M. le président. « Art. 7. - L'article 19 de la loi n° 93-980 du 4 août 1993 précitée est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "sur les opérations de la Banque de France, la politique monétaire et ses perspectives" sont remplacés par les mots : "sur les opérations de la Banque de France, la politique monétaire qu'elle met en oeuvre dans le cadre du Système européen de banques centrales et les perspectives de celle-ci" ;
« 2° Le début du deuxième alinéa est ainsi rédigé : "Dans le respect des dispositions de l'article 107 du traité instituant la Communauté européenne et des règles de confidentialité de la Banque centrale européenne, le gouverneur de la Banque de France..." (Le reste sans changement) . »
Par amendement n° 10, M. Lambert propose de rédiger comme suit le dernier alinéa de cet article :
« 2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé : "Dans le respect des règles de confidentialité de la Banque centrale européenne, le gouverneur de la Banque de France ou le Conseil de la politique monétaire sont entendus par les commissions des finances des deux assemblées, à l'initiative de celles-ci, et peuvent demander à être entendus par elles". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. La commission propose d'introduire deux modifications à l'alinéa 2° de l'article 7.
Tout d'abord, elle souhaite supprimer la référence à l'article 107 du traité relatif à l'indépendance des membres de la Banque centrale européenne et des banques centrales nationales, référence qui paraît sans utilité ici, d'autant que le gouverneur, quand il sera auditionné par les commissions des finances du Parlement, sera tenu au respect des règles de confidentialité de la Banque centrale européenne. L'article 1er du projet de loi prévoit déjà que le gouverneur ne peut recevoir d'instruction de quiconque.
Ensuite, elle souhaite que les membres du CPM autres que le gouverneur puissent être entendus par les commissions des finances des deux assemblées.
En effet, le gouverneur de la Banque de France, lorsqu'il sera auditionné par les commissions des finances, le sera avant tout en tant que membre du conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne. Le CPM pourrait dès lors avoir un avis complémentaire, inspiré par des préoccupations plus nationales à propos de la politique monétaire menée par le conseil des gouverneurs. C'est ce qui a conduit la commission des finances du Sénat à faire cette proposition.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La dernière modification ne me pose pas de problème ; ce qui est dit sur l'audition des membres du CPM est tout à fait acceptable par le Gouvernement.
En revanche, la première modification, qui vise à supprimer la référence à l'article 107 du traité, ne me paraît pas possible à retenir.
L'Institut monétaire européen a clairement fait savoir que l'audition devait se faire sans préjudice de l'indépendance du gouverneur.
Dans ces conditions, je suis très surpris qu'une assemblée comme la vôtre, qu'une commission des finances comme celle que vous présidez, monsieur Poncelet, veuille ne pas rappeler l'indépendance du gouverneur, qui est en quelque sorte la base de la création de la Banque centrale européenne.
On aurait pu concevoir à la rigueur - encore que ce ne soit pas la position de l'Institut monétaire européen - de ne pas y faire référence ; mais dès lors que cela figure dans le texte, cette volonté de le retirer serait interprétée, me semble-t-il, par tout le monde comme une opposition du Sénat à l'indépendance du gouverneur de la Banque centrale, ce qui me paraît tout à fait inconcevable.
Je propose donc que vous gardiez, si vous le souhaitez, la seconde modification, mais pas la première.
M. Alain Lambert, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Cela est indiqué clairement à l'article 1er, mais il n'y a pas là, je crois, de différence de point de vue.
Comme je l'ai indiqué avant la discussion des articles, il faut que nous soyons juridiquement corrects. Ce serait en effet un comble d'avoir voulu l'euro et de ne pas l'être ! Puisque M. le ministre me dit que cela risque d'être le cas, je suis d'accord pour ne plus supprimer la référence à l'article 107 du traité.
Si j'ai bien compris, M. le ministre n'est pas opposé en revanche, à la proposition qui est faite de pouvoir entendre le CPM. (M. le ministre acquiesce.)
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 10 rectifié, présenté par M. Lambert, au nom de la commission et tendant à rédiger comme suit le dernier alinéa de l'article 7 :
« 2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé : "Dans le respect des dispositions de l'article 107 du traité instituant la Communauté européenne et des règles de confidentialité de la Banque centrale européenne, le gouverneur de la Banque de France ou le Conseil de la politique monétaire sont entendus par les commissions des finances des deux assemblées, à l'initiative de celles-ci, et peuvent demander à être entendus par elles". »
Quel est ainsi l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 10 rectifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. La question du contrôle de l'activité de la Banque de France est évidemment directement posée par le transfert de compétences de la banque vers le futur SEBC et la BCE en ce qui concerne l'émission des billets libellés en euros.
Si l'article 107 du traité de Maastricht a été transposé par la France en 1993 dans l'esprit et dans la loi au travers, notamment, de l'article 1er de la loi du 4 août, tel que ressortant, après une péripétie constitutionnelle sur laquelle je ne reviendrai pas, de la rédaction du II de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1993, aujourd'hui, il s'agit, selon notre commission des finances, de faire en sorte que la « publicité » accordée aux activités de la Banque de France, en particulier son rapport annuel, dépende, en quelque sorte, des règles de confidentialité que la Banque centrale européenne voudra bien retenir pour son mode de fonctionnement.
Est-ce à dire qu'il y aurait quelque chose à cacher ?
Devons-nous en conclure qu'après l'indépendance, soulignée par l'article 107, nous devrions admettre aussi la diffusion d'une information en quelque sorte édulcorée, sélectionnée à l'aune de ce qui constitue la raison d'être de la future Banque centrale européenne, à savoir la mise en oeuvre de la monnaie unique et la pédagogie du renoncement à toute alternative politique à l'économie de marché et à l'acceptation de la monnaie unique comme instrument de cette économie de marché que cela implique ?
Nous ne voterons donc pas cet amendement de la commission des finances, qui procède, de notre point de vue, de la même logique libérale que les précédents, logique qui ne reconnaît comme règles que celles des marchés et ignore totalement le contrôle démocratique.
M. Jacques Habert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Je tiens à souligner l'importance de cet amendement, qui donne aux parlementaires la possibilité d'interroger et d'auditionner les hauts fonctionnaires de la Banque centrale européenne et le gouverneur de la Banque de France. C'est là une ouverture très large qui mérite d'être soulignée.
J'observe que cette procédure existe aux Etats-Unis, où le Congrès peut interroger à tout moment le président de la Réserve fédérale. Il le fait d'ailleurs souvent et sans ménagement.
C'est donc une innovation qu'il est bon de mettre en relief au moment où elle entre dans notre législation.
M. Lucien Neuwirth. Très bien !
M. Jacques Habert. La possibilité pour les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat de procéder à de telles auditions jouera en faveur d'une véritable transparence. Des explications seront fournies, qui jusque-là restaient relativement confidentielles et parfois mystérieuses.
De plus, je pense que le Gouvernement pourra veiller à l'exercice démocratique du débat sur la politique monétaire.
C'est donc bien volontiers que nous voterons cet amendement n° 10 rectifié.
M. Emmanuel Hamel. C'est un moindre mal !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, ainsi modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article 7 bis