M. le président. Par amendement n° 3, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Avant le dépôt du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport analysant la situation des régimes spéciaux de sécurité sociale et leurs évolutions prévisibles au cours des dix prochaines années. »
Cet amendement est assorti de deux sous-amendements.
Le sous-amendement n° 70, présenté par M. Blanc, tend à compléter le texte proposé par l'amendement n° 3 pour insérer un article additionnel après l'article 1er par une phrase ainsi rédigée :
« Il étudiera tout particulièrement le système des compensations et surcompensations entre ces différents régimes spéciaux et entre le régime général et ces régimes spéciaux. »
Le sous-amendement n° 95 rectifié, déposé par M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, a pour objet de compléter le texte proposé par l'amendement n° 3 par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce rapport étudiera les conséquences des dispositifs de surcompensation et proposera des mesures tendant à favoriser la pérennité et l'intégrité de ces régimes. »
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Depuis que nous discutons des questions de sécurité sociale, l'un des problèmes qui nous préoccupent le plus est celui de la situation des régimes spéciaux et de leur évolution prévisible au cours des dix prochaines années.
Nous souhaitons donc que le Gouvernement nous adresse un rapport chaque année afin de situer ces régimes spéciaux et leur évolution.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 70 est-il soutenu ?...
La parole est à Mme Borvo, pour défendre le sous-amendement n° 95 rectifié.
Mme Nicole Borvo. On sait que l'un des éléments essentiels de notre système de protection sociale réside dans l'existence d'un certain nombre de régimes spéciaux dont la vocation est, en général, de se préoccuper de la gestion de l'assurance vieillesse, même s'il existe dans de nombreuses professions, et au premier chef dans la fonction publique, une universalité des prestations prises en charge.
Cette réalité, illustrée en particulier par l'existence de dispositions statutaires propres aux salariés concernés par ces régimes spéciaux, doit-elle aujourd'hui apparaître comme un atout ou comme un obstacle à toute politique équilibrée en matière de protection sociale ?
On ne peut oublier ici que l'on a connu, dans les derniers mois de l'année 1995, un mouvement social d'une force et d'une singularité originales contre le plan de réforme de la protection sociale de M. Juppé, plan dont l'un des éléments clés était la remise en cause de ces régimes spéciaux.
Que les choses soient claires : il ne nous échappe pas que la commission des affaires sociales, tout comme la commission des finances, ne cherche, par le biais de cet amendement n° 3, qu'à « remettre le couvert », s'agissant de cette question !
Je me dois donc de rappeler ici à nos collègues de la majorité sénatoriale que les événements que notre pays a connus à l'automne 1995 ont eu pour prolongements, entre autres, de motiver, ce printemps dernier, le rejet massif des orientations politiques choisies par le gouvernement de M. Juppé.
Qu'ont donc les régimes spéciaux qui nécessiterait que l'on procède à leur remise en cause ?
Serait-ce que la retraite des agents du secteur public est calculée selon des modalités différentes de celles qui sont imposées aux affiliés du régime général ?
Serait-ce que la couverture maladie du régime de la Régie autonome des transports parisiens inclut également des prestations de médecine du travail ?
Serait-ce que la caisse de sécurité sociale minière assure aux ayants droit une gratuité des soins ?
Serait-ce que les modalités de calcul de la cotisation employeur du régime des salariés d'Electricité de France assure, dans les faits, un excédent permanent des recettes sur les dépenses ?
Devons-nous considérer, mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, que l'existence de garanties plus élevées que celles qui sont accordées aux bénéficiaires du régime général serait un privilège à combattre pour assurer un traitement « équitable » entre tous les assurés ?
Est-ce là votre objectif ?
Nous avons, nous, une position de principe confortée par une analyse équilibrée de la situation.
On ne peut, dans l'état actuel des choses, se satisfaire, par exemple, de ce que les modalités de liquidation des retraites du régime général aient été modifiées depuis 1993 de telle sorte que le pouvoir d'achat des retraités s'en ressent douloureusement.
On ne peut pas plus se satisfaire d'une évolution des prestations qui consiste à en maintenir simplement la valeur en francs constants, ce qui n'est pas sans poser de problèmes de justice sociale, la croissance réelle de la richesse nationale étant, par nature, plus importante et devant, dans ce cadre, être plus justement répartie.
Il importe, à notre sens, de rendre à l'ensemble de ces régimes spéciaux les moyens de leur développement et de trouver les éléments d'équilibrage de leur situation.
Il est d'ailleurs à noter que, lorsqu'il s'agit des différents régimes et des diverses caisses assurant des prestations pour les non-salariés, on débouche toujours dans notre pays sur des solutions appropriées !
Pour notre part, nous estimons indispensable d'assurer la pérennité de ces régimes et de clarifier en particulier les relations qu'ils entretiennent avec les autres et le régime général, notamment.
Nous pensons en particulier que ce n'est pas par la voie de la surcompensation entre régimes spéciaux que l'on pourra répondre aux difficultés structurelles ou temporaires de tel ou tel autre régime.
Il nous faut donc des éléments d'appréciation, des orientations, des pistes à explorer, y compris dans le cadre d'une réforme des modalités de financement. C'est le sens de ce sous-amendement, que nous vous invitons à adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 95 rectifié ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. En dépit des amples commentaires de Mme Borvo, je m'en tiendrai, pour ma part, au texte du sous-amendement pour interroger le Gouvernement sur les efforts qu'il déploie afin d'assurer la pérennité des régimes spéciaux, me réservant de donner l'avis de la commission ensuite.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 3 et sur le sous-amendement n° 95 rectifié ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je l'ai déjà dit, il nous faut, avant d'arrêter une position sur les régimes spéciaux, faire un diagnostic, un état des lieux de ces régimes. Je rappelle que, pour la plupart, les régimes spéciaux ont été créés avant le régime général. Ils ont des liens extrêmement forts avec le statut des personnels, notamment avec certains avantages de ce statut.
Ce diagnostic portera sur l'état financier de ces régimes, sur les évolutions démographiques, sur le lien entre ces régimes et les différents statuts, sur les comparaisons entre les différents régimes ainsi que sur la compensation et la surcompensation, lorsqu'elles existent.
C'est à partir de cet état des lieux global que le Gouvernement fera un certain nombre de propositions. Ce travail sera donc fait, je l'ai déjà dit, raison pour laquelle je ne crois pas utile de prévoir un rapport de plus.
Par conséquent, ni l'amendement n° 3 ni le sous-amendement n° 95 rectifié ne reçoivent un avis favorable du Gouvernement.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 95 rectifié ?
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. J'ai cru un instant que nous allions être d'accord avec le Gouvernement sur le premier amendement venant en discussion, ce qui laissait bien augurer de la suite. Malheureusement, il n'en est rien.
Quant au sous-amendement n° 95 rectifié, j'approuve totalement ce qu'en dit Mme le ministre. On ne peut pas, en effet, s'engager aujourd'hui sans un état des lieux préalable. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 95 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

Section 1

Substitution de la contribution sociale
généralisée à la cotisation maladie

Article 2