Séance du 27 mai 1998







M. le président. « Art. 47 bis A. - L'article L. 132-7 du code des assurances est ainsi rédigé :
« Art. L. 132-7. - L'assurance en cas de décès est de nul effet si l'assuré se donne volontairement et consciemment la mort au cours de la première année du contrat.
« Ces dispositions ne sont pas applicables aux contrats mentionnés à l'article L. 140-1 souscrits par les organismes mentionnés au dernier alinéa de l'article L. 140-6. »
Par amendement n° 29, MM. Huchon, Machet et les membres du groupe de l'Union centriste proposent de rédiger comme suit cet article :
« I. - L'article L. 132-7 du code des assurances est abrogé.
« II. - Dans l'article L. 132-18 du code des assurances, les mots : "dans le cas où l'assuré s'est donné volontairement et consciemment la mort au cours du délai mentionné à l'article L. 132-7 ou lorsque le contrat exclut la garantie du décès en raison de la cause de celui-ci" sont supprimés. »
La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet. L'article L. 132-7 du code des assurances, dans sa rédaction issue de l'article 6 de la loi n° 81-5 du 7 janvier 1981, interdit que le décès volontaire et conscient puisse être à l'origine de la mise en jeu de la garantie prévue au contrat d'assurance en cas de décès au cours de ses deux premières années d'application.
Une telle interdiction pénalise tout particulièrement le conjoint survivant, qui est déjà durement touché par le suicide et qui doit, en outre, subir une nouvelle épreuve avec le non-versement des droits acquis par le contrat.
L'application de l'article L. 132-7 crée une injustice flagrante quant à l'origine d'un décès, et donc du veuvage.
Le présent article constitue d'ores et déjà un progrès certain par rapport à la situation actuelle en ramenant de deux ans à un an le délai pendant lequel l'assurance-décès peut être déclarée de nul effet et en excluant du dispositif les assurances de groupe souscrites par les organismes mentionnés au dernier alinéa de l'article L. 140-6 du code des assurances.
Cependant, afin de ne pas créer une nouvelle injustice entre les conjoints survivants, il est proposé de ne pas appliquer également l'article L. 132-7 du même code aux contrats individuels, et donc de supprimer l'article concerné.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. Un pas important a été franchi dans le sens de l'assouplissement d'un dispositif en effet très sévère pour le bénéficiaire d'un contrat d'assurance vie qui doit subir le décès violent de son conjoint. Il est apparu à la commission peu raisonnable d'aller plus loin au risque d'encourager les compagnies d'assurance à pratiquer une sélection des risques.
Telle est la raison pour laquelle, si le Gouvernement venait à partager ce sentiment, je recommanderais à notre excellent collègue M. Jacques Machet de retirer son amendement. A défaut, la commission des finances serait obligée d'émettre un avis défavorable.
Que notre collègue comprenne bien que nous ne sous-estimons pas le problème réel posé tel qu'il l'a décrit tout à l'heure ; mais le mieux étant parfois l'ennemi du bien, je crois qu'il faut bien mesurer la conséquence de cette proposition.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je tiens à remercier M. le rapporteur des propos qu'il vient de tenir. Le Gouvernement a effectivement fait un pas important en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale pour, si je puis dire, adoucir le sort des conjoints de personnes qui se seraient suicidées, en ramenant de deux ans à un an le délai d'exclusion légale pour les contrats individuels.
Je crois, comme M. Lambert, que supprimer complètement ce délai, qui nous place déjà parmi les pays les moins restrictifs dans ce domaine, amènerait les compagnies d'assurance à procéder à une sélection des risques qui pourrait être tout à fait défavorable pour certaines familles fragiles.
Je crois donc, comme M. Lambert, qu'il serait sage, monsieur Machet, que vous retiriez votre amendement, car le mieux, en la matière, pourrait être l'ennemi du bien.
M. le président. Monsieur Machet, l'amendement n° 29 est-il maintenu ?
M. Jacques Machet. J'ai bien entendu l'appel conjoint de M. le rapporteur et de M. le secrétaire d'Etat, mais, en tant que président du groupe d'étude des problèmes du veuvage, je me dois de témoigner du fait que les personnes qui se retrouvent seules après un suicide connaissent des difficultés très importantes.
Certes, je vais retirer l'amendement, mais je voudrais que l'on prenne conscience de ces difficultés qu'affrontent ces veufs, et plus encore ces veuves.
J'espère, en tout cas, que la mesure que je propose sera au moins étudié un jour et que l'on avancera tout doucement dans le bon sens.
M. le président. L'amendement n° 29 est retiré.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 47 bis A.

(L'article 47 bis A est adopté.)

Article 47 ter