M. le président. La parole est à M. Moinard.
M. Louis Moinard. Ma question s'adresse à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat.
Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur le problème de la désignation préalable des enseignes dans les dossiers présentés aux comités départementaux d'équipement commercial, les CDEC, notamment à propos des opérations de centre-ville, qui peuvent souvent prendre des années avant d'être réalisées.
Si ce souci d'information des instances décisionnelles semble légitime, cette mesure paraît conforter considérablement les grosses entreprises, qui peuvent s'engager sur des investissements à très long terme, au détriment d'entreprises plus modestes ou d'entreprises locales, qui pourraient remplir un rôle identique mais dont les moyens financiers et la capacité d'engagement à long terme ne sont pas de la même nature.
Si les enseignes des projets de centre-ville devaient être connues plusieurs années à l'avance, les petits entrepreneurs en grande surface ne pourraient vraisemblablement assurer le développement de leur entreprise à égalité de chances avec des sociétés plus établies, qui pourraient, elles, tirer parti de leur notoriété et de leurs moyens pour préempter la plupart des projets.
Il apparaît que la dénomination préalable du secteur d'activité - et non de l'enseigne - lors du dépôt de dossier à la CDEC, d'une part, et une procédure ad hoc de sélection d'enseigne à l'intérieur de ce secteur d'activité, le moment venu, par les maîtres d'ouvrage, d'autre part, devraient pouvoir garantir à la puissance publique une maîtrise de la qualité de l'enseigne nationale, sans pour autant accorder une prime à l'enseigne la plus connue, dès le dépôt à la CDEC.
Par ailleurs, il semble qu'en l'état il faille limiter le risque qu'une enseigne non détentrice d'un accord de la CDEC ne se substitue à une enseigne défaillante mais détentrice, elle, d'un agrément.
Monsieur le ministre, je suis persuadé que ces observations ne vous ont pas échappé ; comptez-vous vous en inspirer dans les recommandations que vous adresserez aux préfets pour l'interprétation des décrets d'application de la loi relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Raffarin, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat. Monsieur le sénateur, en effet, le sujet que vous évoquez est important.
Vous le savez, pour rééquilibrer le paysage commercial en faveur des petites et moyennes entreprises du commerce et de l'artisanat, la loi du 5 juillet 1996 a mis en place un nouveau dispositif.
Ce dispositif a fait l'objet de décrets d'application. Des circulaires ont été adressées aux préfets et l'ensemble du dispositif est aujourd'hui opérationnel. J'ai d'ailleurs installé récemment la commission nationale d'équipement commercial.
Il est vrai que nous devons être très attentifs au développement des centres-villes : nous voulons rééquilibrer le paysage commercial en leur faveur pour défendre la valeur du commerce comme élément de cohésion économique et sociale, pour dynamiser le tissu social.
Pour ce faire, nous avons progressé dans le sens que vous souhaitez, monsieur le sénateur : aujourd'hui, pour désigner une enseigne en centre-ville au sein de la commission départementale d'équipement commercial, il faut atteindre le seuil de 2 000 mètres carrés.
Cependant, nous ne pouvons pas aller plus loin - nous sommes déjà passés de 1 200 mètres carrés à 2 000 mètres carrés - parce que nous voulons éviter qu'il y ait une mise aux enchères des agréments, certains obtenant une autorisation sans identification du projet précis, au risque de laisser s'organiser un véritable commerce en la matière, comme nous l'avons connu dans le passé.
Une telle situation serait profondément désagréable et constituerait un obstacle à la transparence que nous souhaitons développer dans l'urbanisme commercial. Des dispositions ont d'ailleurs été prises à cet effet.
Cela étant, monsieur le sénateur, sachez-le, les préfets ont naturellement toutes les possibilités pour intégrer dans les projets de centres-villes, notamment grâce à l'observatoire départemental de l'équipement commercial, la possibilité de bâtir un projet, de faire en sorte que les entreprises locales puissent avoir accès à ce type de projet pour ne pas le réserver aux seules entreprises nationales. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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