Séance du 11 juin 1998







M. le président. Par amendement n° 456, M. Vezinhet, Mme Derycke et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, après l'article 27, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 351-3-1 du code de la construction et de l'habitation, les mots : "suivant celui" sont supprimés.
« II. - Les tarifs de l'impôt de solidarité sur la fortune fixés à l'article 885 U du code général des impôts sont relevés à due concurrence. »
La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. La loi de finances de 1993 a modifié les conditions de versement des aides au logement. Elle a notamment supprimé le versement de ces aides dès le premier mois de paiement du loyer, c'est-à-dire dès l'entrée dans les lieux du locataire.
A l'époque, le ministre en charge du logement, M. Périssol, avait qualifié cette disposition de doux euphémismes : « remise en ordre », « aménagement », « harmonisation technique ». Bref, l'efficacité des aides au logement était évaluée à l'aune de la cohérence juridique. Il s'agissait aussi de faire la chasse au « gaspi » : il fallait réaliser des économies. Celles-ci étaient alors évaluées à 320 millions de francs. D'ailleurs, à cette époque-là, on était en pleine période d'économies sur le dos des ménages les plus modestes. En effet, non seulement on introduisait un délai de carence, mais, en plus, les aides au logement n'étaient pas régulièrement revalorisées comme elles auraient dû l'être.
Cette décision a eu des effets dramatiques sur les locataires. Elle a, de fait, introduit un véritable droit de péage pour l'acccès au logement social. Elle les a privés d'une ressource indispensable au moment où ils s'installent et où ils ont à faire face, bien souvent, à de lourdes dépenses. Elle a eu comme autre effet négatif de transférer du budget des aides à la personne aux FSL l'aide à l'entrée dans les lieux.
Cet amendement tend à supprimer ce délai de carence pour le versement de l'APL. Il s'agit d'une mesure de justice sociale, réclamée de tous les acteurs du milieu associatif et du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées.
Le Gouvernement de M. Jospin a fait du logement, et plus particulièrement du logement social, une priorité de son action. Dès le décret d'avances du 10 juillet 1997, il a opéré une revalorisation des barèmes de l'APL, après un quasi-gel de ceux-ci pendant quatre ans.
Monsieur le secrétaire d'Etat, cet amendement se situe dans la logique et la continuité de l'action du Gouvernement, et j'espère que vous ne lui opposerez pas l'article 40.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission a bien perçu l'intérêt de cette disposition du point de vue social. Toutefois, elle se souvient que ce délai de carence avait été introduit dans la loi de finances de 1995 pour des raisons d'équilibre des finances publiques. Aussi, quelque peu partagée, elle émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. J'ai bien entendu l'argumentation de M. Vezinhet. Il a rappelé que certaines instances, qui me tiennent à coeur, ont pris des positions allant dans le sens de ses conclusions.
En fait, la mesure prise par la loi de finances pour 1995 concernant l'APL alignait le régime appliqué à cette prestation sur celui de l'allocation logement, comme d'ailleurs de quasiment toutes les autres prestations sociales et familiales, qui résultait d'une disposition votée par la représentation nationale en 1983.
Les règlements interviennent toujours le premier jour du mois qui suit l'ouverture des droits, non seulement pour l'APL, mais également pour l'allocation logement et pour la plupart des prestations servies par les caisses d'allocations familiales.
La première difficulté provoquée par un traitement spécial de la seule APL, qui rétablirait, en quelque sorte, la situation d'avant la loi de finances pour 1995, serait donc une difficulté pratique.
La seconde difficulté est d'ordre financier. En effet, selon le chiffrage qui m'a été fourni, le coût d'une telle mesure n'est pas négligeable : quelque 350 millions de francs. De plus, se poseraient, me dit-on, des difficultés concrètes d'application s'il fallait établir au prorata des jours pour tous les entrants pour la première fois dans un logement un calcul des droits à leur verser.
Toutefois, le Gouvernement est resté sensible au problème qui est soulevé. S'agissant de l'APL ou de l'allocation logement, il vous propose un système de continuité, donc sans délai de carence, lorsque les personnes ont été préalablement bénéficiaires de l'ALT, étant entendu que, à chaque changement de logement, il n'y a plus de délai de carence, mais continuité du paiement de ces allocations.
Le problème reste posé pour ceux qui accèdent pour la première fois au logement. Pour ceux-là, vous le savez, des mécanismes ont été mis en place et se sont développés. Il s'agit du Fonds de solidarité pour le logement. Il y a également, pour le paiement des cautions, possibilité d'intervention du « 1 % » depuis la convention signée entre l'Etat et l'Union d'économie sociale du logement, l'UESL, en mai 1997.
Les avancées existent donc. Toutefois, quelques cas peuvent encore poser problème. Normalement, la solution serait à rechercher par le biais de ces dispositifs.
En tout état de cause, compte tenu de l'importance de la dépense, le Gouvernement n'a pas retenu cette disposition au-delà de la continuité avec l'allocation de logement temporaire.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 456, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 457, M. Vezinhet, Mme Derycke, et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 27, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 831-4-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions prévues à la première phrase de l'alinéa précédent ne s'appliquent pas aux personnes qui, hébergées par un organisme logeant à titre temporaire des personnes défavorisées et bénéficiant de l'aide prévue à l'article L. 851-1, accèdent à un logement ouvrant droit à l'allocation logement mentionnée à l'article L. 831-1. Dans ce cas, l'aide est due à compter du premier jour du mois civil au cours duquel les conditions d'ouverture du droit sont réunies. »
« II. - L'article L. 542-2 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, cette aide est due à compter du premier jour du mois civil au cours duquel les conditions d'ouverture du droit sont réunies pour les personnes hébergées par un organisme logeant à titre temporaire des personnes défavorisées et bénéficiant de l'aide prévue à l'article L. 851-1. »
« III. - Les tarifs de l'impôt de solidarité sur la fortune fixés à l'article 885 U du code général des impôts sont relevés à due concurrence des paragraphes I et II ci-dessus. »
Par amendement n° 517, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 27, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 542-2 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions prévues à la première phrase de l'alinéa précédent ne s'appliquent pas aux personnes qui, hébergées par un organisme logeant à titre temporaire des personnes défavorisées et bénéficiant de l'aide mentionnée à l'article L. 851-1, accèdent à un logement ouvrant droit à l'allocation de logement, afin d'assurer la continuité des prestations prévue par le deuxième alinéa de l'article L. 552-1. »
« II. - L'article L. 831-4-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions prévues à la première phrase de l'alinéa précédent ne s'appliquent pas aux personnes qui, hébergées par un organisme logeant à titre temporaire des personnes défavorisées et bénéficiant de l'aide mentionnée à l'article L. 851-1, accèdent à un logement ouvrant droit à l'allocation de logement, afin d'assurer la continuité des prestations prévue par le deuxième alinéa de l'article L. 552-1. »
La parole est M. Vezinhet, pour défendre l'amendement n° 457.
M. André Vezinhet. L'article 27 du projet de loi revient partiellement sur les mesures adoptées dans la loi de finances pour 1995, s'agissant des conditions de versement des aides au logement, en supprimant le délai de carence d'un mois pour les personnes logées par un organisme bénéficiant de l'ALT dès lors qu'elles accèdent à un logement ouvrant droit à l'APL.
Cette disposition est tout à fait positive, car elle permet à une personne défavorisée de bénéficier, dès son entrée dans un logement, d'une aide de la collectivité, facilitant ainsi son installation.
En revanche, ce délai de carence n'a pas été supprimé pour les personnes hébergées par des associations bénéficiant de l'ALT, lorsqu'elles deviennent à leur tour locataires de plein droit et sont éligibles à l'ALS ou à l'ALF. Cet amendement vise donc à supprimer ce délai de carence.
J'ajoute que le coût de cette disposition est relativement faible : 10 millions de francs, contre 350 millions de francs pour la mesure précédente.
Là encore, nous souhaiterions que le Gouvernement reprenne à son compte cet amendement. Les partenaires sociaux, qui financent aussi ces associations, n'y verront sans doute pas d'inconvénient. Une telle disposition ne serait que justice pour les familles concernées. En effet, aucun argument ne peut justifier que l'on traite différemment les locataires selon qu'ils relèvent, d'une part, de l'APL ou, d'autre part, de l'ALF ou de l'ALS, pas même le fait que ces deux dernières allocations sont des prestations sociales, ce qui n'est pas le cas de l'APL. Les arguments dits de cohérence juridique ne sont pas recevables.
Je rappelle qu'il s'agit de permettre l'accès à un logement. C'est à ce moment-là que les locataires ont à assumer de lourdes charges : caution, équipement du logement, tous éléments que j'ai rappelés lors de l'examen de l'amendement précédent.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour présenter l'amendement n° 517 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 457.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est convaincu par l'argumentation développée par M. Vezinhet. Il propose, par l'amendement n° 517, la même disposition que celle qui est prévue par l'amendement n° 457, étant entendu que la rédaction est légèrement différente. Le résultat est le même et cette disposition n'a pas à être gagée. L'amendement n° 457 est donc satisfait par l'amendement n° 517.
M. le président. Monsieur Vezinhet, je suppose que vous retirez l'amendement n° 457 ?
M. André Vezinhet. Après examen en commission de l'amendement n° 517 et compte tenu des propos de M. le secrétaire d'Etat, je retire en effet l'amendement n° 457.
M. le président. L'amendement n° 457 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 517 ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Il s'agit d'étendre le bénéfice de la continuité des aides personnelles au logement pour les ménages logés dans les locaux ouvrant droit à l'allocation de logement temporaire, créée par l'article 27 au titre de l'APL, à deux autres sortes d'aides au logement : l'allocation au logement familial et l'allocation logement.
Cet amendement constitue un véritable apport. Il donne satisfaction, sous une forme rédactionnelle adaptée à la codification, à l'amendement n° 327 rectifié, présenté par M. Vasselle et plusieurs membres de son groupe, sur lequel nous avions émis un avis favorable, amendement qui a d'ailleurs été retiré tout à l'heure. La commission est favorable à l'amendement n° 517.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 517, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 27.

Section 2

Accroissement de l'offre de logement

Article 28