode opératoire n'a pas à être développé, il convient, du point de vue fiscal, de reprendre la terminologie de l'article 28. En effet, l'article 112 du code général des impôts prévoit une taxation en cas de réduction de capital qu'il « assimile » à une distribution de dividende.
M. le président. La parole est à M. Angels, pour présenter les amendements n°s 137, 138 et 139.
M. Bernard Angels. Comme l'a dit précédemment mon collègue Jean-Louis Carrère, il nous semble nécessaire d'allonger légèrement la durée de placement des parts sociales en la portant de quatre à cinq ans afin d'augmenter les chances de réussite de toutes les caisses et que l'opération de placement soit un total succès.
En effet, il faut prendre en compte la capacité de placement des parts par les caisses d'épargne. Or la capacité des caisses et leur dynamisme commercial sur ce produit spécifique sont difficiles à évaluer. Par souci de prudence, et pour augmenter les chances de réussite de l'opération, nous proposons un allongement d'une année de la durée de placement.
Il ne faut pas l'allonger trop afin de ne pas accroître la période d'incertitude qui est inhérente à la mise en place des nouveaux statuts et qui ne pourrait que nuire au développement dudit réseau. A cet égard, la proposition de la commission de porter cette durée de quatre à huit ans nous paraît dangereuse.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 121, 122, 123 et 199, ainsi que sur les amendements n°s 137, 138 et 139 ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 122, qui apporte une précision utile. Il est en effet nécessaire de préciser que les parts sociales non souscrites sont annulées à l'issue du délai de huit ans, ce que nous avions omis de prévoir dans l'amendement de la commission.
La commission est également favorable au sous-amendement n° 199, qui porte sur la neutralisation de la réduction éventuelle du capital des caisses d'épargne au regard de l'impôt. Cette précision est également utile. En effet, M. Bourdin répare un oubli. Il arrive même à la commission et à ses services de ne pas maîtriser la totalité d'un sujet aussi technique !
Il est donc nécessaire de préciser que les modalités de la mutualisation prévues par l'article 21 n'emportent pas de conséquences fiscales pour les caisses d'épargne, faute de quoi une éventuelle réduction de leur capital induite par une souscription insuffisante des parts sociales pourrait être assimilée à une distribution de dividendes et taxée en tant que telle.
Je souhaite que le sous-amendement n° 121 soit retiré. En effet, la commission tient au dispositif des bons de souscription, car cet instrument supplémentaire vise à favoriser le succès du placement des certificats coopératifs d'investissement. Ces bons de souscription constituent un levier permettant de mieux diffuser le capital et de préparer les augmentations de capital à venir.
Les modalités seront fixées - cela résulte de l'amendement n° 19 - par arrêté du ministre. Dans le texte de la loi, nous ne pouvons que définir les principes, donc l'existence de ces bons de souscription, qui peuvent être attachés aux parts sociales, ce qui n'est pas non plus une obligation.
Ces bons sont donc, au sein d'une palette, un instrument supplémentaire dont on aura peut-être besoin. Aussi avons-nous estimé que ce dispositif pouvait être prévu, d'autant qu'il ne peut être défavorable aux caisses, bien au contraire, puisqu'il a été conçu dans une optique tout à fait favorable au développement de celles-ci.
Je souhaite que soit également retiré le sous-amendement n° 123, qui vise à supprimer le troisième alinéa de l'amendement n° 19.
M. Bourdin a certainement raison - ce n'est pas moi qui contesterai sa position - de vouloir aligner le statut des caisses d'épargne sur le droit commun de la coopération, qui prévoit déjà la faculté, pour les coopératives, d'émettre des certificats coopératifs d'investissement. Il n'est donc pas, a priori, utile de rappeler à cet endroit de la loi ce principe général, qui s'applique en tout état de cause.
Toutefois, ce troisième alinéa est nécessaire pour préciser les modalités selon lesquelles les caisses d'épargne qui le souhaiteront pourront émettre des certificats avant d'avoir placé la totalité de leurs parts sociales. C'est bien de cette situation qu'il s'agit.
Pendant la période de placement des parts sociales, dont la durée - quatre ans, huit ans ou cinq ans ? - sera arrêtée au cours de la négociation, il est possible que les caisses d'épargne aient besoin d'augmenter leur capital pour alimenter leur développement. Il s'agit bien de régir les dispositions qui vont s'appliquer à ces émissions de certificats coopératifs d'investissement. Il s'agit non pas d'alimenter le fonds de garantie des retraites, mais de procurer des fonds propres supplémentaires pour les caisses elles-mêmes.
Or l'article 19 sexies de la loi de 1947 sur la coopération prévoit que l'émission de certificats coopératifs d'investissement s'effectue par augmentation du capital atteint à la clôture de l'exercice précédant cette émission et que les CCI ne peuvent représenter plus de la moitié de ce capital.
Si cette disposition devait s'appliquer, les caisses d'épargne qui n'auraient pas encore placé la totalité de leur capital initial dans le public pourraient en réalité émettre un montant de CCI plus important en pourcentage de leur capital effectivement souscrit que ce que le législateur a souhaité.
Aussi est-ce en vertu de cette considération purement technique et de l'incohérence à laquelle nous conduirait l'application de l'article 19 sexies de la loi de 1947 sur la coopération que le troisième alinéa de notre amendement n° 19 a été rédigé.
J'espère que vous avez tous saisi les subtilités de cette démonstration. (Rires et exclamations sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jean-Louis Carrère. Vous êtes d'une clarté !
M. Philippe Marini, rapporteur. J'ai essayé d'être aussi clair que possible, mais, malheureusement, cette matière est assez touffue. Souhaitez-vous que je recommence ?
M. Michel Sergent. Oui ! nous n'avons pas bien compris.
M. Bernard Angels. Surtout la fin !
M. Jean-Louis Carrère. Non, depuis le début ! (Sourires.)
M. le président. Mes chers collègues, puis-je vous rappeler à un peu de sérieux ?
M. Philippe Marini, rapporteur. J'espère avoir convaincu M. Bourdin de la nécessité de conserver le troisième alinéa de notre amendement n° 19. J'espère l'avoir convaincu aussi de bien vouloir retirer son sous-amendement n° 123 à la suite de ces explications.
Monsieur le ministre, nous n'y pouvons rien si ce sujet est tellement complexe !
M. Jean-Louis Carrère. On comprend pourquoi vous n'avez pas fait la réforme !
M. Philippe Marini, rapporteur. Je suggère à nos collègues du groupe socialiste de bien vouloir retirer l'amendement n° 137 visant à allonger la durée de placement des parts sociales à cinq ans. Ce sujet allant encore être discuté, mieux vaut peut-être que le Sénat parte d'une position quelque peu maximaliste, celle d'une durée de huit ans, pour voir où les curseurs s'arrêteront, au sein de la commission mixte paritaire. Le voeu que nous formulons est de parvenir à un accord. Mais n'allons pas trop vite ni trop loin pour laisser le temps à la concertation d'être fructueuse.
C'est la seule raison pour laquelle je vous demande, à ce stade, de bien vouloir vous rallier à l'amendement n° 19 de la commission, et cela vaut avis défavorable sur les amendements n°s 137, 138 et 139.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 19, les sous-amendements n°s 121, 122, 123 et 199, ainsi que sur les amendements n°s 137, 138 et 139 ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le président, je ne vais pas avoir à préciser les numéros des amendements et des sous-amendements, car le Gouvernement les rejette tous en bloc.
M. Philippe Marini, rapporteur. Oh !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je ne reviendrai pas sur le refus des groupements locaux d'épargne ; nous en avons déjà parlé pendant des heures ! C'est votre point de vue, mais ce n'est pas le nôtre. Vos amendements le reprenant, je ne peux donc pas les accepter.
Ensuite, vous nous proposez de rallonger à huit ans la durée de placement des parts sociales. Honnêtement, ce n'est pas raisonnable ! Vous-même, à l'instant, avez d'ailleurs qualifié votre position de maximaliste, ce qui signifie donc qu'elle n'est pas raisonnable. Nous n'allons pas commencer à placer aujourd'hui des certificats coopératifs pour finir dans huit ans. Rendez-vous compte ! Nous n'allons pas mettre autant de temps à réaliser la réforme que vous en avez mis pour l'étudier sans la faire. Nous allons essayer d'avancer un peu plus vite ! Dans ces conditions, une durée de placement de huit ans ne me paraît pas acceptable.
Faut-il aller au-delà de quatre ans ? Faut-il retenir cinq ans ? C'est un point qui peut se discuter et qui méritera que l'on y revienne. Le Gouvernement est favorable à une durée de quatre ans, mais les arguments qui pèsent pour allonger un peu plus cette durée peuvent être examinés. Cela dit, je ne m'étendrai pas sur ce point, car le Sénat va sûrement adopter votre amendement n° 19 de telle sorte que l'amendement n° 137, qui vise à instaurer un délai de cinq ans, deviendra sans objet.
Sur le fonds,...
M. Philippe Marini, rapporteur. Vous y êtes plutôt favorable !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je n'ai pas dit que j'y étais plutôt favorable, monsieur le rapporteur ! J'ai dit que cela méritait une discussion et que, entre quatre ans et cinq ans, je ne concluais pas. Je reste a priori favorable au délai de quatre ans, qui figure dans le texte du Gouvernement, mais je conçois que l'on puisse discuter, alors qu'un délai de huit ans ne peut certainement pas être accepté !
Quant à la réforme que vous nous proposez sur les bons de souscription, sa limpidité est apparue à tout le monde et nous avons tous vu que les souscripteurs eux-mêmes allaient constater une très grande simplification de la réforme que nous suggérons.
A plusieurs reprises, vous avez qualifié cette réforme « d'usine à gaz », qualificatif sans doute péjoratif dans votre bouche. Je ne me permettrai donc pas de reprendre un argument de cette nature, qui ferait de la peine aux dizaines de milliers de salariés de Gaz de France. Mais il est clair que vous ne simplifiez pas ce que nous voulons faire en introduisant les éléments sur lesquels vous venez de rapporter.
Je n'irai pas jusqu'à dire qu'ils n'ont pas de sens. Ils en ont un. Mais c'est tellement compliqué ! Cela ouvre tellement de voies possibles selon les situations ! Cela rend tellement opaque la réforme que nous voulons faire ! Cela engage tellement, à terme, par les bons de souscription, l'éventualité d'émissions de nouveaux certificats coopératifs d'investissement alors que, pour le moment, personne n'a parlé de cette idée ! Enfin, cet amendement, qui se veut technique, remet tellement en cause la logique même de la réforme ! Honnêtement, il n'est nullement nécessaire d'en rajouter dans un texte dont chacun a déjà souligné la complexité.
En conclusion, n'approuvant pas la suppression des GLE, n'étant pas favorable au passage à huit ans et ne souhaitant pas compliquer le texte, et donc « donner de l'embonpoint à la loi », comme l'excellent président de la commission, M. Lambert, le rappelle souvent, il vaut mieux que le Gouvernement dise tout de go qu'il préfère s'opposer à tous les amendements et sous-amendements en question.
M. le président. Monsieur Bourdin, acceptez-vous de retirer les sous-amendements n°s 121 et 123, comme vous l'a suggéré M. le rapporteur ?
M. Joël Bourdin. Je suis sensible, vous le savez, monsieur le président, à ces demandes de retrait. Je retire donc ces deux sous-amendements, mais j'indique tout de suite que je ne suis pas convaincu.
Je connais bien le système des bons de souscription ; j'ai l'occasion de l'enseigner par ailleurs. Il implique qu'il existe un véritable marché des bons de souscription avec des informations ; la cotation du bon de souscription est en soi une information qui est donnée aux épargnants. Les bons de souscription ne seront pas cotés en bourse, c'est évident. Ce que je crains, c'est que nous n'instituions un marché mal informé qui ne soit pas efficient. Or un marché qui n'est pas efficient, c'est un marché injuste.
Je retire ces sous-amendements, parce que ce n'est qu'une simple possibilité qui est inscrite dans l'amendement, mais - je le répète - en ce qui me concerne, j'hésiterais beaucoup à créer des bons de souscription dans ce cadre-là, pour une raison très simple, c'est qu'on ne peut pas les concevoir en dehors d'un marché efficient.
M. le président. Les sous-amendements n°s 121 et 123 sont retirés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 122, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 199, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
M. Jean-Louis Carrère. Le groupe socialiste également.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 137, 138 et 139 n'ont plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21, modifié.

(L'article 21 est adopté.)

Article 22