Séance du 1er avril 1999







M. le président. La parole est à M. Estier.

M. Claude Estier. Les questions sur la situation au Kosovo étant nombreuses, aujourd'hui, il est inévitable qu'elles se recoupent plus ou moins.
Plus que sur le bilan d'une semaine de frappes aériennes sur la Serbie - il est peut-être encore trop tôt pour l'établir de façon précise -, ma question portera sur les aspects humanitaires de la situation.
Je suis de ceux - mes amis partagent ce sentiment - qui sont convaincus que ce n'est pas l'intervention armée de l'OTAN qui a provoqué une épuration ethnique que le dictateur Milosevic avait depuis longtemps programmée - elle était même déjà mise en oeuvre - comme il l'avait d'ailleurs fait en Bosnie.
Si l'on en croit une information donnée, hier, par le ministre allemand de la défense, M. Scharping, des camps de concentration auraient même été installés au Kosovo. Peut-être pourrez-vous le confirmer, monsieur le ministre.
Il reste que l'exode massif de populations kosovares albanophones vers le Monténégro, la Macédoine et surtout l'Albanie - exode qui, j'y insiste, avait commencé bien avant le début des frappes de l'OTAN - pose à ces pays des problèmes qu'ils n'ont absolument pas les moyens de surmonter.
Le Haut-commissariat aux réfugiés, malgré le dévouement inlassable de ses représentants, ne peut faire face seul, surtout si, comme on peut le craindre, cet exode doit se prolonger.
Le Premier ministre a fait état, dès hier, des actions déjà engagées par la France soit sur le plan national, soit dans le cadre d'une coordination européenne.
Vous venez de rappeler, monsieur le ministre, que le ministre de la coopération, M. Josselin, se trouve aujourd'hui à Tirana et qu'il doit se rendre également à Skopje.
Nous avons appris aussi qu'aujourd'hui se tient à Bonn une réunion a laquelle participent les ministres des huit pays voisins de la Yougoslavie.
En réponse à la question précédente, vous venez de donner un certain nombre d'indications sur ce que peut être l'aide apportée aujourd'hui à ces populations plongées dans le plus grand désarroi.
La représentation nationale est toutefois désireuse d'obtenir le maximum de détails sur les actions envisagées ou déjà engagées, sur leur nature, leur localisation, leur programmation dans le temps mais aussi dans l'espace. La question se pose en effet de savoir si les populations qui sont aujourd'hui en Albanie, par exemple, doivent rester là ou si l'on envisage de les faire passer dans des pays voisins.
Nous souhaitions également avoir des précisions - mais vous venez de nous les donner - sur le nombre de réfugiés recensés à ce jour, car les chiffres les plus contradictoires circulent, vous l'avez dit.
Si la France a raison de participer au combat contre Milosevic, elle se doit d'être au premier rang pour ce qui est de l'aide qui doit être apportée aux victimes de son régime sanguinaire. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) M. le président. La parole est M. le ministre.
M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. Monsieur Estier, en matière d'aide, je l'ai dit, la France prend toute sa part et cherche à être le plus efficace possible. Si nous avons demandé à M. Josselin de se rendre sur place, c'est, précisément, pour compléter les évaluations que nous avons déjà de par nos contacts avec nos partenaires européens et avec le HCR.
Je le répète, c'est plutôt aux chiffres du HCR qu'il faut se fier, et non pas à ceux des autres organismes, dont ce n'est pas la véritable vocation de dénombrer les réfugiés.
Si nous travaillons ainsi, c'est parce que nous voulons parvenir à une situation qui soit le plus compatible possible avec les moyens, les responsabilités et les demandes de l'Albanie, de la Macédoine et du Monténégro - ce n'est pas tout à fait sur le même plan - mais aussi des pays européens qui peuvent également être des pays d'accueil ou qui l'ont déjà beaucoup été - j'ai cité l'Allemagne et la Suisse, je pourrais, naturellement, citer l'Italie. Nous voulons arriver à une approche globale.
Le problème posé est non pas celui des moyens mais celui de la coordination de l'action des organismes, afin qu'ils travaillent ensemble au lieu de se concurrencer de façon stérile.
Toute cette action doit être placée sous le signe du refus absolu de la politique qui consiste à terroriser des populations. Il faut donc installer ces populations et les aider dans des endroits qui préfigurent leur retour le plus proche possible, car ce sera naturellement l'un des éléments de tout règlement politique lorsqu'on en reviendra à ce niveau.
En tout cas, je puis vous assurer, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous faisons absolument tout ce qui est en notre pouvoir pour atténuer les souffrances des populations. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l'Union centriste.)

VOLET MILITAIRE DE LA CRISE AU KOSOVO