M. le président. « Art. 2. _ L'article L. 324-10 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 324-10 . _ Est réputé travail dissimulé :
« _ soit l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce par toute personne physique ou morale qui, se soustrayant intentionnellement à ses obligations :
« a) N'a pas requis son immatriculation au répertoire des métiers ou, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, au registre des entreprises, ou au registre du commerce et des sociétés, lorsque celle-ci est obligatoire ou à l'ordre professionnel dont relève son activité, ou a poursuivi l'une de ces activités après refus d'immatriculation au répertoire des métiers ou, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, au registre des entreprises, ou au registre du commerce et des sociétés, ou postérieurement à une radiation,
« b) Ou n'a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou aux déclarations qui doivent être faites à l'administration fiscale en vertu des dispositions législatives et réglementaires en vigueur ;
« _ soit le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320.
« L'employeur qui remet un bulletin de paie mentionnant une rémunération qui ne correspond pas à la totalité des heures de travail effectuées se rend coupable de l'infraction mentionnée à l'alinéa précédent. »
Par amendement n° 4, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de remplacer les cinq premiers alinéas du texte présenté par cet article pour l'article L. 324-10 du code du travail par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'activité l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce par toute personne physique ou morale qui, se soustrayant intentionnellement à ses obligations :
« a) N'a pas requis son immatriculation au répertoire des métiers ou, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, au registre des entreprises, ou au registre du commerce et des sociétés, lorsque celle-ci est obligatoire, ou a poursuivi son activité après refus d'immatriculation, ou postérieurement à une radiation ;
« b) Ou n'a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale en vertu des dispositions législatives et réglementaires en vigueur.
« Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait, pour tout employeur, de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320. »
Cet amendement est assorti de deux sous-amendements.
Le sous-amendement n° 33, présenté par Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés, tend :
I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4, à supprimer le mot : « intentionnellement ».
II. - Dans le dernier alinéa du même texte, à supprimer le mot : « intentionnellement ».
Le sous-amendement n° 61 rectifié, déposé par M. Jourdain, vise, dans le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4 pour remplacer les cinq premiers alinéas de l'article L. 324-10 du code du travail, à remplacer les mots : « tout employeur » par les mots : « toute personne physique ou morale ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 4.
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement, qui vise à récrire l'ensemble de l'article 2, se justifie par son texte même.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter le sous-amendement n° 33.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Il s'agit, par ce sous-amendement, de réintroduire le terme « intentionnellement » dans le texte de l'article 2.
Se soustraire à l'immatriculation au répertoire des métiers ou au registre du commerce, à la déclaration préalable à l'embauche, aux déclarations aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale ne saurait être sérieusement considéré comme une simple négligence.
De plus, le prétexte souvent opposé par les employeurs aux inspecteurs et aux contrôleurs du travail qui constatent l'infraction est que le salarié n'est présent dans l'entreprise que depuis quelques heures, ce qui est le plus souvent faux.
Il convient de colmater cette brèche qui permet à certains d'échapper aux sanctions.
M. le président. La parole est à M. Jourdain, pour présenter le sous-amendement n° 61 rectifié.
M. André Jourdain. A l'article 2 du projet de loi, dans la première définition du travail dissimulé, l'expression « toute personne physique ou morale » est employée, alors que, dans la seconde définition, la formule utilisée est « tout employeur ».
Je propose que l'on retienne la même expression dans les deux définitions, à savoir « toute personne physique ou morale ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 33 et 61 rectifié ?
M. Louis Souvet, rapporteur. En ce qui concerne le sous-amendement n° 33, la commission émet un avis défavorable.
En effet, la position des auteurs de ce sous-amendement est contraire à celle qui a été adoptée par la commission, laquelle souhaite conserver la mention du caractère intentionnel dans la définition du comportement fautif, par exemple le non-accomplissement des formalités d'immatriculation et les infractions du même type.
S'agissant du sous-amendement n° 61 rectifié, la commission donne un avis favorable, par souci de symétrie avec l'expression employée au début de l'article L. 324-10 du code du travail. C'était une inattention et nous sommes heureux qu'elle soit réparée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 4, ainsi que sur les sous-amendements n°s 33 et 61 rectifié ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 4, car il permet d'améliorer la rédaction du texte.
Par ailleurs, les cas de défaut d'inscription à un ordre professionnel sont d'ores et déjà visés par les délits spécifiques d'exercice illégal de la profession ou de port illégal du titre.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 33, le Gouvernement lui est défavorable pour le motif invoqué à l'instant par M. le rapporteur.
Enfin, s'agissant du sous-amendement n° 61 rectifié, je serais tentée de dire que l'expression « employeur » est plus précise, puisqu'elle vise toute personne physique ou morale.
Cela étant, le Gouvernement partage le souci de cohérence de M. Jourdain et s'en remet sur ce point à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 33.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Je voudrais réaffirmer ici que, dans les affaires de travail clandestin, il est très difficile de faire la preuve de l'intention frauduleuse.
Par ailleurs, je suis d'accord avec ma collègue Mme Dieulangard quand elle affirme que l'on ne peut sérieusement considérer comme une simple négligence le fait de se soustraire à l'immatriculation au répertoire des métiers, à la déclaration préalable à l'embauche ou encore aux déclarations aux organismes de protection sociale.
Nous voterons donc ce sous-amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 33, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 61 rectifié, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit le dernier alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 324-10 du code du travail :
« La mention sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué constitue, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord conclu en application du chapitre II du titre Ier du livre II du présent code, une dissimulation d'emploi salarié. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement vise à ce que ne soit pas considérée comme une dissimulation d'emploi salarié la mention, sur le bulletin de paie, d'un nombre total d'heures de travail inférieur au nombre d'heures réellement effectuées lorsque cette mention est faite en application d'une convention ou d'un accord d'annualisation du temps de travail.
L'alinéa inséré par l'Assemblée nationale vise à combattre une pratique qui est de plus en plus répandue, celle de la sous-évaluation des heures réellement effectuées.
Sans remettre en cause cet objectif, l'amendement tend à tenir compte des pratiques liées au lissage des rémunérations résultant des accords d'annualisation du temps de travail.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Nous ne voterons pas cet amendement, même si nous en comprenons l'argumentation et ne voulons pas faire de procès d'intention à quiconque.
De fait, les méthodes de lissage qui sont couramment employées dans le cas de préretraite ou de temps partiel annualisé - même si nous réprouvons cette annualisation - conduisent à porter sur le bulletin de paie des mentions horaires fausses. Il est de l'intérêt du salarié que sa rémunération soit lissée, mais cela conduit l'employeur à se mettre en contradiction avec la lettre de la loi.
Nous préférerions que la réglementation relative aux mentions portées sur le bulletin de paie soit modifiée plutôt que de voir apparaître cette disposition dans le code du travail. Cela n'est-il pas envisageable ? Un récapitulatif des heures travaillées ou qui seront travaillées ne pourrait-il, par exemple, être annexé au bulletin de paie ? Ou encore, le nombre prévisionnel d'heures annuelles ne pourrait-il être calculé en début d'exercice et adressé par document écrit à chaque salarié concerné ? Ne peut-on réactiver la commission Turbot - vous y avez fait allusion hier, madame le ministre - qui vous a récemment fait des propositions sur la simplification du bulletin de paie pour qu'elle étudie cette question ?
Nous sommes particulièrement soucieux des garanties dont disposeront les salariés, et ne pouvons voter une mesure qui entérine une forme de fraude, fût-elle acceptée par tous.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2 bis