M. le président. Par amendement n° II-3, MM. Gérard Larcher et André Diligent proposent d'insérer, après l'article 54, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 1615-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les collectivités territoriales ou leurs groupements qui comprennent une zone franche urbaine définie au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, les dépenses réelles d'investissement relatives à l'installation et à l'aménagement d'équipements collectifs à caractère culturel ou sportif situés dans ces zones, donnent lieu, à compter de 1999, sous réserve des dispositions de l'article L. 1615-7, à remboursement du fonds de compensation dès l'exercice en cours. »
« II. - Les pertes de recettes résulant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Diligent.
M. André Diligent. Le Sénat connaît l'amendement qu'avec mon ami Gérard Larcher j'ai l'honneur de lui présenter, car il a voté un amendement exactement identique le 10 octobre 1996, lors de l'examen du projet de loi relatif à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville.
Le Sénat avait émis un vote positif, malgré, je le précise, l'opposition du gouvernement de l'époque. Par conséquent, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez l'occasion de vous distinguer de ce gouvernement-là, qui n'était pas le vôtre. (Sourires.)
M. Alain Lambert, rapporteur général. Très habile !
M. André Diligent. J'espère, en tout cas, que le Sénat restera dans sa logique, car il n'a pas changé, lui ! (Nouveaux sourires.)
M. Philippe Marini. Très bien !
M. André Diligent. Permettez-moi de citer un extrait du rapport du Haut Conseil à l'intégration : « La culture est sans doute l'un des domaines où le lien dialectique pourtant nécessaire entre identité et appartenance à la collectivité est mis en évidence. La ville est à la fois le lieu de développement des cultures spécifiques et celui de la recherche d'une culture pour tous. » On pourra reprendre ce texte à l'occasion du prochain débat sur l'intégration !
Dans le droit-fil de cette citation, l'amendement que je vous propose a pour objet d'accélérer le remboursement de la TVA au profit des communes des zones franches.
Afin d'éviter toute incidence sur le solde budgétaire de l'exercice 1998, et pour être agréable au Gouvernement, nous proposons même que la mesure n'entre en vigueur qu'à partir de 1999. Je suis persuadé que le Gouvernement sera très sensible à ce geste ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert. rapporteur général. Il est vrai que le Sénat et sa commission des finances sont constants, et ce quels que soient les gouvernements.
La commission des finances estime que cet amendement est tout à fait pertinent, puisqu'il s'agit de favoriser l'action en faveur de zones urbaines difficiles, en incitant au développement d'équipements sportifs et culturels de nature à offrir aux jeunes et aux habitants de ces quartiers un meilleur environnement. De surcroît, le dispositif ne nous semble pas exposer l'Etat à de trop lourdes dépenses, dans la mesure où il s'agit plutôt d'un coût de trésorerie, puisque cet amendement ne fait qu'avancer la date du versement du fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA.
La commission des finances a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est avec un grand respect que j'ai écouté M. Diligent. Avec continuité et une certaine obstination, il propose que les remboursements du Fonds de compensation pour la TVA interviennent l'année même - et non deux ans après, comme il est de règle - de la réalisation de l'investissement, lorsqu'il s'agit d'un investissement relatif aux équipements collectifs à caractère culturel ou sportif situés dans ce que l'on appelle les zones franches urbaines, les ZFU, et ce afin d'encourager les communes à y implanter de tels équipements.
M. Diligent y voit un encouragement à une politique d'intégration dont il a été l'un des artisans et l'un des défenseurs les plus acharnés.
Les communes qui réalisent des investissements dans ces zones franches urbaines sont d'ores et déjà bénéficiaires du FCTVA, à condition, bien évidemment, que les investissements en question satisfassent aux conditions d'éligibilité.
Par conséquent, ce qui est en cause, c'est non pas l'accès à ce fonds, mais la possibilité d'obtenir un remboursement anticipé, c'est-à-dire immédiatement plutôt qu'au terme de deux ans.
J'ai déjà eu l'occasion d'indiquer, au cours de ce débat budgétaire, que les relations entre l'Etat et les collectivités locales devraient faire l'objet d'une large concertation en 1998, et il va de soi que le FCTVA - car les montants en jeu sont considérables - sera inclus dans les éléments de cette concertation.
A ce stade, cet amendement me semble donc peut-être un peu prématuré, mais nous aurons le temps d'en reparler l'année prochaine, puisque M. Diligent propose que la mesure prenne effet en 1999.
Une décision trop rapide en la matière pourrait entraîner l'extension d'une telle dérogation, peut-être sans précaution, à de nombreux autres types d'équipements.
J'ajoute qu'il existe déjà de nombreuses mesures tendant à favoriser la redynamisation des territoires situés dans les zones franches urbaines. Celle que vous proposez constitue une incitation supplémentaire qu'il faut replacer dans la politique d'ensemble des zones franches urbaines.
Compte tenu de ces considérations et parce que nous aurons l'occasion de reparler du fonds de compensation de la TVA dans le courant de l'année 1998, je vous demande, avec tout le respect que j'éprouve pour vous, monsieur Diligent, de bien vouloir retirer cet amendement. Sinon, je serai obligé d'en demander le rejet.
M. le président. Monsieur Diligent, l'amendement est-il maintenu ?
M. André Diligent. C'est avec beaucoup d'émotion que je reçois les respects d'un membre éminent du Gouvernement : je suis très touché par cette marque de sympathie.
J'aurais souhaité y répondre par un autre geste de politesse, mais je considère que je souscris déjà au souhait de concertation exprimé par M. le secrétaire d'Etat : mon amendement a aujourd'hui un caractère indicatif, afin de préparer le futur débat. (Sourires.) Je le considère donc comme la première étape de la concertation que nous allons avoir, et c'est la raison pour laquelle je le maintiens. (Rires.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement II-3.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la semaine dernière, au cours du débat sur les crédits de la politique de la ville et de l'intégration, nous avons évoqué, avec le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, M. Gérard Larcher, ce sujet des zones urbaines sensibles et des zones franches urbaines. Nous avons souhaité que les mesures mises en oeuvre par la loi portant pacte de relance pour la ville, votée voilà juste un peu plus d'un an, puissent perdurer et porter leurs fruits pendant un temps suffisant pour qu'il soit possible d'en dresser un vrai bilan dans la continuité. La persévérance est un élément essentiel dans le succès de ces dispositifs !
Nous avons insisté, les uns et les autres, sur le caractère primordial de la prise en charge des aspirations des jeunes de ces secteurs par différents moyens, qu'il s'agisse de la prévention, de l'action éducative et sociale, des sports - qui sont une remarquable école de discipline et d'apprentissage des règles collectives et des règles de la vie en société - ou qu'il s'agisse, lorsque c'est nécessaire, des services publics. Mais l'Etat a un rôle à jouer et doit poser des limites lorsque cela s'impose, de telle sorte que la société puisse intégrer ses différentes composantes et vivre autant que possible en harmonie.
Les considérations qui ont été développées sur toutes les travées de cet hémicycle en faveur d'une politique des zones urbaines sensibles, d'une politique de discrimination positive en faveur des secteurs qui cumulent le plus de handicaps, constituent, à mon sens, un cadre dans lequel s'inscrit tout logiquement l'initiative présentée par notre éminent collègue André Diligent.
Pour ma part, en tant que rapporteur spécial des crédits de la ville, c'est avec grand plaisir que je voterai cet amendement.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-3, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi des finances, après l'article 54.

Article 55