Séance du 3 juin 1998







M. le président. « Art. 6. _ L'article L. 412-49 du code des communes est ainsi rédigé :
« Art. L. 412-49 . _ Les fonctions d'agent de police municipale ne peuvent être exercées que par des fonctionnaires territoriaux recrutés à cet effet dans les conditions fixées par les décrets en Conseil d'Etat prévus à l'article 6 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
« Ils sont nommés par le maire après avoir été agréés par le représentant de l'Etat dans le département et le procureur de la République, puis assermentés.
« L'agrément peut être retiré temporairement ou définitivement par le représentant de l'Etat dans le département ou le procureur de la République après consultation du maire. »
Je suis d'abord saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 24, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi le deuxième alinéa du texte présenté par cet article pour l'article L. 412-49 du code des communes :
« Ils sont nommés par le maire, agréés par le procureur de la République, puis assermentés. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 105, présenté par le Gouvernement, et tendant, dans le texte proposé par l'amendement n° 24 pour le deuxième alinéa de l'article L. 412-49 du code des communes, après le mot : « agréés », à insérer les mots : « par le représentant de l'Etat dans le département et ».
Par amendement n° 65 rectifié ter , MM. About et Trucy proposent, dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 412-49 du code des communes, de supprimer les mots : « le représentant de l'Etat dans le département ».
Par amendement n° 54 rectifié, M. Gélard et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent, dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 412-49 du code des communes, de remplacer les mots : « représentant de l'Etat dans le département » par le mot : « préfet ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 24.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Cet amendement a trait à l'agrément.
Le Gouvernement, dans le projet de loi initial, a proposé un double agrément pour les agents de police municipale, dans la mesure où ils exercent à la fois des activités de police administrative, ce qui implique, à ses yeux, l'agrément du préfet, et des activités de police judiciaire, ce qui implique celui du procureur de la République.
Actuellement, les policiers municipaux n'ont besoin que d'un seul agrément, celui du procureur de la République. L'Assemblée nationale l'avait d'ailleurs elle-même souhaité en 1982, au moment de la discussion des lois de décentralisation. A l'époque, le rapporteur de ces lois, M. Alain Richard, qui défendait au Palais-Bourbon cette proposition, avait justifié l'agrément du procureur de la République comme la garantie à la fois de l'honorabilité des agents concernés et de l'impartialité du contrôle. Il ne s'agissait donc pas de vérifier la capacité professionnelle des intéressés à exercer des fonctions de police municipale !
La commission a bien évidemment accepté l'assermentation. Mais, à partir du moment où nous donnons au préfet le pouvoir de négocier la convention de coordination - et c'est bien le rôle du représentant de l'Etat que de veiller à ce que les moyens de police sur le territoire dont il a la charge soient le mieux coordonnés possible - je ne vois pas au nom de quoi il conviendrait d'ajouter l'agrément du préfet, à celui du procureur de la République, qui, encore une fois, ne porte que sur l'honorabilité.
Le Gouvernement a d'ailleurs été sensible à notre argument : plutôt que de redemander un nouvel agrément pour les 13 000 agents actuellement en place - c'est-à-dire plutôt que de solliciter 13 000 fois le préfet, qui aurait dû lui-même à nouveau solliciter le procureur alors que l'agrément avait été accordé par ce dernier - il nous paraît préférable de faire prévaloir le bon sens et de respecter ce qui fonctionne bien actuellement.
C'est la raison pour laquelle la commission vous propose d'adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter le sous-amendement n° 105 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 24.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 24, à moins que M. Delevoye accepte le sous-amendement n° 105 qui rétablit le double agrément par le procureur de la République et par le représentant de l'Etat dans le département.
Les missions de police administrative des agents de police municipale sont fortement affirmées par le projet de loi. Il s'agit de consacrer leur participation à la sécurité générale, en particulier à la sécurité de proximité, comme je vous l'ai dit dans la discussion générale.
L'agrément par le préfet se justifie donc pleinement, cependant que l'agrément du procureur de la République doit être maintenu, compte tenu de l'extension des compétences de police judiciaire de ces agents.
J'ajoute que ce double agrément sera un élément de la reconnaissance de la fonction et qu'il conférera une légitimité renforcée aux agents de police municipale.
Ai-je besoin d'insister sur le fait qu'en matière d'ordre public c'est le préfet qui assume en dernier ressort la responsabilité ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je maintiens la position de la commission des lois. J'ai d'ailleurs oublié d'avancer un argument en faveur de l'amendement n° 24 : l'Assemblée nationale a cru bon de préciser - et son intention était louable - que l'agrément interviendrait après la nomination des agents, estimant qu'il ne fallait pas engager des frais de formation inutiles et qu'il fallait d'abord solliciter l'agrément, puis nommer, puis former, puis assermenter. Mais, juridiquement, ce n'est pas possible car on ne peut pas donner un agrément à un fonctionnaire inscrit sur une liste d'aptitude nationale puisqu'on ne sait pas sur quel territoire il exercera sa profession.
La commission des lois réaffirme donc que l'agrément du préfet apparaît inutile par rapport à la situation actuelle, qu'à l'évidence la loi réalise surtout une extension de pouvoir en matière de police judiciaire et que, bien évidemment, il convient de revenir à ce qui est la seule solution juridiquement acceptable, à savoir d'abord la nomination, puis l'agrément, puis l'assermentation.
La commission des lois, dans un autre amendement, proposera d'ailleurs de fixer le délai d'agrément à deux mois, de façon qu'il intervienne à une date la plus proche possible de la nomination et d'une formation par le CNFPT et afin qu'il n'y ait ni frustration pour les agents qui se verraient refuser l'agrément ni formation inutile.
M. le président. L'amendement n° 65 rectifié ter est-il maintenu ?
M. François Trucy. A l'instar de M. About, qui a retiré l'amendement n° 64, je le retire, ainsi que, par avance, l'amendement n° 66 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 65 rectifié ter est retiré.
Par ailleurs, compte tenu des votes déjà intervenus, l'amendement n° 54 rectifié n'a plus d'objet.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 105.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je suis favorable à ce sous-amendement et, par voie de conséquence, défavorable à l'amendement n° 24, qu'il faut d'ailleurs relier, pour bien le comprendre, à l'amendement n° 25. En effet, d'une part, on supprime le double agrément et, d'autre part, on prévoit un agrément tacite par le procureur dans un délai fixé à trois mois.
Comme je l'ai dit dans mon intervention liminaire, c'est très dangereux. En effet, compte tenu de l'encombrement bien connu des juridictions, dans certains cas les maires seront appelés à prendre des décisions sans avoir vraiment de proposition du préfet ni même du procureur.
Voilà pourquoi on ne peut qu'approuver le sous-amendement du Gouvernement, c'est-à-dire le retour au texte initial.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 105, repoussé par la commission.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 25, M. Delevoye, au nom de la commission, propose, après le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 412-49 du code des communes, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'agrément est délivré par le procureur de la République dans un délai de deux mois à compter de la demande du maire. Passé ce délai, ou à l'issue d'un délai de trois mois si le procureur de la République demande un délai supplémentaire d'un mois, l'agrément est réputé délivré. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Monsieur Peyronnet, à l'évidence, nous souhaitons que la nomination du fonctionnaire soit la plus proche possible de la formation, mais aussi que l'agrément soit délivré par le procureur de la République dans un délai de deux mois.
Le procureur de la République doit cependant avoir la faculté, notamment en cas de transfert d'un département à un autre, de demander un délai supplémentaire.
Je rappelle que le procureur de la République dispose toujours de la faculté de retirer l'agrément, même en cas d'accord tacite au bout de trois mois. Mais nous sommes convaincus, les uns et les autres, que l'efficacité de l'Etat est telle que les délais seront respectés !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Toujours sur l'article 6, je suis maintenant saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 26, M. Delevoye, au nom de la commission, propose, dans le dernier alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 412-49 du code des communes, de remplacer les mots : « temporairement ou définitivement par le réprésentant de l'Etat dans le département ou » par le mot : « par ».
Par amendement n° 109 rectifié, le Gouvernement propose, dans le troisième alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 412-49 du code des communes, de supprimer les mots : « temporairement ou définitivement ».
Par amendement n° 66, rectifié, MM. About et Trucy proposent, dans le troisième alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 412-49 du code des communes, de supprimer les mots : « le représentant de l'Etat dans le département ».
Par amendement n° 60, M. Gélard et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent, dans le dernier alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 412-49 du code des communes, de remplacer les mots : « représentant de l'Etat dans le département » par le mot : « préfet ».
L'amendement n° 66 rectifié a été précédemment retiré.
Quant à l'amendement n° 60, il n'a plus d'objet.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 26.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Cet amendement a deux objets : supprimer la possibilité du retrait temporaire de l'agrément pour éviter les confusions avec les procédures disciplinaires et, par coordination, prendre en compte la suppression de l'agrément par le préfet.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 109 rectifié et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 26.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. La commission voit bien, tout comme moi-même, la difficulté du retrait temporaire : un agrément est ou n'est pas retiré. Bien que je partage le point de vue de la commission à cet égard, je ne peux cependant pas accepter son amendement dès lors que le double agrément n'est pas rétabli.
Dans ce domaine, c'est le préfet qui assume la responsabilité de l'ordre public. Un agrément tacite au niveau du procureur ne saurait suffire en matière d'ordre public.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 109 rectifié n'a plus d'objet.
Par amendement n° 74, MM. Vasselle et Ostermann proposent, dans le dernier alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 412-49 du code des communes, de remplacer le mot : « consultation » par le mot : « avis ».
L'amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° 27, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de compléter le dernier alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 412-49 du code des communes par une phrase ainsi rédigée : « Le maire peut alors proposer un reclassement dans un autre cadre d'emplois dans les mêmes conditions que celles prévues à la section III du chapitre VI de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, à l'exception du second alinéa de l'article 81. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Permettez-moi, tout d'abord, de revenir sur ce que vous disiez à l'instant, monsieur le ministre.
Comme en témoigne l'article 20, vous souhaitez ne pas rappeler l'ensemble des policiers municipaux pour solliciter un nouvel agrément. Cela signifie donc que vous donnez force à l'actuel agrément, qui est donné par le procureur. La commission des lois a simplement souhaité garder cette logique, en reconnaissant au procureur la capacité d'agréer les policiers municipaux.
J'en viens à l'amendement n° 27.
L'Assemblée nationale a supprimé la faculté pour le maire de proposer un reclassement. Nous avons estimé que c'était rendre la situation plus difficile et pour le personnel, et pour le maire, qui se retrouve avec un fonctionnaire qu'il ne peut absolument pas reclasser dans un autre service.
D'où cet amendement, qui vise à offrir une troisième voie entre l'obligation de garder dans le même emploi un agent qui ne pourrait plus continuer à exercer ses fonctions et la révocation ou la mise à la retraite d'office. Cette mesure, qui nous paraît sage et raisonnable, est conforme à l'intérêt du fonctionnaire.
Par ailleurs, nous avons ajouté une clause visant à ce que ce reclassement ne soit pas subordonné à la demande de l'intéressé, contrairement à ce qui est prévu par la loi du 26 janvier 1984 en cas d'inaptitude physique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Article 7