M. le président. Par amendement n° 47, M. Legrand propose d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« La loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce ne s'applique pas aux relations entre la SNCF et RFN en matière domaniale. »
La parole est à M. Le Grand.
M. Jean-François Le Grand. Cet amendement a pour objet d'introduire une disposition dérogatoire à la loi du 2 janvier 1970 donnant la possibilité à RFF de confier à la SNCF la gestion domaniale de tout ou partie des biens qui lui sont transférés.
Il convient de préciser à cet égard que RFF pourra user de cette possibilité en fonction de l'intérêt qu'il y trouvera pour l'accomplissement de ses missions.
Deux raisons militent en faveur de cette dérogation.
Tout d'abord, l'imbrication dans le cas de gestions domaniales séparées risque de créer des lourdeurs de nature à entraver la nécessaire évolution de l'affectation domaniale.
Ensuite - et le Sénat est parfaitement bien placé pour le savoir - se pose le problème de la complexité des relations qui existeraient alors en matière domaniale entre RFF, la SNCF et les collectivités locales.
L'unicité de gestion de la SNCF présente un intérêt évident.
Par ailleurs, la plupart des opérations de mise en valeur des sites ferroviaires nécessitent une réorganisation préalable des différentes activités : voyageurs, fret...
Telles sont les raisons pour lesquelles j'ai déposé cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Gerbaud, rapporteur. Il s'agit d'un amendement intelligent. Il est le résultat d'une analyse menée avec beaucoup de pertinence, comme à l'accoutumée, par notre ami Jean-François Le Grand.
Il n'en reste pas moins que nous nous interrogeons sur le point de savoir si cet amendement, quelque satisfaction qu'il puisse donner, est bien prudent.
Est-il effectivement nécessaire - même par un biais - d'attirer l'attention de la Commission de Bruxelles sur cette particularité ?
En dépit des apparences, ce n'est peut-être pas une très bonne idée.
Compte tenu de ces considérations et de cet appel à la prudence, M. Le Grand acceptera peut-être de retier son amendement.
M. le président. Monsieur Le Grand, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean-François Le Grand. Je trouvais que le propos commençait fort bien. Malheureusement, il se termine un peu moins bien. (Sourires.)
Je comprends parfaitement les inquiétudes de M. le rapporteur. Sur le fond, il n'a pas tort. Mon objectif était simplement de souligner qu'une difficulté de gestion se profilait à l'horizon.
Nous n'avons pas véritablement intérêt, c'est exact, à attirer l'attention de la Commission de Bruxelles sur ce point. C'est pourquoi, après avoir écouté l'avis du Gouvernement, je retirerai probablement mon amendement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et tourisme. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Monsieur Le Grand, maintenez-vous votre amendement ?
M. Jean-François Le Grand. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 47 est retiré.
Par amendement n° 143, Mme Luc, MM. Billard, Leyzour et Minetti, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel rédigé comme suit :
« Un contrat de plan passé entre l'Etat, la Société nationale des chemins de fer français et l'établissement public visé au premier alinéa de la présente loi dans les conditions de la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification détermine les objectifs assignés à ces entreprises et au groupe dans le cadre de la planification nationale et les moyens à mettre en oeuvre pour les atteindre.
« Le premier de ces contrats de plan devra entrer en vigueur le 1er janvier 1998. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. L'article 24 de la loi d'orientation des transports intérieurs prévoit qu'un contrat de plan entre l'Etat et la SNCF déterminera les objectifs assignés à l'entreprise et au groupe dans le cadre de la planification nationale, et les moyens à mettre en oeuvre pour les atteindre.
La lutte des cheminots a contraint l'Etat et l'entreprise publique à renoncer au contrat de plan 1995-2000 en raison de son contenu, qui ne permettait pas d'assurer l'avenir de la société nationale et qui remettait en cause son unicité et ses missions de service public.
Ce contrat de plan faisait du critère de rentabilité financière un critère exclusif de gestion. Il faisait supporter une dette énorme - 117 milliards de francs ! - à la SNCF et n'apportait aucune dotation en capital. Le surendettement de 25 milliards de francs prévu avait comme corollaire la suppression de 30 000 emplois de cheminots et la fermeture de 6 000 kilomètres de lignes, le tout accompagné de transferts d'activité à la sous-traitance ou d'autres formes de privatisation.
Les cheminots ont refusé le contenu du contrat de plan, mais pas la procédure prévue par le paragraphe I de l'article 24 de la LOTI instaurant le contrat de plan.
Il faut d'ailleurs noter que si l'article 13 du projet de loi prévoit le remplacement du paragraphe II de l'article 24, il n'abroge pas le paragraphe I de ce même article. Par conséquent, l'existence d'un contrat de plan entre l'Etat et la SNCF est toujours explicitement prévu par la loi.
Un tel contrat de plan permettait de pérenniser les engagements de l'Etat, notamment les engagements financiers. Il doit donc être établi le plus rapidement possible.
Il est indispensable que RFF soit partie prenante de ce contrat de plan afin de clarifier les relations entre les trois parties : relations entre RFF et l'Etat ; relations entre la SNCF et l'Etat ; relations entre RFF et la SNCF.
Cette clarification devrait porter, notamment, sur les relations financières, les relations techniques, les arbitrages concernant les choix et les investissements d'infrastructure, l'affectation des sillons, les redevances et péages d'infrastructures. Pour cela, il est nécessaire que l'indépendance de l'ensemble du personnel à l'égard des choix opérés soit garantie. Un contrôle démocratique de ce fonctionnement devrait être prévu explicitement.
Nous souhaitons que le Gouvernement précise ses intentions en matière de planification ferroviaire car, vous le savez, monsieur le ministre, la nature a horreur du vide.
Monsieur le président, nous demandons que le Sénat se prononce par scrutin public sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Gerbaud, rapporteur. Cet amendement est parfaitement argumenté. D'ailleurs, il se situe dans la logique de la politique des membres du groupe communiste républicain et citoyen : il s'agit d'une sorte de machine à remonter le temps. Ce n'est pas au moment où le contrat de plan est remplacé à la SNCF par un projet industriel qu'il faut en prévoir un pour RFF !
Par conséquent, la commission, émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, car les relations entre la SNCF et RFF seront régies par convention.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 143, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et cioyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 77:

Nombre de votants 317
Nombre de suffrages exprimés 317
Majorité absolue des suffrages 159
Pour l'adoption 94
Contre 223

Par amendement n° 144, MM. Billard, Leyzour et Minetti, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel rédigé comme suit :
« Jusqu'à l'entrée en vigueur du prochain contrat de plan entre l'Etat et la Société nationale des chemins de fer français, aucune ligne, aucune desserte, aucune gare ne pourra être supprimée, aucune voie ne pourra être déclassée. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Notre amendement vise à insérer, toujours après l'article 4, un article additionnel qui précise que, jusqu'à l'entrée en vigueur du prochain contrat de plan entre l'Etat et la Société nationale des chemins de fer français, aucune ligne, aucune desserte, aucune gare ne pourra être supprimée, aucune voie ne pourra être déclassée.
A notre sens, la nouvelle structure publique créée par le présent projet de loi ayant notamment pour objectif « le maintien et le développement du réseau ferroviaire », qui inclut donc les lignes locales et régionales, le maillage actuel du réseau doit être préservé dans l'attente d'un nouveau contrat de plan qui fixerait l'avenir du réseau ferré.
Nous pensons que l'on ne peut tirer argument de l'échec des deux précédents contrats pour conclure qu'il appartient donc à la seule SNCF et à RFF de définir en interne ses activités futures.
Il est en effet impensable que l'Etat ne fixe pas d'orientations essentielles qui soient partagées par la SNCF dans un engagement contractuel.
Ce contrat de plan permettrait de développer, en lieu et place d'une concurrence, une réelle complémentarité entre modes de transport en lieu et place d'une concurrence qui, chaque jour, se révèle de plus en plus nécessaire pour les usagers, la collectivité et les personnels de chaque entreprise.
L'élaboration d'un tel document devrait donc présider à des changements majeurs dans le transport ferroviaire et romprait avec la logique actuelle de déclin.
On ne peut donc prendre, dans l'attente de l'élaboration d'un tel contrat, des décisions qui compromettraient l'existence de lignes, de dessertes, prévoirait le déclassement des voies ferrées et hypothéquerait les chances de développement du transport ferroviaire.
Je suis persuadé, mes chers collègues, que vous serez sensibles à ces quelques arguments de bon sens, et je ne doute pas que vous adopterez l'amendement n° 144.
M. Henri de Raincourt. C'est comme si c'était fait !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Gerbaud, rapporteur. Je ne voudrais pas passer pour un « déboulonneur du rail » (Sourires), mais la commission est défavorable à cet amendement. En effet, il fait état d'un contrat de plan, qui est une forme dépassée, on le voit bien, par le projet industriel, procédure jugée plus moderne et plus motivante.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme. Les dispositions proposées dans cet amendement n'étant pas de nature législative, le Gouvernement y est défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 144, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 5