M. le président. « Art. 2. - L'article 9 de la loi du 2 juillet 1990 précitée est modifié ainsi qu'il suit : « au début de la seconde phrase du second alinéa, le mot : "Il" est remplacé par les mots : "Le contrat de plan de La Poste". »
Sur cet article, je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 8 est présenté par Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Garcia, Mélenchon, Pastor, Peyrafitte et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 36 est déposé par MM. Billard, Leyzour et Minetti, les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 37, MM. Billard, Leyzour et Minetti, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit l'article 2 :
« Le second alinéa de l'article 9 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications est complété par les dispositions suivantes :
« Il indique également le montant de la contribution de l'Etat aux investissements réalisés par France Télécom pour le développement des réseaux et des services qu'il fournit au public. »
Par amendement n° 38, MM. Billard, Leyzour et Minetti, les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit l'article 2 :
« L'article 9 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 est complété par l'alinéa suivant :
« Il précise notamment les missions de service public assignées à chaque exploitant et les conditions financières et techniques de leur atteinte. »
Par amendement n° 39, MM. Billard, Leyzour et Minetti, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit l'article 2 :
« Le second alinéa de l'article 9 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 est complété par la phrase suivante : "Il indique en particulier les conditions de la participation de chaque exploitant public à un aménagement équilibré du territoire." »
La parole est à M. Charzat, pour défendre l'amendement n° 8.
M. Michel Charzat. Il s'agit d'un amendement qui vise à préserver la procédure contractuelle, qui doit, selon nous, continuer à régir les rapports entre, d'une part, l'entreprise nationale et, d'autre part, son actionnaire principal.
En effet, l'ouverture, pour le moment, partielle du capital à 51 p. 100 permet de préserver le statut d'entreprise nationale puisque, aux termes de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, une personne morale de droit public qui possède plus de la moitié des actions de l'Etat reste une entreprise du secteur public. L'article 2 tend tout simplement à amoindrir considérablement la pratique contractuelle de la société nationale.
Je m'étonne qu'un ministre comme M. Fillon qui s'inscrit dans une tradition gaullienne en vertu de laquelle l'Etat actionnaire joue un rôle pour promouvoir un certain nombre d'objectifs d'intérêt national laisse passer cet amendement qui tourne le dos à toute la doctrine et toute la pratique française qui existe depuis longtemps, pratique que la gauche, il y a quelques années, avait modernisée à travers une gestion contractuelle beaucoup plus équilibrée.
En effet, dans cet article 2, vous ne faites pas disparaître le contrat de plan, mais vous le réduisez à peu de chose, puisque les dispositions fondamentales visant à gérer le cadre financier et à préciser l'évolution des tarifs et des investissements n'y figurent plus. C'est là un signe supplémentaire de la démission de l'Etat en faveur des intérêts privés et cela s'inscrit, selon nous, dans une logique générale qui vise à supprimer les relations contractuelles entre l'Etat et les entreprises nationales.
Cela correspond tout à fait au flou qui caractérise vos réponses à nos interrogations légitimes et fortes : quelle est votre politique industrielle ? Quels sont les objectifs de stratégie européenne ou mondiale que vous assignez à cette entreprise qui reste pour le moment nationale ?
Dès lors que vous ne pouvez pas ou ne voulez pas définir ces grandes priorités, ces grands objectifs structurants d'une gestion dynamique de cette entreprise nationale, vous vous condamnez à laisser le « pilotage automatique », c'est-à-dire le pilotage du marché, régir le devenir de l'entreprise nationale et, par là même, vous entrez dans cette logique de soumission aux intérêts particuliers qui vont peu à peu infléchir, puis contrôler la gestion de l'entreprise nationale. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons avec fermeté, monsieur le ministre, de maintenir le contrat de plan dans toutes ses prérogatives afin de ne pas laisser aux seules règles du marché le soin de fixer la politique française en matière de télécommunications.
M. le président. La parole est à M. Billard, pour défendre l'amendement n° 36.
M. Claude Billard. L'article 2 amoindrit le contrat de plan entre l'Etat et France Télécom, puisque toutes les dispositions tarifaires et financières en disparaissent pour être renvoyées au fameux cahier des charges.
A la lecture du rapport, on ne peut saisir l'ampleur du changement, puisqu'il est écrit : « L'article 2 du projet de loi maintient le principe d'un contrat de plan entre France Télécom et l'Etat. Il n'en précise pas, pour des raisons qui se comprennent aisément, le contenu. »
Eh bien si ! Nous en avons aisément saisi le contenu. Nous avons compris que vous souhaitez vider ce contrat de plan de tout contenu social et territorial.
Or, mes chers collègues, qui pourrait prétendre qu'un cahier des charges saurait suffire à la planification du développement des télécommunications en France ? Comment ne pas souligner la contradiction flagrante entre les discours et la réalité ? Je ne résiste pas à l'envie d'évoquer le discours du président de la République qui, à l'occasion du cinquantième anniversaire du Commissariat général du Plan, le 24 mai dernier, a prononcé un véritable plaidoyer en faveur de la planification :
« Toute société a besoin de stabilité, autant que de souplesse. Parce que l'économie n'a de sens que mise au service de l'homme, elle a besoin de repères, de points fixes, de continuité. L'Etat doit y jouer son rôle ».
Or avec le projet de loi de déréglementation du secteur des télécommunications et celui que nous examinons aujourd'hui, l'Etat prive la nation d'un outil essentiel d'aménagement du territoire... Mais cela ne tarit nullement les belles paroles !
Il n'est qu'à constater l'importance du nombre de discours ayant trait à l'aménagement du territoire : le Gouvernement et les membres de la majorité sénatoriale rivalisent de prouesses rhétoriques dans ce domaine... Malheureusement, les populations, les usagers, les salariés n'ont aucune peine à en mesurer les limites.
Pour notre part, nous sommes cohérents, et nous plaidons pour un aménagement du territoire harmonieux et équilibré, fondé sur des atouts nationaux tels que la SNCF, France Télécom et La Poste, mais aussi sur une réelle implication des établissements bancaires dans le développement de l'économie.
L'article 2 de ce projet de loi remet en cause la planification du secteur des télécommunications dans notre pays. Nous y sommes opposés, et c'est pourquoi, au nom des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, je vous propose d'adopter notre amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Minetti, pour présenter l'amendement n° 37.
M. Louis Minetti. Cet amendement vise à compléter le second alinéa de l'article 9 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications.
Nous souhaitons que le contrat de plan entre l'Etat et France Télécom - mais cela vaut aussi pour La Poste - précise « le montant de la contribution de l'Etat aux investissements réalisés par France Télécom pour le développement des réseaux et services qu'il fournit au public ».
L'expérience de la SNCF, dont la dette a explosé du fait d'investissements commandés par l'Etat, notamment pour financer les lignes TGV, devrait nous inciter, me semble-t-il, à envisager une solution de ce type.
Les investissements dans les réseaux de télécommunications effectués par l'entreprise doivent participer à l'aménagement du territoire. Or, pour assurer un accès à un réseau moderne jusque dans les départements ruraux, ceux dont la Commission de Bruxelles et le Gouvernement souhaitent une extinction lente et silencieuse, il n'est pas de meilleure garantie que l'engagement financier de l'Etat.
Une telle disposition est indispensable, car les investissements dans certaines zones ne sont pas rentables, au sens étroit du terme.
C'est donc à la collectivité d'en assumer la charge. Soyons clairs ! Avec la loi de déréglementation que vous avez votée la semaine dernière, si les opérateurs privés vont chercher à gagner des parts de marché sur des secteurs porteurs, là où il y a des « niches de profit », ces mêmes opérateurs privés ne sont pas philanthropes. Le service au public, ce n'est pas leur problème, et cela ne les intéresse pas.
Or la révolution informationnelle nécessitera des investissements considérables. Il convient que France Télécom soit en mesure de les assurer.
C'est tout le sens de l'amendement que nous vous demandons d'adopter.
M. le président. La parole est à M. Leyzour, pour défendre l'amendement n° 38.
M. Félix Leyzour. Avant de présenter l'amendement n° 38, je tiens à m'étonner du rapport présenté par M. Gérard Larcher, selon lequel « l'article 2 du projet de loi maintient le principe d'un contrat de plan entre France Télécom et l'Etat ». Pour des raisons qui se comprennent aisément, il n'en précise pas le contenu.
Je tiens à dire que nous ne comprenons pas pourquoi des éléments encadrant le contrat de plan ne seraient pas introduits dans ce projet de loi. Cela nous apparaît au contraire de la plus grande nécessité.
Nous proposons en conséquence d'indiquer explicitement dans le texte du projet de loi lui-même que le contrat de plan « précise notamment les missions de service public assignées à chaque exploitant et les conditions financières et techniques de leur atteinte ».
Nous refusons d'admettre que, comme l'affirme M. Gérard Larcher, « s'agissant d'une société de droit privé, les règles d'affectation des résultats relèvent des organes statutaires de la société ».
Cette démarche est, selon nous, marquée du sceau d'un grand mépris à l'égard du Parlement, c'est-à-dire à l'égard de la représentation nationale.
C'est pourquoi nous estimons qu'il faut donner un contenu réel au contrat de plan, notamment à son financement.
Nous vous proposons donc, par notre amendement, d'assurer dans une définition, certes sommaire, mais réelle, qu'à l'avenir l'intérêt général sera toujours au centre des objectifs du contrat de plan.
M. le président. La parole est à M. Billard, pour défendre l'amendement n° 39.
M. Claude Billard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre amendement tend à préciser l'action des exploitants publics, La Poste et France Télécom, dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire.
En effet, il est admis et reconnu que les services publics jouent un rôle majeur dans le maintien, voire l'arrivée, de population dans les zones que l'on dit « en voie de désertification ».
Or la loi de déréglementation des télécommunications, ajoutée au texte dont nous débattons actuellement, n'augure rien de bon pour un aménagement équilibré du territoire.
Un aménagement équilibré du territoire, cela signifie en premier lieu le maintien de l'emploi dans les agences France Télécom, le maintien de toutes les agences et, bien entendu, des investissements assurant un accès et une diffusion des services nouveaux en matière de télécommunication.
Si nous souhaitons l'inscrire à cet article, c'est que la loi sur l'aménagement du territoire du 6 février 1995 ne répond pas à cette exigence du maintien du réseau et du maillage.
C'est si vrai que les schémas sectoriels préalables aux schémas nationaux d'aménagement du territoire qui devraient être rendus publics ne le sont pas.
Dans bien des secteurs, je pense à France Télécom, mais aussi à la SNCF et à l'industrie d'armement dont la situation est préoccupante, vous avancez des solutions qui contrecarrent toute idée d'un développement harmonieux du territoire.
Nous pensons, au contraire, que France Télécom, tout comme La Poste, a une responsabilité territoriale à assumer. C'est tout le sens de notre amendement que je vous propose, mes chers collègues, d'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 8 et 36, 37, 38 et 39 ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur l'amendement n° 8 du groupe socialiste, je rappelle que l'article 2 du présent projet de loi maintient la possibilité d'un contrat de plan entre l'Etat et France Télécom.
Il retire simplement du contrat de plan la fixation des tarifs, car la loi de réglementation que nous avons adoptée la semaine dernière inclut cette fixation dans le cahier des charges de France Télécom.
Voilà pourquoi nous ne pouvons être favorables ni à cet amendement n° 8 ni à l'amendement n° 36.
L'amendement n° 37 tend à favoriser les investissements nécessaires, mais il instaure entre France Télécom et l'Etat des relations différentes de celles qui existent entre une société et son actionnaire. Toutefois, depuis des années, c'est plutôt l'inverse qui se produit, notamment depuis la loi de 1990, puisque c'est France Télécom qui fournit à l'Etat un certain nombre de moyens. Je citerai ainsi les 16 milliards de francs de contribution annuelle, les investissements dans des entreprises publiques défaillantes, et la manière exemplaire dont France Télécom a été contrainte d'investir dans Bull. C'était en 1992. Le non-paiement des factures dues à France Télécom entre 1990 et 1993 constitue un autre exemple du sens inverse de ce qui a été pratiqué par rapport à ce que vous préconisez.
Nous ne sommes pas favorables à cet amendement, ce qui ne veut pas dire que nous souhaitons voir perdurer des situations qui ne sont pas acceptables pour l'opérateur, qu'il soit public ou qu'il devienne société nationale à statut de société anonyme.
L'amendement n° 38 a pour objet de spécifier les conditions du contrat de plan, notamment des missions de service public. Je rappelle que l'article 3 de la loi de 1990 reste pleinement en application.
Il y est précisé : « France Télécom a pour objet, selon les règles propres à chacun de ces domaines d'activités contenues notamment dans le code des postes et télécommunications, d'assurer tout service public de télécommunications dans les relations intérieures et internationales, et en particulier d'assurer l'accès au service du téléphone à toute personne qui en fait la demande ». Cet article 3 reste pleinement valable.
Par ailleurs, l'article L. 35-2 du code des postes et télécommunications tel qu'il résulte de nos délibérations de la semaine dernière dispose : « Le cahier des charges d'un opérateur chargé de fournir le service universel... » - et c'est bien le cas de France Télécom puisque, à l'alinéa précédent, il est précisé que France Télécom est l'opérateur chargé de fournir le service universel - « ... est établi après avis de la commission supérieure des postes et télécommunications et détermine les conditions générales de fourniture de ce service, et notamment les obligations tarifaires nécessaires, d'une part, pour permettre l'accès au service de toutes les catégories sociales de la population, d'autre part, pour éviter toute discrimination fondée sur la localisation géographique. Il fixe également les conditions dans lesquelles les tarifs du service universel et sa qualité sont contrôlés. »
Ainsi, la préoccupation de nos collègues me semble déjà prise en compte, et c'est pourquoi nous sommes défavorables à l'amendement n° 38.
J'en viens à l'amendement n° 39.
Dieu sait que, la semaine dernière, le sujet de l'aménagement du territoire a provoqué quelques frissons dans cet hémicycle. Ce matin même encore, la commission mixte paritaire constituée sur le projet de loi de réglementation des télécommunications y a consacré beaucoup de temps. Il a été dit, notamment, que nous devions clairement marquer notre volonté en matière d'aménagement du territoire. Je peux même préciser, sans trahir le secret des délibérations, que les vues du Sénat ont, ce matin, rallié une nette majorité des membres de cette commission mixte paritaire.
Je rappelle que l'article 3 de la loi du 2 juillet 1990 mentionne l'aménagement du territoire. Or cette disposition est toujours valide.
De même, dans le projet de loi de réglementation, l'article L. 32-1 du code des postes et télécommunications fait figurer cette préoccupation d'aménagement du territoire au premier rang des « exigences essentielles ».
Là encore, le souci de nos collègues est clairement pris en compte dans le texte de réglementation comme dans la loi de 1990. Nous sommes donc également défavorables à l'amendement n° 39.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 8 et 36, 37, 38 et 39 ?
M. François Fillon, ministre délégué. L'objet de l'article 2 du projet de loi est précisément de prévoir un contrat de plan entre France Télécom et l'Etat. Ce contrat de plan permettra notamment de clarifier la stratégie de l'actionnaire maj1oritaire de France Télécom.
Les raisons qui sont invoquées pour justifier la suppression de l'article 2 visent le contenu de ce contrat de plan.
Or, mesdames, messieurs les sénateurs, comme vient de le rappeler M. le rapporteur, le texte de réglementation, adopté par le Sénat la semaine dernière, prévoit, d'une part, que les tarifs du service universel sont contrôlés par l'Etat et, d'autre part, que les autres tarifs font l'objet de dispositions du cahier des charges, lui-même contrôlé par l'Autorité de régulation des télécommunications.
Il y aurait donc une contradiction évidente à vouloir inclure dans un contrat devant être passé entre l'Etat et France Télécom des dispositions qui relèvent désormais, en vertu du texte voté voilà quelques jours, du cahier des charges et de l'Autorité de régulation des télécommunications.
S'agissant de l'affectation des résultats, je rappelle que, selon le droit commun des sociétés anonymes, c'est l'assemblée générale des actionnaires qui en décide. Or l'Etat sera majoritaire dans l'assemblée générale des actionnaires de France Télécom.
Pour ce qui est de la stratégie industrielle de France Télécom, je fais remarquer que c'est justement pour donner à France Télécom la liberté de choix et l'autonomie nécessaires à une meilleure « réactivité » que le Gouvernement a présenté ce projet de loi. Nous souhaitons donc que ce soit l'entreprise qui définisse librement sa stratégie, tout en menant, comme il est normal, un dialogue avec l'actionnaire majoritaire.
Le Gouvernement est, par voie de conséquence, défavorable aux amendements n°s 8 et 36.
Quant à l'amendement n° 37, il aurait un sens si c'était bien l'Etat qui avait financé les investissements de France Télécom tout au long de ces années. Or la réalité est tout autre : c'est la DGT, dans un premier temps, et France Télécom elle-même, dans un second temps qui ont financé ces investissements.
En fait, ce sont les usagers qui, à travers les tarifs, d'ailleurs un peu élevés, de France Télécom, ont permis la réalisation de ces investissements.
S'agissant de l'amendement n° 38, qui vise à inclure la définition des missions de service public et leurs conditions de fourniture dans le contrat de plan, là aussi, il y a erreur d'instrument. En effet, c'est dans le cahier des charges de France Télécom et non dans le contrat de plan que doivent figurer les obligations liées aux missions de service public de l'entreprise nationale, missions énumérées clairement dans le texte de réglementation des télécommunications.
En vérité, ce serait affaiblir les missions de service public que de les transposer dans le contrat de plan puisque cela supposerait que ces missions ont un caractère contractuel, alors que c'est la loi qui les définit, le Gouvernement étant chargé de veiller à leur bon accomplissement.
Enfin, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 39, qui vise à inclure la participation de La Poste et de France Télécom à l'aménagement du territoire dans les contrats de plan, car cet amendement est doublement inutile.
La loi du 4 février 1995 sur l'aménagement et le développement du territoire fixe un certain nombre d'obligations. Les cahiers des charges des exploitants prévoient déjà certaines modalités de participation de La Poste et de France Télécom à cet objectif. Le contrat de plan peut apporter des précisions dans le cadre établi par ces textes, sans qu'il soit besoin de le spécifier ici.
L'amendement n° 39 renverse cette perspective puisqu'il renvoie à titre principal au contrat de plan. Cela laisse supposer que les obligations fixées par ailleurs, notamment par la loi, seraient négociables avec les deux exploitants, ce qui, du point du vue du Gouvernement, n'est évidemment pas acceptable.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 8 et 36.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Sous son aspect anodin, cette disposition concernant le contrat de plan de France Télécom est très importante. En effet, il s'agit très directement de la question, si souvent évoquée, de la péréquation géographique et sociale, donc de l'aménagement du territoire.
Cette péréquation ne peut s'opérer que de deux façons : soit il existe une entreprise du secteur public qui est bénéficiaire et qui reverse une partie de ses bénéfices aux populations les plus défavorisées ou aux territoires les plus lointains - et c'est la seule procédure qui soit véritablement satisfaisante -, soit c'est l'Etat qui verse des subventions.
Cette seconde procédure est évidemment liée à l'évolution des budgets. Or, chacun le sait, la ressource publique se fait de plus en plus rare. Au demeurant, l'expérience a prouvé que cette méthode ne pouvait aboutir qu'à une impasse.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que demeure la mention des conditions tarifaires dans le contrat de plan. En effet, la disparition de cet élément des textes antérieurs signifierait l'impossibilité de fait pour l'Etat d'imposer à France Télécom les aménagements nécessaires en vue d'obtenir un minimum de péréquation géographique et sociale.
Vous nous dites, monsieur le ministre, que cela est précisé dans d'autres lois, notamment dans la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, dite « loi Pasqua ».
Il se trouve que cette loi a fait l'objet d'une rencontre au Sénat. Je n'ai pu y participer, n'ayant pas été invité, pas plus d'ailleurs qu'aucun autre membre de la minorité du Sénat. Quoi qu'il en soit, j'ai pu prendre connaissance des « minutes » de cette rencontre, ce qui m'a permis de constater que des membres éminents de votre majorité se plaignaient, les uns amèrement, les autres plus légèrement, du fait qu'un certain nombre de fonds prévus dans la loi n'avaient pas été mis en place. Et le ministre de répondre, un peu gêné tout de même, que, pour des raisons d'économies, le Gouvernement n'avait pas, jusqu'à présent, eu la possibilité de publier le décret permettant de mettre effectivement en oeuvre ce que le Parlement avait voté.
Nous savons ce que valent les mots ! Mieux vaut s'en tenir aux actes !
En l'occurrence, ce que vous faites là, c'est, d'une certaine façon, délier l'Etat et France Télécom de toute obligation réelle d'aménagement du territoire.
Monsieur Larcher, vous êtes un très ardent promoteur de ce thème. Je pourrais vous dire que je vous donne rendez-vous dans quelques années, mais il n'est même pas nécessaire d'attendre puisque, ainsi que je viens de le montrer, dès à présent, vous ne respectez pas, vous qui étiez rapporteur de la loi Pasqua au Sénat, le rendez-vous que vous nous avez fixé l'an passé.
Il n'y a pas de doute, les choses vont s'aggraver, et sur un sujet, le droit à communiquer, qui est au coeur de notre démocratie, qui est l'un des éléments majeurs de l'équilibre du territoire.
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Voilà un superbe exemple du dialogue de sourds qui nous occupe depuis huit jours.
Les tarifs du service public, vous le savez parfaitement, monsieur Delfau, puisque vous avez participé avec assiduité aux débats, sont de la compétence de l'Etat. Tout le discours que vous venez de tenir n'a donc aucune espèce de fondement. C'est l'Etat qui, de par la loi, contrôlera le service public, et celui-ci sera exactement le même qu'aujourd'hui.
M. Gérard Delfau. Ce sera un service public réduit !
M. François Fillon, ministre délégué. Le projet de loi de réglementation définit le contenu de ce service public, que le Parlement pourra, je le rappelle, enrichir quand il le souhaitera.
Je rappelle également que le service public sera financé par l'ensemble des opérateurs au prorata de leurs activités.
Cela signifie que, s'il n'y a pas réellement ouverture à la concurrence, ce que je ne souhaite pas, France Télécom restera dans la situation où elle se trouve aujourd'hui et pourra financer la péréquation grâce à ses résultats, ce qui est le cas actuellement, mais que s'il y a, au contraire, ouverture à la concurrence, ce sont les opérateurs privés qui financeront le service public, à travers le fonds de service universel et la taxte additionnelle aux tarifs d'interconnexion.
Par conséquent, tout le discours que nous venons d'entendre, et je connais trop M. Delfau pour croire qu'il se trompe, ne repose sur aucun fait. Il est en contradiction totale avec le texte que le Sénat a adopté vendredi matin.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 8 et 36, repoussés par la commission et par le Gouvernement.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 39, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)

Article 3