M. le président. M. Daniel Goulet souhaite très vivement attirer l'attention de Mme le secrétaire d'Etat au tourisme sur la situation particulièrement préoccupante des hôteliers et des restaurateurs, confrontés à de multiples et divers problèmes portant sur :
1° Les charges fiscales, et tenant :
a) A la distorsion de la TVA entre les différents établissements français de restauration - repas servis ou emportés - soit 20,6 % et 5,5 % ;
b) A la distorsion de TVA entre les pays de l'Union européenne et la France ;
c) A l'application de cette TVA sur les avantages en nature offerts aux personnels de fabrication et de service.
2° Les charges sociales patronales, dont les taux entre les différents pays de l'Union européenne et la France s'établissent au détriment des professionnels français ;
et enfin,
3° Le paracommercialisme et la nécessité de faire appliquer la circulaire du 10 mars 1979 et l'ordonnance du 1er décembre 1986 afin de contenir le paracommercialisme.
En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître les mesures qu'elle envisage de prendre pour remédier à ces problèmes qui pénalisent très fortement la profession. (N° 76.)
La parole est à M. Goulet.
M. Daniel Goulet. Madame le secrétaire d'Etat, je suis parfaitement conscient que ma question s'adresse tout autant à vous-même qu'à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à M. le secrétaire d'Etat au budget qui détiennent en la matière une responsabilité évidente et directe. Mais je sais aussi que personne mieux que vous, madame le secrétaire d'Etat, ne pourrait se faire l'interprète des professionnels d'un important secteur qui dépend plus particulièrement de votre département ministériel.
Je veux appeler votre bienveillante attention sur la situation particulièrement préoccupante que connaissent les hôteliers et les restaurateurs, qui sont confrontés à des problèmes spécifiques à leur profession.
En effet, les professionnels de la restauration considèrent qu'ils font l'objet d'une certaine distorsion de traitement selon qu'ils dépendent de la profession de restaurateur, de traiteur ou de prestataire de services en fournitures de restauration, à savoir les repas servis sur place ou à emporter.
Par ailleurs, cette discrimination de charges et, par voie de conséquence, de concurrence est encore plus vive et totalement incompréhensible entre les professionnels de la restauration et de l'hôtellerie française et ceux qui dépendent des autres pays de la Communauté européenne.
Ces problèmes tiennent à une distorsion de taux de TVA, à savoir 20,6 % pour les uns et 5,5 % pour les autres. Ils tiennent aussi à l'application de cette TVA sur les avantages en nature offerts aux personnels de fabrication et de service selon qu'ils relèvent d'établissements français ou étrangers. Ils tiennent, enfin, à la différence de taux entre les pays de la Communauté en ce qui concerne les charges sociales patronales.
En outre, ces professionnels manifestent quelque amertume, difficilement contenue, voire un total désarroi devant l'inapplication quasiment constante de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et des circulaires du 10 mars 1979, dont vous connaissez parfaitement les objets.
Au moment où la tendance doit s'orienter vers une plus juste répartition des impositions fiscales entre les contribuables français et entre les pays de la Communauté, c'est-à-dire vers l'équité entre les citoyens, et alors que l'on constate, au terme de cette année touristique fortement excédentaire en résultats positifs, la place essentielle que prennent les professionnels français de l'hôtellerie et de la restauration dans un secteur d'avenir très prometteur et donc très porteur pour l'économie française, ne vous paraît-il pas nécessaire et urgent, madame le secrétaire d'Etat, d'une part, de réexaminer très sérieusement les charges fiscales et sociales, le plus souvent dissuasives et pénalisantes, qui pèsent sur les professionnels de l'accueil et de l'art culinaire français et, d'autre part, de recourir à de nouvelles méthodes d'intervention, notamment d'information et de concertation, qui seraient de nature à faire appliquer enfin la loi sur le paracommercialisme dans ce qu'elle indique expressément par les ordonnances et les circulaires que je viens d'évoquer ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, je suis comme vous très attentive aux questions que vous soulevez et j'ai souvent eu l'occasion de m'en entretenir avec les professionnels, au ministère comme au cours de mes déplacements sur le terrain.
La législation relative à la TVA est issue des directives européennes de 1977 et de 1992 et distingue la vente de denrées alimentaires, assujettie au taux réduit, et la fourniture d'une prestation de restauration, qui supporte le taux normal.
Il est incontestable que la baisse de la TVA sur les prestations de service à forte intensité de main-d'oeuvre aurait des effets bénéfiques pour la consommation et pour l'emploi et supprimerait la distorsion entre la restauration à emporter et la restauration à consommer sur place.
Une telle baisse se heurte à deux obstacles : le premier est d'ordre politique et juridique et ne peut être levé que par un accord unanime des Etats membres ; le second est d'ordre budgétaire : une telle mesure coûterait, en effet, plus de 40 milliards de francs.
J'ajoute que le problème de l'écart de taux entre la restauration et la vente à emporter est devenu très aigu depuis la hausse du taux normal décidée en 1995. Soucieux de ne pas augmenter leurs prix, les restaurateurs ont été contraints d'amputer leurs marges, ce qui affaiblit leur capacité à se moderniser.
Vous avez évoqué ensuite les charges sociales. M. le Premier ministre a annoncé, lors de la conférence du 10 octobre dernier, l'ouverture d'une réflexion sur l'assiette des cotisations patronales, afin d'alléger les charges des entreprises de main-d'oeuvre. L'hôtellerie et la restauration seront les premières bénéficiaires d'une telle réforme, que je suis avec beaucoup d'attention.
Dans l'attente de cette réforme, nous mettons en place des mesures concrètes : le Gouvernement a décidé de supprimer progressivement les charges sociales patronales qui pèsent sur les avantages en nature des salariés des hôtels, cafés-restaurants. Un crédit de 158 millions de francs est inscrit dans le projet de loi de finances pour 1998. A terme, cette mesure représentera un coût de 1 300 millions de francs.
Au-delà des charges fiscales et sociales, il faut aussi étudier les mesures susceptibles d'alléger les charges financières, qui pèsent beaucoup sur les entreprises. Je souhaite engager à cet égard une réflexion pour être en mesure, en accord avec les professionnels, de présenter des propositions.
Je tiens à vous rappeler que le Gouvernement a d'ores et déjà mis en place un dispositif permettant aux entreprises du secteur de la restauration de bénéficier de prêts bonifiés pour financer des travaux de mise en conformité avec les règles d'hygiène et de sécurité.
J'en viens au paracommercialisme. Les entreprises du secteur hôtels, cafés-restaurants sont souvent victimes de la concurrence déloyale des activités clandestines.
A partir des propositions formulées dans le rapport, célèbre dans la profession, de M. Radelet, inspecteur général du tourisme, les pouvoirs publics ont pris des mesures qui ont été mises en oeuvre, après concertation au plan local, par les préfets de département.
La circulaire du 7 novembre 1995 sur les conditions de fonctionnement de certains établissements de formation hôtelière et l'arrêté du 1er avril 1997 relatif au classement des meublés ont complété le dispositif. Les contrôles réalisés par les services déconcentrés de l'Etat ont été renforcés.
Parallèlement, une action pédagogique a été engagée. Les services de l'Etat et les maires disposent aujourd'hui de deux brochures d'information leur permettant de mieux informer les différents acteurs sur leurs droits et devoirs.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments de réponse que je souhaitais vous apporter.
M. Daniel Goulet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Goulet.
M. Daniel Goulet. Madame le secrétaire d'Etat, compte tenu de l'étendue du chantier auquel vous vous êtes attaquée, des solutions à tous les problèmes évoqués ne pourront pas, à mon avis, être trouvées dans l'immédiat, c'est-à-dire dans les semaines et les mois qui viennent.
En tout cas, j'ai bien noté, et je vous en remercie, que vous avez tout à fait saisi l'importance de cette catégorie de professionnels qui, par leur rôle et leur dynamisme, apportent de la valeur ajoutée à l'économie française et qui, par la présence qu'ils assurent dans les villes et les villages, ont un intérêt incontournable pour l'aménagement du territoire.
Certes, il existe des problèmes financiers et budgétaires. Je comprends parfaitement qu'ils soient difficiles à traiter dans l'état actuel des finances publiques, mais j'ai bien compris que votre volonté était très forte, dans la mesure où vous avez parlé de volonté politique. Nous devons en effet, les uns et les autres, nous pencher sur ce secteur de façon que les professionnels sentent qu'ils ont auprès d'eux non seulement un ministre qui s'occupe bien d'eux, mais aussi une nation qui est reconnaissante de leur action pour l'art culinaire et la gastronomie.

Situation de l'emploi dans le Mantois