M. le président. Par amendement n° I-65, M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés, proposent, après l'article 17, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter du 1er janvier 1997, le tarif des droits prévus aux articles 777 et suivants du code général des impôts applicable entre époux est ouvert aux concubins notoires et déclarés.
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des dispositions précédentes sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits prévus à l'article 885 U du code général des impôts.
La parole est à M. Masseret.
M. Jean-Pierre Masseret. Il est nécessaire, au nom de la neutralité fiscale, de traiter de la même manière les couples mariés et ceux qui ne le sont pas, tant en matière d'impôt sur le revenu qu'en matière de droits de succession. Il n'est pas normal en effet que le concubin notoire et déclaré - j'insiste sur l'expression -, qui survit soit considéré comme une personne non parente et taxé à ce titre à 60 % dès le premier franc. (M. Emmanuel Hamel proteste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-65, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-182,Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 17, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'article 14 de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier sont abrogées. »
La parole est à M. Billard.
M. Claude Billard. Les entreprises privées de ce pays doivent-elles être totalement exonérées de toute contribution aux charges publiques ?
Poser cette question pourrait paraître provocateur si les faits et les réalités de notre système de prélèvements fiscaux et sociaux ne venaient à contredire ce simple principe constitutionnel.
En effet, l'impôt sur les sociétés a été largement aménagé, ce qui a conduit à une quasi-neutralisation de cet impôt au regard des retours que l'Etat attribue aux entreprises.
Nous avons ainsi souligné que, si l'impôt sur les sociétés avait rapporté 118 milliards de francs au budget général, 115 milliards de francs d'aides publiques aux entreprises avaient été identifiés dans le rapport Carayon, et nous sommes bien obligés de continuer à nous interroger sur le bien-fondé - et le traitement fiscal - des 115 milliards ou 120 milliards de francs de remboursement de TVA accordés aux entreprises.
Ces sommes, si elles peuvent trouver une justification dans l'économie générale de nos impôts sur la consommation, apparaissent tout de même en dernier ressort comme une forme de trésorerie disponible à moindre coût pour les entreprises privées assujetties à un financement indirect de l'investissement.
Une fois atteints les objectifs assignés en matière d'impôt sur les sociétés, le patronat français a fait son cheval de bataille de la réduction des droits de mutation à titre gratuit, qui serait à la source, selon certaines estimations, de la disparition d'emplois et de la mort d'entreprises.
Un rappel simple s'impose.
On ne peut en effet oublier que les droits de mutation à titre gratuit constituent, comme l'impôt sur le revenu, l'un des rares impôts progressifs de notre législation fiscale.
Dans les faits, plus une donation s'avère importante et plus le montant des droits est élevé.
Cela nous permet évidemment de revenir sur les caractéristiques de la mesure adoptée dans le projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier.
Il s'agissait alors de procéder à un abattement uniforme de 35 % sur la valeur de chaque part de la donation afin de limiter la contrainte fiscale pesant sur ce type d'opération.
Le coût de la mesure, estimé à 1 milliard de francs, consistait, en fait, à défiscaliser largement certaines donations importantes au sein de groupes familiaux.
En effet, même si certaines des entreprises visées par le dispositif concerné sont aujourd'hui régies selon le principe de l'appel public à l'épargne et voient leur capital largement diffusé auprès d'un public anonyme d'actionnaires, un grand nombre d'autres ou un certain volume de titres de propriété demeurent dans le giron des familles fondatrices.
Cette situation n'a d'ailleurs pas que des caractéristiques isolées en termes de droits de mutation.
C'est pour cette raison et pour la cohérence du débat que nous avions, dans un premier temps, choisi de placer la discussion de cet amendement avant la discussion de l'article 13 du projet de loi, relatif à l'impôt de solidarité sur la fortune.
La cohérence du débat entre les deux impôts est d'autant plus forte que chacun s'accorde ici à reconnaître que l'impôt de solidarité sur la fortune est en quelque sorte le frère jumeau de la fiscalité sur l'enregistrement.
Mais il convient de rappeler une question fondamentale.
En effet, nul n'ignore que les biens professionnels sont exonérés de l'impôt sur la fortune.
Or, que sont les biens professionnels, sinon précisément les droits de propriété dont on cherche à encourager la transmission ?
Il y a donc un effet à double détente de l'article 14 de la dernière loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier : d'abord, réduire le montant des droits d'enregistrement, puis peser, à terme, sur le produit de l'impôt de solidarité sur la fortune, puisque les donataires continueraient de jouir de l'exonération des biens professionnels.
Dans les faits, cet article 14 est loin de porter sur les fonds de commerce des associés-gérants de SARL. Il concerne d'abord les successions importantes de grands groupes dynastiques comme peuvent l'être le groupe du Louvre de la famille Taittinger, le groupe Pernod-Ricard, le groupe Auchan de la famille Mulliez, le groupe Cora-Révillon des Bouriez, et j'en passe...
C'est d'abord au profit de ces grandes familles, dignes héritières des deux cents familles de l'époque du Front populaire ou ayant réussi à tirer parti du développement social et économique des années soixante, que l'article 14 du texte portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a été adopté en mars dernier.
En fait, il ne s'agissait ni plus ni moins que de compléter les dispositions favorables aux grands groupes contenues dans les précédents ajustements de l'impôt sur les sociétés par de nouveaux avantages fiscaux d'ailleurs refusés aux particuliers dans les mêmes proportions.
Evidemment, on nous dira, et on nous l'a déjà dit, qu'il faut éviter autant que faire se peut la « vulnérabilisation » de nos grandes entreprises en contraignant les possesseurs de parts sociales à les revendre sur le marché pour payer le montant des droits de transmission.
Mais posons la question. Qu'est-ce qui permet la valorisation de ces parts sociales ?
M. le président. Il faut terminer, monsieur Billard !
M. Claude Billard. J'ai fini, monsieur le président.
Une sorte de génération spontanée du capital ou bien plutôt le travail accompli par des générations et des générations de salariés ?
N'est-il pas juste que la collectivité finisse, d'une manière ou d'une autre, par tirer parti de cette valorisation après l'avoir largement supportée, au travers de l'avoir fiscal par exemple ?
C'est aussi sous le bénéfice de ces ultimes observations que je vous invite à adopter cet amendement n° I-182.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-182, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles 17 bis et 17 ter