M. le président. « Art. 3 bis . _ Le Gouvernement déposera sur le bureau des assemblées, avant le 1er août 1998, un rapport analysant les conséquences sur le financement de la sécurité sociale et sur la situation des entreprises d'une modification de l'assiette des cotisations sociales à la charge des employeurs, notamment appuyée sur la valeur ajoutée.
« Ce rapport décrira également les incidences d'une telle réforme sur l'emploi. »
Par amendement n° 5, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - Avant le 1er juin 1998, le Gouvernement déposera, sur le bureau des assemblées, un rapport dressant le bilan du basculement des cotisations d'assurance maladie vers la contribution sociale généralisée résultant de l'application de la loi n° 96-1160 du 27 décembre 1996 du financement de la sécurité sociale pour 1997.
« II. - Avant le 1er juin 1998, le Gouvernement déposera, également sur le bureau des assemblées, un rapport analysant les conséquences sur le financement de la sécurité sociale, l'emploi et la situation des entreprises d'une modification de l'assiette des cotisations sociales à la charge des employeurs, prenant notamment en compte la valeur ajoutée. »
Cet amendement est affecté d'un sous-amendement n° 96, présenté par Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et visant, dans le paragraphe II du texte proposé par l'amendement n° 5 pour l'article 3 bis , après les mots : « prenant notamment en compte », à insérer les mots : « l'utilisation de ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cet amendement vise, d'une part, à compléter l'article 3 bis par une disposition qui prévoit le dépôt d'un rapport sur le bilan du transfert CSG-cotisations maladie opéré en 1997. Ce bilan nous semble important, comme nous le disons d'ailleurs depuis le début de l'examen de ce projet de loi.
Aujourd'hui, nous ne connaissons pas le résultat de ce transfert réalisé en 1997, notamment pour ce qui concerne la partie non salariale des transferts vers la CSG.
Or la réalisation d'une telle étude aurait dû constituer un préalable au transfert massif des cotisations maladie sur la CSG tel qu'il est proposé par le Gouvernement.
En outre, cet amendement vise à rapprocher la date de dépôt du rapport sur la réforme des cotisations patronales. En effet, M. Chadelat, que nous avons auditionné, s'est vu confier une mission sur ce sujet et doit remettre un rapport d'ici à la fin de l'année. La date que nous proposons donne presque six mois au conseil d'analyse économique mentionné dans le rapport annexé pour étudier l'impact économique des propositions. Nous attendons donc les propositions du Gouvernement d'ici à cette date.
M. le président. La parole est Mme Borvo, pour défendre le sous-amendement n° 96.
Mme Nicole Borvo. L'évolution du mode de calcul des cotisations dues par les entreprises fait aujourd'hui l'objet d'un assez large consensus.
Il est en effet patent que les conditions de la production ont profondément évolué depuis la naissance de la protection sociale et que la part des salaires dans les coûts de production est en diminution tendancielle.
On sait, à l'examen des séries statistiques les plus récentes, que la part des salaires dans la valeur ajoutée créée par le travail humain ne cesse de décroître, au même rythme que les difficultés de notre système de protection sociale ont pu, elles, croître.
Si la part des salaires diminue pour des raisons qui tiennent au travail lui-même, il ne faut pas oublier qu'elle diminue aussi sous les effets conjugués de la déflation salariale, de la précarisation des conditions de travail et de la croissance du chômage ?
Pour autant, il paraît souhaitable de procéder à la mise en place d'un nouveau mode de calcul durable des cotisations dues par les entreprises.
Pour ce qui nous concerne, nous estimons indispensable de maintenir le caractère essentiel des sources de financement de la protection sociale, c'est-à-dire celui d'un prélèvement sur le lieu de création de la richesse, celui de l'entreprise.
La valeur ajoutée doit-elle devenir la nouvelle assiette des cotisations patronales ?
Ce pourrait être la première piste à explorer, ce qui aurait cependant plusieurs inconvénients ; d'une part, celui de continuer à mettre d'abord à contribution les salaires, qui continuent de constituer l'utilisation principale de la valeur ajoutée et, d'autre part, celui de limiter la stratégie de réduction des cotisations de l'entreprise à la réduction de la valeur ajoutée qu'elle produirait.
Outre cette première difficulté, on peut aussi se poser la question de savoir quelle consistance on donne à la valeur ajoutée elle-même.
Les résultats de toute simulation sur le transfert des cotisations patronales sur une base valeur ajoutée pourraient d'ailleurs différer si l'on appréhende la valeur ajoutée en tant que valeur nette comptable ou si l'on prend en compte la valeur ajoutée telle qu'elle ressort de la lecture de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, qui la définit pour ce qui concerne l'application des dispositions relatives au plafonnement de la taxe professionnelle.
Le rapport Chadelat rappelle fort opportunément ce que recouvre la définition de l'article considéré.
La valeur ajoutée dont il s'agit est constituée de la valeur ajoutée comptable, majorée des subventions d'exploitation, des loyers de biens soumis à des opérations de crédit-bail et des taxes sur le chiffre d'affaires non récupérables.
L'avantage de cette définition de la valeur ajoutée est, entre autres, de ne pas permettre d'allégement artificiel de la valeur ajoutée qui résulterait des opérations de crédit-bail.
Pour autant, demeure le problème fondamental : cette valeur ajoutée doit-elle servir d'assiette - auquel cas elle ne prendrait à notre sens qu'imparfaitement en compte les spécialités de la situation de tel ou tel secteur d'activité économique - ou doit-elle plutôt servir de variable d'ajustement des cotisations patronales, fondée par exemple sur sa prise en compte comme dénominateur d'un rapport dans lequel le numérateur serait constitué par la masse salariale ?
Devons-nous arrêter la conception que nous avons de la valeur ajoutée uniquement à ce qui englobe la définition fournie par le code général des impôts en matière de taxe professionnelle ou regarder aussi du côté des placements financiers qui constituent, qu'on le veuille ou non, une des utilisations de la valeur ajoutée créée par le travail ?
Nous estimons donc indispensable de majorer la valeur ajoutée telle que définie par l'article 1647 B sexies du code général des impôts des produits de placements financiers bruts des entreprises non financières et des produits financiers nets des banques, compagnies d'assurances et institutions financières.
La valeur ajoutée prise dans cette acception permettrait de servir de dénominateur à un rapport dont le numérateur, je l'ai dit, serait constitué par les salaires bruts.
Chaque entreprise bénéficierait, dans le cadre des prélèvements traditionnels existants, d'une remise de cotisations dès lors qu'elle consacrerait une part plus importante de la valeur ajoutée à l'emploi et aux salaires et verrait ses cotisations croître dès lors que cette part relative serait réduite.
C'est dans cet objectif que nous proposons le sous-amendement n° 96.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 96 ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Nous discuterons sur le fond quand le Gouvernement nous proposera des modifications de la contribution patronale. Pour le moment, nous émettons un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 5 et sur le sous-amendement n° 96 ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le Gouvernement ne peut qu'être favorable à l'élaboration d'un bilan du basculement des cotisations d'assurance maladie vers la contribution sociale généralisée opéré par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997. Il est d'ores et déjà prévu, puisque l'annexe B au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 transmise au Parlement répond à cette requête. Des développements sont ainsi consacrés à l'élargissement de l'assiette de la CSG, à l'augmentation du taux, à la substitution de la CSG à la cotisation d'assurance maladie et à l'affectation de la CSG et des droits de consommation sur l'alcool au régime obligatoire d'assurance maladie, en compensation notamment des pertes de cotisations.
Par conséquent, je ne vois pas l'utilité d'ajouter encore un rapport aux très nombreuses annexes existant déjà et qui, en l'occurrence, répondent particulièrement aux souhaits de M. le rapporteur.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 96, M. Bernard Kouchner a répondu sur le fond lors de l'examen de l'amendement n° 75, et je n'ai rien à ajouter. Nous souhaitons en effet - je l'ai dit à plusieurs reprises - modifier l'assiette des cotisations patronales, en espérant pouvoir, dès l'année prochaine, en faire une première étape. Il conviendra de travailler sur la notion de valeur ajoutée.
En conclusion, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 96, repoussé par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 3 bis est ainsi rédigé.

Section 2

Dispositions diverses relatives aux ressources

Article 4