Sur ces crédits, la parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce titre Ier porte, bien évidemment, sur la dette publique. Celle-ci s'est enfin stabilisée - M. le secrétaire d'Etat et MM. les rapporteurs spéciaux l'ont indiqué - et cela est heureux pour les finances publiques. Mais le stock de la dette reste tout de même coquet, M. le secrétaire d'Etat l'a reconnu.
L'évolution des taux d'intérêt sera déterminante pour la maîtrise de cette dette. Cela est d'autant plus vrai que le déficit du budget est en voie d'être lui-même maîtrisé.
Toutefois, les spécialistes s'attendent à une montée progressive des taux d'intérêt, notamment des taux longs. En effet, nous sommes, semble-t-il, au point bas des taux nominaux, même si les taux d'intérêt réels demeurent encore historiquement trop élevés.
Dans ce contexte, monsieur le secrétaire d'Etat, nous ne comprenons pas pourquoi, à la fin du mois d'octobre 1997, le conseil de la politique monétaire et le gouverneur de la Banque de France ont pris la décision, grave, d'accroître le taux d'intervention de la banque centrale dans l'heure même - ce qui était du plus mauvais effet - qui a suivi une décision analogue de la Bundesbank.
Revenons quelques instants sur le rôle et le statut de la Banque de France, qui sont régis par deux lois des mois d'août et de décembre 1993, lois qui ont été prises en application du traité de Maastricht.
L'article 1er de cette loi figurant dans le chapitre 1er intitulé Missions fondamentales de la Banque de France dispose : « la Banque de France définit et met en oeuvre la politique monétaire dans le but d'assurer la stabilité des prix. »
L'article 2 prévoit : « Le Gouvernement » - j'y insiste - « détermine le régime de change et la parité du franc. »
M. René Régnault. Eh oui !
M. Paul Loridant. Monsieur le secrétaire d'Etat, étions-nous à la fin du mois d'octobre, sommes-nous au mois de décembre 1997 dans une situation d'inflation ? Y a-t-il surchauffe de l'économie ? Y a-t-il emballement des salaires ? Honnêtement, si nous étions dans cette situation, nous le saurions ! La presse financière et les marchés nous en informeraient.
Dès lors, monsieur le secrétaire d'Etat, la décision du conseil de la politique monétaire et du gouverneur de la Banque de France est strictement incompréhensible. Pire, c'est une faute politique et une faute économique, sauf si la décision d'augmenter les taux d'intérêt a été prise non pas pour assurer la stabilité des prix, mais en vue de maintenir une parité entre le franc et le deutsche mark compatible avec la création de l'euro programmée dans les prochains mois. Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, dans ce cas, seul le Gouvernement pouvait prendre cette décision d'augmenter les taux en vue d'assurer la parité des changes.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande très clairement si le Gouvernement, le ministre des finances ont donné des instructions à la Banque de France pour modifier les taux en référence à cette parité de change. Nous savons bien que le Gouvernement ne peut pas donner d'instructions à la banque centrale, mais la politique de change est du ressort exclusif du Gouvernement.
Il nous a été dit que cette augmentation des taux avait été justifiée par l'anticipation d'une éventuelle hausse de l'inflation dans les mois et les années à venir. Monsieur le secrétaire d'Etat, si tel est le cas, il s'agit d'une faute et c'est incompréhensible. Ou alors, c'est le Gouvernement qui a voulu cette augmentation des taux !
En conclusion, il serait temps, monsieur le secrétaire d'Etat, de modifier de nouveau les statuts de la Banque de France. Avec la création de l'euro, cette modification devient indispensable. Il conviendra alors de bien préciser les missions de la banque centrale et du système monétaire européen. On ne peut pas, en effet, limiter l'objet des banques centrales à la seule stabilité des prix. Il faudra préciser que les banques centrales contribuent également au plein emploi des moyens de production, donc à l'emploi.
Je sais bien, monsieur le secrétaire d'Etat, que, pour ce faire, il faut modifier le traité de Maastricht. Toutefois, s'agissant du groupe communiste républicain et citoyen et des partis qui le composent - le Parti communiste français et le Mouvement des citoyens - non seulement nous y sommes prêts, mais nous le souhaitons.
Nous vous demandons donc, monsieur le secrétaire d'Etat, de justifier cette hausse incompréhensible des taux d'intérêt et d'agir pour modifier et le traité de Maastricht et le statut des banques centrales. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je remercie M. Loridant de sa question et je souligne la passion avec laquelle il a défendu les intérêts de notre pays, une passion sympathique et j'espère communicative.
Il s'agit, monsieur Loridant, d'une décision purement conjoncturelle, qui a été prise par le gouverneur de la Banque de France à la suite d'un mouvement qu'il avait constaté quelques heures auparavant en Allemagne. C'est donc une décision d'adaptation qui ne met pas en cause les règles centrales sur lesquelles notre politique de change et notre politique des taux d'intérêt sont assises.
Tout d'abord, nous voulons que la France accède, dans de bonnes conditions et dans les délais prévus, à la monnaie unique. La politique économique du Gouvernement, qui, soit dit en passant, n'avait pas donné d'instruction au gouverneur de la Banque de France quant à la décision que vous avez évoquée...
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... la politique économique du Gouvernement, dis-je, consiste donc à assurer le passage à l'euro dans les meilleures conditions possible.
Cela implique - c'est le deuxième point que je tiens à souligner - une situation économique intérieure exemplaire grâce à une gestion rigoureuse de nos finances publiques ; je l'ai dit dans mon intervention. Cela suppose aussi le suivi des différents critères de bonne gestion fixés par les traités, notamment par le traité de Maastricht. Cela signifie également un niveau des taux d'intérêt à long terme tel qu'il puisse placer la France parmi les pays qui ont les taux d'intérêt les plus bas en Europe occidentale.
Nous nous trouvons dans cette situation. D'ailleurs, plusieurs années d'effort ont été nécessaires pour y parvenir.
Le fait d'avoir des taux d'intérêt parmi les plus bas de l'Union européenne est de nature à faire comprendre que, par ailleurs, la croissance peut revenir, que les perspectives d'investissement de notre pays sont beaucoup plus optimistes pour l'année 1998 que pour l'année 1997 et que les perspectives de développement de l'emploi peuvent s'asseoir sur une politique économique, monétaire et financière suffisamment solide pour que la France ne soit plus, comme elle l'a été voilà vingt ou vingt-cinq ans, le malade de l'Europe en ce qui concerne les relations financières, les taux d'intérêt et l'inflation.
La réduction de l'inflation à un taux jamais atteint par notre pays témoigne, à la fois, de la santé financière de la France, de la bonne gestion globale de ce pays et d'une économie capable d'être compétitive au plan international. Par ailleurs, les taux d'intérêt actuels permettent le redémarrage de l'investissement. En outre, la politique économique et sociale globale qui est conduite permettra l'accession de la France, en temps et en heure et je dirai la tête haute, au sein de la mécanique générale de la monnaie unique.
Tout cela me permet de dire que, globalement, monsieur Loridant, la politique économique et sociale du Gouvernement, eu égard à la situation financière, est purement et simplement excellente.
Le passage à la monnaie unique dans quelques semaines confirmera, avec éclat, combien le redressement du pays et la santé économique de notre pays sont tout à fait patents. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre Ier.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. « Titre II : 118 434 000 francs. »