Séance du 2 juin 1998







M. le président. Avant de donner la parole à M. Tui, auteur de la question n° 264, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité, je tiens à saluer sa première intervention devant la Haute Assemblée.
M. Basile Tui. Je vous remercie, monsieur le président, de ce propos de bienvenue.
Si les problèmes qui se posent de nos jours sont universels, il est cependant des endroits où ils sont ressentis avec une toute singulière intensité, surtout quand on cherche, sans grand succès, des solutions pour y remédier. Tel est le cas à Wallis-et-Futuna.
J'ai souhaité attirer l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur les difficultés que rencontre actuellement la majeure partie de la population du territoire de Wallis-et-Futuna. En effet, de nombreux foyers, qui représentent environ 80 % des habitants du territoire, ne disposent d'aucune ressource financière fixe et se trouvent donc réduits à vivre d'une autosubsistance irrégulière et insuffisante.
Les petits producteurs ne peuvent commercialiser de façon régulière leur production et sont donc dans l'impossibilité de faire face à des charges inhérentes à la vie quotidienne, telles que de simples factures d'eau et d'électricité.
En outre, les familles connaissent de réelles difficultés pour faire face à certains frais liés à la scolarisation de leurs enfants, notamment aux frais d'habillement.
Des efforts ont été entrepris au niveau local, telle la création du fonds d'aide au développement économique et social, le FADES, et du code territorial des investissements, le CTI, prévoyant des aides au promoteur qui, dans le cadre de son projet, crée réellement de nouveaux emplois. Devant l'ampleur du problème, ces mesures demeurent cependant nettement insuffisantes.
Par ailleurs, l'Etat, à travers les crédits des chantiers de développement, offre une possibilité à des jeunes d'effectuer vingt heures par semaine de travaux, sous forme de contrat à durée déterminée.
On peut regretter cependant que ces crédits n'aient pu être maintenus à leur niveau promis en 1995, c'est-à-dire 6 millions de francs par an en deux versements de 3 millions de francs chacun : ils ont en effet été anormalement diminués cette année de 795 000 francs ; c'est autant de contrats de travail supprimés et, par conséquent, autant de jeunes abandonnés au désoeuvrement.
J'appelle donc l'attention du Gouvernement sur la fracture sociale qui s'aggrave d'année en année dans le territoire, opposant ces foyers sans revenu à ceux qui perçoivent des salaires. Je tiens d'ailleurs à préciser que cette situation de paupérisation pourrait rapidement devenir explosive si aucune mesure adéquate n'était prise à court terme pour y remédier.
Je souhaite donc savoir si le Gouvernement envisage prochainement la création d'un revenu minimum de subsistance spécifique, à l'instar du revenu minimum d'insertion existant en métropole, ou du revenu minimum de croissance mis en place en Nouvelle-Calédonie.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Monsieur le sénateur, je suis très heureux de vous répondre à l'occasion de votre première intervention devant le Sénat.
Je vous ai écouté avec émotion, après avoir lu votre question avec beaucoup d'attention.
Comme vous le savez, l'article 12 de la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 confère aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer ; à ce titre, la protection sociale et l'aide sociale relèvent de la compétence de l'Assemblée territoriale.
Par conséquent, tout dispositif tel que celui que vous proposez doit se faire dans le cadre de la loi de juillet 1961 et dans le respect de l'organisation sociale du territoire qui repose beaucoup sur le droit coutumier.
Pour autant, l'Etat n'est pas sans prendre en compte la spécificité du territoire, et vous avez d'ailleurs rappelé à cet égard certaines dispositions qui pèsent lourd sur le budget, monsieur le sénateur : l'Etat apporte en effet son concours, dans le cadre conventionnel, au financement de l'aide sociale, à hauteur de 7,6 millions de francs par an, dont 6,9 millions de francs versés par le ministère de l'emploi et de la solidarité et 0,7 million de francs versé par le secrétariat d'Etat à l'outre-mer.
Cette intervention vise trois domaines : tout d'abord, l'aide aux personnes âgées ne bénéficiant pas du régime local de retraite, pour un montant de 5 millions de francs qui devrait être augmenté du fait de la renégociation de la convention de 1992 ; par ailleurs, le versement de prestations familiales aux familles non salariées, à hauteur de 2,2 millions de francs au titre de l'aide sociale à l'enfance ; enfin, l'aide aux handicapés, pour un montant de 0,4 million de francs.
En outre, l'Etat participe - vous l'avez dit, monsieur le sénateur - pour 4,4 millions de francs par an au financement des chantiers de développement qui sont assimilables à des contrats emploi-solidarité locaux.
J'ai donc le regret de vous dire, monsieur le sénateur, que, au regard des éléments que je viens de vous rappeler, le Gouvernement n'envisage pas la création d'un revenu minimum à Wallis-et-Futuna.
M. Basile Tui. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Tui.
M. Basile Tui. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie infiniment de votre réponse. Vous venez de rappeler les conditions dans lesquelles le territoire de Wallis-et-Futuna bénéficie de l'intervention de l'Etat.
Si je me suis permis d'évoquer ces problèmes auxquels la population fait face quotidiennement, c'est tout simplement parce que, compte tenu des problèmes accumulés et de l'importance des besoins, les mesures prises se sont révélées nettement insuffisantes.
Nous nous demandons toujours pourquoi un territoire de quelques centaines de kilomètres seulement, dont le sous-sol est dépourvu de toute ressource naturelle, ne bénéficie pas des mêmes aides que la Nouvelle-Calédonie, pourtant beaucoup plus riche.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je maintiens donc ma demande, en espérant que l'Etat, avec toute la sollicitude dont il sait faire preuve, considérera différemment les problèmes spécifiques de ces gens bien démunis.

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