M. le président. Par amendement n° 54, M. Jean-Marie Girault, au nom de la commission, propose, dans le premier alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article 232-15 du code de procédure pénale, après les mots : « met fin à la procédure », d'insérer les mots : « , qui déclare régulière l'ordonnance de mise en accusation ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Marie Girault, rapporteur. Il s'agit de réparer une omission.
En effet, l'Assemblée nationale, qui a opportunément prévu la faculté d'interjeter appel du jugement statuant sur la régularité de l'ordonnance de mise en accusation, a oublié de préciser le délai dans lequel cela devait être fait. La commission a fixé ce délai à dix jours, conformément au droit commun.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Toubon, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 54, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 55, M. Jean-Marie Girault, au nom de la commission, propose, dans le troisième alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article 232-15 du code de procédure pénale, de supprimer les mots : « à compter de la notification du jugement et, dans les autres cas, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Marie Girault, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination qui résulte de nos délibérations précédentes : le délai d'appel court dès le prononcé du jugement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Toubon, garde des sceaux. Je suis favorable à cet amendement, qui traduit le fait que nous nous sommes mis d'accord, il y a quinze jours, pour que les explications ne soient pas différées.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 55, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 222, MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de supprimer le dernier alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article 232-15 du code de procédure pénale.
La parole est à M. Badinter.
M. Jacques Toubon, garde des sceaux. Cet amendement a déjà été présenté, et longuement !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Oh ! « Longuement » ?
M. Robert Badinter. J'ajouterai, monsieur le garde des sceaux, quelques observations à propos du délai, car c'est bien du délai, cette fois-ci, qu'il s'agit.
M. Jacques Toubon, garde des sceaux. Absolument !
M. Robert Badinter. Le délai ouvert à M. le procureur général est fixé à deux mois.
Nous sommes en matière criminelle, et je constate que l'on a simplement fait une projection de la règle applicable en matière correctionnelle. Cependant, je demande à chacun de bien mesurer les conséquences humaines d'un tel délai.
En matière pénale, le délai d'appel est de dix jours pour chacune des parties ; si l'une des parties fait appel, il est de cinq jours pour faire un appel incident, c'est-à-dire pour rouvrir pleinement le champ du débat.
En matière correctionnelle, le prévenu condamné a dix jours pour décider s'il fait appel ou non et, s'il fait appel, le ministère public peut faire appel à son tour pendant les cinq jours qui suivent.
Si les délais ont été établis de la sorte, c'est parce que chacun conçoit qu'il vaut mieux être fixé le plus vite possible sur la continuation de la procédure.
Nous sommes maintenant au niveau de la procédure criminelle avec, pour la première fois, un double degré de juridiction.
Pour faire appel, les parties disposent du même délai de dix jours. En cas d'appel d'une partie, les autres parties ont un délai supplémentaire de cinq jours. Ainsi, si l'accusé qui a été condamné fait appel, le ministère public - en l'occurrence le procureur de la République - disposera d'un délai supplémentaire de cinq jours.
Quant au procureur général, selon le projet de loi, il disposerait d'un délai de deux mois, et c'est sur la portée de ce long délai que je demande à chacun de prêter attention.
Considérons un accusé qui vient de bénéficier d'un acquittement ou d'une peine très légère. Il ne fait pas appel. On peut mesurer avec quelle angoisse il va vivre les dix jours qui vont suivre, au cours desquels le ministère public peut faire appel et, par voie de conséquence, le procès peut recommencer, ce qui n'est pas le cas jusqu'à présent.
En outre, le délai de dix jours étant expiré sans appel du procureur de la République, voilà qu'aux termes du projet de loi il lui faudra encore attendre environ sept semaines de plus pour savoir si son sort ne va pas se rejouer une deuxième fois !
Est-ce véritablement indispensable ? Je ne le pense pas.
Je ne le pense pas, car, comme le faisait remarquer très justement notre collègue Michel Dreyfus-Schmidt, s'agissant d'affaires criminelles, contrairement aux dizaines ou aux centaines d'affaires correctionnelles qui se déroulent dans le ressort de la cour d'appel, le ministère public, avec à son sommet le procureur général, sait parfaitement le jour même quelle est la décision rendue et recueille aisément dans les heures ou au moins dans les jours qui suivent l'avis du procureur de la République ou de l'avocat général qui a requis.
Pourquoi faire supporter une attente de sept semaines supplémentaires à celui qui a été ainsi condamné ?
J'ajoute que, même s'il a fait appel, il est pour lui très important d'être fixé définitivement sur la position du ministère public, car, si ledit ministère public n'a pas, lui, fait appel, l'affaire revenant devant la cour d'assises, la nouvelle condamnation ne pourra être supérieure à la première. Par conséquent, son sort ne pourra que s'améliorer.
Vous voyez donc l'importance de ce délai d'attente sur la situation psychologique de l'accusé.
Si ces deux mois avaient été indispensables, nous ne serions sans doute pas intervenus. Le projet de loi avait initialement fixé le délai à un mois ; l'Assemblée nationale l'a porté à deux mois. Pour ma part, je souhaite qu'en matière criminelle on en reste à ce qui est le droit commun de l'appel : dix jours pour chacune des parties, cinq jours pour l'appel incident, y compris, compte tenu des moyens de télécommunication dont nous disposons, pour le procureur général.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Marie Girault, rapporteur. La commission souhaiterait entendre le Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Toubon, garde des sceaux. Autant j'étais défavorable, s'agissant des articles 232-1 et 232-11 du code de procédure pénale, à l'argumentation présentée par les sénateurs socialistes, qui tendait à remettre en cause l'appel du procureur général, autant je suis sensible à leur argumentation sur le délai. D'ailleurs, le texte d'origine du Gouvernement retenait un délai d'un mois, et c'est par un vote de l'Assemblée nationale que ce délai a été porté à deux mois.
Cependant, je précise qu'un délai plus long pour le procureur général me semble justifié. En effet, situé au plus haut niveau de la hiérarchie du ministère public, celui-ci doit pouvoir porter une appréciation sur l'ensemble des intérêts en cause. En particulier dans le cas cité par M. Badinter, celui d'un acquittement, il doit pouvoir apprécier la position des victimes et, notamment, les éventuelles réactions de ces dernières.
Toutefois, je serais, pour ma part, tout à fait favorable à ce que le Sénat revienne au délai prévu initialement par le Gouvernement.
Je vais même, puisque je suis le seul à en avoir la possibilité, déposer un amendement tendant à remplacer les mots : « deux mois » par les mots : « un mois ».
M. le président. Je suis donc saisi par le Gouvernement d'un amendement n° 298, qui tend, dans le dernier alinéa du texte proposé par l'article 3 pour l'article 232-15 du code de procédure pénale, à remplacer les mots : « deux mois » par les mots : « un mois ».
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Marie Girault, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 222.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le débat, tel qu'il vient d'être engagé, est important et intéressant, mais on n'est pas allé jusqu'à son terme : M. le garde des sceaux a, en quelque sorte, fait la moitié du chemin. En fait, il a repris la position qui était initialement la sienne, en justifiant le délai plus long pour l'appel interjeté par le procureur général par la nécessité d'attendre la réaction de la victime.
J'avoue que cela me choque beaucoup. La victime, c'est une chose - ses intérêts doivent être pris en compte, et ils le sont certainement - et l'action publique, c'est autre chose. Il me paraît évident que le procureur général doit être suffisamment éclairé sur l'ensemble du dossier pour prendre en considération tous les éléments de l'affaire...
M. Jacques Toubon, garde des sceaux. C'est bien ce que j'ai dit ! Il doit en particulier prendre en considération la réaction de la victime !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... et pour savoir ce qu'est l'intérêt des uns et ce qu'est l'intérêt des autres, mais, surtout, ce que doit être sa position par rapport à la peine prononcée.
Peut-être faut-il plus de dix jours. Ne pourrait-on pas transiger à quinze jours, monsieur le garde des sceaux ?
M. Jacques Toubon, garde des sceaux. On peut aussi jouer à la canasta !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. Badinter a parfaitement démontré combien il pourrait être cruel, sinon inhumain, de prolonger trop longtemps l'incertitude dans laquelle va se trouver l'intéressé.
Actuellement, le procureur général ne dispose pas d'un délai plus long que les autres parties pour se pourvoir en cassation. Je ne vois donc pas pourquoi, dans ce cas, on prévoirait un délai plus important.
Nous maintenons donc notre amendement n° 222, qui tend à supprimer le dernier alinéa, ce qui signifie que, puisque nous avons maintenu la possibilité pour le procureur général de faire appel, le délai serait pour lui, comme pour les autres, de dix jours. Dix jours lui suffisent largement pour prendre position et savoir s'il doit ou non faire appel de la décision qui a été rendue par le tribunal d'assises.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 222, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 298, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 232-15 du code de procédure pénale.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE 232-16 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE