M. le président. « Art. 19. - I. - En vue de réduire la consommation d'énergie, d'améliorer la santé et de limiter les sources d'émission de substances polluantes, des décrets en Conseil d'Etat définissent :
« - les normes et spécifications applicables à la fabrication, la mise sur le marché, le stockage, l'utilisation, l'entretien et l'élimination des biens mobiliers autres que les véhicules, lesquels sont visés à l'article 21 ;
« - les normes et spécifications applicables à la construction, l'utilisation, l'entretien et la démolition des biens immobiliers ;
« - les conditions de contrôle des opérations mentionnées aux deux alinéas précédents.
« II. - Les décrets mentionnés au I ci-dessus peuvent aussi :
« 1° Imposer aux constructeurs et utilisateurs de contrôler les consommations d'énergie et les émissions de substances polluantes, à leur diligence et à leurs frais ;
« 2° Prescrire les conditions de limitation de la publicité ou des campagnes d'information commerciale relatives à l'énergie ou à des biens consommateurs d'énergie, ou l'obligation d'afficher la consommation énergétique des biens consommateurs d'énergie, lorsqu'elles sont de nature à favoriser la consommation d'énergie dans les cas autres que ceux prévus à l'article premier de la loi n° 74-908 du 29 octobre 1974 relative aux économies d'énergie ;
« 3° Supprimé.
« III. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles le fioul domestique, le gazole, l'essence et les supercarburants devront comporter un taux minimal d'oxygène avant le 1er janvier 2000. Ce décret en Conseil d'Etat fixe également les conditions dans lesquelles les carburants devront être reformulés avant la même date.
« IV. - Supprimé.
« V. - Pour satisfaire aux dispositions de la présente loi, un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles l'ensemble des constructions devront comporter une quantité minimale de matériaux en bois avant le 1er janvier 2000. Ce bois est récolté par une sylviculture respectueuse de l'environnement. »
Par amendement n° 23, M. François, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du paragraphe I de l'article 19 :
« En vue de réduire la consommation d'énergie et de limiter les sources d'émission de substances polluantes nocives pour la santé humaine et l'environnement, des décrets en Conseil d'Etat définissent : »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe François, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
Plutôt que de fixer l'objectif ambitieux d'améliorer la santé, les mesures techniques nationales ont plus simplement pour objet de limiter ou de prévenir les émissions de substances polluantes nocives pour la santé humaine.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Je suis tout à fait favorable à ce que le mot « santé » figure souvent dans le projet de loi. Je crois important d'afficher cette préoccupation.
Je reste donc sur ma position de tout à l'heure, et j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 23.
M. Philippe Adnot. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot. Bien entendu, je suis favorable à cet amendement. Mais j'étais défavorable à l'amendement n° 107 et je désire m'exprimer à ce sujet. Je me demande vraiment dans quel monde nous sommes !
M. Henri de Raincourt. Eh oui, qui va payer ?
M. Philippe Adnot. Voilà un amendement qui tend à exclure du champ d'application de la décision que prend le Gouvernement ce qui relève de la responsabilité de l'Etat, c'est-à-dire les autoroutes et les voies rapides.
M. Henri de Raincourt. Absolument !
M. Philippe Adnot. L'Etat ne réalise pas ce qui est de sa responsabilité, mais il impose des contraintes en matière de voirie communale : c'est maintenant l'Etat qui décide de l'emplacement des pistes cyclables pour celles-ci ! C'est incroyable !
L'Etat décide à la place des collectivités, alors que toute la noblesse de leur mission est de prendre ce genre de décision.
Je tiens absolument à ce qu'il soit acté que j'étais contre l'amendement n° 107, qui ne va pas du tout dans le sens du respect de l'autonomie des collectivités locales. (Marques d'approbation sur certaines travées du RPR.)
M. Emmanuel Hamel. Il eût fallu que la commission se réunît ! Elle se serait prononcée contre !
M. le président. La Haute Assemblée a voté en connaissance de cause !
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 24, M. François, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit le deuxième alinéa du paragraphe I de l'article 19 :
« les spécifications techniques applicables à la fabrication, à la mise sur le marché, au stockage, à l'utilisation, à l'entretien et à l'élimination des biens mobiliers autres que les véhicules visés à l'article 21. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 108, déposé par le Gouvernement, et tendant, dans le second alinéa de l'amendement n° 24, après les mots : « l'entretien », à insérer les mots : « , aux seuils de rendement ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 24.
M. Philippe François, rapporteur. Il s'agit de préciser la rédaction de l'alinéa habilitant le pouvoir réglementaire à prendre des mesures sur les biens mobiliers. Les termes « normes et spécifications » sont à la fois trop généraux et trop imprécis.
Dans le processus industriel, les normes sont des documents d'application volontaire adoptées par un organisme de normalisation reconnu - l'AFNOR en France, le CEN au niveau communautaire et l'ISO au plan international - que l'autorité administrative compétente peut rendre obligatoires, en application du code de la consommation ainsi que du décret du 26 janvier 1984 fixant le statut de la normalisation. Il est donc inutile de le prévoir à l'article 19.
En revanche, il convient de parler de spécification technique, qui est un document d'application obligatoire édicté par le pouvoir réglementaire, sous couvert d'une habilitation législative.
M. le président. La parole est à Mme le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 108 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 24.
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Par coordination avec l'amendement n° 101, qui sera examiné ultérieurement et qui est un amendement de cohérence, le Gouvernement souhaite conserver la notion de seuil de rendement. Tel est l'objet du sous-amendement n° 108.
En ce qui concerne l'amendement n° 24, le Gouvernement émet un avis favorable.
M. Philippe François, rapporteur. Que peut-on demander de mieux !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 108 ?
M. Philippe François, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 108, accepté par la commission.
M. Emmanuel Hamel. Je vote contre : cette inflation réglementaire devient démente !

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 24, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 25, M. François, au nom de la commission des affaires économiques, propose, dans le troisième alinéa du paragraphe I de l'article 19, de remplacer les mots : « normes et spécifications » par les mots : « spécifications techniques ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe François, rapporteur. La justification de cet amendement de coordination est similaire à celle de l'amendement n° 24.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?
Je mets aux voix l'amendement n° 25, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 97, MM. Richert et Hérisson proposent de compléter le paragraphe I de l'article 19 par un alinéa nouveau ainsi rédigé :
« - les conditions d'utilisation des substances chimiques à potentiel élevé de destruction de l'ozone et de réchauffement climatique, dans le cadre de la lutte contre les incendies. »
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Compte tenu de ce que nous a dit tout à l'heure Mme le ministre à propos d'un autre amendement, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 97 est retiré.
Par amendement n° 26, M. François, au nom de la commission des affaires économiques, propose dans le deuxième alinéa du paragraphe II de l'article 19, après les mots : « de substances polluantes », d'insérer les mots : « des équipements de chauffage et de climatisation ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe François, rapporteur. Le deuxième alinéa du paragraphe II de l'article 19 autorise le pouvoir réglementaire à imposer aux constructeurs et aux utilisateurs d'être en mesure de contrôler à leurs frais les consommations d'énergie et les émissions de substances polluantes, sans préciser l'origine de ces consommations et de ces émissions.
Il conviendrait à tout le moins de préciser les objets visés par cette obligation de contrôle, à savoir les appareils thermiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, car la proposition qu'il contient affaiblit la portée des décrets prévus à l'article 19 en limitant simplement la mesure aux équipements de chauffage et de climatisation.
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 100, M. François, au nom de la commission des affaires économiques, propose, dans le troisième alinéa (2°) du paragraphe II de l'article 19, après les mots : « à des biens consommateurs d'énergie, » de supprimer les mots : « ou l'obligation d'afficher la consommation énergétique des biens consommateurs d'énergie, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe François, rapporteur. En ce qui concerne l'affichage des consommations énergétiques, il cconvient de privilégier la procédure plus simple de l'article 20, dont le paragraphe 3° vise l'habilitation des autorités administratives à prescrire l'obligation d'afficher la consommation énergétique de certains biens.
Il s'agit donc de supprimer ce dispositif à l'article 19. Dans le cas contraire, on laisserait coexister deux procédures contradictoires pour l'adoption des décrets d'application, ce qui serait préjudiciable à la bonne marche de l'administration.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?
Je mets aux voix l'amendement n° 100, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 41, MM. Souplet, Machet, Deneux, et les membres du groupe de l'Union centriste, proposent d'insérer, après la première phrase du paragraphe III de l'article 19, une phrase ainsi rédigée : « Un taux spécifique d'oxygène sera par ailleurs fixé pour les carburants utilisés par les véhicules appartenant à des « flottes captives » urbaines de plus de 50 véhicules. »
La parole est à M. Souplet.
M. Michel Souplet. Cet amendement s'inscrit dans la logique à la fois de mon intervention de ce matin et de la proposition de loi relative à l'incorporation obligatoire de carburants d'origine agricole dans le gazole, que le Sénat avait adoptée à l'unanimité voilà quelques années.
Ce matin, j'ai cité l'exemple d'un bon nombre de villes françaises qui ont décidé l'incorporation d'environ 15 %, 20 % ou 25 % de diester dans le gazole des autobus urbains. Cela permet de diminuer considérablement les fumées noires, les particules, les composés aromatiques, dont le benzène, le CO2, qui favorise l'effet de serre, ainsi que la pollution acide en raison de l'absence de soufre.
Pour tous ces motifs, il serait souhaitable que le plus rapidement possible, et non pas seulement en l'an 2 000, l'on puisse adopter des dispositions rendant obligatoire, dans toutes les villes de France, l'incorporation de carburant d'origine agricole par oxygénation. Cela conduirait très rapidement à une amélioration significative de la qualité de l'air.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe François, rapporteur. Mon collègue M. Souplet sait combien je partage son point de vue à cet égard. Toutefois, je lui demanderai de retirer son amendement, pour la simple raison que, à l'article 21, nous présenterons un amendement n° 30 qui a un objet similaire.
M. le président. Monsieur Souplet, l'amendement est-il maintenu ?
M. Michel Souplet. J'ai lu rapidement l'amendement n° 30 qu'a déposé la commission à l'article 21. Il est moins explicite que le mien. Mais je ne vais pas faire la forte tête, et je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 41 est retiré.
Par amendement n° 27, M. François, au nom de la commission des affaires économiques, propose :
I. - De supprimer la seconde phrase du paragraphe III de l'article 19.
II. - En conséquence, de rétablir le paragraphe IV de cet article dans la rédaction suivante :
« IV. - Un décret fixe les conditions dans lesquelles les spécifications des carburants mentionnées au paragraphe III devront être redéfinies avant la même date. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe François, rapporteur. Le paragraphe III de l'article 19 prévoit l'incorporation obligatoire de composants oxygénés dans les carburants et combustibles liquides avant le 1er janvier 2000. Un décret précisera le taux minimal d'oxygène que devront comporter lesdits carburants et combustibles.
L'Assemblée nationale a quelque peu remanié cette disposition en la cumulant, par ailleurs, avec celle du paragraphe IV, voté à l'unanimité par le Sénat, prévoyant la publication d'un décret en Conseil d'Etat afin de fixer, pour l'ensemble des carburants, des teneurs maximales en aromatiques, en benzène et en soufre.
Compte tenu du calendrier européen, qui met en discussion une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant la qualité de l'essence et du carburant diesel et modifiant la directive 93/12/CEE du Conseil, et compte tenu des délais d'adoption et de transposition de ces textes, la commission vous propose de dissocier la fixation d'un taux minimal d'oxygène dans les carburants du problème de la reformulation qui dépend de cette directive.
C'est pourquoi elle vous suggère de revenir au texte adopté en première lecture au Sénat, qui prévoyait l'adoption de deux décrets.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 66, M. Adnot propose de supprimer le paragraphe V de l'article 19.
La parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot. Cet amendement tend à supprimer le paragraphe V de l'article 19, dont je vous rappelle les termes : « Pour satisfaire aux dispositions de la présente loi, un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles l'ensemble des constructions devront comporter une quantité minimale de matériaux en bois avant le 1er janvier 2000. Ce bois est récolté par une sylviculture respectueuse de l'environnement. »
Cette formulation ne manque pas de saveur ! Bien entendu, il faudra laisser le soin aux experts d'apprécier, quand on fera venir du bois des îles ou d'ailleurs, ce qui aura été respectueux de l'environnement.
Ce qui me chagrine le plus, c'est que l'on finira par fixer l'âge du capitaine. (Sourires.) Désormais, toute nouvelle construction devra intégrer une certaine quantité de bois. Et un lobby des plastiques, des toits en ardoise ou de pierres de je ne sais quelle provenance fixera bientôt le pourcentage requis pour tel ou tel matériau !
Je représente un département qui est composé de 25 % de forêt. Je suis très intéressé par le développement de celle-ci ! C'est à nous de prendre les mesures pour que le bois soit compétitif et qualitativement intéressant !
S'il faut que la loi détermine la composition de chacune des constructions, même si cela ne correspond en aucun cas aux objectifs poursuivis par le bâtiment, où allons-nous ?
M. Emmanuel Hamel. Nous cessons d'être un pays de liberté pour devenir un pays où tout est réglementé ! C'est le retour de Staline !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe François, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, ce qui mérite quelques explications.
Vous disiez, monsieur Adnot, que votre département était composé de 25 % de forêt. Je vous signale que la France comporte 25 % de forêt, sans compter ses territoires extérieurs, ce qui augmenterait le pourcentage ! La France est l'un des premiers pays forestiers du monde - elle compte 15 000 hectares de forêt - et elle possède la forêt la plus productive d'Europe.
Par ailleurs, cette forêt est la mieux gérée et s'est accrue de 2 500 hectares depuis 1950.
Chacun sait que la filière bois est en très grande difficulté. Cependant, nous ne pouvons pas imposer du bois dans toutes les constructions.
De plus, l'application de cette disposition interviendrait par décrets ministériels et par arrêtés préfectoraux.
Je prendrai un exemple. Si à Tignes ou à La Plagne l'utilisation du bois avait été imposée, aurait-on réalisé ces inadmissibles constructions en béton, qui ont saccagé le paysage de cette montagne, l'une des plus belles du monde ?
L'utilisation du bois me semble normale dans les régions où il est traditionnel de recourir à ce matériau pour construire. Les habitants de Haute-Savoie ne me contrediront certainement pas si je dis qu'ils souhaitent l'implantation dans cette région de chalets en bois plutôt que de constructions en béton.
Par ailleurs, comme la forêt est, dans notre pays, une activité économique non négligeable, il paraît souhaitable de prévoir une telle disposition.
En outre, je rappelle que, du point de vue économique, la filière bois représente 550 000 emplois et est généralement localisée en milieu rural. N'avons-nous pas intérêt à encourager son développement ?
Enfin, j'indiquerai que l'Allemagne et les Pays-Bas ont adopté des réglementations visant à augmenter de 20 % la part du bois dans la construction.
Dans ces conditions, je ne pense pas que cette disposition soit déraisonnable. Aussi, je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir l'adopter.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Je partage l'avis que M. le rapporteur vient d'exprimer excellemment.
Notre filière bois connaît des difficultés. Je constate que certains pays de l'Union européenne ont adopté des dispositions beaucoup plus strictes en ce domaine. En l'occurrence, nous ne prévoyons pas de pourcentages, notamment pas de pourcentage uniforme, afin de laisser toute liberté. Il est clair que, selon le lieu et le type de construction, toutes les modulations seront possibles.
Compte tenu de l'importance économique et écologique du bois, la Haute Assemblée doit maintenir cette disposition, qui a été introduite par l'Assemblée nationale. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur votre amendement, monsieur Adnot.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 66.
M. Yann Gaillard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Il est évident que je partage en partie les restrictions intellectuelles de notre collègue Philippe Adnot, qui connaît bien l'importance de la filière bois dans le département de l'Aube et dans la France tout entière.
Je suis quelque peu réservé sur la rédaction qui a été adoptée par l'Assemblée nationale et qui est assez maladroite. Tel est notamment le cas de la dernière phrase, qui dispose : « Ce bois est récolté par une sylviculture respectueuse de l'environnement. » Cette rédaction est assez bizarre. De plus, elle est un peu dangereuse pour nous, dans la mesure où elle prête le flanc à toutes sortes de manoeuvres internationales sur l'écocertification. Mais ce n'est peut-être pas le moment d'ouvrir cette discussion.
Cela étant dit, ce paragraphe V est un signal, un salut à l'importance écologique du bois. Cette rédaction pourra sans doute être améliorée en commission mixte paritaire. Aussi, je voterai contre l'amendement de suppression.
M. Michel Souplet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Souplet.
M. Michel Souplet. J'exprimerai un peu les mêmes réserves que l'orateur précédent.
Monsieur Adnot, nous appartenons à la même profession, nous connaissons donc bien le métier et les difficultés du secteur de la forêt, en particulier s'agissant de l'exploitation du bois.
La rédaction n'est peut-être pas excellente. Toutefois, je préfère maintenir la mention de l'utilisation du bois dans le texte plutôt que de la supprimer. Je voterai donc contre l'amendement.
M. Philippe Adnot. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot. Je ne peux pas laisser supposer que si j'ai proposé cet amendement c'est parce que je ne serais pas aussi intéressé que mes collègues par la filière bois. Pour permettre à cette dernière de se développer et de se valoriser, il importe de créer des conditions favorables. Un certain nombre de dispositions sont nécessaires pour qu'elle puisse bien fonctionner, pour qu'elle soit une activité économique à part entière, ce qu'elle est d'ailleurs déjà dans de nombreuses régions. Pour autant, je ne vois vraiment pas pour quelle raison cela devrait passer par une obligation d'utilisation inscrite dans le présent projet de loi. En poussant le raisonnement à l'extrême, nous aurons bientôt l'obligation d'incorporer un certain pourcentage de bois dans la construction des cathédrales !
Je ne comprends pas qu'on ait recours à ce type de réglementation pour essayer de favoriser une filière. Il existe une multitude d'autres critères qui peuvent nous permettre de créer les conditions du développement de cette filière.
En l'occurrence, nous devons nous en remettre totalement à ce qui sera fixé par le décret en Conseil d'Etat. Nous ignorons donc tout de ce qui pourra être imposé. Cela me semble extraordinaire !
M. Emmanuel Hamel. Inquiétant et déraisonnable !
M. Philippe Adnot. Aussi, je maintiens cet amendement. Je sais que je serai battu ; du moins nous serons-nous exprimés !
M. Jean-Marie Girault. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Girault.
M. Jean-Marie Girault. J'aime le bois. Nous aimons tous le bois. C'est, passez-moi l'expression, un problème de culture pour les Français. Et les Allemands sont encore beaucoup plus sensibilisés que nous à l'utilisation du bois.
Tout à l'heure, M. le rapporteur évoquait des constructions érigées au mépris de ce qui est raisonnable. Ce sont alors les plans d'occupation des sols, par exemple, qui sont en cause. Selon l'ambiance d'une région, ou d'une province, ils peuvent créer pour tel ou tel lieu un certain nombre de normes à l'occasion des constructions.
Je ne suis pas d'accord pour en venir aujourd'hui à contingenter les matériaux pour construire des maisons. Aussi, je voterai l'amendement.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Je rejoins tout à fait l'orateur précédent : il n'est pas raisonnable d'introduire aujourd'hui dans des textes des obligations pour nos concitoyens, surtout dans le domaine de la construction.
La filière bois connaît effectivement un grand nombre de difficultés. Issu d'un département où cette filière est importante, la Haute-Savoie, auquel M. le rapporteur a fait allusion, je suis convaincu que ce n'est pas en fixant des quotas ou en prévoyant des obligations que l'on résoudra les problèmes de cette activité économique.
Je vous rappelle que les bétonniers utilisent une ressource minérale locale !
Non, on ne réglera pas ainsi des problèmes qui sont plus liés à l'architecture et à la culture architecturale locale. La construction de chalets en bois en zone de montagne, par exemple, répond à une logique.
Si une telle disposition était adoptée, elle ouvrirait la porte aux lobby des fabricants de PVC, d'aluminium ou de tous les produits qui résultent de technologies nouvelles, domaines qui connaissent parfois autant de difficultés que les filières économiques traditionnelles. Aussi, je rejoins notre collègue Adnot. Je voterai donc l'amendement.
M. Emmanuel Hamel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Vous me permettrez de citer Lamartine, qui fut membre de cette noble maison et vécut quelques mois dans le palais où réside actuellement le président du Sénat : « Arbres de la forêt, vous connaissez mon âme. »
Mon âme, madame le ministre, elle est faite notamment de l'admiration de la forêt. L'un de mes plus beaux souvenirs d'enfance, ce sont les promenades que je faisais en forêt de Fontainebleau, aux côtés de mes parents. Le bois, c'est une structure merveilleuse de la nature, et la lumière du soleil sur une nappe de bois, c'est merveilleux, surtout si elle reflète l'image d'un visage aussi beau que le vôtre, madame. (Sourires.)
Pour autant, introduire dans notre législation et notre réglementation des quotas, des dispositions de ce genre, c'est - peut-être vais-je un peu trop loin, mais il faut parfois que certains aillent trop loin - changer la nature de la France, pays de liberté et de responsabilité !
Vous donnez au pouvoir réglementaire la mission qui devrait être celle des architectes, séduits par la beauté du bois, et des écoles d'architecture, éveillant leurs élèves sur ce qu'il est possible de faire pour valoriser la beauté de notre pays par l'exploitation du bois.
Laisser au pouvoir réglementaire la possibilité de tout mettre en quotas, ce n'est plus être la France, pays de liberté.
Alors, développez la responsabilité, faites en sorte que chacun des membres de notre société soit plus conscient de ses devoirs dans l'utilisation des produits, à commencer par les plus nobles, comme le bois.
Mais, je vous en prie, et si grande que soit la nécessité de soutenir certaines activités et d'aider au développement de certaines branches actuellement en difficulté, n'allons pas, à partir d'un objectif respectable et valable, introduire dans notre législation des dispositions aux termes desquelles la France cesserait d'être ce qu'elle doit être, un pays de liberté et de responsabilité, et deviendrait un pays « soviétique » de quotas et d'obligations réglementaires ! (Applaudissements.)
M. Philippe François, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe François, rapporteur. Monsieur le président, pour essayer que nous revenions sur terre, je demande une brève suspension de séance afin de réunir la commission.
M. le président. Le Sénat va, bien sûr, accéder à cette demande.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures vingt-cinq.)