M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant le travail et les affaires sociales :
II. - Santé publique et service communs
III. - Action sociale et solidarité.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en application de notre nouvelle procédure de discussion budgétaire, j'ai aujourd'hui l'honneur de vous présenter le volet social du budget du travail et des affaires sociales.
Depuis l'exercice 1996, les crédits correspondants sont présentés en deux fascicules distinct : d'une part, celui de la santé publique et des services communs et, d'autre part, celui de l'action sociale et de la solidarité. Cette dichotomie ne paraît pas répondre à une nécessité très forte car les moyens matériels et humains des services sanitaires et sociaux sont communs aux deux fascicules. C'est bien d'ailleurs cet ensemble que M. Jacques Barrot a présenté dans son audition devant notre commission.
L'évolution de ce budget s'inscrit dans un contexte de stabilisation des dépenses de l'Etat et de réforme du sytème de protection sociale.
Les ordonnances du printemps dernier et la loi de financement de la sécurité sociale que nous venons de voter visent à redresser les comptes sociaux dans l'immédiat et à permettre la maîtrise de ceux-ci dans le futur. Cette grande réforme n'est pas sans incidence sur les crédits du ministère qui a la tutelle de la sécurité sociale.
L'évolution du budget des afffaires sociales et de la santé traduit donc bien la priorité que le Gouvernement accorde à la santé publique et à la cohésion sociale. L'augmentation des crédits n'est plus l'unique critère d'appréciation, une diminution pouvant être un signe de meilleure gestion, c'est d'ailleurs un signe des temps. Sous cette réserve, les crédits demandés en 1997 s'élèvent à 69,5 milliards de francs, soit une progression de 3 % par rapport au budget voté en 1996. Il s'agit donc de l'un des rares budgets présentés en augmentation cette année.
J'en arrive à la répartition par grandes masses de crédits.
Les crédits du fascicule de la santé publique et des services communs s'élèvent à 8,116 milliards de francs ; ils sont en diminution de 1,5 % par rapport à 1996 en raison du transfert au budget du Premier ministre des crédits de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie.
Les dépenses de l'administration générale sont stabilisées au niveau de 5,06 milliards de francs, tandis que les dépenses d'intervention sanitaire diminuent de 3,1 % pour s'établir à 3,054 milliards de francs. Toutefois, à structure constante, ces dépenses d'intervention sanitaire auraient augmenté de 8,5 %.
Les crédits consacrés aux personnes âgées et aux personnes handicapées progressent de 5,9 % - ils atteignent 28,7 milliards de francs - tandis que ceux qui sont consacrés à la lutte contre l'exclusion augmentent de 5,8 % - ils s'élèvent à 28,3 milliards de francs. Il s'agit donc de deux masses budgétaires à peu près comparables.
Les crédits consacrés au développement de la vie sociale sont simplement reconduits : 4,4 milliards de francs.
Ainsi, les postes les plus importants du budget des affaires sociales et de la santé sont présentés en augmentation pour 1997. J'estime toutefois, même si cela peut surprendre certains d'entre vous, qu'il n'y a pas lieu de s'en féliciter dans tous les cas. En effet, si certaines évolutions de crédits résultent de choix assumés par le Gouvernement, d'autres augmentations apparaissent comme largement subies.
Ainsi, de nombreuses mesures du budget de la santé publique et des services communs sont destinées à accompagner la réorganisation du système de soins décidée et mise en oeuvre avec détermination par le Gouvernement.
Les deux mesures les plus marquantes sont l'inscription, pour la première fois en 1997, de crédits consacrés à l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, l'ANAES, et aux agences régionales de l'hospitalisation, qui ont été créées par l'ordonnance du 24 avril 1996 et qui joueront, nous le savons, un rôle éminent dans la réforme de nos structures hospitalières.
Une dotation de 35 millions de francs est allouée à l'ANAES, une autre dotation de 98 millions de francs étant prévue pour les vingt-quatre agences régionales de l'hospitalisation.
Ces organismes nouveaux seront, je l'ai dit, des acteurs stratégiques de la politique de rationalisation des modes d'allocations des ressources aux hôpitaux.
A cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat, j'insiste sur la nécessité qu'il y a de réduire vigoureusement les inégalités qui existent entre les régions en matière de dotation hospitalière. Lors de la présentation du projet de loi sur le financement de la sécurité sociale, j'avais souligné que ces dotations variaient du simple au double, ce qui est évidemment excessif. Il ne faudrait pas hésiter à prévoir des taux d'évolution négatifs pour les enveloppes des régions actuellement surdotées et à engager les restructurations nécessaires sous l'égide, bien entendu, des agences régionales de l'hospitalisation.
De même, j'approuve la réduction du montant des subventions d'investissements hospitaliers. Abstraction faite de la poursuite de l'exécution des contrats de plan, la seule opération programmée pour 1997 est la mise en place d'unités hospitalières sécurisées destinées à la population carcérale. En effet, étant donné la situation actuelle de suréquipement, l'Etat n'a plus à subventionner d'autres investissements hospitaliers que ceux qui relèvent directement de ses missions régaliennes. D'autres mesures nouvelles participent également à l'accompagnement de la réforme du système de santé. Il s'agit notamment du renforcement des moyens consacrés au réseau national de santé publique, le RNSP, qui voit sa dotation augmenter de près de 50 % en 1997.
Toutefois, en dépit de cette forte progression, les crédits consacrés au RNSP restent modestes, puisqu'ils s'élèvent à 22 millions de francs.
La France accuse, nous le savons, un certain retard dans le domaine de la veille sanitaire. C'est pourquoi, par exception aux principes de rigueur, j'admettrais que ces crédits soient sensiblement accrus dans les années à venir. Il s'agit là, en effet, d'une dépense intelligente et de nature à contribuer efficacement à la détermination des priorités de santé publique et au pilotage de notre dispositif sanitaire.
A côté des dotations destinées à accompagner la réforme du système de soins, le ministère continue à intervenir directement en faveur de certaines priorités de santé publique.
Comme les années précédentes, les crédits consacrés à la lutte contre le sida et à la toxicomanie sont en augmentation sensible : ils progressent respectivement de 5,3 % et de 8,5 %, pour atteindre des montants de 474 millions de francs et de 694 millions de francs.
Concernant la lutte contre l'alcoolisme et le tabagisme, il faut donner acte au Gouvernement d'avoir introduit un peu de logique dans l'intervention des pouvoirs publics en proposant, par l'article 30 du projet de loi de finances, d'affecter une fraction du droit sur les tabacs à la Caisse nationale de l'assurance maladie, la CNAM, à hauteur de 3 milliards de francs. Ainsi, les fumeurs contribueront directement au financement de l'assurance maladie pour laquelle ils représentent une lourde charge.
Je m'interroge par ailleurs sur le montant des crédits affectés par l'Etat à la lutte contre le cancer. Ils ne sont pas à la mesure de la part de cette pathologie dans la mortalité d'ensemble de la population. En dehors des crédits consacrés au dépistage du cancer du sein, à hauteur de 17,7 millions de francs, et d'une fraction non identifiée des dotations inscrites au budget de la recherche, sauf informations complémentaires que vous pourriez fournir monsieur le ministre, l'essentiel de l'effort repose sur l'assurance maladie et sur la générosité publique.
Les derniers développements de l'affaire de l'ARC risquant de tarir cette source de financement essentielle, en décourageant les dons ; il est urgent de rétablir la confiance des Français sur ce point. Je remarque que, dans cette affaire, la Cour des comptes est intervenue de façon décisive et, vous m'en excuserez peut-être, monsieur le ministre, elle a fait preuve là d'une plus grande clairvoyance que l'administration de tutelle. Mais vous n'étiez pas en charge de votre ministère à l'époque ; la critique ne vous concerne donc pas.
La réforme en cours de la sécurité sociale suppose également une clarification de certaines relations financières entre le ministère des affaires sociales et les établissements sanitaires ou les organismes de sécurité sociale. La Cour des comptes a formulé des observations à ce sujet, notamment en ce qui concerne les personnels mis à disposition par les hôpitaux ou les caisses, qui représentent près de 10 % des effectifs des services centraux. Je ne suis pas certain que cette pratique soit tout à fait compatible avec les responsabilités de tutelle du ministère. La même observation est d'ailleurs valable pour sa situation de locataire de locaux appartenant aux caisses de sécurité sociale.
La deuxième grande orientation politique qui transparaît dans le budget des affaires sociales et de la santé est l'anticipation de la loi de cohésion sociale.
C'est ainsi que les crédits consacrés à l'intégration et à la lutte contre l'exclusion progressent de 10,8 % en 1997, pour atteindre 784,4 millions de francs.
De même, les crédits consacrés aux centres d'hébergement et de réadaptation sociale, les CHRS, progressent de 5,6 % pour s'établir, en 1997, à 2,348 milliards de francs. Une mesure nouvelle de 84 millions de francs est prévue afin de pérenniser 1 000 places d'hébergement d'urgence qui seront juridiquement requalifiées en CHRS.
De même, la capacité d'accueil des centres de formation des travailleurs sociaux sera accrue de 10 % en 1997 grâce à une mesure nouvelle de 34,5 millions de francs, qui porte leur dotation à 511,8 millions de francs.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je m'étonne toutefois que cette mesure nouvelle soit pour partie gagée par le transfert de 13 millions de francs en provenance des crédits consacrés à la formation des intervenants à domicile. Ce choix apparaît en effet contradictoire avec la création de la prestation spécifique dépendance, la PSD, voulue par le Sénat. Prestation en nature, la PSD aura pour effet d'accroître la demande d'aide à domicile de la part des personnes âgées dépendantes.
Enfin, je rappelle qu'une provision exceptionnelle de 470 millions de francs est inscrite pour 1997 au budget des charges communes au titre de la future loi de cohésion sociale.
La priorité affirmée par le Gouvernement a donc des conséquences budgétaires très nettes. Il est tout à fait spécieux de prétendre que la loi de cohésion sociale sera une loi d'affichage, sans financement à la clef.
Mais toutes les évolutions du budget des affaires sociales ne découlent pas de choix politiques. En 1997, comme les années précédentes, les augmentations de crédits les plus importantes résulteront d'évolutions subies.
Certaines de ces augmentations peuvent être considérées comme vertueuses dans la mesure où elles répondent à un souci de sincérité budgétaire.
Ainsi, les dépenses de télécommunications du ministère font l'objet d'une remise à niveau de 80 % en raison d'une dette de 45 millions de francs qui n'était pas honorée.
De même, les dépenses d'aide médicale de l'Etat font l'objet d'une remise à niveau de 16,8 %, qui les porte à 807 millions de francs pour 1997 face à une dette de 600 millions de francs envers l'assurance maladie.
Parlons aussi des efforts de sincérité budgétaire nécessaires pour les crédits de frais de justice et de réparation civile. Ces crédits sont reconduits en 1997, comme les années précédentes, au niveau de 10,9 millions de francs, alors que les dépenses effectivement constatées ont toujours été plus de dix fois supérieures.
Toutefois, les augmentations de crédits les plus importantes en volume correspondent non pas à un souci de sincérité budgétaire, mais à la dérive persistante de certaines dépenses sociales obligatoires.
Ainsi les crédits consacrés à l'allocation de RMI progresseront, en 1997, à un rythme de 5,3 %, pour atteindre 24,2 millions de francs. Ce taux de progression peut paraître modéré par rapport à celui des années précédentes, que je rappelle : 26,3 % en 1993, 15,5 % en 1994 et 14,6 % en 1995. Il est néanmoins supérieur à celui de 1996, qui devait être limité à 4,4 %. Le ralentissement du rythme de progression des dépenses du RMI est donc relatif.
Le RMI paraît avoir fini sa phase de montée en charge et s'être durablement installé dans le paysage de notre protection sociale. Certes, la fraude ou le laxime n'expliquent pas, à eux seuls, la vigueur de la progression du RMI. Mais je regrette que le débat sur l'obligation alimentaire qui a eu lieu à l'Assemblée nationale n'ait pu aboutir. En tout état de cause, je crois qu'il est opportun d'appliquer de façon plus rigoureuse les règles existantes en la matière.
A l'inverse des dépenses de RMI, les crédits consacrés à l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH, ne montrent aucun signe d'infléchissement. Ils augmentent en 1997 de 7,2 %, pour atteindre 22,2 milliards de francs, soit un supplément de crédits de 1,5 milliard de francs par rapport à 1996.
Le nouveau barème d'invalidité, fixé en 1994 à la suite des observations de la Cour des comptes, n'a pas fondamentalement modifié les décisions des commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel, les COTOREP.
Plus d'un tiers des allocations sont encore attribuées au titre de l'inaptitude à exercer une activité professionnelle. Je constate que, pour 1997, aucune économie n'est prévue au titre de cette réforme. Les économies qui avaient été prévues pour 1995 et 1996 ne se sont pas concrétisées.
Les crédits consacrés aux centres d'aide par le travail, les CAT, constituent un troisième poste de dépenses important et en progression rapide ; ils augmentent de 4,5 %, pour atteindre 5,844 milliards de francs. Une mesure nouvelle de 254,6 millions de fancs est prévue pour la création de 2 000 places supplémentaires.
Les raisons de cet accroissement sont connues, mais elles mériteraient d'être analysées en détail : longévité accrue des personnes handicapées, difficultés sur le marché de l'emploi ordinaire, nécessité d'offir des débouchés aux jeunes adultes maintenus dans les établissements d'éducation spéciale en application de l'amendement Creton.
Ces évolutions budgétaires m'amènent à préconiser, pour conclure, monsieur le secrétaire d'Etat, trois orientations : tout d'abord, une planification systématique des investissements dans le domaine des équipements sociaux, sur le modèle du programme d'humanisation des hospices, pour savoir où l'on va ; ensuite, une réduction des inégaliés dans la répartition géographique des équipements sanitaires et sociaux et de leurs dotations de fonctionnement, à commencer, bien entendu, par le secteur hospitalier ; enfin, un réexamen permanent des modalités d'attribution des prestations sociales au regard des objectifs recherchés et des résultats constatés.
Le projet de budget des affaires sociales et de la santé pour 1997 mérite une appréciation globalement favorable. Il porte la marque des réformes d'envergure qui sont engagées par le Gouvernement et qui témoignent d'une vision à long terme de l'intérêt supérieur du pays. C'est pourquoi votre commission des finances vous demande d'adopter ces crédits. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste ainsi que sur certaines travées de RDSE.)
M. le président. La parole et à M. Boyer, rapporteur pour avis.
M. Louis Boyer, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour la santé. Monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'adoption de la réforme constitutionnelle qui a consacré un légitime droit de regard du Parlement sur les finances de la sécurité sociale et s'est traduite, dès cette annnée, par l'examen d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale nous a conduits à retenir, pour le présent rapport, une approche stricte de la notion de « crédits de la santé ».
Le budget de la santé publique et des services communs n'échappe pas au contexte de rigueur budgétaire qui imprègne l'ensemble du projet de loi de finances ; avec 8,116 milliards de francs en 1997, il est en effet en baisse de 1,5 % par rapport à l'an dernier.
Certes, les crédits relatifs aux interventions sanitaires, qui s'élèvent à 3,20 milliards de francs, sont épargnés par les restrictions budgétaires et progressent d'un peu plus de 4 % à sturucture constante.
En revanche, les crédits de fonctionnement du ministère des affaires sociales, qui s'établissent à 5,20 milliards de francs, ne progressent que de 0,40 % par rapport à ceux qui ont été ouverts en loi de finances initiale pour 1996 ; cette stabilisation se traduit par la suppression de 100 emplois, qui, pour les trois quarts d'entre eux, étaient vacants ou gelés.
Votre commission tient à mettre l'accent, dans ce bref rapport, sur les conséquences institutionnelles de l'ordonnance portant réforme hospitalière, la lutte contre les grands fléaux et les crédits de la veille et de la sécurité sanitaires.
J'évoquerai d'abord la politique hospitalière de l'Etat.
Le présent projet de budget prépare la mise en place des agences régionales de l'hospitalisation et de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé. Ainsi, la ligne budgétaire du chapitre 47-11, qui correspondait à l'Agence nationale pour le développement de l'évolution médicale, l'ANDEM, est supprimée, alors qu'est créée une nouvelle ligne, dotée de 35 millions de francs, destinés à l'ANAES. Cela sous-entend que l'ANDEM serait supprimée au 31 décembre prochain et que l'ANAES serait créée au 1er janvier 1997.
Il est probable qu'il n'en sera pas ainsi. Lors de son audition budgétaire, M. Hervé Gaymard l'a reconnu et a promis qu'il serait procédé à un aménagement destiné à ménager une transition. Nous aimerions avoir des précisions sur la nature de cet aménagement ainsi que sur le volume de crédits de l'assurance maladie qui alimenteront, avec la subvention de l'Etat, le budget de l'ANAES.
Je voudrais formuler trois observations au sujet de la politique hospitalière de l'Etat.
Premièrement : depuis des années, on méconnaît trop souvent l'importance du nombre de postes de personnels non pourvus à l'hôpital en feignant d'ignorer qu'au niveau local les vacances de postes permettent de disposer de marges de manoeuvre budgétaire, mais occasionnent une surcharge de travail pour le personel qui débouche sur une diminution de la sécurité et de la qualité des soins.
Deuxièmement : il s'agit des vacances de postes de praticiens hospitaliers, dont l'importance conduit les hôpitaux à recruter des médecins étrangers, alors que l'on constate parallèlement une pléthore médicale nationale. Le statut et, surtout, les carrières des praticiens hospitaliers mériteraient d'être revalorisés afin de corriger cette situation.
La troisième et dernière observation concerne la grille de la fonction publique hospitalière. Toutes les décisions prises en matière de fonction publique sont automatiquement répercutées sur la fonction publique hospitalière et donc sur les budgets des hôpitaux. Cette année, alors que le taux directeur sera fixé à un niveau très rigoureux, il faudra que les hôpitaux subissent les conséquences des augmentations décidées pour la fonction publique par le Gouvernement.
En outre, la grille de la fonction publique hospitalière n'a pas évolué parallèlement aux changements qui ont affecté la nature des métiers de l'hôpital ; il conviendrait donc de la dépoussiérer, en concertation avec les personnels intéressés.
Je voudrais maintenant évoquer la lutte contre les grands fléaux.
Si la lutte contre le sida et la toxicomanie fait, cette année encore, l'objet d'un effort accru dont la commission se félicite, elle tient à mettre l'accent sur des causes qui semblent un peu laissées pour compte, à savoir la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme ainsiq que la lutte contre le cancer.
Les crédits destinés à lutter contre le sida progresseront de façon significative, avec une augmentation de 26 millions de francs, soit un taux de progression de 5,3 %. Ils représentent désormais près de 475 millions de francs.
Les crédits de la lutte contre la toxicomanie inscrits au budget du ministère, qui s'élèvent à 694 millions de francs, sont en progression de 8,5 % par rapport à la loi de finances pour 1996. Il faut y ajouter 230 millions de francs affectés à la mission interministérielle de lutte contre la toxicomanie, qui est rattachée aux services du Premier ministre.
La commision des affaires sociales se félicite de la volonté du Gouvernement d'améliorer ainsi la prise en charge médicale, sociale et phychologique des personnes victimes de la toxicomanie ou du sida. Cependant, si les crédits de la lutte contre la toxicomanie et le sida progressent, d'autres actions semblent laissées pour compte, je le répète ; la politique de lutte contre le cancer et celle qui est engagée contre le tabagisme et l'alcoolisme.
Dans le rapport du Haut Comité de la santé publique de 1994, l'importance de la mortalité prématurée liée au cancer est relevée. Cette maladie est en effet responsable de 140 000 décès par an. Etant à l'origine de 36 % des décès, c'est la première cause de mortalité avant l'âge de soixante-cinq ans.
Retenu comme thème prioritaire dans bon nombre de conférences régionales de santé, le cancer a également été reconnu parmi les dix priorités dégagées par la conférence nationale de santé.
La commision des affaires sociales regrette que la lutte contre le cancer ne fasse pas encore l'objet d'une individualisation budgétaire ni d'une véritable stratégie, avec des objectifs et des moyens associés.
Certes, un conseil national du cancer a été mis en place en 1995. Mais ses travaux ne sont pas véritablement connus à ce jour. Et l'on ne connaît pas de plan gouvernemental de lutte contre le cancer, même si un financement annuel de 5 millions de francs est dégagé pour cofinancer des actions de dépistage.
Autre parent pauvre de la politique de santé : la lutte contre l'alcoolisme et le tabagisme. Les crédits qui y sont affectés sont simplement reconduits en francs courants, ce qui veut dire qu'ils baissent en francs constants. Certes, M. le secrétaire d'Etat l'a rappelé lors de son audition devant la commission, il faut ajouter à ces crédits ceux qui seront engagés par le comité français d'éducation pour la santé et ses comités régionaux et départementaux. Toutefois, ce comité agissait déjà au cours des années précédentes et on ne peut tirer argument de l'augmentation de ses crédits pour se convaincre d'une augmentation des crédits de la lutte contre l'alcoolisme.
Je voudrais enfin évoquer brièvement les crédits prévus en faveur de la santé des populations et de la veille sanitaire, dont votre commission estime la progression très satisfaisante.
Ainsi, les crédits inscrits en faveur de la santé des populations progressent de 8 %, ce qui est un taux particulièrement important dans le contexte budgétaire actuel. Les postes qui progressent le plus sont le programme d'accès à la santé des personnes défavorisées, la vaccination contre l'hépatite B en milieu carcéral et le renforcement du comité français d'éducation pour la santé.
A cet égard, je tiens à souligner l'importance de la lutte contre la tuberculose, dont sont pour l'instant chargés les départements : la résurgence de cette maladie est particulièrement inquiétante, d'autant qu'elle se traduit par des formes souvent résistantes aux thérapeutiques habituelles.
En ce qui concerne la veille sanitaire, il faut noter la reconduction des crédits destinés aux observatoires régionaux de la santé et aux instituts Pasteur, mais surtout la très forte progression - 50 % - des crédits du réseau national de santé publique, le RNSP. La commission des affaires sociales se félicite de l'importance de cette progression, justifiée à la fois par les besoins du RNSP, la qualité du travail accompli et la volonté du Gouvernement de mener une véritable politique de veille sanitaire.
Pour conclure, la commission estime que le budget de la santé est un bon budget, surtout dans le nécessaire contexte de rigueur dont le volume des crédits de l'Etat subit les effets. Aussi, elle a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la santé et des services communs pour 1997. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Chérioux, rapporteur pour avis.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour les affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, tirant les conséquences de la mise en place de la loi de financement de la sécurité sociale, la commission des affaires sociales émet cette année, pour la première fois, un avis sur les affaires sociales entendues au sens large, portant à la fois sur l'action sociale, la solidarité et les moyens du ministère, mon excellent collègue, M. Louis Boyer continuant, pour sa part, comme par le passé, à analyser les crédits consacrés à la santé.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de votre ministère parce qu'ils témoignent du fait que la solidarité et la lutte contre l'exclusion sont aujourd'hui deux priorités essentielles de l'action du Gouvernement dans le cadre d'un budget qui se caractérise, pour la première fois, par une stabilisation des dépenses de l'Etat.
La commission s'est félicitée de la priorité accordée à la lutte contre l'exclusion avec la transformation de 1 000 places d'asiles de nuit en places de centres d'hébergement et de réadaptation sociale, les CHRS, qui permettront d'assurer un accompagnement social favorable à une insertion réussie.
S'agissant des handicapés, auxquels notre excellent collègue M. Jacques Machet a consacré de remarquables avis ces dernières années, la création de 2 000 places nouvelles en centres d'aide par le travail et de 500 places en ateliers protégés, d'une part, l'augmentation significative des crédits de l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH, et la revalorisation des moyens des équipes de suivi et de reclassement professionnel, d'autre part, sont des éléments très positifs.
Trois observations cependant doivent être faites.
La baisse de 13 millions de francs des crédits consacrés à la formation des intervenants à domicile est une économie en trompe-l'oeil puisque les besoins sont tels, notamment auprès des personnes âgées dépendantes, que cette mesure ne peut déboucher que sur un report de la charge sur les collectivités locales alors même qu'il est difficile d'évaluer les coûts à leur juste mesure.
Ensuite, au moment où vous décidez de réévaluer les crédits des commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel, les COTOREP, il nous semble utile de rappeler que ces organismes devraient bénéficier d'un allégement de leur charge de travail du fait de l'instauration de la future prestation spécifique dépendance et que l'occasion est donc ainsi offerte de leur demander un effort supplémentaire pour réduire les délais de traitement des demandes.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. Enfin, le transfert de la garantie de ressources des travailleurs handicapés à l'association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés, l'AGEFIPH, nous est apparu conforme à la mission confiée à cet organisme par le législateur en 1987, lorsque avait été instituée l'obligation d'emploi, et compatible avec les moyens financiers de cet organisme ; en revanche, nous nous sommes demandés si ce transfert ne devrait pas se traduire par une révision du statut d'association de l'AGEFIPH afin d'éviter de démembrer ce que nous pouvons considérer comme un véritable service public.
Mais, dans cet hémicycle, en particulier, l'avis rendu sur votre budget, monsieur le ministre, ne prend son sens que s'il est mis en perspective avec les dépenses d'action sociale décentralisée.
Remarquons tout d'abord que, même si l'on additionne les crédits de l'Etat consacrés à l'action sociale et la solidarité, dont 24 milliards de francs consacrés au RMI, et les dépenses liées au fonctionnement du ministère, le montant total, soit 66,5 milliards de francs, est encore inférieur à celui des dépenses nettes d'aide sociale des départements en 1995, qui s'élève à 73 milliards de francs avant déduction du contingent communal d'aide sociale.
La seconde caractéristique de ces dépenses, c'est leur spectaculaire progression. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 9,5 % en 1993, 8 % en 1994, 7 % en 1995. La progression des dépenses d'aide sociale se situe toujours à un niveau trois fois plus élevé que l'inflation. Un tel rythme ne pourra indéfiniment être soutenu par des collectivités locales qui savent déjà que les marges de manoeuvre sur les ressources fiscales qui leur ont été transférées ne sont plus extensibles.
Enfin, grâce aux excellents travaux de l'observatoire départemental d'action sociale, l'ODAS, nous sommes en mesure de constater que, dans l'évolution de ces dépenses, l'effet volume dû à l'augmentation du nombre de personnes prises en charge ou secourues explique seulement un tiers de la hausse, tandis que les deux tiers sont dus à l'effet coût, qu'il s'agisse de la revalorisation des prestations ou des frais de fonctionnement des établissements.
La prise en chage de l'hébergement des personnes handicapées augmente ainsi de 8,5 % en 1995, mais trois quarts de cette hausse sont dus à l'effet coût. Plus étonnant encore, les dépenses de placement en établissement d'aide à l'enfance augmentent de 4 % en 1995 alors que le nombre de mineurs pris en charge n'a pas augmenté significativement.
Ce phénomène est d'abord dû à une augmentation très importante des rémunérations des agents des institutions sociales et médico-sociales, qui interviennent pour plus de la moitié dans les frais intégrés dans les prix de journée.
Ces agents, qui relèvent d'établissements privés gérés à titre principal par des associations, ont bénéficié de la tansposition des accords Durieux-Durafour sur l'amélioration de la fonction publique hospitalière, dans le cadre d'avenants agréés par décision du ministre en 1992.
Or la Cour des comptes a souligné que cette décision avait été prise sans que l'administration puisse mesurer son impact sur les finances départementales au regard des marges de manoeuvre budgétaires.
Il ne s'agit pas ici de revenir sur le passé, mais il est bon de souligner que le système actuel, qui aboutit à écarter complètement les collectivités locales du processus de décision sur la variable salariale, qui est pourtant une variable centrale des dépenses d'aide sociale, ne pourra pas être poursuivi à l'avenir car il est devenu insupportable.
Il en est de même de la seconde inquiétude qui tient au niveau élevé du glissement-vieillesse-technicité des agents-GVT.
Le GVT est en quelque sorte le thermomètre de l'effet coût induit par le déroulement individuel des avancements et des promotions des carrières nonobstant, je le rappelle, toute mesure salariale collective ; lorsque ce coût évolue plus vite que les prix à la consommation, sans doute est-ce le signe d'une fièvre due, pour partie, aux revalorisations d'indice mises en place par les protocoles Durafour, mais aussi à des facteurs plus généraux imputables au vieillissement démographique de la population des agents et à l'accroissement moyen de la qualification de ceux-ci.
Ce sont ces facteurs généraux qui expliquent que, même en tenant compte de l'effet de « noria », c'est-à-dire des économies dues au remplacement des agents partant à la retraite par des agents plus jeunes, le « GVT solde », qui avoisine 0,9 % actuellement, ne devrait pas descendre au-dessous de 1 % au cours des prochaines années, en particulier dans les établissements sociaux et médico-sociaux, dont le recrutement est généralement plus récent.
Face à ces facteurs qui se trouvent ainsi à l'origine d'une hausse spontanée des dépenses, le mode de tarification des établissements sociaux et médico-sociaux amplifie à son tour les risques de dérive. En effet, une fois reconnu le caractère « justifié et non excessif » de leurs prévisions de dépenses et de recettes, les organismes disposent d'une sorte de droit de tirage sur le financeur public qui demeurera valable même si les prévisions initiales sont dépassées, et cela sans qu'aucune contrainte ne pèse sur les organismes qui ne respectent pas leurs objectifs puisque ces derniers ne sont pas reconnus comme opposables par la jurisprudence.
Afin de mettre fin à ce processus non maîtrisé, la commission des affaires sociales vous proposera, mes chers collègues, de rétablir l'article 98, supprimé par l'Assemblée nationale, qui visait justement à poser le principe d'enveloppes limitatives de financement pour les établissements dépendant de l'Etat.
M. Charles Descours. Très bien !
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. Enfin, il nous est apparu qu'effectuer des contrôles serait utile pour éviter les dérives constatées pour certaines prestations.
D'une part, dans le cadre de la loi actuelle, il est nécessaire de contrôler les ressources des parents d'un bénéficiaire du RMI...
M. Alain Gournac. Oui !
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. ... afin que ceux-ci soient amenés à prendre leurs responsabilités lorsque leurs revenus sont élevés et qu'ils n'ont pas d'autres membres de leur famille à charge.
M. Alain Gournac. Tout à fait !
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. D'autre part, s'agissant toujours du RMI, le mécanisme actuel de prise en charge des non-affiliés à l'assurance personnelle apparaît appliqué par les caisses d'allocations familiales de manière tout à fait extensive, et ce au détriment des finances départementales puisque des contrôles sommaires ont montré qu'une proportion non négligeable des personnes dispose en fait de droits à prestation à l'assurance maladie du fait d'une activité antérieure ou de leur conjoint. Maintenir l'assurance personnelle dans ce cas, c'est faire payer deux fois l'assuré social et le contribuable local.
M. Charles Descours. Bravo !
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. En conclusion, je suis persuadé que notre système d'action sociale peut être plus efficace face à l'exclusion sans nécessairement donner lieu à des dépenses supplémentaires.
En tout cas, il nous appartient à tous de cerner les dysfonctionnements et de procéder aux réformes nécessaires pour que, sans alourdir les prélèvements obligatoires, nous puissions maintenir l'action sociale à son niveau, tout en la renforçant sur les publics prioritaires.
Cet objectif doit guider ceux qui, avec la majorité de la commission des affaires sociales, voteront votre projet de budget pour 1997, monsieur le secrétaire d'Etat. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 19 minutes ;
Groupe socialiste, 17 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 26 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 18 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 16 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes.
La parole est à Mme Fraysse-Cazalis.
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget de la santé pour 1997 est en diminution par rapport à l'an dernier, avec à peine plus de 8 milliards de francs, soit 0,52 % du budget de l'Etat. C'est bien peu par rapport aux besoins.
Or la situation est de plus en plus préoccupante.
On assiste en effet au retour de maladies d'un autre âge. C'est le résultat de carences qui affectent tant la prévention que le traitement, et qui sont d'autant plus dommageables qu'une part croissante de la population est désormais confrontée à des difficultés économiques.
La mise en oeuvre du plan Juppé aggravera considérablement cette situation. Elle a déjà commencé de le faire.
Le Haut Comité de la santé publique indique : « Il existe en France des écarts très importants de niveau d'état de santé selon les catégories sociales. Le risque de décès entre trente-cinq et soixante ans varie de 10 % pour les cadres à 20 % pour les ouvriers. »
Certes, ce n'est pas une nouveauté, mais cela montre que, à l'injustice sociale inacceptable qui caractérise votre politique de santé, s'ajoute l'inefficacité.
Une politique de prévention sérieuse et responsable permettrait d'éviter des gâchis financiers et humains. Vous lui tournez le dos.
La médecine scolaire ne dispose pas des moyens suffisants pour suivre correctement les enfants. Nombre d'établissements ne disposent même pas d'une infirmière. A Nanterre, quatre médecins scolaires devraient suivre 17 000 élèves ! Ces chiffres parlent d'eux-mêmes.
En ce qui concerne la santé au travail, l'exemple de l'amiante a malheureusement attesté que les moyens n'étaient pas à la hauteur des besoins.
On peut multiplier les exemples qui montrent qu'une meilleure prévention pourrait avoir des conséquences positives.
Si l'hypercholesterolémie était dépistée correctement, cela permettrait de prévenir bien des accidents cardio-vasculaires coûteux, tant sur le plan financier que sur le plan humain.
On peut estimer à 2 000 le nombre de femmes décédées d'un cancer du col de l'utérus en 1993 ; or un dépistage précoce, par un frottis cervicovaginal - qui devrait être systématiquement pris en charge - permettrait de guérir beaucoup de femmes affectées par cette maladie.
Le rapport pour avis de la commission des affaires sociales indique que « la politique de lutte contre le cancer et celle qui est engagée contre le tabagisme et l'alcoolisme semblent laissées pour compte ». Les crédits consacrés à cette dernière action sont, en effet, simplement reconduits depuis plusieurs années, ce qui signifie qu'ils sont en diminution sensible en francs constants.
Vous vous félicitez de quelques crédits en augmentation dans ce budget, tels ceux de la lutte contre le sida. La réalité, c'est une progression de 26 millions de francs pour 110 000 personnes atteintes par le virus. Il n'y aura pas de quoi faire face de manière décente aux nécessités de dépistage, de prévention, de traitement, d'accueil et de suivi de ces personnes.
La même remarque vaut pour la lutte contre les toxicomanies. Le rapport confirme que le manque de places en post-cure non seulement ne permet pas d'accueillir tous ceux qui en ont besoin mais induit un délai d'attente qui favorise les rechutes.
En ce qui concerne les hôpitaux, le niveau des autorisations de programme chute de 80 % par rapport à l'an dernier. Vous prévoyez des suppressions massives de personnel et de nouvelles suppressions de lits. Vous organisez le délabrement du système public hospitalier, dont notre pays pouvait être légitimement fier, tant pour la qualité des soins dispensés que pour celle de la formation offerte aux étudiants.
Y aurait-il trop de personnel dans les hôpitaux ? Selon le rapport, « on méconnaît l'importance du nombre de postes non pourvus, en feignant d'ignorer qu'au niveau local les vacances de postes permettent de disposer de marges de manoeuvre budgétaires, mais occasionneraient une surcharge de travail pour le personnel, débouchant sur une diminution de la sécurité et de la qualité des soins ».
Pour ne pas méconnaître tout cela, il faut écouter non seulement les médecins, les personnels et leurs organisations syndicales, mais aussi les élus, qui posent des questions sur le manque de personnel, comme je l'ai fait récemment à propos de l'hôpital Foch, par exemple, ou au sujet de Paris X.
Vous ne m'avez d'ailleurs pas répondu, monsieur le secrétaire d'Etat, sur les mesures que vous comptez prendre pour empêcher l'extension de la tuberculose, notamment à l'université de Paris X-Nanterre, dont le président se déclare complètement démuni face à cette maladie.
Votre souci premier est d'offrir au secteur financier l'important marché de la santé, comme vous voulez lui livrer celui des retraites et de la protection sociale. D'ailleurs, le rapport du Haut Comité de la santé publique montre que le secteur privé lucratif est en train d'accaparer les services les plus rentables.
C'est au regard de cette situation que doivent être appréciés les crédits du ministère de la santé. Vous les diminuez, au mépris des besoins réels, pour satisfaire à ce que le rapporteur nomme pudiquement le « contexte de rigueur budgétaire », autrement dit, en langage clair, la soumission aux critères de convergence imposés par l'Europe de Maastricht pour accéder à la monnaie unique.
Nous refusons d'y sacrifier le droit à la santé. C'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen votera contre ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.) M. le président. La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de budget qui nous est proposé se présente un peu comme en suspens, dans l'attente de réformes que l'on nous dit à venir, qu'il s'agisse du projet de loi de renforcement de la cohésion sociale ou de la réforme des institutions sociales et médico-sociales.
L'article 98 a été supprimé à l'Assemblée nationale mais notre collègue M. Chérioux propose, au nom de la commission des affaires, d'introduire une disposition à peu près identique, même si la date de mise en oeuvre est repoussée d'un an.
Autant il faut s'inquiéter d'une dérive financière souvent excessive dans certains établissements, autant il me semble dangereux d'aborder la question de la gestion des CAT, les centres d'aide par le travail, et des CHRS, les centres d'hébergement et de réadaptation sociale, sous le seul angle financier, la gestion étant une chose, l'efficacité en termes de travail et d'insertion en étant une autre.
Mais, surtout, le Gouvernement avait introduit cet article alors que, d'une part, il annonçait un texte pour l'année prochaine et que, d'autre part, il n'avait pas envisagé de négociations avec des associations qui ont dénoncé ce processus, le Gouvernement faisant une fois de plus la preuve de son goût pour les méthodes autoritaires en la matière.
Lancer une telle décision d'encadrement des crédits et d'opposabilité sans aucune négociation était une erreur ; lancer la même décision en amont d'une loi était une faute. L'Assemblée nationale et, d'ailleurs, le Gouvernement lui-même en ont tiré les conclusions. Dans ces conditions, relancer aujourd'hui une telle décision, même en en repoussant l'application d'un an, ne me paraît pas du tout souhaitable. Si la loi et la concertation doivent effectivement intervenir, l'amendement de M. Chérioux n'a pas réellement de sens.
Le débat sur le RMI est également un peu occulté par le projet de loi en chantier.
Tout à l'heure, M. Chérioux, lui aussi, a fait allusion aux discussions qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale sur la fameuse condition de ressources et sur l'obligation alimentaire.
Effectivement, cette obligation alimentaire était prévue dans la loi de 1991, mais elle n'a pas été appliquée, et elle ne l'est toujours pas. Il est vrai qu'un certain nombre de cas de détournement de la loi nous sont régulièrement soumis, mais l'arbre ne doit pas cacher la forêt : ces cas extrêmes ne doivent pas nous amener à prendre une décision ou à rendre aujourd'hui applicable cette obligation alimentaire.
En effet, cette obligation alimentaire, si elle était appliquée, frapperait essentiellement une classe d'âge, celle des quarante - soixante-cinq ans, qui a déjà souvent en charge des personnes de plus de quatre-vingts ans. Dans cette classe d'âge, on trouve évidemment des personnes très aisées, mais surtout des membres des couches moyennes, sur lesquelles pèsent déjà lourdement diverses charges, dont l'éducation des enfants jusqu'à vingt-cinq ans.
Cela m'apparaît donc comme une erreur de relancer ce débat et, à partir de quelques cas extrêmes, de faire supporter l'obligation alimentaire par toute une population dont les charges sont déjà lourdes.
Par ailleurs, pour beaucoup de jeunes, il est difficile de dépendre de leurs parents jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans ; or, aujourd'hui, c'est souvent le cas. Si, par le biais du RMI, on contraignait ces jeunes gens à dépendre encore de leurs parents, au nom de l'obligation alimentaire, on risquerait de provoquer des difficultés supplémentaires dans les relations entre parents et enfants.
En ce qui concerne les travailleurs handicapés, je salue la création de places supplémentaires dans les CAT, mais j'aimerais savoir, car le budget est parfois d'une lecture difficile, s'il y a eu une augmentation effective du financement pour les places de CAT existantes.
L'UNIOPSS, l'Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux, évoque une augmentation d'environ 1,8 %,. Confirmez-vous ce taux, monsieur le ministre ?
Quant au transfert à l'AGEFIPH, l'association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés, de l'insertion en milieu ouvert, il me paraît tout à fait scandaleux. Mais ce problème concernant davantage le budget du ministère du travail, j'interviendrai sur ce point lors de l'examen de ce budget.
De la même façon, je ne comprends pas - et je rejoins à cet égard les orateurs qui m'ont précédée, notamment les rapporteurs des commissions - la baisse des crédits concernant les intervenants d'aide à domicile. Ils passent de 16,4 millions de francs à 3,4 millions de francs.
Comme pour la prestation autonomie, à laquelle l'Etat devait à l'origine participer et qui est devenue une prestation dépendance uniquement payée par les départements, ce sont ces derniers qui vont, de surcroît, devoir assurer le financement de la formation des personnels.
M. Barrot a dit très nettement devant l'Assemblée nationale que les conseils généraux devaient gérer la prestation spécifique dépendance en ce qui concerne non seulement la prestation elle-même mais aussi la formation du personnel.
Nous venons tous de recevoir un intéressant rapport de l'ODAS, l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée, intitulé Action sociale : la décentralisation face à la crise. Il présente toute une série de chiffres, concernant notamment l'évolution des dépenses d'action sociale départementale. M. Fourcade a sûrement eu, lui aussi, l'oeil attiré par ce rapport.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. En effet !
Mme Joëlle Dusseau. Le total de ces dépenses d'action sociale des départements a augmenté de 61 % de 1989 à 1995 et de 92 % de 1984 à 1995. Les dépenses liées à la dépendance ont, quant à elles, augmenté de 17 % entre 1984 et 1989 et de 54 % entre 1989 et 1995.
S'agissant de la prestation spécifique dépendance, les départements devront, de surcroît, assurer la formation des personnels. Il en résultera une augmentation des dépenses départementales et donc des impôts locaux, qui sont, nous le savons bien, particulièrement injustes, ainsi que de nouvelles inégalités entre les départements plus « riches » ou plus « sociaux » et les autres. Les conséquences seront particulièrement importantes pour une partie extrêmement fragile de la population : je veux parler des personnes âgées dépendantes.
J'ai été également étonnée par la diminution des crédits affectés à la lutte contre l'alcoolisme. D'un côté, on augmente les taxes sur l'alcool pour financer la sécurité sociale et, de l'autre, on diminue les crédits affectés à la lutte contre ce fléau. Certains - mais je n'en connais pas - soutiennent que les taxes sur les alcools permettent de diminuer la consommation. En fait, elles permettent de mieux soigner les cirrhoses, les accidents de la route et les maladies cardio-vasculaires liées à l'alcoolisme. Ce n'est guère sérieux. Il faudrait tout de même mener une réflexion plus globale sur les dépenses de santé.
En commission, M. Fourcade a déclaré que nous n'avions pas les moyens de connaître le montant des crédits consacrés à la lutte contre le cancer.
Il en va de même pour l'alcoolisme. S'il est impossible de chiffrer les conséquences de l'alcoolisme sur la santé, nous savons toutefois que ce fléau coûte très cher à la société tant sur le plan de la santé que sur le plan humain. Il est tout à fait anormal de ne pas s'attaquer aux causes réelles de ce fléau dont les conséquences sont extrêmement lourdes pour le budget de la sécurité sociale et de la santé, sans parler des conséquences humaines qui sont bien connues.
Je suis particulièrement sensible à ce fléau lorsqu'il touche les femmes. En effet, il est bien souvent à l'origine de nombreux cas de femmes battues ou d'enfants torturés.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la dernière partie de mon intervention sera précisément consacrée aux femmes. Je sais que ce domaine relève plutôt de la compétence de Mme Couderc.
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale. Cette question relève même totalement de sa compétence !
Mme Joëlle Dusseau. Mais puisque les crédits relevant de cette question dépendent du budget que vous présentez, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est à vous que je m'adresse en attendant la réponse de Mme Couderc.
Je n'insisterai pas sur le taux de chômage des femmes, qui est largement supérieur à celui des hommes, sur leurs salaires qui, à qualification égale, sont inférieurs de 25 % à celui des hommes, sur la précarité du travail féminin - le travail à temps partiel, les emplois sous-qualifiés et sous-payés sont leur lot -, sur leur solitude compte tenu de la multiplication des familles monoparentales.
Que constate-t-on sur le plan budgétaire ? Voilà deux ans, le Gouvernement a supprimé les actions de formation professionnelle spécifique destinées aux femmes isolées, lorsque les actions d'insertion et de formation, les AIF, ont été remplacées par les stages d'insertion et de formation à l'emploi, les SIFE. Ces crédits, qui permettaient de monter des opérations spécifiques pour les femmes, n'existent plus. C'est une erreur, les femmes en grande difficulté étant un public vraiment spécifique. On ne peut même plus identifier les crédits qui leur sont affectés, puisque, dans les statistiques, la rubrique « femme isolée » a disparu.
Dans le budget pour 1997 qui nous est présenté, les crédits consacrés aux femmes baissent de manière significative. Les actions de communication disparaissent purement et simplement. Est-ce bien le moment alors que l'interruption volontaire de grossesse est remise en cause par les commandos anti-IVG et que se dessine, ici et là, une remise en cause, peut être encore plus grave, du droit à la contraception dans la mesure où certains pharmaciens refusent, au nom d'une certaine idéologie, de délivrer des contraceptifs ?
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. C'est une honte !
Mme Joëlle Dusseau. Est-ce le moment de diminuer les crédits affectés à la communication ou aux actions en faveur de l'emploi, de la formation et de l'égalité professionnelle ? Je fais allusion ici aux crédits figurant au chapitre 43-02-20, qui passent de 30 millions de francs en 1996 à 19 millions de francs en 1997.
En fait, ce chiffre de 19 millions de francs est faux, parce qu'il est truqué. Il résulte en partie du transfert de 5 million de francs du budget du travail à celui de l'action sociale. En conséquence, ce sont non pas 19 millions de francs qu'il faudrait rapporter aux 30 millions de francs de l'année dernière, mais, en réalité, 15 millions de francs. Les crédits se trouvent, en fait, diminués de moitié.
Voilà vingt-deux ans, M. Giscard d'Estaing, qui s'est exprimé hier sur un autre sujet à l'Assemblée nationale, créait le secrétariat d'Etat à la condition féminine. Voilà quinze ans, François Mitterrand instituait le ministère des droits de la femme ; en 1993, le gouvernement Balladur supprimait tout poste ministériel.
Voilà deux ans, l'allocation parentale d'éducation s'adressait en réalité uniquement aux femmes, qui devaient ainsi rejoindre leur foyer pour laisser leur place aux hommes. Aujourd'hui, les crédits spécifiques en faveur des femmes sont amputés comme jamais ils ne l'ont été.
Il n'y a, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, que deux explications possibles : soit vous estimez qu'il faut revenir au bon vieux temps, lorsque les femmes étaient au foyer et qu'aux termes du code civil elles devaient obéissance aux hommes, soit vous estimez, au contraire, que la parité est parfaitement atteinte puisqu'il n'y a plus besoin ni de ministère ni d'actions spécifiques. Laquelle de ces explications vous convient le mieux, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, les sénateurs du groupe du RDSE représentant le parti radical socialiste voteront contre ce budget. (MM. Autain et Mazars applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, assurer la défense de la santé publique, de l'action sociale et de la solidarité dans une conjoncture économique difficile, alors que les besoins s'accroissent et que la gestion du budget de l'Etat est nécessairement rigoureuse, constitue un exercice particulièrement délicat. La lutte contre l'exclusion et la protection des personnes vulnérables restent néanmoins et, à juste titre, inscrites parmi les priorités du Gouvernement.
C'est pourquoi tant les crédits destinés à la santé publique queceux qui sont alloués à l'action sociale et à la solidarité sont en augmentation par rapport à 1996.
Le budget de la santé publique et des services communs s'élève ainsi, pour 1997, à quelque 8 milliards de francs, soit une progression de 4,5 % si l'on tient compte du transfert au budget des services du Premier ministre des crédits de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie.
Quant au budget de l'action sociale et de la solidarité, il progresse de 3,7 % par rapport à l'an dernier et s'élève à un peu plus de 61 milliards de francs.
Dès lors, monsieur le secrétaire d'Etat, comment ne pas soutenir votre projet de budget ?
J'évoquerai, pour ma part, deux points qui me tiennent particulièrement à coeur.
Je commencerai par la politique en matière de lutte contre l'exclusion, que vous avez présentée, monsieur le secrétaire d'Etat, comme étant la première priorité assignée au budget de l'action sociale et de la solidarité. Le financement dont elle bénéficie le prouve : avec 28 milliards de francs, les crédits consacrés à la lutte contre l'exclusion progressent de près de 6 % et profitent principalement aux centres d'hébergement et de réadaptation sociale, les CHRS, dans lesquels seront créées l 000 places supplémentaires, et au revenu minimum d'insertion.
S'agissant plus particulièrement de celui-ci, les crédits consacrés à cette allocation augmentent de 1,2 milliard de francs par rapport à 1996 et atteignent 24,2 milliards de francs, soit une progression de 5,3 %. Ces moyens nouveaux tiennent compte de l'augmentation prévue du nombre des bénéficiaires et de la revalorisation de l'allocation.
En juin 1996, le nombre d'allocataires percevant le RMI avoisinait 994 000. Actuellement, si l'on prend en compte les membres du foyer de l'allocataire, ce sont plus de 1,8 million de personnes qui sont aidées par la prestation.
Depuis la création de celle-ci, le nombre de bénéficiaires a plus que doublé tandis que le montant de la dotation budgétaire de l'Etat a quadruplé, passant de 6 milliards de francs en 1989 à 24 milliards de francs aujourd'hui.
Néanmoins, la hausse des bénéficiaires du RMI s'est sensiblement ralentie à partir de 1995, ce qui explique la relative modération de l'évolution de la dotation prévue pour 1997.
Pour contenir plus efficacement l'augmentation des dépenses liées au revenu minimum d'insertion, il a été suggéré de refuser l'attribution de cette prestation aux demandeurs dont les parents ou le conjoint, voire le conjoint séparé ou l'ex-conjoint, ont des revenus « élevés » - cette notion reste à définir - afin de recourir à la solidarité familiale par la mise en oeuvre de l'obligation alimentaire prévue par la loi du 1er décembre 1988.
Un amendement accepté par la commission des finances et visant à réformer le mode d'attribution de cette allocation a donc été déposé à l'Assemblée nationale.
Par ailleurs, plusieurs parlementaires soutiennent l'introduction de l'obligation alimentaire dans le dispositif du RMI, certains l'assortissant d'une redéfinition de la notion de débiteur d'aliments.
Toutefois, les députés ont rejeté l'amendement et M. Alain Lamassoure, au nom du Gouvernement, s'est prononcé contre, jugeant préférable, comme M. Jacques Barrot, de ne pas réviser la loi.
J'adhère, pour ma part, entièrement à cette position du Gouvernement : s'il est vrai que des abus peuvent exister - on parle de certains parents fortunés laissant leurs enfants tributaires de la solidarité nationale - il est indispensable de garder à l'esprit que ces situations sont marginales et que l'adoption d'une telle mesure aurait pour seule conséquence d'accroître la précarité de certains allocataires. Celle-ci est d'ailleurs souvent due à une situation de rupture familiale et nombreux sont ceux qui renonceront à faire valoir leurs droits tant auprès de leur famille qu'auprès de l'Etat, se retrouvant encore plus démunis.
M. Guy Fischer. C'est vrai !
M. Bernard Seillier. Soit dit au passage, l'effectivité du versement des pensions alimentaires, pourtant judiciairement acquise, permettrait déjà de progresser vers une plus grande justice.
En outre, dans la pratique, l'obligation alimentaire ne joue que si une décision de justice a été rendue, ce qui pose incidemment le problème de la prise en charge des frais liés au procès et constitue une autre forme d'épreuve à surmonter.
Enfin, il paraît difficile de forcer la solidarité familiale si celle-ci ne s'exerce pas spontanément, car cela révèle une pathologie qui n'est que trop réelle.
Concrètement, la participation aux commissions locales d'insertion permet d'avoir une bonne connaissance des cas individuels et de les aider si on le souhaite. Mon expérience est, certes, liée à la réalité des départements ruraux, mais je crois que la véritable question réside dans la connaissance, l'accompagnement et le suivi personnalisé des bénéficiaires du RMI, et plus généralement de ceux qui sont en situation de grande pauvreté.
S'agissant d'un jeune, il est particulièrement important de connaître la qualité des relations qu'il entretient ou non avec sa famille ou son entourage social.
L'exclusion impose beaucoup plus, je le crois, un accompagnement personnalisé tel qu'il est pratiqué, par exemple, dans les missions locales qu'un arsenal juridique tendant à mettre en cause les familles qui sont, hélas ! plus souvent en situation de précarité que de prospérité. Des générations de bénéficiaires du RMI commencent à apparaître.
En outre, les familles ont une créance à l'égard de la société même lorsque certains de leurs enfants sont acculés à solliciter la solidarité nationale pour pouvoir vivre. La situation des familles nous conduit à mener plus une politique d'encouragement à exister, à se fonder, à se consolider qu'un rappel de ces charges même si elles sont appelées « obligations alimentaires ».
Je crains que cette idée d'une famille aisée qui enverrait son ou ses enfants émarger au RMI ne soit une vue de l'esprit qui conduise insidieusement une fois de plus, sans qu'on le cherche, à égratigner l'image de la famille dans la conscience collective.
Le RMI a été conçu comme un droit individuel conféré par l'Etat en contrepartie d'une démarche d'insertion, et il doit le rester.
Rien ne s'oppose, en revanche, à la recherche d'une meilleure gestion et d'une plus grande efficacité du dispositif, notamment en décentralisant son attribution et en mettant l'accent sur le volet insertion de son objectif. L'expérience des départements ruraux mérite d'être analysée de près parce qu'elle permet souvent de ne pas laisser le bénéficiaire du RMI seul avec lui-même.
Je souhaite mettre l'accent, en second lieu, sur la protection et la veille sanitaires.
La protection sanitaire participe, elle aussi, à la lutte contre l'exclusion. Elle comprend, en effet, les programmes et dispositifs en faveur de la santé des populations et vise à prendre en charge la santé des populations en situation précaire ou marginalisées.
Elle se traduit par des mesures nouvelles concernant, notamment, le programme d'accès à la santé des publics défavorisés, les programmes régionaux de santé, ainsi que la vaccination contre l'hépatite B de la population carcérale.
Ses crédits, d'un montant de 313 millions de francs, sont également en augmentation de 8 % par rapport à 1996.
Quant à la veille sanitaire, la progression inquiétante des maladies infectieuses, en particulier au cours de la dernière décennie, a rendu nécessaire le renforcement des mesures de surveillance et de la capacité à déclencher des alertes et des interventions épidémiologiques rapides, aussi bien en France qu'à l'échelon international.
Mais c'est surtout une véritable démarche globale engagée selon une méthodologie rigoureusement scientifique qui s'impose. La mission constituée au Sénat sur ce sujet devrait pouvoir apporter sa pierre à l'édifice que vous vous attachez vous-même à perfectionner, monsieur le secrétaire d'Etat.
La création, en 1992, du réseau national de santé publique répond à ce souci de surveillance et d'intervention rapide. Ce réseau constitue un support technique important de la politique de santé publique en matière de sécurité sanitaire et de prévention.
Les allocations budgétaires ont, à juste titre, pour objet d'accroître cet effort de vigilance.
L'effort engagé devra se poursuivre car, si la démarche est bonne, on est encore loin des moyens qui devront progressivement être ceux du réseau national de santé publique.
Bien que, globalement, les crédits consacrés aux programmes et dispositifs de veille sanitaire soient en très légère diminution de 0,1 % par rapport à 1996 - ils s'élèvent à presque 116 millions de francs - cette quasi-stabilité recouvre, en réalité, un redéploiement des moyens au profit du réseau national de santé publique, d'un montant de 7,3 millions de francs, ce qui représente une hausse avoisinant 50 %.
Pour conclure cette intervention, je souhaite rappeler que le budget des affaires sociales est l'un des volets de la politique de protection sanitaire et de lutte contre l'exclusion.
Celle-ci inclut plus globalement, d'une part, la première loi de financement de la sécurité sociale et, d'autre part, l'intégration, sous une forme à préciser - assez rapidement, je l'espère - des institutions sociales et médico-sociales dans un dispositif cohérent avec les autres volets de la politique sanitaire et sociale. Le projet de loi sur la cohésion sociale, annoncé par le Gouvernement et pour lequel l'actuelle loi de finances prévoit des anticipations budgétaires, viendra compléter l'édifice. Bien que notre débat d'aujourd'hui ne concerne pas ce texte, je me permettrai de regretter, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'assurance maladie universelle ne soit pas intégrée à ce projet de loi et fasse l'objet d'un texte séparé.
Cela dit, le groupe des Républicains et Indépendants juge votre budget tout à fait positif et le votera en attendant le prochain projet de loi sur la cohésion sociale. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. de Villepin.
M. Xavier de Villepin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, M. Cantegrit est parti ce soir pour le Gabon, où il effectue une mission officielle de représentation du Sénat. Il est actuellement dans l'avion qui le conduit à Libreville...
M. le président. Monsieur de Villepin, vous ne pouvez pas intervenir au nom de M. Cantegrit ! Vous devez parler en votre nom propre.
M. Xavier de Villepin. J'interviens tout de même en son nom, en vous priant de m'en excuser, monsieur le président. (Rires.)
M. le président. Vous créez un précédent qui posera des problèmes.
M. Xavier de Villepin. Vous savez combien M. Cantegrit est plus compétent que moi sur le sujet ! (Nouveaux rires.)
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous proposez aujourd'hui d'examiner votre projet de budget pour 1997. Celui-ci nous est présenté dans un contexte particulier, puisqu'il s'inscrit dans le cadre du plan de réforme de la sécurité sociale engagé par le Premier ministre voilà un an, et dans celui d'une grande réflexion sur l'avenir de la couverture sociale en France.
Les choses évoluent : plusieurs textes nous sont soumis, ou le seront prochainement ; je pense, en particulier, au financement de la sécurité sociale, au fonds de pension, à l'universalité de l'assurance maladie.
En tant que représentant des Français de l'étranger, il me paraît nécessaire, à ce stade de la réforme, de faire le point sur l'état de la couverture sociale de nos compatriotes expatriés, dont vous savez, monsieur le secrétaire d'Etat, combien ils sont attachés au système français de sécurité sociale.
Près de 1 700 000 Français vivent actuellement à l'étranger. La majorité d'entre eux bénéficient d'une protection sociale française ou équivalente en qualité.
En effet, les 810 000 Français qui résident au sein de l'Union européenne ou de l'association européenne de libre-échange, l'AELE, sont soumis aux régimes obligatoires de leurs pays de résidence, régimes qui sont par ailleurs coordonnés avec le nôtre.
Par ailleurs, un nombre non négligeable d'expatriés ont, en fait, le statut de « détaché ». Cela signifie que les entreprises françaises qui les emploient hors du territoire national pour une durée limitée - de trois à six ans en général - maintiennent, pour eux et leur famille, le régime métropolitain. Leur nombre est difficile à cerner, mais l'on peut parler raisonnablement d'environ 125 000 à 130 000 personnes.
Enfin, un nombre équivalent de Français - 125 000 - sont couverts par la caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger.
Beaucoup aussi ont pris les habitudes locales et bénéficient des systèmes locaux publics ou privés.
Seuls quelques milliers de nos compatriotes résidant à l'étranger, et non les deux tiers comme certains voudraient le faire croire, sont encore privés d'une couverture sociale à laquelle ils aspirent. Nous nous devons, monsieur le secrétaire d'Etat, de réfléchir aux moyens de leur donner satisfaction afin qu'aucun Français, quelque soit son lieu de résidence, n'en soit exclu.
Cette réflexion doit avoir pour cadre, me semble-t-il, la Caisse des Français de l'étranger, la CFE, que vous connaissez, monsieur le secrétaire d'Etat, puisque vous l'aviez inaugurée voilà quelques années alors qu'elle n'était pas encore autonome et s'appelait la caisse des expatriés.
Depuis, nous avons beaucoup progressé et nous avons su mettre en place un système unique au monde, me semble-t-il, à l'égard de nos expatriés.
Depuis lors, vos prédécesseurs au ministère des affaires sociales se sont félicités du fonctionnement de la Caisse des Français de l'étranger, dont M. Cantegrit préside le conseil d'administration.
Il faut dire que la CFE est très attentive aux besoins de ses assurés et qu'elle s'efforce d'y répondre du mieux possible, tout en maintenant des comptes équilibrés. C'est d'ailleurs grâce à une gestion saine et rigoureuse qu'elle a pu accomplir un effort extrêmement important en matière de justice sociale : baisse des cotisations, création d'une troisième catégorie, aides ponctuelles comme, par exemple, au moment de la dévaluation du franc CFA.
Les Français expatriés à titre individuel, si j'ose dire, apprécient ces efforts et la qualité du service qui leur est ainsi rendu dans la reconnaissance de leur situation particulière au sein de la sécurité sociale française.
Mais la CFE ne s'intéresse pas qu'aux particuliers ; elle participe également avec les entreprises au renforcement de la présence française à l'étranger souhaité tant par le Président de la République que par le président du Sénat et le Gouvernement. Elle l'a démontré à plusieurs reprises en prenant des mesures de diminution, voire d'exonération de cotisations à l'égard de nos entreprises exportatrices et « expatriatrices ».
Elle est, en effet, l'un de leurs partenaires privilégiés et contribue, à sa mesure, au redressement du marché de l'emploi en permettant un allégement des charges sociales des entreprises pour tout emploi créé à l'étranger et occupé par un jeune Français de moins de trente ans. C'est une mesure que votre ministère et celui de Mme Couderc envisagent d'ailleurs d'élargir.
La caisse est prête, une nouvelle fois, à soutenir les projets gouvernementaux. Mais nous ne devons pas oublier que, contrairement aux organismes du régime général, elle se trouve dans une situation de concurrence totale avec les assureurs privés et ne doit donc pas être pénalisée par rapport à ceux-ci.
La Caisse des Français de l'étranger est une caisse d'assurances volontaires. Certes, elle n'a pas la prétention d'être en tout point comparable aux caisses du régime obligatoire, mais elle sait qu'elle est encore perfectible, qu'elle peut encore mieux répondre aux aspirations de nos compatriotes et de nos entreprises.
Le nouveau conseil d'administration élu le 4 septembre dernier, et qui prendra ses fonctions lors de sa première réunion les 6 et 7 janvier prochain, sera conduit à vous faire un certain nombre de propositions dans ce sens. Un séminaire de réflexion, auquel seront associés les anciens administrateurs, clôturera ce conseil d'administration.
Il sera orienté autour de trois axes principaux : comment être plus performant à l'égard des Français expatriés afin que tous ceux qui le souhaitent puissent adhérer à la Caisse des Français de l'étranger ? Comment être plus performant à l'égard des entreprises expatriatrices afin de faciliter l'emploi à l'international ? Comment être encore plus rapide et plus disponible, bien que le personnel assure déjà une qualité de service remarquable ?
Les Français de l'étranger, en particulier les administrateurs de la CFE, sont attentifs à la réforme qui, peu à peu, se met en place sous votre égide, monsieur le secrétaire d'Etat, et lui apportent leur soutien. Je souhaite qu'il en soit de même en ce qui concerne les propositions que nous serons amenés à vous faire.
Un second point retient également leur attention. Il est d'actualité, puisque nous serons très prochainement appelés à nous prononcer dessus : il s'agit de la création des fonds de pension.
Ce projet est très suivi pas nos compatriotes car la retraite reste souvent pour eux un problème, bien qu'ils puissent bénéficier de pensions de vieillesse françaises, fondées sur le principe de la répartition.
Ainsi, les détachés, réputés avoir leur domicile en France, cotisent obligatoirement aux régimes français. Les expatriés, quant à eux, sont soumis, dans un certain nombre de pays, au régime local obligatoire. Mais ils ont également la faculté de s'assurer, à titre volontaire, au régime de vieillesse français.
Des possibilités de rachat de cotisations vieillesse existent également pour nos compatriotes, mais le décret du 19 mai 1992 a rendu leurs conditions financières beaucoup plus onéreuses. Par conséquent, nombreux sont ceux qui ne peuvent donner suite à de tels projets, dont le coût est aujourd'hui excessif.
Par ailleurs, la France est liée avec un certain nombre de pays par des conventions bilatérales qui coordonnent les régimes en appliquant, dans la plupart des cas, la règle de la « totalisation-proratisation ».
L'expérience montre que ces accords ne sont réellement appliqués et respectés que lorsqu'ils sont conclus avec les pays de niveau équivalent au nôtre, comme par exemple les pays européens.
En revanche, lorsqu'il s'agit d'accords conclus avec les pays africains, nos compatriotes rencontrent les plus grandes difficultés, non seulement pour obtenir le versement de leurs pensions, mais aussi, parfois, pour obtenir un simple document administratif des caisses locales.
Cette situation ayant été amplifiée par la dévaluation du franc CFA, une mission de l'Inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, s'est rendue dans plusieurs de ces pays à la demande du Premier ministre. Composée de représentants du ministère du travail et des affaires sociales, du ministère des affaires étrangères et du ministère de la coopération, elle a procédé à une évaluation de la protection vieillesse des Français expatriés dans les pays de la zone franc et a rendu son rapport au Premier ministre au mois de juillet 1996.
Il semble que, comme nous le pressentions déjà, la protection assurée par les régimes de retraite locaux soit très inégale et très incertaine. Dans l'état actuel de la réglementation, les expatriés éprouvent un certain nombre de difficultés à accéder à une protection complémentaire française. L'une des solutions préconisées serait alors le renforcement de la protection volontaire et complémentaire vieillesse offerte par le régime français.
Nous ne devrons pas perdre cette idée de vue au moment où vous nous présenterez le texte sur les fonds de pension.
Les Français de l'étranger sont intéressés par une structure qui leur proposerait des fonds de pension. Toutefois, il devra être tenu compte des contraintes inhérentes à leur situation particulière.
Je souhaite que, lorsque nous débattrons de la création des fonds de pension, les Français de l'étranger ne soient pas oubliés et que soient prévues dans les textes un certain nombre de mesures spécifiques. Cela nécessitera l'adaptation de certains articles, pour laquelle je me tiens à votre disposition.
Telles sont, monsieur le secrétaire d'Etat, les quelques réflexions que je souhaitais formuler sur l'état actuel de la protection sociale de nos expatriés. Ils souhaitent, et j'appuie totalement leur volonté, ne pas être exclus de la réforme engagée par le Gouvernement, comme cela a souvent été le cas dans le passé. Ils veulent être considérés comme des Français « normaux » dont la seule spécificité est de vivre hors du territoire national. Il nous faut malgré tout tenir compte de cette spécificité si nous voulons, ainsi que l'a exprimé à plusieurs reprises le Président de la République, renforcer notre expatriation et, par là même, la place de la France dans le monde.
Je terminerai mes propos par une requête : je forme le voeu très vif, monsieur le secrétaire d'Etat, que, dans l'emploi du temps chargé qui est le vôtre, vous installiez le nouveau conseil d'administration de la Caisse des Français de l'étranger qui prendra ses fonctions les 6 et 7 janvier prochain. Vos prédécesseurs l'avaient fait, et les administrateurs de la caisse, expatriés eux-mêmes, attachent la plus grande importance à ce contact privilégié qui leur permettra de vous exposer les grands axes de leurs projets.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous pouvez compter sur le soutien du groupe de l'Union centriste ainsi que sur celui des Français de l'étranger, que vous connaissez bien. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous avons examiné, voilà quelques instants, les conclusions de la commission mixte paritaire relatives au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1997. Aussi, nous allons discuter du budget de la santé publique, de l'action sociale et de la solidarité et du budget des affaires sociales d'une façon beaucoup plus limitée que les années précédentes.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez un bon budget pour 1997. Il s'élève à 69 milliards de francs et croît de plus de 2 milliards de francs, soit une progression supérieure à 3 %. C'est beaucoup. La progression est même plus importante sur quelques chapitres. En effet, certains d'entre eux augmentent de 6 %, voire plus, et je m'en réjouis. Il s'agit des crédits en faveur de la lutte contre l'exclusion et pour le renforcement de la cohésion sociale, et des crédits relatifs aux CHRS, les centres d'hébergement et de réadaptation sociale, qui nous avaient tellement inquiétés les années précédentes et pour lesquels nous avions été si sollicités par les associations qui les gèrent. Il s'agit aussi des crédits pour les sans-abri.
Je me réjouis aussi de la progression de 10 % des effectifs des assistantes sociales et des éducateurs. Là encore, l'effort est important et il sera ressenti par les professionnels.
Enfin, s'agissant des crédits spécialement réservés à la santé publique, je voudrais insister tout particulièrement, pour m'en féliciter, sur le fait que les dotations consacrées au réseau national de la santé publique augmentent de 50 %. Vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, parallèlement à vous, le Sénat est engagé dans une mission de réflexion sur la veille sanitaire et, surtout, sur la mise en réseau des moyens existants. Ces moyens sont très nombreux et très compétents, mais sont très éparpillés et il n'y a aucun échange entre les uns et les autres. Nul doute que le réseau national de la santé publique, lorsqu'il aura atteint sa vitesse de croisière, aura, au sein de la veille sanitaire, une place primordiale. Je me réjouis que, petit à petit, on lui en donne les moyens.
Je formulerai cependant une remarque sur ce tableau quasi idyllique. Je me réjouis, bien sûr, des efforts importants engagés dans la lutte contre la toxicomanie et le sida. Toutefois, sans vouloir faire de comptabilité morbide, je voudrais tout de même rappeler que 60 000 décès sont dus au cancer et 60 000 aux maladies cardio-vasculaires ou pulmonaires, dans lesquelles le tabac et l'alcool jouent un rôle considérable.
M. Lucien Neuwirth. C'est vrai !
M. Charles Descours. S'agissant de la toxicomanie et du sida, nous avons fait des efforts, vous avez fait des efforts, monsieur le secrétaire d'Etat, et vos prédécesseurs en avaient faits aussi. Je m'en réjouis car ces deux fléaux frappent des jeunes et des personnes connues. Cependant, essayons de faire abstraction de l'effet de mode et préoccupons-nous des causes essentielles de mortalité que sont les cancers liés au tabagisme et à l'alcoolisme. Il faut augmenter les crédits consacrés à la lutte contre l'alcoolisme et le tabagisme.
M. Alain Gournac. Tout à fait !
Mme Michelle Demessine. Effectivement !
M. Charles Descours. Si cela n'est pas fait, je n'exclus pas, puisque nous pouvons désormais influer sur le budget de la sécurité sociale, que le Parlement inscrive dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 - d'ailleurs, au détriment des conseils d'administration - des montants significatifs pour lutter contre ces deux fléaux.
J'ai toujours approuvé les augmentations des prix du tabac et de l'alcool décidées par tous les gouvernements. J'ai fait approuver par le Sénat la loi Evin visant, notamment, à limiter la publicité sur le tabac et l'alcool. Il faut toujours appliquer la règle des trois « P » - les prix, la publicité et la prévention. Si on a fait beaucoup pour les prix et un peu pour la publicité, en revanche, on n'a rien fait ou on n'a pas fait grand-chose pour la prévention,...
M. François Autain. Voilà !
M. Charles Descours. ... et ce quel que soit le Gouvernement. Ce que j'affirme aujourd'hui, je l'avais déjà dit à M. Evin.
Nous devons donc faire un effort en ce qui concerne la prévention. L'alcoolisme et le tabagisme sont, en effet, deux fléaux touchant désormais de plus en plus de jeunes.
Mme Michelle Demessine. Et de femmes !
M. Charles Descours. Je ne sais pas si les femmes sont de plus en plus nombreuses à boire. En tout cas, elles sont de plus en plus nombreuses à fumer.
Nous avons donc sur un taux de tabagisme qui baisse très peu un transfert vers les populations les plus jeunes. La publicité doit être faite d'une manière positive : on doit apprendre aux gens quel danger ils courent quant ils boivent ou lorsqu'ils fument d'une façon excessive.
Je pense que ces remarques pourraient inspirer votre prochain projet de budget, monsieur le secrétaire d'Etat. Dans le cas contraire, nous serions obligés d'inscrire des crédits dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998.
En tout cas, cette observation sur le financement de la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme mise à part, je considère que, compte tenu de ce que j'ai dit auparavant et de l'augmentaiton globale qu'il connaît, ce budget reste un excellent budget et c'est pourquoi je le voterai sans état d'âme. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Alain Gournac. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Autain.
M. François Autain. Monsieur le secrétaire d'Etat, le temps qui m'est imparti pour évoquer votre action m'oblige, pour faire court, à faire fort. (Sourires.) Je vous prie de m'en excuser.
A vous regarder agir, en effet, je ne peux m'empêcher de penser à ce jeu télévisé intitulé Des chiffres et des Lettres . En effet, quand vous parlez de politique de santé publique, vous n'avez jamais de mots assez longs, et lorsque vous la financez, vous n'avez jamais de chiffrage assez court.
M. Alain Gournac. Oh !
M. François Autain. J'aimerais le démontrer par quelques exemples, qu'ils touchent à la réforme des structures de l'administration sanitaire, aux interventions publiques prévues au titre IV, à la lutte contre les grands fléaux, ou encore à l'amélioration de la protection et de la sécurité sanitaires.
S'agissant d'abord des réformes de structures, je reprendrai à mon compte les excellentes observations du rapporteur pour avis M. Louis Boyer en ce qui concerne les investissements hospitaliers. Vous avez vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, reconnu, à l'Assemblée nationale, que le désengagement de l'Etat compromettrait la nécessaire modernisation des établissements, sans laquelle il n'y aura pas de restructuration hospitalière réussie, bien entendu dans le respect des objectifs de santé publique. Vous avez laissé entendre que l'assurance maladie devrait prendre le relais. Voulez-vous me dire, dans le contexte actuel, avec quels moyens ?
Je regrette également, et ce sera mon deuxième exemple, que les moyens accordés aux agences régionales de l'hospitalisation qui seront chargées de cette restructuration ne soient pas à la hauteur des objectifs qui leur sont assignés.
J'observe, enfin, que les moyens des services vont être réduits à la suite de la suppression de cent postes en 1997. Que sont devenues les ambitions affichées d'un renforcement sensible des postes d'encadrement pourtant si nécessaires à la mise en oeuvre des réformes ?
Quant aux interventions publiques, elles sont, elles aussi, en régression.
Le désengagement de l'Etat en matière de formation des professions paramédicales, qui ne s'est pas démenti depuis trois ans, va, hélas ! se poursuivre.
En effet, 46 millions de francs feront défaut aux écoles de formation des professions paramédicales par rapport à l'année dernière, alors que les besoins en personnel demeurent. Elles devront compenser cette réduction de crédits par une contribution financière demandée aux étudiants, pourtant peu fortunés et qui feront donc les frais de ce désengagement.
Il est paradoxal, par ailleurs, de constater la quasi-disparition des crédits destinés à la formation continue des professions paramédicales, alors que le plan « Juppé », très opportunément, la rend obligatoire pour les médecins.
S'agissant, ensuite, de la lutte contre les grands fléaux, les critiques, monsieur le secrétaire d'Etat, doivent se faire plus vives.
Je crois l'avoir déjà dit à l'occasion de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, vous ne pouvez pas faire croire à une vraie politique de santé publique quand, ayant augmenté très sensiblement les taxes sur les alcools et sur le tabac, les crédits consacrés à la prévention stagnent. Comme M. Charles Descours, je dirai qu'il ne s'agit pas d'une originalité du présent gouvernement.
Glaner quelques recettes supplémentaires pour la sécurité sociale, voilà donc, semble-t-il, votre seul objectif. La déception est encore plus grande quand on sait que, sur les 2 millions de francs consacrés à la prévention du tabagisme, la moitié va aux actions judiciaires entreprises par le bouillant conseil juridique du Comité national de lutte contre le tabagisme.
Comment ne pas évoquer, surtout, la navrante conclusion de l'affaire des « buvettes » ? Vous avez reçu au Sénat le soutien actif de notre groupe pour empêcher l'adoption de l'amendement des députés.
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. Nous n'avions pas le soutien du groupe socialiste à l'Assemblée nationale !
M. François Autain. Nous avons, une fois n'est pas coutume, fait front commun avec la majorité du Sénat contre les alliances contraires, mais de même nature, nouées à l'Assemblée nationale.
Tout cela pour aboutir à quoi ? A un décret, pris en plein mois d'août, qui n'honore pas ceux qui l'ont négocié puis signé.
S'agissant de la recherche contre le cancer, M. le rapporteur a excellement dit, reprenant à son compte les conclusions récentes d'un rapport de l'IGAS, que la multiplication des initiatives ne pouvait tenir lieu de politique globale de prévention et de prise en charge. Il faut absolument, monsieur le secrétaire d'Etat, fixer les objectifs et définir les moyens budgétaires permettant de les atteindre.
S'agissant des thérapies nouvelles offertes aux victimes du sida et qui, reconnaissons-le, donnent des résultats plutôt encourageants, je voudrais être sûr de la liberté de prescription des praticiens et de l'égalité du droit d'accès des patients.
Dans un autre domaine, dois-je vous rappeler les réactions très négatives que suscitent vos atermoiements dans le dépistage de la trisomie 21 dont vous voulez - contre toute logique - limiter la prise en charge aux femmes âgées de plus de trente-huit ans alors que l'on sait que la majorité des naissances présentant cette anomalie génétique survient chez les femmes plus jeunes ?
Signalons enfin qu'on ne trouve rien, dans votre projet de budget, en ce qui concerne la lutte contre la contamination par l'amiante, et plus généralement contre les pathologies évitables qu'avaient recensées dans son rapport le Haut Comité de la santé publique.
Le dernier volet de votre action, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est le renforcement de la sécurité sanitaire.
J'ai d'abord trouvé M. le rapporteur fort aimable pour juger de l'évolution des crédits attribués aux agences chargées du contrôle des produits. Les auditions auxquelles procède actuellement la mission sénatoriale montrent que les moyens de l'Agence du médicament, s'ils garantissent la sécurité sanitaire, méritent toutefois d'être encore renforcés pour permettre à cette agence d'être définitivement l'outil efficace, rapide dans ses interventions, que le Sénat avait voulu mettre en place. Comment ne pas souligner, en outre, la part croissante des taxes payées par l'industrie et le désengagement corrélatif de l'Etat qui, s'il se confirmait, pourrait faire peser à terme un soupçon sur l'indépendance de cette agence, compte tenu du fait que l'on pourrait lui reprocher d'avoir des liens financiers trop étroits avec l'industrie pharmaceutique ?
Quant aux crédits accordés à l'Agence du sang et à l'Etablissement français des greffes, force est de constater, au mieux, la stagnation et, au pire, compte tenu de l'évolution de leur mission, la diminution des moyens financiers qui leur sont alloués.
Je reprends, enfin, à mon compte les inquiétudes exprimées par le rapporteur en ce qui concerne l'avenir de l'Agence nationale d'évaluation, qui succédera bientôt à l'ANDEM : le montant des crédits qui lui sont alloués ne paraît pas, loin s'en faut, à la hauteur des missions qui lui sont confiées, d'autant que, si l'amendement que vous présentez à l'article 35 est adopté, les ressources vont être amputées de 25 %.
Décidément, si l'on mesure votre ambition réformatrice à l'aune des moyens dont disposent les instruments que vous avez créés pour la réaliser, c'est le scepticisme qui l'emporte.
Je relèverai un point de satisfaction cependant : l'augmentation sensible des crédits accordés au réseau national de santé publique de Saint-Maurice. Oserais-je toutefois rappeler que les CDC américains emploient 9 000 agents pour un budget de 10 milliards de dollars ? Avec quelques dizaines d'employés - très remarquables - on est loin du compte, vous en conviendrez.
D'une manière générale, monsieur le secrétaire d'Etat, le déplacement récent, auquel j'ai participé, de la mission sénatoriale aux Etats-Unis a fait apparaître la nécessité de fédérer les actions développées en vue de renforcer la veille sanitaire et la qualité du contrôle des produits destinés à l'homme. La mission sénatoriale, qui vous a auditionné mardi dernier, conclura prochainement ses travaux. Je sais que c'est un projet qui vous tient à coeur. Pourriez-vous cependant nous indiquer quelles sont vos intentions dans ce domaine, monsieur le secrétaire d'Etat ?
Telles sont, très rapidement exposées, les quelques réflexions que m'inspire la politique de santé du Gouvernement.
Vous me permettrez, pour conclure, d'observer qu'il est bien difficile de réfléchir sur une politique qui n'est pas définie, ou qui est tout au moins incomplètement définie.
Comme je l'ai déjà dit voilà quelques semaines, vous n'avez pas permis à la représentation nationale de débattre de cette définition.
La conférence nationale de santé doit être très rapidement le lieu privilégié de la préparation d'un tel débat. Le débat doit permettre d'exercer les choix et de définir les orientations.
Vous en conviendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, beaucoup de chemin reste à faire pour atteindre cet objectif.
Telles sont toutes les raisons pour lesquelles les membres du groupe socialiste ne voteront pas les crédits consacrés pour 1997 à la politique de santé publique. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, M. Barrot déclarait, le 28 octobre dernier à l'Assemblée nationale, que les priorités de son budget en matière d'action sociale étaient « la lutte contre l'exclusion et l'accentuation de l'effort en faveur des handicapés ».
Nous aurons l'occasion, au cours de la discussion, d'aborder les crédits consacrés aux handicapés, et je concentrerai ma courte intervention sur la lutte contre l'exclusion.
Faut-il rappeler que la lutte contre la « fracture sociale » était le thème majeur de M. Jacques Chirac, candidat à l'élection présidentielle ?
Force nous est de constater que, en la matière, le bilan est catastrophique. Le nombre de bénéficiaires du RMI a augmenté de 5 % en un an, et il a doublé en huit ans.
Aujourd'hui, sans doute, 12 millions de personnes sont touchées par la pauvreté et une famille sur quatre est frappée par le chômage. Selon l'INSEE, le nombre de jeunes en situation de grande pauvreté a doublé en dix ans.
Tout l'éventail social est concerné. Ainsi, les jeunes de moins de trente ans sont de plus en plus nombreux à accéder au RMI : 43 % des nouveaux bénéficiaires ont moins de vingt-neuf ans, et parmi eux figurent des jeunes diplômés, voire très diplômés - 37 % ont un diplôme supérieur au bac - qu'un BTS, une maîtrise universitaire, un doctorat ou un diplôme d'ingénieur ne protègent plus du chômage.
Tous sont victimes d'une politique - votre politique et celle du gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le secrétaire d'Etat - qui privilégie la finance au détriment de la production et des dépenses sociales, une politique qui étend la précarité, les inégalités sociales, qui casse les acquis et les droits sociaux.
Comment s'étonner de l'exclusion de l'accès aux soins d'un nombre toujours plus grand de personnes quand on impose une politique de rationnement des soins, comme vous le faites avec le plan Juppé ?
Comment s'étonner que l'accès au logement soit de plus en plus difficile quand on sacrifie la construction de logements sociaux, quand on baisse le pouvoir d'achat des aides au logement et qu'on relève les plafonds pour l'APL ?
Comment s'étonner que de plus en plus de personnes, notamment des jeunes, soient exclues du monde du travail quand on privilégie des formes d'activité qui déstabilisent l'emploi - je pense à la multiplication des emplois précaires type contrat emploi-solidarité, des contrats à durée déterminée et du temps partiel - quand de plus en plus de chômeurs ne touchent aucune allocation ?
Je parlais de l'augmentation du nombre de jeunes bénéficiaires du RMI : ils représentent aujourd'hui un quart des allocataires. Mais la situation est dramatique pour les jeunes de moins de vingt-cinq ans qui, donc, ne peuvent en bénéficier. On estime ainsi que 300 000 jeunes de treize à vingt et un ans sont en réel danger d'exclusion, et que 80 000 d'entre eux sont proches de la marginalisation.
C'est pourquoi il est urgent, monsieur le secrétaire d'Etat, de revaloriser significativement le montant du RMI et d'en ouvrir l'accès aux jeunes de moins de vingt-cinq ans connaissant des problèmes d'insertion particulièrement importants.
Toute personne à la recherche d'un emploi devrait bénéficier gratuitement de stages dispensés par des organismes compétents.
Si, donc, on ne peut se réjouir de l'augmentation d'un budget qui marque, en fait, la progression de la pauvreté, il ne faudrait pas oublier toutes les charges dont l'Etat laisse le poids aux collectivités locales, lesquelles se retrouvent frapppées de plein par l'accroissement de la pauvreté.
Faire reculer l'exclusion exigerait d'autres moyens que ceux qui sont dégagés. Mais ce n'est pas le choix que le Gouvernement fait, ainsi que les derniers débats sur le projet de loi de finances nous l'ont bien montré : il propose en effet l'allégement de l'impôt sur les grandes fortunes pour un millier de contribuables !
Quelle indécence alors que, selon le Secours catholique, une personne sur cinq, parmi celles que cette association a rencontrées, dispose de 30 francs ou moins par jour !
Nous approchons des fêtes de fin d'année. De partout vont scintiller les lumières et les paillettes d'un moment privilégié de joie et de retrouvailles dans les familles.
Les enfants des familles en difficulté ont droit aussi à leur part de rêve. C'est pourquoi le Gouvernement s'honorerait, comme l'a proposé Robert Hue en s'adressant à Alain Juppé, notre Premier ministre, d'attribuer, sous forme de prime de Noël, les 500 francs qui ont fait défaut à la prime de rentrée scolaire et qui continuent de manquer.
M. François Autain. Bonne idée !
Mme Michelle Demessine. Au contraire des orientations du projet de loi de finances pour 1997, un plan d'urgence pour la pauvreté exigerait un doublement de l'impôt sur la fortune.
Notre conception de la société est radicalement opposée à la vôtre, qui est celle d'une société où l'argent règne en maître.
C'est aussi parce que nous refusons la perspective d'une société toujours plus dure pour les faibles et toujours plus clémente pour les tenants du capital que nous rejetons vos orientations en matière d'action sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, chaque année, la discussion du rapport budgétaire concernant les crédits du ministère de la santé permettait d'évoquer les dépenses de l'assurance maladie et leur évolution, ainsi que les actions propres du ministère en matière de santé publique ou d'équipements hospitaliers, par exemple.
Désormais, c'est lors du débat sur la loi de financement de la sécurité sociale que le Parlement doit se prononcer sur les « conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale et sur les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale ».
Voilà quelques semaines, à l'occasion de ce débat, à cette même tribune, j'avais regretté, comme plusieurs de nos collègues, que « les orientations de la politique de santé » soient à peine évoquées dans un texte essentiellement comptable. Et, comme les années passées, nous retrouvons dans ce projet de loi de finances l'exposé des orientations politiques que vous nous proposez, monsieur le secrétaire d'Etat.
Nul doute qu'en recourant au « copié-collé », pour reprendre une expression d'informaticien, en inscrivant ces objectifs dans la loi de financement de la sécurité sociale, vous auriez amélioré « la lisibilité » des deux textes, vous auriez mieux satisfait à l'esprit de la réforme de la sécurité sociale et aux attentes du Parlement, et vous auriez prévenu les critiques, justifiées cette année - mais cette année seulement - de la commission des finances, exprimées par certains de ses membres dénonçant, à travers cette double démarche budgétaire, « un système ingérable ».
Comme l'a dit en réponse le ministre délégué au budget, « cette année, nous essuyons les plâtres ». Nul doute que le Gouvernement fera mieux l'an prochain !
Mon intervention portera sur les priorités sur lesquelles le Gouvernement propose de concentrer les moyens, sur la démographie médicale et les évolutions contradictoires qu'elle laisse apparaître, sur la sécurité et la veille sanitaire.
En matière de renforcement de la lutte contre les fléaux sanitaires et les dépendances, je suis amené à reprendre l'interrogation que plusieurs de nos collègues ont exprimée encore à l'instant et que j'avais formulée l'an dernier : sur quels critères de santé s'appuient les choix financiers que vous avez l'intention d'arrêter ?
Toutes les études épidémiologiques, les rapports du Haut comité de santé publique, les conclusions des conférences régionales et nationale de santé soulignent le fait que la France connaît la mortalité prématurée la plus élevée d'Europe. Le premier objectif devrait donc consister à rattraper notre retard, d'autant que les facteurs en sont parfaitement connus, à savoir, au premier chef, le tabac, l'alcool, les pathologies cardiovasculaires et le cancer.
Or il n'y a aucune corrélation entre les dotations financières et ces diverses pathologies. Plusieurs orateurs se sont exprimés sur ce point, et je ne souhaite pas m'y attarder plus longtemps.
Je n'irai pas non plus jusqu'à reprendre l'expression un peu cruelle du rapporteur spécial de l'Assemblée nationale, qui a parlé de « hiérarchie de l'audimat ».
Beaucoup d'entre nous gardent le souvenir de la discussion épique qui s'est instaurée, lors du débat sur le dernier projet de loi portant diverses mesures d'ordre sanitaire, social et statutaire, le DMOSSS, dont j'étais le rapporteur devant la Haute assemblée, à propos de l'amendement « buvettes ».
Plusieurs orateurs étant intervenus pour regretter les conditions dans lesquelles un décret paru dans le courant de l'été avait permis de déroger et, par là même, d'aller à l'encontre de la volonté exprimée par la Haute Assemblée, je ne développerai pas mon argumentation sur ce point.
Cependant, je ne peux pas faire l'impasse sur la demande exprimée tout récemment par le Haut comité de santé publique quant à un plan national de lutte contre les comportements à risques liés à l'alcool. Quelles sont vos intentions à ce sujet, monsieur le secrétaire d'Etat ?
La démographie médicale, le développement de l'offre de soins sont considérés comme des facteurs d'accroissement des dépenses de santé et de disparités régionales, et les conclusions de la mission confiée à Dominique Coudreau seront très attendues.
Outre le fait qu'il ne faudra sans doute plus tarder à infléchir le numerus clausus pour l'entrée dans les facultés de médecine, car la « décrue » démographique s'amorcera avant dix ans, les mesures annoncées par le Premier ministre dans sa déclaration du 15 novembre tardent à se concrétiser : « Des incitations à la réorientation d'un nombre significatif de médecins de ville vers la médecine préventive en milieu scolaire ou au travail seront instituées », avait dit M. Juppé.
Cette intention est louable, compte tenu de la pénurie médicale régnant dans ces domaines. Mais comment expliquer alors que le projet de loi de finances pour 1997 ne comporte aucune mesure nouvelle pour la médecine scolaire ?
Comment expliquer aussi la sous-médicalisation des hôpitaux publics, dénoncée à juste titre par l'excellent rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, M. Louis Boyer, et dont la seule réponse réside dans l'amélioration du statut des praticiens hospitaliers ?
Et comment expliquer enfin que la situation des médecins à diplôme étranger n'ait toujours pas été correctement réglée depuis la loi du 4 février 1995 ?
Plusieurs de mes collègues, dont M. Descours, se sont exprimés sur la question de la sécurité sanitaire. Ils ont notamment fait état de l'avancement des travaux de la mission sénatoriale, lesquels nous ont permis à la fois de constater le bon fonctionnement des structures existantes et de relever quelques lacunes. En liaison étroite avec vous-même et votre cabinet, monsieur le secrétaire d'Etat, il nous appartiendra d'étudier les conditions dans lesquelles ces dernières peuvent être comblées.
Monsieur le secrétaire d'Etat, tenant compte du souci de rigueur qui marque le projet de loi de finances pour 1997, les membres du groupe de l'Union centriste considèrent que la santé « ne s'en tire pas trop mal ». C'est la raison pour laquelle ils voteront votre projet de budget. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, deux ans après le début de nos travaux sur la prise en charge de la douleur, je pense nécessaire de dresser rapidement un premier bilan, et surtout de remercier M. le secrétaire d'Etat des mesures qu'il a annoncées le 21 novembre dernier.
En effet, tant qu'un enfant, une personne âgée, bref, un malade souffrira alors que sa souffrance aurait pu être évitée, notre travail ne sera pas achevé. Mes chers collègues, publier un rapport, faire des propositions au Gouvernement, voter une loi, dégager des crédits, c'est bien. Mais il nous faut voir si la loi est appliquée, si les propositions sont suivies d'effet et si l'argent a été bien employé.
Nous allons donc examiner point par point ces différents aspects.
Premier point : les mentalités ont évolué dans le bon sens.
Si la prise en charge de la douleur est longtemps restée insuffisante dans notre pays, c'est, en grande partie, en raison d'une insuffisante prise de conscience de la légitimité du combat contre la douleur. Celle-ci concernait non seulement les médecins et les équipes soignantes, mais aussi les malades et leur famille.
Les auditions publiques de la commission des affaires sociales et la publication du rapport ont eu un important retentissement médiatique, qui était indispensable pour faire évoluer le sujet. Grâce aux auditions publiques, la position des églises, notamment, est mieux connue de tous. On continue d'ailleurs à demander régulièrement le rapport, et ces demandes émanent principalement de médecins, d'hôpitaux, d'étudiants ou de journalistes qui préparent des articles.
Le code de déontologie médicale a été modifié.
Il est cependant important que nous continuions à travailler et à alimenter ainsi cette évolution des mentalités.
Deuxième point : la loi que nous avons votée couvre désormais l'ensemble des établissements de santé et des établissements médico-sociaux. Mais, à ce jour, monsieur le secrétaire d'Etat, nous n'avons pas d'informations précises sur le degré d'application de la loi, même si nous savons que les choses ont bien progressé.
Il serait pourtant facile de mesurer cette application, au moins dans les hôpitaux, grâce aux directions départementales de l'action sanitaire et sociale et, désormais, aux agences régionales de l'hospitalisation, qui ont connaissance des projets d'établissement.
C'est pourquoi je voudrais vous formuler une première demande : il faudrait que les services déconcentrés de l'Etat recensent les hôpitaux qui ont fait quelque chose et ceux qui n'ont rien fait.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Lucien Neuwirth. Nous vous suggérons également de rédiger une circulaire d'application qui serait distribuée à tous les services déconcentrés et aux différents établissements. Cette circulaire préciserait les obligations légales et énumérerait des exemples de moyens pour les satisfaire.
D'ores et déjà - et nous nous en félicitons - les instructions ministérielles annuelles relatives à l'évolution des dépenses des établissements sanitaires sous compétence tarifaire de l'Etat ont retenu, en 1995 et 1996, le traitement de la douleur au titre des priorités en matière de santé et d'organisation des soins.
Troisième point : la mise en oeuvre de nos propositions concernant la formation des médecins et les durées de prescription des morphiniques a été rapide.
D'une part, la réforme du deuxième cycle des études médicales prévoit que les futurs médecins devront obligatoirement participer à un séminaire consacré à la douleur et aux soins palliatifs, ce qui est très important pour l'avenir, même si un problème demeure néanmoins concernant les concours d'internat.
D'autre part, la durée maximale de prescription de la morphine orale a été doublée, comme nous le souhaitions, ce qui constitue une source de plus grand confort pour les patients. Il reste à poursuivre l'entreprise pour d'autres morphiniques.
Quatrième point : les crédits que nous avions obtenus sur la réserve parlementaire, à titre exceptionnel et pour engager la réforme, ont été utilisés pour former les médecins : les 5 millions de francs que nous avions débloqués ont été distribués, à la suite d'un appel à candidature auprès des centres hospitaliers et universitaires, pour financer des actions de formation à la lutte contre la douleur ouvertes aux professionnels des établissements de santé, mais aussi aux praticiens libéraux de la zone d'attraction de l'établissement.
Il appartient maintenant à l'Etat de prendre le relais et je proposerai tout à l'heure un amendement destiné à dégager 2,5 millions de francs pour des actions de formation continue concernant le traitement de la douleur destinées aux médecins et aux personnels paramédicaux.
Cinquième point : le dossier « carnet à souches » était malheureusement bloqué, mais vous nous avez annoncé, le 21 novembre, une prochaine modernisation de ce carnet. Elle s'avérait indispensable.
Comme nous l'avions dit dans notre rapport, nous estimons que la généralisation des cartes d'assuré social permettra même de supprimer le carnet à souches.
Sixième point : les ordonnances du plan Juppé comprennent d'intéressantes dispositions.
Ainsi, l'ordonnance portant réforme hospitalière prévoit que la qualité des soins constitue un objectif pour tous les établissements de santé. Elle les oblige à évaluer cette qualité et indique qu'il est tenu compte de cette évaluation dans la procédure d'accréditation des établissements.
Dès que nous en aurons l'occasion, nous déposerons un amendement visant à préciser, dans le texte de l'ordonnance, que la prise en charge de la douleur des patients entre bien dans le champ de la qualité des soins, ce qui nous paraît constituer une évidence.
Si une telle disposition était adoptée, l'évaluation de la prise en charge de la douleur serait un élément d'appréciation pour l'accréditation, et aussi, je l'espère, pour l'inscription à la nomenclature dans l'avenir.
Septième et dernier point : il faudrait, monsieur le secrétaire d'Etat, affecter des postes de praticien hospitalier à la prise en charge de la douleur, car cela est particulièrement attendu.
En effet, vous le savez, des médecins se sont investis, dans les hôpitaux et en ville, afin d'améliorer la prise en charge de la douleur. Ces pionniers, qui ont tellement fait avancer les choses, nous ne devons pas les laisser seuls. Il faut leur faire comprendre que la lutte contre la douleur fait partie des priorités gouvernementales en matière de santé. Compte tenu de l'ampleur des besoins et malgré le contexte de rigueur budgétaire, j'estime qu'il est possible d'affecter à la lutte contre la douleur quelques postes de praticien hospitalier aujourd'hui vacants.
Au moment où notre ambition commune, mes chers collègues, est de faire entrer une dimension qualitative dans notre politique de la santé, serait-il possible un seul instant de laisser de côté le traitement de la douleur dans ses multiples expressions ?
J'ai eu l'occasion de le dire, un courant puissant s'est mis en mouvement dans notre pays en faveur de la prise en charge de la douleur et du développement des soins palliatifs ; cette évolution nécessaire dans les mentalités mérite le soutien du Gouvernement et du pays tout entier. Le Sénat unanime a montré la voie ; à vous, monsieur le secrétaire d'Etat, d'en assurer la réussite ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Mazars.
M. Georges Mazars. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, réduire la fracture sociale, tel était le fil conducteur de la campagne de M. Chirac, voilà un peu plus d'un an et demi. C'est donc à la lumière de cet objectif, que nous partageons tous, que nous devons examiner le projet de loi de finances pour 1997, et singulièrement les crédits que l'on nous propose d'affecter au ministère du travail et des affaires sociales, en particulier dans les domaines de la santé publique et de l'action sociale.
RMI, avenir des objecteurs de conscience, aide à domicile, financement de la loi d'orientation sur la cohésion sociale sont autant de domaines où les mesures qui nous sont proposées tendent plus, selon moi, à élargir la fracture qu'à la réduire.
Le RMI voit ses crédits augmenter de plus de 5 % par rapport au budget de 1996. Cela ne pose pas en soi problème puisque l'augmentation est fonction de celle du nombre des bénéficiaires.
Le Gouvernement donne cependant moins de publicité à sa volonté d'économiser 500 millions de francs en - je cite la lettre de cadrage adressée au ministre du travail et des affaires sociales - « renforçant les contrôles et en mettant en oeuvre l'obligation alimentaire et la récupération sur succession ».
La volonté du législateur, unanimement exprimée par la représentation nationale en 1988, a limité l'obligation alimentaire à quelques situations précaires. Prévoir que les ressources des descendants ou ascendants pourront être prises en compte pour l'attribution du RMI, c'est, à l'évidence, contribuer à une diminution purement artificielle du nombre des bénéficiaires. En effet, beaucoup de personnes en situation de rupture familiale et dont la famille ne connaît pas une situation précaire préféreront sans doute renoncer au bénéfice du RMI plutôt que de dépendre à nouveau de leur famille.
L'argent public économisé par ce biais ne me semble pas digne de notre responsabilité.
Les moins de trente ans constituent un quart des bénéficiaires du RMI ; la mise en oeuvre de cette mesure, qui les toucherait donc en priorité, ferait d'eux des mineurs économiques, et donc des citoyens de seconde zone, ce qui contribuerait à élargir la fracture sociale et son corollaire, la fracture civique.
La mesure envisagée suscite de ma part deux réflexions.
En premier lieu, comment se ferait le contrôle des revenus des ascendants ou descendants dans le respect de la législation « Informatique et libertés » ? Le RMI est assurément un dispositif perfectible, mais il semble clair que c'est plutôt sur le volet de l'insertion qu'il faudrait faire porter nos efforts.
En second lieu, on s'est peu préoccupé pour l'instant des effets qu'aurait la suppression du service national sur le fonctionnement des nombreuses associations qui vivent grâce aux objecteurs de conscience. Or le projet de loi de finances prévoit une baisse de 30 % des crédits consacrés aux appelés qui ont choisi cette forme de service national. Il est nécessaire que le Gouvernement nous apporte des éclaircissements sur cette question, car les prises de position de deux de ses membres me semblent pour le moins contradictoires. En effet, à l'Assemblée nationale, M. Barrot a déclaré que la baisse des crédits en question était justifiée par la fin de l'objection de conscience en 1997, tandis que M. Millon a annoncé récemment que cette possibilité resterait ouverte aux jeunes au-delà de la suppression du service national obligatoire.
Permettez-moi simplement de demander quel sens aura l'objection au fait de porter les armes pour des raisons liées aux convictions personnelles lorsque aura disparu la notion même de l'année due par les jeunes au service de la nation. Il est indispensable que nous ayons rapidement des précisions sur ce point et que, dans tous les cas de figure, les associations qui bénéficient actuellement de la compétence des objecteurs soient assurées de pouvoir continuer à fonctionner dans des conditions au moins aussi favorables que celles qui existent aujourd'hui. Cela a une importance toute particulière pour les associations qui participent, d'une manière ou d'une autre, à la lutte contre l'exclusion.
Les crédits pour la formation des intervenants de l'aide à domicile subissent une baisse de près de 80 %. En ce qui concerne la qualification de ces professionnels, cela contribue à la dévalorisation des diplômes reconnus et à l'éclosion de formations fantaisistes, qui n'offrent aucune garantie aux personnes bénéficiaires de cette aide. De plus, cette déqualification entraîne une précarisation des salariés qui contribuent à un service public. On se situe aux antipodes des recommandations du Conseil supérieur du travail social, qui tendaient à considérer désormais l'aide à domicile comme partie intégrante du travail social.
Par ailleurs, 470 millions de francs sont inscrits en mesures exceptionnelles pour la mise en oeuvre du projet de loi d'orientation relatif au renforcement de la cohésion sociale. Mais cette somme provient des économies faites dans le budget du travail sur l'allocation de solidarité spécifique pour les chômeurs en fin de droits. Cette loi, faute de moyens financiers supplémentaires, risque de se réduire comme peau de chagrin et de n'être qu'un texte d'affichage d'une mesure qui serait de surcroît rendue possible par des économies faites au détriment des plus modestes.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera contre le projet de budget du ministère des affaires sociales.
Enfin, je voudrais profiter de cette discussion pour soulever un problème qu'il nous appartient à nous seuls, mes chers collègues, de régler.
Nous votons des mesures en faveur de l'accessibilité des bâtiments aux personnes handicapées. Or j'ai pu constater concrètement, la semaine dernière, que le Palais du Luxembourg ne comportait aucun aménagement permettant une réelle accessibilité aux personnes handicapées. Ces dernières subissent, de ce fait, une discrimination que je trouve, pour ma part, intolérable. Il est indispensable et urgent que nous trouvions rapidement les crédits nécessaires aux travaux qui s'imposent.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Vous avez raison !
M. le président. La parole est à M. Lagourgue.
M. Pierre Lagourgue. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je serai très bref, compte tenu du temps qui m'est imparti.
Je tiens, à l'occasion de l'examen du projet de budget consacré aux affaires sociales, à attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat, sur le niveau de la pauvreté dans les départements d'outre-mer, qui reste très élevé.
En effet, on recense aujourd'hui près de 109 000 bénéficiaires du RMI dans les DOM, dont 50 000 dans mon département, la Réunion ; si l'on compte également les familles, c'est-à-dire les personnes à la charge du RMIste, ce sont 16 % de la population des DOM qui sont concernés par le RMI.
Certes, votre projet de budget, monsieur le secrétaire d'Etat, prévoit, par rapport à l'an dernier, une augmentation des crédits affectés au RMI de plus de 1,2 milliard de francs pour l'ensemble de la France, dont 10 % seulement, hélas ! seront consacrés à l'outre-mer. Cet effort remarquable mérite d'être souligné, même s'il reflète une réalité qui voit croître sans cesse le nombre des exclus.
Dans ces conditions, comment ne pas repenser le RMI pour en faire un véritable outil vers l'insertion, une véritable prestation d'activité ? Car, huit ans après son instauration, le bilan du RMI n'est pas satisfaisant en termes d'éradication de l'exclusion.
Force est de constater que les programmes d'action engagés outre-mer en faveur de l'insertion ne répondent pas à notre attente : ainsi, à ce jour, à peine 5 000 contrats d'insertion par l'activité ont été signés sur les quelques 109 000 allocataires du RMI que comptent les DOM, alors que l'objectif du Gouvernement était fixé à 10 400 contrats pour la fin de l'année 1996 !
Il est facile d'ironiser en disant que le RMI s'est, au fil des ans, transformé en RMG, c'est-à-dire en revenu minimum garanti.
Faisons en sorte qu'il devienne une aide et une incitation à l'emploi, pour donner une nouvelle dynamique à la politique d'insertion. Passons d'une logique d'assistance à une logique de remise au travail, en offrant au RMIste la possibilité d'obtenir un emploi dans tous les secteurs d'activité y compris le secteur privé.
Les modalités du dispositif que je suggère seront, certes, à étudier en détail, mais on pourrait envisager que l'employeur ne supporte que la différence entre l'allocation et le salaire, à charge pour lui, comme pour le RMIste, de payer les cotisations sociales afférentes, ce qui contribuerait à diminuer le déficit de la sécurité sociale. Le dispositif serait limité dans le temps et l'employeur serait encouragé à transformer ce contrat en un véritable contrat de travail.
Inciter davantage le RMIste à s'insérer dans le monde du travail pour retrouver sa dignité, inciter davantage l'entreprise ou l'association à faire appel à un RMIste, tels sont les objectifs d'une expérience qu'il faut tenter, car il est insupportable de voir une partie de la population - les jeunes surtout - oisive, sans occupation, ne sachant que faire pour passer le temps, et tentée par la délinquance.
Ce débat a d'ailleurs déjà été ouvert, notamment à l'occasion de la tenue des assises de l'égalité sociale et du développement de l'outre-mer au mois de février dernier, ainsi qu'à l'Assemblée nationale, par certains de nos collègues parlementaires.
Les départements d'outre-mer ayant déjà été le terrain d'expérimentation pour le contrat d'accès à l'emploi, qui a été, par la suite, institué en métropole sous le nom de contrat initiative - emploi, le CIE, pourquoi ne pas faire de même avec le RMI ?
Nous attendons, pour le début de l'an prochain, un projet de loi de cohésion sociale destiné à résorber la fracture sociale et à lutter contre l'exclusion. Ne serait-ce pas là une opportunité à saisir ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, je sais que vous êtes particulièrement attentif à la situation économique et sociale difficile des départements d'outre-mer. C'est pourquoi je vous renouvelle ma confiance en approuvant votre projet du budget. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'ai souhaité intervenir ce soir sur un sujet qui continue de me tenir à coeur, les personnes handicapées, même si je ne suis plus rapporteur pour avis, tâche enrichissante que j'ai assumée pendant quatre ans. Je remercie d'ailleurs notre collègue M. Jean Chérioux d'y avoir fait allusion.
Souhaitant porter un regard empreint d'humanité et d'espoir, j'ai articulé mon propos autour de quatre axes.
Il m'a semblé, d'abord, nécessaire de rappeler que l'insertion des enfants handicapés dans le milieu éducatif devait se faire le plus tôt possible, ce qui n'est pas facile. Or, à cet égard, les progrès accomplis semblent insuffisants car il n'y a pas assez d'instituteurs spécialisés, et je le regrette.
De plus, il m'a toujours semblé que la puissance publique devait mener de manière égale une politique en faveur de ceux qui peuvent travailler et de ceux qui ne peuvent le faire, même si cela est difficile aujourd'hui ; le ministre de la fonction publique en a d'ailleurs parlé tout à l'heure pour l'embauche de personnes handicapées.
Or, à cet égard, le transfert du financement de la garantie de ressources pour les personnes handicapées travaillant en milieu ordinaire du budget de l'Etat à l'AGEFIPH, par le biais de l'article 97 du présent projet de loi de finances, me conduit à poser une question : ne peut-on craindre, de ce point de vue, un certain désengagement de l'Etat ? J'aimerais, monsieur le ministre, que vous me rassuriez sur ce point ainsi que sur deux autres.
Tout d'abord, le temps n'est plus de la montée en charge de la loi de 1987, où l'AGEFIPH voyait croître ses excédents. Il ne faudrait pas que sa situation financière soit ménacée à terme par des transferts de charges. Ensuite, c'est le statut même de l'AGEFIPH - c'est une association - qui peut paraître désormais insuffisant dans la mesure où celle-ci est investie d'un rôle d'opérateur public.
Mais ces interrogations ne doivent pas faire oublier que, compte tenu du contexte budgétaire difficile - tout le monde l'a dit - les dispositions en faveur des handicapés qui figurent dans ce projet de budget s'avèrent, dans l'ensemble, favorables, avec la création de 500 places d'ateliers protégés et de 2 000 places de CAT.
Cet effort est d'autant plus notable que, s'agissant des CAT, est appliquée la vérité des prix. Ainsi, le coût d'une place est estimé à 67 500 francs au lieu de 55 000 francs l'an passé.
Parallèlement, les crédits de fonctionnement des CAT déjà existants - c'était également très important - sont accrus.
S'agissant des crédits de tutelle et de curatelle, ils enregistrent une croissance de plus de 17 %, ce qui est tout à fait significatif.
Enfin, l'allocation aux adultes handicapés augmente de 7,2 %, atteignant, pour 1997, 22,26 milliards de francs, ce qui prouve, une fois encore, que les dispositions de la loi de finances pour 1994, contre lesquelles je m'était élevé, ont eu un caractère inopérant.
Au-delà du strict plan budgétaire, 1996 a été une année notable pour les handicapés puisqu'une proposition de loi sur l'autisme - sujet très difficile - a été discutée et que des textes réglementaires fort importants sont intervenus, concrétisant ainsi les efforts des années passées. Il s'agit notamment de la circulaire du 4 juillet 1996 sur la prise en charge médico-sociale et la réinsertion sociale et professionnelle des traumatisés crâniens, et de la circulaire du 5 juillet 1996 relative au recensement des besoins des personnes qui peuvent relever de handicaps rares.
Nous avançons ainsi, comme je l'avais souhaité les années passées, sur le chemin d'une meilleure connaissance et d'une prise en charge mieux adaptée du handicap et des handicapés.
C'est donc sur cette note d'espoir, monsieur le secrétaire d'Etat, valeur qui manque tant à notre pays, que je voterai les crédits du budget des affaires sociales pour 1997 (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le secrétaire d'Etat, après ce long débat sur la santé, et avant que vous répondiez aux orateurs, je voudrais vous faire part de deux observations.
Premièrement, je constate avec satisfaction que la politique de santé publique qui est soutenue par ce budget est placée sous le signe de la réforme.
Pour la lutte contre les grands fléaux sanitaires, tous mes collègues vous ont demandé, monsieur le secrétaire d'Etat, de clarifier davantage chaque action, notamment de mieux chiffrer l'action en matière de cancer.
En ce qui concerne les produits alcooliques et le tabac, je considère que l'évolution que nous avons inaugurée voilà quelques années et qui consiste à affecter une partie de la taxe sur ces produits à la Caisse nationale d'assurance maladie est une bonne chose, et qu'il faudra poursuivre dans cette voie.
Sur le problème de la sécurité sanitaire, nous avons des vues communes, me semble-t-il, sur la réorganisation des structures et sur l'élargissement des missions de l'Agence du médicament.
Le Sénat fonde beaucoup d'espoirs sur la transformation de l'Agence nationale pour le dévoppement de l'évaluation médicale, l'ANDEM, en agence nationale d'accréditation et d'évaluation, car seule une agence solide pourra nous permettre de réaliser la réforme hospitalière dans de bonnes conditions.
C'est un outil essentiel pour que le pouvoir médical hospitalier soit un peu contraint de prendre en considération les chiffres objectifs, ce qui serait une bonne chose. Nous attendons donc de vous, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous accélériez la mise en place de cette agence.
Par ailleurs, nous savons que vous souhaitez modifier l'organisation de l'administration centrale de votre ministère. Il me semble que vous devriez le faire autour de trois pôles essentiels, à savoir la définition de la santé publique, le contrôle de l'appareil de soins et la gestion financière de la protection sociale. Mais il est clair que la création et, je l'espère, le bon démarrage des agences régionales d'hospitalisation vont avoir quelques incidences sur la structure de l'administration centrale.
Je forme deux voeux : le premier, c'est qu'il y ait une meilleure osmose entre le réseau de centres anticancéreux et l'ensemble de l'appareil hospitalier. Instruit de l'expérience de l'Ile-de-France, je voudrais éviter les batailles permanentes entre les uns et les autres, chacun estimant être seul compétent pour s'occuper de cancérologie.
En outre, je souhaite que, dans les organisations chargées d'instruire les projets, notamment dans les comités régionaux de l'organisation sanitaire et sociale, les CROSS, au sein desquels, aujourd'hui, les élus occupent trois sièges sur trente-six, vous acceptiez, à l'occasion d'une réorganisation aussi importante de l'appareil hospitalier, d'augmenter leur nombre. Ainsi, les malheureux élus qui participent à ces réunions ne se sentiraient pas comme des étrangers au milieu d'une assemblée de fonctionnaires habitués à traiter entre eux des questions de santé publique et d'organisation hospitalière. (M. Machet applaudit.) Je formule ce souhait parce que les élus ne connaissent pas si mal les problèmes de terrain.
J'en viens à ma seconde observation, qui porte sur l'avenir.
J'espère que, au cours de l'année 1997, se dérouleront un certain nombre de discussions importantes qui sont toutes placées sous le signe d'une solidarité plus agissante.
Pour la loi relative à la cohésion sociale, j'espère que nos amis du Conseil économique et social réussiront à mener à bien leur examen et qu'ils parviendront à rendre un avis dûment motivé. Il serait dramatique qu'un texte de cette nature, soit enterré.
Malgré la complexité des dispositifs que vous nous proposez, monsieur le secrétaire d'État, il est clair que nous sommes prêts à les examiner à partir du premier trimestre de l'année prochaine. Il s'agit d'un projet de loi important en matière de lutte contre l'exclusion. Il reste certes un certain nombre de choix à faire et j'attends beaucoup de vous.
Par ailleurs, l'assurance maladie universelle pose de nombreux problèmes. Je ne crois pas que nous arriverons à les traiter sans remettre en cause l'existence des multiples régimes, sans essayer de créer quelques passerelles entre les différents mécanismes de protection sociale.
Si nous voulons vraiment que toutes les personnes qui habitent en France, qu'elles soient citoyens français ou résidents en situation régulière, bénéficient d'une prise en charge globale par l'assurance maladie, il faut élaborer des dispositifs extrêmement simples pour éviter de tomber dans le « corporatisme », le fractionnement entre différents régimes, comme c'est le cas actuellement.
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, je sais que vous êtes attentif à la mise en place de l'allocation spécifique dépendance pour les personnes âgées. Je viens d'apprendre que l'Assemblée nationale est en train d'adopter ce texte dans des conditions satisfaisantes. Il faudra, bien entendu, que vous preniez les textes d'application rapidement pour assurer la mise en place de ces mécanismes.
Nous venons de voter, dans la loi de financement de la sécurité sociale, 7 000 places de cure médicale et 2 000 places de soins infirmiers. Par conséquent, tout est prêt dans les meilleures conditions.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous comptons sur vous car, avec ces trois textes relatifs respectivement à la prise en charge de la dépendance des personnes âgées, à l'assurance maladie universelle et à la lutte contre l'exclusion, nous pourrons atteindre les objectifs de la grande politique de santé que vous venez de nous présenter.
Je crois que la discussion qui vient d'avoir lieu et les excellents rapports des trois rapporteurs montrent à l'évidence que les orientations de la politique de santé, renforcées par le débat approfondi sur la loi de financement de la sécurité sociale, sont désormais plus précises et commencent à être connues de tous.
Il reste encore à affiner un certain nombre de mécanismes, à faire entrer davantage d'élus dans les instances de décision, à mettre en place tous les outils de mesure et de contrôle de l'activité hospitalière ou de la médecine libérale. Mais je pense que, par les réponses que vous allez nous donner, vous allez nous apporter un certain nombre de garanties, et je vous en remercie à l'avance. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE).
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget que vous examinez aujourd'hui est constitué de trois grandes masses d'importance inégale retracées dans deux sections budgétaires distinctes.
Le premier bloc comprend l'action sociale et la solidarité, de loin le plus important des trois, puisque ses crédits s'élèvent à 61,4 milliards de francs pour 1997, ce qui traduit une progression de 3,7 %.
Le deuxième bloc est celui de la santé publique. Les crédits qui y sont consacrés atteignent 3,05 milliards de francs ; ils sont essentiels, et c'est la raison pour laquelle ils augmentent de 4,5 % en 1997, à structure constante. Je dis cela pour M. Autain et Mme Fraysse-Cazalis, qui déploraient une diminution du budget. Il y a non pas diminution, mais augmentation, je le redis.
Le dernier bloc, enfin, est celui des services communs, dont les crédits s'élèvent à 5 milliards de francs, ce qui permettra à notre administration sanitaire et sociale de bien fonctionner.
Comme plusieurs d'entre vous l'ont rappelé, les crédits que nous examinons aujourd'hui, et c'est notamment vrai pour la santé, ne représentent pas tout l'effort sanitaire de la nation. En réalité, on le voit bien avec les problèmes que nous avons évoqués à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, il faut ajouter aux crédit budgétaires les crédits hors budgets, qui sont les crédits de l'assurance maladie et qui sont les plus importants. La logique profonde de l'institution de cette loi de financement de la sécurité sociale est bien que nous ayons un débat conjoint et une problématique conjointe entre les crédits, qu'ils soient budgétaires ou non budgétaires.
Je voudrais tout d'abord dégager les priorités qui marquent le budget « Action sociale ».
Elles sont au nombre de deux : la lutte contre l'exclusion et l'extension de l'effort en faveur des handicapés.
Le projet de loi tendant au renforcement de la cohésion sociale, que vous venez d'évoquer, monsieur le président Fourcade, est actuellement en cours d'examen par le Conseil économique et social. Il sera examiné par la Parlement le plus rapidement possible. Il constituera le cadre de référence de l'action publique en vue de la prévention des exclusions et de l'insertion de tous dans la communauté nationale.
Cela étant, s'agissant du budget, je voudrais d'ores et déjà illustrer certaines actions qui préfigurent la loi de cohésion sociale et qui sont inscrites dans le budget de 1997.
Les crédits consacrés aux centres d'herbergement et de réadaptation sociale augmentent de 5,6 %, avec 1 000 nouvelles place créées en 1997, ce qui représente un doublement de l'effort par rapport aux années précédentes. Le nombre total de places permanentes sera ainsi porté à 35 000, et cette extension permettra d'offrir aux populations les plus défavorisées des structures d'accueil plus nombreuses et rénovées, puique 25 millions de francs sont consacrés à des rénovations.
Les crédits relatifs au revenu minimum d'insertion s'élèvent à 24,23 milliards de francs, soit une progression de 5,3 %. Il s'agit là d'une prévision de dépense qui ne laisse pas place au laxisme, je le souligne, en pensant notamment aux propos de M. Jacques Oudin. En 1996, le prévision budgétaire sera donc tenue.
On assiste à une très nette décélération de la croissance des effectifs des bénéficiaires du RMI. En effet, alors que le nombre des allocataires s'était accru de 8,15 % entre juin 1994 et juin 1995, il a progressé de moins de 5 % entre juin 1995 et juin 1996. Cela correspond à ce que disait M. Oudin, qui parlait de la fin de la montée en charge d'un dispositif qu'il nous faut maintenant stabiliser.
La dotation inscrite pour 1997 appelle effectivement l'intensification des politiques de contrôle, mais aussi et surtout, comme l'ont souligné MM. Seillier et Chérioux, une relance des politiques d'insertion. La mise en oeuvre du projet de loi relatif au renforcement de la cohésion sociale permettra ainsi aux allocataires de bénéficier d'une politique d'insertion professionnelle beaucoup plus vigoureuse, se traduisant notamment par l'attribution à 25 000 allocataires d'un contrat d'initiative locale. Cette dernière mesure s'ajoute aux moyens d'insertion existants, lesquels prolongent la réforme récente du contrat initiative-emploi.
L'obligation alimentaire, qui a été évoquée par M. Mazars, est prévue à l'article 23 de la loi du 1er décembre 1988 instituant le RMI.
Aucune disposition légale ne limite l'obligation des pères et mères de contribuer à proportion de leurs facultés à l'entretien et à l'éducation de leurs enfants, même majeurs. Sur ce point, le Gouvernement n'entend modifier ni la lettre ni l'esprit de la loi. L'arsenal législatif existant est suffisant pour lutter contre les abus qui pourraient détourner le RMI de sa vocation.
Enfin, je voudrais, pour évoquer l'intervention de M. Lagourgue, reconnaître avec lui les difficultés particulières et la situation spécifique de l'outre-mer. Vous le savez, Jacques Barrot et moi-même sommes extrêmement attachés aux départements d'outre-mer, aux politiques sociale et de santé publique que l'Etat doit conduire. Par rapport aux propositions que vous faites, monsieur Lagourgue, il est bien évident qu'en liaison étroite avec M. le ministre délégué à l'outre-mer nous espérons pouvoir avancer sur ce sujet très important de la lutte contre l'exclusion et pour l'insertion sociale dans ces départements.
Enfin, les crédits des programmes d'action sociale de l'Etat, qui sont essentiellement consacrés à la lutte contre l'exclusion et à l'accueil d'urgence des sans-abri, progressent de près de 6 %, pour atteindre près de un milliard de francs.
Les seuls crédits déconcentrés destinés à la prise en charge de l'urgence sociale augmentent de 20 %, ce qui permettra, notamment pendant la période hivernale, de faire face aux besoins. Cette mesure participe du volet logement et hébergement d'urgence de la future loi de cohésion sociale.
Comme il n'y a évidemment pas d'action sociale de qualité sans formation des travailleuses et des travailleurs sociaux, il est prévu 13 millions de francs de mesures nouvelles pour accroître les capacités des centres de formation des travailleurs sociaux, et une progression de 10 % des effectifs d'éducateurs et d'assistantes sociales.
Comme l'a rappelé Jacques Barrot devant le Conseil supérieur du travail social, les bourses des étudiants en travail social seront désormais revalorisées dans les mêmes conditions que celles de l'enseignement supérieur.
Enfin, l'insertion par l'économique est un volet important de la politique de lutte contre l'exclusion. Sur le budget de l'action sociale et de la solidarité, elle représente 132,5 millions de francs en 1997, ce qui permettra de financer l'accueil de 20 000 personnes dans plus de 500 structures d'insertion. A cela s'ajoutent bien évidemment les crédits du budget du ministère du travail.
Voilà, en quelques mots, les grands axes retenus en matière de lutte contre l'exclusion, axes qui préfigurent en grande partie la future loi de cohésion sociale.
S'agissant maintenant des personnes handicapées, l'Etat leur consacre, toutes lignes budgétaires confondues, environ 28 milliards de francs sur le budget de l'action sociale et 5 milliards de francs sur le budget du travail, sans compter les crédits qui sont inscrits au titre de l'assurance maladie pour le financement des établissements et les crédits que mettent en place les conseils généraux dans le cadre des compétences qui leur sont imparties.
L'allocation aux adultes handicapés, l'AAH, a été évaluée de façon réaliste, me semble-t-il, sans que l'on puisse parler, comme l'a fait M. Oudin, de dérive. Cette prestation coûtera 22,8 milliards de francs l'année prochaine, soit une progression de 7 %.
Je voudrais également souligner que la fixation d'un seuil d'incapacité minimal de 50 % et l'application d'un nouveau barème d'incapacité ont eu un impact limité sur l'évolution des dépenses de l'AAH, et cela pour deux raisons : d'abord, les recoupements entre la population concernée par le RMI et celle qui est visée par l'AAH sont moins nombreux que ce que l'on aurait pu penser initialement ; ensuite, comme l'a souligné M. Chérioux, les mesures en cause ne s'appliquaient qu'aux premières demandes et non pas aux personnes déjà bénéficiaires de l'AAH.
Je voudrais dire aussi, pour saluer la remarque de M. Jacques Oudin, que l'augmentation du nombre de compléments d'AAH traduit le succès de la politique visant à aider les personnes les plus gravement handicapées dans leur effort d'autonomie.
J'ajoute que nous créons, en 1997, 2 000 places en CAT, 500 places en atelier protégé qui sont financées sur le budget du ministère du travail que vous examinerez tout à l'heure.
Pour répondre à Mme Dusseau, je précise que, au-delà de la création de ces 2 000 places, il y aura, c'est vrai, une évolution entre 1997 et 1996 de 2,1 % des crédits affectés aux CAT hors création des 2 000 places nouvelles.
Enfin, pour terminer sur l'action sociale, je voudrais insister sur plusieurs sujets.
Nous avons une mesure nouvelle de 20 millions de francs - plus 18 % - pour financer les associations gérant les mesures de tutelle et de curatelle d'Etat.
Les crédits ouverts en 1997 pour l'aide médicale à la charge de l'Etat progressent de 17 % pour atteindre 807 millions de francs. Il s'agit bien d'une remise à niveau tangible, comme l'a souligné votre rapporteur spécial de la commission des finances. Grâce à cette mesure nouvelle, nous éviterons les effets de reports de charges qui entraînent des retards de paiement préjudiciables à tout le monde.
Enfin, s'agissant des moyens consacrés à la promotion des droits des femmes, madame Dusseau, on sait bien, depuis Aragon, que « la femme est l'avenir de l'homme » ! (Sourires.)
M. Emmanuel Hamel. On le savait déjà avant ! (Nouveaux sourires.)
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. Par conséquent, c'est Mme Couderc qui vous répondra sur ce sujet dans quelques heures à la faveur de l'examen du budget du travail.
J'en viens maintenant aux subventions sociales, en particulier aux crédits consacrés à l'humanisation des hospices. Ceux-ci atteignent 388,4 millions de francs en 1997, soit une somme inférieure aux crédits de 1996. Cette réduction tient essentiellement à l'allongement d'un an de la durée de réalisation des contrats de plan entre l'Etat et les régions, qui est une mesure d'application générale.
Pour autant, en 1999, nous aurons achevé le vaste programme d'humanisation des 200 000 lits d'hospice environ lancé à la fin des années soixante-dix, l'Etat y ayant consacré 1,8 milliard de francs sur la période 1994-1999 et les collectivités territoriales environ 2 milliards de francs.
Je voudrais, enfin, en réponse aux questions de Mme Dusseau, de M. Oudin et de M. Chérioux, évoquer les crédits consacrés à la formation des intervenants de l'aide à domicile.
En réalité, les crédits permettant de financer le certificat d'aptitude aux fonctions d'aide à domicile, le CAFAD, sont redéployés sur les formations initiales des travailleurs sociaux, et cela pour plusieurs raisons.
Ces crédits ne représentaient que 13 millions de francs environ, c'est-à-dire à peine plus de 100 000 francs par département ; ils étaient affectés régulièrement par des procédures de régulation budgétaire. Ce type de formation continue n'était financé directement par le ministère qu'à titre d'exception et en complément d'autres formations. Enfin, le financement du CAFAD, comme l'a relevé M. Jacques Barrot, relève de la compétence des collectivités locales, en particulier des conseils régionaux, ainsi que des employeurs.
C'est dans cette voie que se sont lancées d'ores et déjà plusieurs régions - l'Ile-de-France, la Bretagne - où sont menés, notamment dans le département de l'Ille-et-Vilaine, des programmes qui mobilisent des crédits du secteur du travail et de la formation professionnelle ainsi que du Fonds social européen.
L'amendement Creton, évoqué par M. Chérioux, porte sur un sujet que nous suivons avec une attention particulière. La création de 2 000 nouvelles places en CAT n'est évidemment pas étrangère à cette préoccupation, même si l'on sait bien que cela ne suffira pas.
J'aborderai maintenant, après M. Chérioux, le problème de la politique salariale, qui provoque une augmentation des dépenses d'action sociale. La commission nationale d'agrément, qui comprend des représentants de l'Association permanente des présidents de conseils généraux, veille strictement à ce que les avenants aux conventions collectives du secteur ne favorisent pas les salariés au-delà des dispositions en vigueur dans la fonction publique hospitalière.
Telles sont les observations que je voulais faire, mesdames, messieurs les sénateurs, sur le sujet important de la lutte contre l'exclusion.
S'agissant maintenant de la santé, les grandes priorités de notre action sont les suivantes : la sécurité sanitaire, la lutte contre les grands fléaux, la mise en oeuvre des réformes de l'hospitalisation publique et privée et du système de soins dans son ensemble.
Nos grands axes d'intervention sont au nombre de trois.
Le premier volet concerne l'amélioration de la protection sanitaire, c'est-à-dire le renforcement de la veille et de la sécurité sanitaires. Il s'agit là d'une compétence régalienne de l'Etat, dont tout nous montre que nous devons mieux l'organiser et mieux la renforcer.
Plusieurs d'entre vous ont salué l'augmentation des crédits destinés au réseau national de santé publique, le RNSP, qui a pour mission de surveiller l'émergence de maladies infectueuses et de problèmes de santé liés à l'environnement. La dotation augmente de 50 % : c'est important, même si c'est encore insuffisant.
Il reste que nous revenons de loin : nous avons trop longtemps pris du retard en la matière. Les comparaisons avec le CDC d'Atlanta sont quelque peu délicates dans la mesure où, aux Etats-Unis, on inclut les crédits de vaccination qui, en France, figurent dans le budget de l'assurance maladie. Cela étant, même à structures comparables, nous avons beaucoup de retard.
Dans l'année qui vient, nous voulons conduire une politique ambitieuse en matière épidémiologique - nous aurons l'occasion d'en reparler - au-delà même de l'augmentation des moyens du RNSP.
Je suis fermement convaincu qu'il nous faut mener une action européenne beaucoup plus soutenue. Je suis pour ma part assez déçu de la timidité de l'Union européenne en matière de réseaux de surveillance sanitaire et épidémiologique. Voilà, à l'évidence, un sujet qui mérite qu'on s'y attache.
Par ailleurs, nous renforçons les moyens de fonctionnement des missions de contrôle assurées par les DDASS et les DRASS.
Une mesure de 11,4 millions de francs est prévue pour la vaccination des détenus contre l'hépatite B.
Je citerai quelques autres mesures nouvelles : le financement d'actions dans le domaine des maladies génétiques et des maladies rares, le renforcement des moyens du comité français d'éducation pour la santé et l'amélioration de la prise en charge sanitaire des personnes les plus démunies.
Comme l'ont souligné MM. Huriet, Autain et Fourcade, nous avons devant nous le grand chantier de la remise en ordre des instruments de sécurité sanitaire. Nous aurons l'occasion de reparler de ce sujet dans les mois qui viennent, car chacun ici est bien conscient de la nécessité de disposer d'une organisation de contrôle sanitaire plus cohérente et mieux coordonnée qu'elle ne l'est actuellement.
S'agissant de la lutte contre les fléaux sanitaires, les crédits consacrés en 1997 à la lutte contre le sida s'élèveront à 474 millions de francs, contre 450 millions de francs en 1996 ; chacun d'entre vous a souligné cette progression.
Bien entendu, l'effort que consacre globalement la nation à la lutte contre le sida est bien plus important puisqu'il est d'environ 6 milliards de francs : 5 milliards de francs pour les hôpitaux, 500 millions de francs pour la politique de prévention et 500 millions de francs pour la recherche ; tels sont les ordres de grandeur.
J'ajouterai, en réponse à Mme Fraysse-Cazalis, que la France est le pays au monde qui a mis le plus rapidement les nouveaux traitements, les trithérapies, à la disposition des malades atteints du sida. Actuellement, 18 000 patients suivent ce type de traitement.
Il n'y a aucun refus de prescription pour des raisons budgétaires et nous nous sommes assurés que, dans tous les hôpitaux de France où les malades sont suivis, les crédits sont disponibles pour financer les nouveaux médicaments. Lorsqu'un médecin prescrit une trithérapie, le médicament est là, et cela me paraît extrêmement important, parce que nous avons pris les dispositions nécessaires. Je saisis cette occasion pour remercier l'ensemble des professionnels de santé et des agents du ministère qui se sont dépensés sans compter pour mettre rapidement en oeuvre ce programme.
Par ailleurs, les crédits de lutte contre la toxicomanie atteignent 694 millions de francs. Il faut y ajouter les crédits de la mission interministérielle inscrits sur le budget du Premier ministre. Cela représente une augmentation de près de 10 %, qui va nous permettre de mettre en place une politique ambitieuse en matière de lutte contre la toxicomanie.
Plusieurs d'entre vous, MM. Boyer, Autain et Huriet, ainsi que Mme Dusseau, ont évoqué la lutte contre l'alcoolisme et le tabagisme. Les crédits consacrés à la lutte contre ces deux fléaux dans le projet de loi de finances sont stabilisés mais l'effort de la nation à cet égard est évidemment plus important que ne le laissent apparaître les seuls crédits du budget de la santé.
Il faut également prendre en compte les crédits du comité français d'éducation pour la santé et les crédits qui seront inscrits sur les projets régionaux de santé, ainsi que la politique des prix - chacun sait que l'augmentation des prix est dissuasive - et la politique de réduction de la nocivité des produits.
Nous menons une politique globale en matière de lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme. Nous aurons l'occasion d'y revenir dans les prochaines semaines.
Il est vrai que, sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres en matière de santé publique, notamment en ce qui concerne la politique de prévention, il faut introduire de la cohérence entre les interventions de l'Etat, des collectivités locales et de la caisse nationale d'assurance maladie. Il importe désormais de développer une synergie des efforts qui sont déployés à ces différents niveaux.
M. Louis Boyer a parlé du cancer avec beaucoup de pertinence et d'humanité.
S'agissant du dépistage, trois localisations de cancer peuvent faire l'objet d'un dépistage organisé : le sein, le col de l'utérus et la sphère colo-rectale.
A ces cancers correspondent des programmes qui sont financés par des crédits du fonds de prévention de l'assurance maladie et des crédits inscrits au budget de l'Etat.
S'agissant du sein, 96 millions de francs ont été dégagés en 1996 pour assurer l'organisation du dépistage dans vingt départements. Je souhaite mettre en oeuvre très rapidement l'extension de ce programme dans les autres départements. Je m'exprimerai dans les prochaines semaines sur ce sujet.
En ce qui concerne le col de l'utérus, des programmes ont été lancés par le Conseil national du cancer et l'extension proposée par cet organisme sera réalisée l'année prochaine.
Enfin, le dépistage du cancer colo-rectal fait l'objet depuis plusieurs années, au sein de la communauté scientifique et médicale, d'études très détaillées, parfois légèrement contradictoires. Samedi prochain, doit paraître dans le Lancet , un article qui apporte des arguments en faveur du développement de ce dépistage.
J'avais, au printemps dernier, anticipé cette évolution en confiant à une commision scientifique le soin de me faire des recommandations. Dès qu'elles me seront transmises, nous ferons le nécessaire.
Il est évident que nous avons besoin de mettre en cohérence notre politique de lutte contre le cancer, car elle n'est pas lisible, qu'il s'agisse des soins ou de la recherche. J'ai été très sensible aux propos du président Fourcade quant à la nécessaire coordination entre le système hospitalier et les centres anticancéreux. Dans les semaines qui viennent, j'aurai l'occasion de m'exprimer globalement sur la politique de la nation relative au cancer.
Le troisième et dernier axe de ce projet de budget est la mise en oeuvre des réformes structurelles du système de santé.
Nous allons mettre en place l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, l'ANAES qui va reprendre les bases de l'Agence nationale pour le développement de l'évaluation médicale. Je peux rassurer à la fois M. Fourcade et M. Boyer : le Gouvernement a déposé un amendement tendant à bien organiser cette transition sur le plan budgétaire, de manière que l'ANAES, sur la base des recommandations du professeur Matillon, soit opérationnelle le plus rapidement possible.
Les vingt-quatre agences régionales de l'hospitalisation sont un outil majeur de la réforme. Elles sont en cours d'installation puisque les directeurs d'agence que nous avons nommés au début du mois de septembre sont en train de signer les conventions constituant les groupements d'intérêt public avec l'assurance maladie. La somme de 97,7 millions de francs inscrite au budget pour 1997 permettra de mettre en oeuvre cette réforme importante.
Jacques Barrot et moi signerons, dans les prochaines semaines, l'ensemble de ces conventions constitutives.
Je voudrais évoquer, à la suite des observations de M. Louis Boyer et de Mme Fraysse-Cazalis, la politique budgétaire de l'Etat en direction des hôpitaux.
Il faut d'abord rappeler que l'hôpital est une entité juridique particulière puisque c'est un établissement public local autonome, souverain, dont le personnel a un statut national mais est, pour partie, recruté nationalement et, pour une autre partie, recruté localement, le tout étant financé essentiellement par l'assurance maladie et, pour une moindre fraction, par l'Etat. Aussi la clarification est-elle nécessaire.
La logique profonde de la réforme, puisque nous sortons du budget global et des systèmes d'économie administrée, qui n'ont pas véritablement fait la preuve de leur efficacité, est précisément de définir, à travers un contrat passé entre chaque établissement de santé et l'agence régionale, les moyens sur une base pluriannuelle, c'est-à-dire sur trois ans. Je crois que nous sommes loin des grandes architectures de l'économie planifiée. Il faut faire confiance aux gens, et c'est cette logique contractuelle associant les gestionnaires et les financeurs qui permettra d'obtenir une meilleure qualité de soins pour tous les Français.
MM. Huriet et Autain ainsi que le président Fourcade ont évoqué l'organisation de notre administration sanitaire et sociale.
En cette fin de siècle, celle-ci est effectivement confrontée à des défis majeurs : problèmes de santé publique, de sécurité santaire, de lutte contre l'exclusion, de travail social. Mais elle est aussi confrontée à la logique profonde de la réforme de la protection sociale et des changements qu'elle induit tant du point de vue de l'organisation des soins qu'au regard du financement de la sécurité sociale.
Il va de soi que l'institution des lois de financement de la sécurité sociale ne peut qu'avoir un effet important sur l'organisation de notre ministère.
Nous avons donc beaucoup travaillé sur cette question depuis six mois. J'ai piloté un groupe de travail avec les directeurs du ministère et des agences et établissements publics sous tutelle. J'ai reçu de nombreux fonctionnaires du ministère afin qu'ils me parlent de leur travail, de leurs problèmes.
Nous allons, Jacques Barrot et moi-même, dans les semaines à venir, publier un document d'orientation, qui sera un outil de concertation, sur la réorganisation de notre administration centrale. Je ne peux évidemment vous en dire plus aujourd'hui puisque ce document n'est pas encore totalement rédigé, mais je serai, tout comme Jacques Barrot, à la disposition du Sénat pour évoquer cette question, qui concerne un aspect majeur de l'organisation de notre administration sanitaire et sociale.
Je voudrais enfin remercier Lucien Newirth d'avoir contribué au débat concernant la douleur, car son travail a beaucoup fait avancer les choses sur cette question. Je lui répondrai plus précisément tout à l'heure, à la faveur de l'examen de l'amendement qu'il a déposé.
Je terminerai en disant au président Fourcade que nous serons présents au rendez-vous sur les trois textes qu'il a évoqués et qui traiteront respectivement de la cohésion sociale, de la prestation spécifique dépendance et de l'assurance maladie universelle.
Deux groupes de travail viennent d'être constitués pour préparer le projet de loi sur l'assurance maladie universelle : l'un s'intéresse à l'accès au droit et l'autre aux questions liées au financement. Sur la base de leurs conclusions, nous aurons l'occasion, l'année prochaine, de débattre longuement.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments d'information que je voulais vous apporter à la suite de vos remarques, de vos critiques ou de vos approbations. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant la santé publique, les services communs, l'action sociale et la solidarité inscrits à la ligne « Travail et affaires sociales » seront mis aux voix à la suite de l'examen des crédits affectés au travail.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Je suis, bien sûr, avec intérêt le déroulement de nos travaux. Je rappelle que nous mettons en place une réforme de la discussion budgétaire. Je vous demande donc, mes chers collègues, d'être le plus concis possible, tout en restant bien évidemment précis, afin que nous puissions respecter l'ordre du jour tel qu'il a été établi par la conférence des présidents. Je vous en remercie à l'avance.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III, 89 265 222 francs. »