M. le président. M. François Lesein expose à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation que la loi n° 1134 du 27 décembre 1994, modifiant certaines dispositions relatives à la fonction publique territoriale, ainsi que la circulaire du 13 février 1995 laissent encore sans réponse un certain nombre de questions concernant la situation et la gestion des cadres A territoriaux, momentanément privés d'emploi.
Il lui demande s'il envisage de publier prochainement des décrets d'application, notamment sur l'article 97 de la loi du 27 décembre 1994, afin de préciser l'organisation et les conditions de rémunération des missions pouvant être confiées à cette catégorie de fonctionnaires. (N° 400.)
La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur le sort réservé aux cadres A sans emploi, habituellement appelés « en incident de carrière ».
Vous avez déploré, vous aussi, le gaspillage de ces talents. Voilà deux ans, j'avais déposé, avec certains de mes collègues, divers amendements au texte devenu la loi Hoeffel du 27 décembre 1994. Le Sénat n'avait bien sûr pas retenu tous ces amendements.
Force est de constater que la situation n'a guère évolué dans un sens positif depuis deux ans, le contingent des cadres A sans emploi payés par le CNFPT s'élevant toujours à plus de 200, nombre auquel s'ajoutera, au fil des mois à venir, la prise en charge d'une centaine de responsables administratifs dont le détachement sur emploi fonctionnel a pris fin depuis juin 1995. Présentement, ils sont maintenus en surnombre dans leur collectivité d'origine pour une durée d'un an.
Ces missions temporaires, que nous avions demandé au CNFPT de confier à ces personnes en attente d'une situation, ont été très utiles aussi bien aux intéressés qu'aux collectivités bénéficiaires.
Ces agents privés d'emploi perçoivent une rémunération réduite à leur salaire indiciaire, prime de résidence et quotient familial inclus. Privés de fonctions, ils ne perçoivent pas le régime indemnitaire statutaire lié à leur grade, non plus que la prime annuelle versée par de nombreuses collectivités.
Monsieur le ministre, pourriez-vous demander au CNFPT ainsi que, pour les autres catégories, aux centres départementaux de gestion de bien vouloir préciser le régime mis en place à l'intention des agents pris en charge effectuant des prestations temporaires, de façon à clarifier la règle du jeu ? A quelles primes et indemnités ont-ils droit ? De quelles prises en charge peuvent-ils bénéficier ?
Comment cela se passe-t-il, très concrètement ? L'agent en mission négocie directement auprès des tiers, collectivités ou autres, les avantages matériels dont il pourra bénéficier. Des disparités de traitement ne peuvent manquer de résulter de la liberté ainsi laissée aux employeurs d'accorder ce que bon leur semble, ce qui, à mon sens, ne va pas dans le sens d'une bonne gestion de tous ces cadres, qui ont besoin de sécurité. Ne pas remédier à cette situation, c'est risquer de susciter découragement ou démotivation à la suite de quelques mauvaises expériences.
Je note, monsieur le ministre, que les articles 97 et 97 bis modifiés n'ont fait l'objet d'aucun décret d'application spécifique, malgré la complexité du sujet traité. Or, vous le savez, certaines personnes vont avoir tendance à abuser, notamment à cumuler plusieurs activités, ce qui engendrera des gains indus. M. Hoeffel avait cru bien faire en interdisant aux fonctionnaires privés d'emploi le cumul de leur rémunération principale avec des rémunérations accessoires liées à des activités annexes pendant la durée de leur prise en charge. Notre collègue M. Jean-Jacques Hyest, alors rapporteur à l'Assemblée nationale du projet de loi adopté par le Sénat, s'était interrogé sur la constitutionnalité de cette disposition.
Je ne vous cache pas ma perplexité devant les conséquences juridiques ouvertes par la modification introduite à l'article 97. Très concrètement, comment mettre en oeuvre cette nouvelle législation sans définir, au préalable, par décret et les cumuls d'activités autorisés ? Monsieur le ministre, il s'agit là de fonctionnaires de grande compétence, de cadre A, en général, et qui ont fait preuve d'un non moins grand dévouement.
M. le président. Monsieur Lesein, veuillez conclure, je vous prie.
M. François Lesein. Je termine, monsieur le président.
Monsieur le ministre, au moment où les organes dirigeants des centres départementaux de gestion et, surtout, du Centre national de la fonction publique territoriale vont être renouvelés, ne serait-il pas opportun de se pencher de nouveau sur la situation des fonctionnaires privés d'emploi et de préciser par décret les modalités de gestion de ces personnels, ce qui favoriserait la reprise d'activité ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur Lesein, le texte de 1994 est d'application directe, comme cela a été bien précisé par la circulaire du 13 février 1995. Il n'est donc pas nécessaire de prendre des textes réglementaires.
Quelle est la règle ? Elle est simple. En effet, le CNFPT est l'employeur, et il lui appartient d'assurer la rémunération principale. S'il confie des missions à ses personnels, il lui appartient aussi de décider éventuellement du régime indemnitaire qu'il souhaite leur appliquer et d'assurer les frais de ces missions, en particulier les frais de déplacement. Je crois savoir qu'un certain nombre de cas concrets se sont, à cet égard, posés. Je le rappellerai au CNFPT si cela s'avérait nécessaire, car il est l'employeur et doit assurer l'intégralité de ses responsabilités.
S'agissant du cumul avec d'autres activités, je ferai simplement une réflexion de caractère général sur ces personnels temporairement privés d'emploi qui sont pris en charge collectivement par le Centre national de la fonction publique territoriale. Ces situations ont pour vocation d'être temporaires et les plus courtes possible. Il y aurait donc tout de même quelque paradoxe à faire assumer, d'une manière mutualisée, par les collectivités locales, la prise en charge de ces personnes et à accepter qu'outre le maintien de leur rémunération, et malgré les incidents de carrière auxquels vous faisiez allusion, elles perçoivent des rémunérations complémentaires en occupant d'autres emplois à temps partiel. Ce n'est pas la vocation de ce système, qui doit être limité dans le temps.
Si ces personnes ont l'occasion d'exercer d'autres activités, peut-être peuvent-elles aller jusqu'au bout de la logique et donc effectivement sortir du dispositif de prise en charge par le CNFPT.
M. François Lesein. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. Je remercie M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation de la façon dont il considère le rôle du Centre national de la fonction publique territoriale. Je pense que tout cela devait être précisé. Il lui appartiendra de « tirer la sonnette » du CNFPT afin que ce dernier applique la même règle à tous.
Concernant le cumul, monsieur le ministre, je ne souhaite évidemment pas que ces agents puissent tirer profit de crédits provenant des collectivités locales, communes ou départements. Cependant, lorque l'un de ces agents accepte une mission, ce qui est justement ce que nous souhaitions tous, il engage des frais, car il est obligé, sur place, de louer un meublé tout en gardant, bien sûr, son domicile principal, puisque la mission ne dure pas plus de six mois, sans compter les frais de déplacement, quand ils sont contraints d'aller à l'autre bout de la France.
Je peux vous citer des exemples de personnes qui ont accepté ces missions et qui en étaient, à la fin, de leur poche. Le compte n'y était pas ! Elles se résoudront peut-être un jour à refuser de partir en mission, considérant que ceux qui restent au siège sont payés parce qu'ils ont été embauchés et que, elles, n'ont rien du tout.
Cette situation mérite d'être corrigée. Je serais très heureux, au nom de tous ces agents, de ces laissés-pour-compte temporaires, que vous puissiez établir une règle définitive, monsieur le ministre.

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à l'égard des gens dits « du voyage »