Séance du 19 mai 1998







M. le président. Par amendement n° 55, M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, propose d'insérer, avant l'article 19, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le cinquième alinéa de l'article 521-1 du code pénal, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Est également puni des mêmes peines le fait, pour un vétérinaire, lorsqu'il a été amené à soigner des animaux ayant participé à des combats, de ne pas en aviser le maire. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Cet amendement tend à obliger le vétérinaire amené à soigner un animal présentant des lésions telles qu'elles lui ont manifestement été infligées à l'occasion d'un combat à déclarer cet événement au maire.
A l'heure actuelle, les combats d'animaux sont prohibés, à l'exception des courses de taureaux ou des combats de coqs dans les localités où une tradition locale ininterrompue peut être établie. En cas d'infraction à cette réglementation, les dispositions et les sanctions prévues à l'article 521-1 du code pénal sont applicables.
Dès lors, il est logique que les vétérinaires amenés à soigner des animaux victimes de combats soient obligés d'en aviser le maire.
D'aucuns considéreront qu'une telle disposition peut provoquer des représailles envers les professionnels qui s'acquitteront de cette obligation. Mais j'estime que ce projet de loi exige de la part de tous un minimum d'engagement.
En outre, le vétérinaire pourra toujours arguer auprès de ceux qui lui amèneront un animal blessé lors d'un combat que, en cas de non-respect de cette obligation, il encourt une forte amende ainsi qu'une peine d'emprisonnement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Cet amendement mettrait le vétérinaire concerné dans une situation très difficile à gérer, voire périlleuse, dans la mesure où il ne peut avoir que des soupçons quant à la participation d'un chien à un combat. Dans ces conditions, la délation à laquelle il lui est demandé de se livrer ne permettrait pas d'engager des poursuites à l'égard de ses clients.
Le Gouvernement ne peut accepter de placer la profession vétérinaire dans une telle situation. Il propose en conséquence le rejet de cet amendement.
M. Dominique Braye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. J'ai vu mon collègue et confrère Jean Bernard m'adresser un signe manifestant son embarras.
Mes chers collègues, je ne vous soumets cette proposition qu'après avoir évoqué le problème avec les représentants de la profession. Il est bien évident que, en cas de doute, le vétérinaire ne fera pas de déclaration.
Je puis vous indiquer que le service des urgences de l'école vétérinaire d'Alfort voit de plus en plus de chiens présentant des lésions dont on peut affirmer avec certitude qu'elles résultent de morsures. Deux vétérinaires qui exercent dans des quartiers difficiles et que j'ai rencontrés m'ont fait part du même constat. L'un d'eux n'a d'ailleurs pas attendu que je dépose cet amendement pour déclarer aux services de police et de gendarmerie les faits qu'il avait pu constater. En bon citoyen, il a ainsi essayé d'apporter sa pierre à la résolution de ce problème de société.
J'ai aussi abordé cette question avec le syndicat des vétérinaires et avec l'ordre des vétérinaires ; bien qu'elles aient reconnu que la mise en oeuvre de cette disposition présentait certaines difficultés, ces instances représentatives ont néanmoins admis que la profession devait fournir cet effort pour aider à résoudre le problème.
A la fois en qualité de rapporteur et en tant que vétérinaire, je demande que le Sénat se prononce sur cet amendement par scrutin public.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je veux simplement signaler au Sénat que le syndicat des vétérinaires d'exercice libéral est opposé à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 55, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 90:

Nombre de votants 315
Nombre de suffrages exprimés 299
Majorité absolue des suffrages 150
Pour l'adoption 173
Contre 126

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 19.

Article 19