M. le président. M. Charles Metzinger appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les circulaires n° 81-46 et n° 81-252 du 9 juillet 1981 relatives aux modalités d'établissement des autorisations collectives de sortie du territoire pour des élèves mineurs.
Dans les régions frontalières, et c'est le cas en Moselle, l'enseignement précoce d'une langue étrangère à l'école primaire, en l'occurrence l'allemand, est devenue une pratique courante et les enseignants y associent souvent des projets d'échanges et de rencontres avec des écoles allemandes qui ont élaboré des programmes similaires.
L'obligation faite par cette circulaire au chef d'établissement ou au directeur d'école de s'assurer de la nationalité française de l'élève en demandant communication de sa carte nationale d'identité ou de son passeport périmé depuis moins de cinq ans revêt souvent un caractère dissuasif pour l'élève de participer à ces projets pédagogiques.
Depuis 1981, des traités admettent la libre circulation des personnes à l'intérieur de la Communauté européenne. Afin que tous les élèves puissent sans difficulté participer à ces échanges transfrontaliers, il lui demande de bien vouloir reconsidérer cette circulaire pour en assouplir les modalités. (N° 395.)
La parole est à M. Metzinger.
M. Charles Metzinger. La circulaire en question a été signée conjointement, le 9 juillet 1981, par le ministre de l'intérieur et le ministre de l'éducation nationale : c'est pourquoi je m'adresse à vous, monsieur le ministre de l'intérieur.
L'enseignement précoce d'une langue étrangère à l'école primaire est devenue une pratique courante, en particulier dans les régions frontalières comme la Moselle, où l'allemand est enseigné dans de nombreuses classes primaires. Nos voisins allemands ont adopté une pratique similaire avec l'enseignement du français. Il en résulte des échanges et des rencontres entre écoles primaires françaises et allemandes ; elles participent d'une pédagogie vivante et appliquée.
Malheureusement, ces échanges sont souvent remis en question pour des raisons administratives par l'application de la circulaire précitée.
Cette circulaire définit les modalités de l'établissement des autorisations collectives de sortie du territoire pour les élèves mineurs. Elle dispose, en particulier, que le chef d'établissement ou le directeur d'école doit s'assurer de la nationalité française de l'élève en demandant communication de sa carte nationale d'identité ou de son passeport, la possession de l'un ou de l'autre de ces documents étant nécessaires pour l'admission dans les pays visités au nombre desquels figure l'Allemagne.
L'application stricte de cette circulaire, je le répète, constitue souvent un obstacle aux échanges pédagogiques.
Depuis 1981, des traités relatifs à la construction de l'Union européenne ont admis la libre circulation des personnes au sein de la Communauté. Les enfants concernés par les échanges sont compris dans les effectifs d'une classe d'école. Dès lors, ne peut-on pas admettre que, sous la responsabilité des enseignants, il est établi qu'un enfant, même à défaut de la présentation d'une pièce d'identité, est bien membre de la collectivité fréquentant l'école ? Cela permettrait d'éviter que l'exigence de cette pièce d'identité ne soit dissuasive quant à la participation des élèves à ces échanges transfrontaliers.
L'application stricto sensu de cette circulaire semble correspondre à la volonté de l'administration puisque certains sous-préfets l'ont rappelée récemment aux directeurs d'école.
Monsieur le ministre, à l'heure où l'Europe se veut davantage accessible aux citoyens, les conséquences de ce texte me paraissent quelque peu démesurées. N'est-il pas possible d'assouplir cette règle qui semble par trop rigide en 1996 ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, la circulation transfrontalière, y compris dans l'espace européen, est subordonnée à la possession par toute personne d'un document de voyage individuel ou collectif.
Cette obligation s'applique également, d'une manière plus contraignante, aux mineurs. Lorsqu'ils voyagent avec une carte nationale d'identité ou avec un passeport périmé depuis moins de cinq ans, ces documents doivent être accompagnés d'une autorisation de sortie du territoire. Dans le cadre de l'exercice de l'autorité parentale, cette autorisation permet aux parents de manifester leur accord pour le déplacement envisagé.
Cette obligation d'autorisation ne s'applique pas dans le cas où le mineur voyage avec un passeport en cours de validité, celui-ci valant en effet autorisation de sortie du territoire.
En ce qui concerne les voyages scolaires, une première circulaire, du 9 juillet 1981, a prévu, dans un souci de simplification, une autorisation collective de sortie du territoire établie sous l'autorité des directeurs d'école ou des chefs d'établissement après accord des parents. Cette autorisation n'est cependant valable que pour un seul voyage.
Les accords internationaux obligent à la possession d'un document de voyage individuel ou collectif.
Le développement des déplacements des mineurs, notamment à l'occasion des activités scolaires, a conduit l'administration à aménager encore certaines obligations. J'ai, dans cet esprit, signé le 2 janvier 1996 une circulaire prise en application d'une action commune de l'Union européenne relative à la diffusion d'un document de voyage collectif pour les mineurs ressortissants d'Etats tiers à l'Union. Ce document s'applique dans le cadre de voyages scolaires sur le territoire de l'Union européenne.
A cette occasion, j'ai tenu compte de la situation des départements frontaliers en autorisant pour ceux-ci, et à titre dérogatoire, une validité étendue à l'année scolaire et non à un seul voyage.
L'accueil très favorable réservé à ce document m'a conduit à saisir récemment le ministère des affaires étrangères pour proposer à nos partenaires de l'Union européenne une extension de ce document de voyage à l'ensemble des élèves scolarisés en France, et non plus uniquement aux élèves scolarisés dans les départements frontaliers.
L'autorisation collective vaudra pour tous les voyages accomplis pendant une même année scolaire. Cette mesure s'appliquera à l'ensemble des établissements d'enseignement français engagés dans des actions de coopération scolaire transfrontalilère et devrait bénéficier, en tout premier lieu, aux établissements des départements frontaliers.
Voilà, monsieur le sénateur, les précisions que je pouvais vous apporter. Mon souci est, naturellement, de ne pas déposséder les parents de leur autorité parentale, car ils doivent rester responsables de ce que font leurs enfants, tout en facilitant, dans le monde qui est le nôtre, les voyages scolaires de tous les enfants de France au sein de l'Union européenne.
M. Charles Metzinger. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Metzinger.
M. Charles Metzinger. Monsieur le ministre, je constate un certain assouplissement par rapport à cette circulaire initiale de 1981.
Je voudrais tout simplement préciser que, dans le cas que j'ai évoqué, il s'agit non pas uniquement de voyages scolaires mais aussi d'échanges pédagogiques qui ont lieu plus d'une fois par an, et sont parfois d'une durée assez importante.
J'ajoute que, depuis le traité de Karlsruhe signé au mois de février dernier par la France, l'Allemagne, la Suisse et le Luxembourg, les collectivités territoriales transfrontalières sont autorisées à réaliser certaines opérations ensemble, ce qui n'était pas possible auparavant sans dérogation spéciale. Ce traité semble de nature à favoriser le développement des échanges scolaires au sein de l'Union européenne. Cet assouplissement de la circulaire de 1981 ne peut donc qu'aller dans le bon sens.

Situation de l'institut médico-éducatif
de Sainte-Fortunade en Corrèze