M. le président. Alors que le climat social dans le domaine des transports routiers semble se dégrader, M. Gérard Roujas souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur l'importance toujours croissante du transport routier de marchandises, et plus particulièrement de matières dangereuses.
L'accroissement de ce mode de transport fait peser un risque majeur au niveau tant de la sécurité routière que de l'environnement.
Ces dernières semaines, des accidents tragiques ont mis en cause des poids lourds. Il est à craindre que, malgré l'amélioration constante des infrastructures routières, des accidents de ce type ne se multiplient, d'une part, en raison du nombre croissant de poids lourds en circulation et, d'autre part, en raison des conditions de travail des salariés de ce secteur d'activité.
Il lui demande donc quelles mesures il entend prendre, premièrement, afin de favoriser d'autres modes de transport de marchandises, rail, association rail-route, et, deuxièmement, afin d'assurer un strict respect de la réglementation du travail dans ce secteur d'activité. (N° 100.)
La parole est à M. Roujas.
M. Gérard Roujas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lorsque j'ai déposé cette question, le conflit des routiers n'avait pas encore éclaté. Nous connaissons, depuis, la manière dont le Gouvernement et vous-même, monsieur le ministre, avez su résoudre cette crise. La tâche était d'autant plus difficile que les chauffeurs routiers avaient le sentiment très fort d'avoir été bernés lors des négociations de 1996, car les engagements pris à ce moment-là n'avaient pas été tenus.
Cela dit, il n'en reste pas moins vrai que l'importance du trafic routier de marchandises souvent dangereuses constitue un problème majeur pour notre pays. En raison de sa situation géographique, la France est un carrefour important pour le trafic routier de marchandises. L'importance de celui-ci, liée aux conditions de travail des chauffeurs routiers - nous avons pu mesurer récemment l'ampleur des lacunes en matière de contrôle et de réglementation -, fait peser sur notre pays un risque majeur, au niveau tant de la sécurité que de l'environnement.
Il suffit, pour s'en convaincre, de se souvenir des accidents mortels impliquant des poids lourds qui, trop régulièrement, font la une de nos journaux. Je pense au carambolage survenu sur l'A 10, au nord de Bordeaux, dont on reparle aujourd'hui ou à celui qui s'est produit, voilà quelques jours, sur l'A 13, à l'ouest de Rouen, ou encore à la collision à un passage à niveau entre un poids lourd et un train. Je pourrais poursuivre pendant longtemps la litanie des drames dans lesquels les poids lourds sont impliqués, que leur responsabilité soit engagée ou non.
L'expérience montre que l'amélioration des infrastructures routières ne suffit pas à réduire le risque, ce qui rend plus impérieuse encore la nécessité de rechercher un meilleur équilibre entre les divers modes de transport de marchandises, en favorisant notamment le rail et les transports combinés rail-route, et d'engager, à l'échelon européen, une concertation en la matière afin de réduire progressivement les transports par route lorsqu'il s'agit de matières dangereuses.
Par ailleurs, alors que dans moins d'un an interviendra la libéralisation du marché européen, j'estime qu'il est également du devoir de l'Etat d'assainir les pratiques dans ce secteur d'activité et d'assurer un strict respect de la réglementation du travail.
Je vous demande donc, monsieur le ministre, de bien vouloir préciser vos intentions dans ce domaine.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, vous soulevez des questions qui sont d'actualité et qui concernent véritablement l'avenir de notre société.
Le respect des règles sociales qui encadrent l'activité du transport routier est indispensable pour garantir à la fois un meilleur équilibre de la concurrence pour les entreprises, une meilleure sécurité de l'ensemble des usagers et une amélioration des conditions de travail pour les conducteurs.
Dans ce cadre, je le dis avec force, le Gouvernement est particulièrement attentif à la dimension européenne de l'activité du transport routier et le chantier de l'harmonisation des règles sociales à ce niveau est une priorité d'autant plus affirmée que la libéralisation du marché européen interviendra le 1er juillet 1998.
C'est un dossier délicat mais qui avance et la France a proposé que soit désormais prévu, dans la réglementation sociale européenne, le principe de transparence, c'est-à-dire le décompte, la rémunération et la limitation des temps autres que la conduite.
Le conseil des ministres vient, par ailleurs, d'adopter un projet de loi visant à améliorer l'exercice de la profession de transporteur routier. Il sera débattu le 8 décembre prochain en première lecture à l'Assemblée nationale. Déclaré d'urgence, il sera voté dans les meilleurs délais.
Ce projet de loi prévoit que les entreprises de transport qui commettent des infractions répétées et de nature délictuelle à la réglementation pourront faire l'objet d'une sanction d'immobilisation administrative d'un ou de plusieurs de leurs véhicules. Dans le cas où une entreprise n'appliquerait pas cette sanction, le projet de loi prévoit des condamnations pénales.
Indépendamment de ces mesures législatives, mais simultanément, il est prévu, par arrêté du ministre de la justice, de majorer sensiblement le montant de la consignation pour les contrevenants qui ne peuvent pas justifier d'un domicile ou d'un emploi en territoire français.
S'agissant plus particulièrement des matières dangereuses, il existe une réglementation précise et très complète qui repose largement sur des règlements internationaux et dont la dernière mise à jour est entrée en vigueur le 1er janvier 1997.
Il existe, par ailleurs, des obligations de formation spécifiques pour les conducteurs et de certification pour les entreprises effectuant les transports des matières les plus dangereuses.
En application de la directive européenne n° 96-35, un arrêté imposera au 31 décembre 1999 à toute entreprise chargeant, transportant ou déchargeant des marchandises dangereuses de désigner un conseiller à la sécurité.
Les transports routiers de marchandises dangereuses font, comme les autres transports, l'objet de contrôles effectués par les contrôleurs de transports terrestes, les gendarmes, les agents de la police nationale et les agents des douanes, qui sont habilités à cette fin par la loi du 31 décembre 1975.
Une circulaire visant à renforcer l'efficacité des contrôles vient d'être adressée aux préfets.
Les accidents récents, en particulier celui qui est survenu en septembre à un passage à niveau en Dordogne, posent le problème de l'éventuel rééquilibrage des transports en général et des marchandises dangereuses en particulier, de la route vers le rail. Cela est un aspect d'une autre nature qui mérite également réflexion.
Il faut cependant noter que, en tout état de cause, le transport rail-route offre d'ores et déjà une alternative crédible au transport routier longue distance sur un certain nombre de parcours, puisqu'il aura progressé de plus de 11 % et représenté plus de 12 milliards de tonnes-kilomètres en 1996.
Pour accroître encore son développement, l'Etat consacrera dès cette année 350 millions de francs à cette action et entend poursuivre cet effort l'an prochain.
M. Gérard Roujas. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

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