13. Les conséquences de l'accident de Tchernobyl - Interventions de MM. Denis JACQUAT, député (UDF), rapporteur pour avis, Christian DANIEL, député (RPR), Jean BRIANE député (UDF), Claude BIRRAUX, député (UDF), et Nicolas ABOUT, sénateur (Ap. RI) (Jeudi 25 avril)

Le rapporteur signale qu'à l'instant même un incendie fait rage autour de Tchernobyl et que le vent et la chaleur diffusent des éléments radioactifs dans une zone où habitent 800.000 habitants. L'an dernier, un "léger accident" a eu lieu, qui était en fait un incident de type 3. D'autres incidents ont eu lieu, et on a appris qu'en Arménie la centrale de Medzamor, qui avait été fermée en 1989, vient d'être relancée. Cette centrale figure sur la liste des installations dangereuses, les mécanismes de contrôle et de sécurité y sont insuffisants, mais les Arméniens n'en peuvent plus de subir des hivers rigoureux et ils ont obtenu une aide de 22 millions de dollars de Moscou.

Il rappelle que la catastrophe de Tchernobyl a eu lieu lors d'un essai, alors que le système de refroidissement était débranché. Des tonnes de béton se sont écroulées et la centrale a émis des particules radioactives pendant dix jours. Près de 200.000 "liquidateurs" ont été irradiés, tandis que l'Agence de l'énergie nucléaire s'est préoccupée surtout de l'image de cette énergie. Seules les télévisions scandinaves et allemandes ont diffusé dès l'origine des informations sur la catastrophe.

Le débat d'aujourd'hui ne trouve pas simplement sa justification dans un anniversaire. Il s'agit de rappeler l'ampleur d'une catastrophe qui fera sentir ses effets au moins jusqu'à l'an 2006, et qui appelle un débat d'aujourd'hui et de demain. Il faut savoir que 96 % du réacteur actif est composé de plutonium 239 qui met 24.000 ans pour perdre 50 % de sa radioactivité. Le sarcophage de béton est fissuré et l'eau de pluie pénètre à l'intérieur. L'ensemble vacille.

Quant au nombre de morts, il va 60.000 à 135.000 selon les estimations et le nombre des cancers de thyroïde est en nette progression. En outre il existe huit cent six sites à ciel ouvert où est déposé du matériel radioactif et on compte encore sur le territoire de l'ancienne Union Soviétique quinze réacteurs du type Tchernobyl en activité.

Le coût de la fermeture de l'installation de Tchernobyl est estimé entre 1,6 et 4 milliards de dollars. Cette fermeture a été promise lors du dernier G7 à Moscou et devrait intervenir avant l'an 2000. Les deux réacteurs en construction ne seraient pas achevés. Mais il faudrait également fermer les réacteurs du même type dans l'ancienne Union Soviétique.

Le rapporteur estime qu'il faut impérativement développer d'autres sources d'énergie, comme la centrale à houille très performante développée par Siemens et EDF en Ukraine, qu'il faut démanteler l'énergie nucléaire à l'ouest et manifester sa solidarité avec les enfants et les adultes qui ont besoin de centres de santé sur place. La création d'une Commission ad hoc rattachée à la Commission de l'environnement devrait étudier les cimetières nucléaires et chimiques. C'est à peu près tout ce qu'il est possible de faire aujourd'hui.

M. Denis JACQUAT, député (UDF), rapporteur pour avis de la Commission des questions sociales, de la santé et de la famille , formule les observations suivantes :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, la Commission des questions sociales, de la santé et de la famille, présidée par M. Grüsenbauer, m'a demandé en tant que parlementaire, mais surtout comme médecin diplômé de réparation juridique du dommage corporel, d'étudier les conséquences sanitaires de la catastrophe de Tchernobyl.

" J'ai accompli cette mission avec un professeur de radiobiologie de renommée mondiale, le professeur Planel. Les conséquences sanitaires doivent être étudiées de façon impartiale. Beaucoup a été dit sur Tchernobyl mais il est très important de savoir quelle est l'exacte vérité.

" Cette mission faisait suite à un rapport sur les conséquences de l'accident de Tchernobyl rédigé il y a quelques années pour la même Commission et pour le Conseil de l'Europe par Mme Ragnarsdóttir. A l'époque, les conclusions étaient qu'il fallait prendre encore un peu de recul pour juger exactement les conséquences de cette catastrophe.

" Cette dernière est le résultat de la très grave combinaison de déficiences de conception et de violations de procédures. Cela a concerné l'essai, la structure, et l'information sur l'explosion. N'oublions pas que ce sont les Suédois qui nous ont informé de la catastrophe.

" Suite à l'explosion un nuage radioactif est parti dans l'air. Il y a eu contamination externe et interne principalement avec de l'iode 131 et du césium 137. Les conséquences de ce nuage radioactif ont été compliquées par une contamination en tache de léopard à cause de la pluie, des endroits ayant été plus contaminés que d'autres.

" Une affection domine plus que les autres, celle qui est liée à l'iode 131 qui contamine la thyroïde de l'enfant. On note en Ukraine, en Bélarus et en Russie une augmentation très importante des cancers de la thyroïde de l'enfant -ils sont multipliés par dix. Ils auraient pu être évités car il y a eu mensonge au sujet de la catastrophe. Il n'y a pas eu distribution d'iode stable qui permet d'éviter les cancers de la thyroïde chez l'enfant. Le produit n'ayant pas été distribué ou trop tardivement, des enfants ont été contaminés dans le ventre de leur maman. Les adolescents ont été contaminés jusqu'à l'âge de 18 ans. Le phénomène a été aggravé car la population connaissant des problèmes d'équilibre alimentaire, la contamination était encore plus facile.

" Une autre catégorie de la population a été atteinte par l'iode 131, ce sont les "liquidateurs", ces personnes qui ont travaillé pour éteindre l'incendie. Les contaminations ont doublé. Sur les 830.000 liquidateurs touchés, 200.000 sont menacés, mais on ne peut affirmer qu'ils auront un cancer de la thyroïde. Par contre, 1.200 enfants sont atteints du cancer de la thyroïde. Nous l'avons constaté en consultant des registres.

" Le deuxième composant est le césium 137. Contrairement à l'iode dont la durée de vie est de huit jours et dont on peut mesurer aujourd'hui les méfaits, le césium 137 a une durée de vie de trente ans. Pour le moment, on ne peut relever l'apparition de tumeurs osseuses résultant d'une absorption massive de césium 137, mais il faut rester méfiant et vigilant sur ce point.

" Troisième grande catégorie de maladie : les troubles neurovégétatifs. Une psychose a été créée et de nombreuses personnes malades, ou qui ne se sentent pas bien, essaient parfois de faire croire -c'est dans la nature humaine- que leur mal est dû à la catastrophe de Tchernobyl.

" Pour tout le reste, tumeurs et autres, pour le moment, on ne peut pas vraiment juger.

" En conclusion, il faut veiller à ne pas avoir de faux malades ou de faux-vrais malades, mais il ne faut pas oublier non plus que des maladies peuvent se déclarer dans un deuxième temps liées aux troubles de la thyroïde ou dues au césium et à d'autres radionucléides.

" Toutefois, j'ai pu noter une différence de discours entre les politiques et les médecins. Les politiques ont tendance à dire que tout ce qui est sanitaire dépend de Tchernobyl. Les médecins sont plus justes en ce qui concerne les conséquences.

" Au sujet de la thyroïde des enfants, j'ajouterai que le diagnostic est établi par les médecins des trois pays, surtout grâce à du matériel en provenance d'Europe de l'ouest. La chirurgie est parfaitement bien réalisée dans les trois pays. Par contre, se pose le problème du traitement postopératoire. Ces enfants ne peuvent être traités dans les trois pays parce que ceux-ci n'ont pas les moyens techniques pour les soigner. Ils viennent donc en Europe de l'Ouest et, malheureusement nous n'avons pas les capacités suffisantes pour les soigner tous. Sur les 1.250 enfants touchés, seules quelques centaines ont été traités correctement. Le quart de ces 1.250 enfants présentent des métastases, mais soignés correctement, 95 % d'entre eux seront guéris. Si l'Ukraine, le Bélarus et la Russie ont été atteints, j'ai l'impression que le Bélarus a été le grand oublié de l'histoire. Souvenons-nous que les vents soufflaient vers ce pays.

" Gardons à l'esprit qu'on ne peut pas dire qu'il n'y aura pas d'autres conséquences sanitaires. Il faut être vigilant, car on connaît mal les effets du césium. Des enfants auront encore des cancers de la thyroïde, nous le savons. Il est de notre devoir de donner tous les moyens financiers pour les soigner, que ce soit dans leur pays ou dans nos pays. "

M. Jean BRIANE, député (UDF) , intervient dans le débat en ces termes  :

" Madame la Présidente, mes chers collègues, ce jour marque le dixième anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl. Le 26 avril 1986, en effet, l'un des réacteurs de la centrale nucléaire de Tchernobyl explosait.

" Ce fut la plus grande catastrophe nucléaire jamais survenue depuis l'avènement de cette forme d'énergie dans le monde. Catastrophe à la fois scientifique, technique et écologique, véritable tragédie humaine. Aux conséquences tragiques immédiates sont venues s'ajouter les conséquences durables à moyen et à plus long termes, sur les populations et sur l'environnement.

" Notre premier geste aujourd'hui doit être d'avoir une pensée pour les victimes de la catastrophe ; il faut leur rendre un hommage public dans cette enceinte du Conseil de l'Europe.

" Dans son excellent rapport, dont je le félicite, notre collègue, M. Staes, fait le point :

- sur l'accident lui-même et sur le dégagement de produits radioactifs ;

- sur les conséquences objectives actuelles et prévisibles de la catastrophe, tant en dommages écologiques pour les sols, les forêts, l'eau, l'environnement d'une manière générale ;

- sur les conséquences pour la santé des populations plus ou moins exposées aux radiations ;

- sur l'état actuel de l'installation accidentée et sur les risques liés aux déchets.

" Avec le rapporteur, nous devons tirer les leçons de cette catastrophe pour éviter qu'une telle tragédie ne se renouvelle de par le monde.

" La première leçon à tirer est un constat : aucun pays n'était préparé à faire face à ce genre de catastrophe, pas plus les pays directement concernés, parce que produisant de l'énergie nucléaire, que les autres pays qui, eux, en subissent les conséquences dramatiques à plus d'un titre sur la vie, sur la santé et sur l'environnement naturel.

" Cela veut dire que, malgré tous les débats qui ont eu lieu depuis des années sur les exigences de sûreté des installations nucléaires, toutes les recommandations n'ont pas été suivies d'effet et toutes les mesures prises, pour garantir la sûreté des installations, réalisées.

" Le projet de résolution présenté par le rapporteur au nom de la Commission de l'environnement propose un certain nombre de mesures urgentes, mais aussi des actions à entreprendre, d'une part pour réduire, autant que faire se peut, les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl, d'autre part, pour prévenir et éviter tout accident similaire, garantir la sûreté des installations nucléaires partout où elles existent ou sont envisagées.

" Je veux dire ici que toute installation nucléaire, où qu'elle se trouve de par le monde, devrait répondre à trois principes qui sont également trois exigences sur lesquelles on ne peut transiger : la sûreté, la transparence, la responsabilité.

" En ce qui concerne la sûreté des installations, il convient de fixer des normes strictes sur le plan international et d'en faire respecter l'application par une autorité internationale spécialement habilitée et reconnue. L'Agence de Vienne n'a pas toute l'autorité requise.

" La transparence du fonctionnement suppose que toute installation nucléaire soit connue et constamment ouverte à un possible contrôle de l'autorité internationale accréditée.

" La responsabilité concerne les Etats sur le territoire desquels se trouvent les centrales mais également les agents chargés du fonctionnement et de l'exploitation de l'installation, seuls à même de juger et de décider de la capacité de production desdites installations hors de toutes pressions extérieures, fussent-elles politiques.

" Au Conseil de l'Europe, temple par excellence du respect et de la défense des droits de l'homme, nous ne pouvons admettre que la personne humaine puisse être délibérément sacrifiée sur l'autel de la science, de la technologie ou au profit de la raison d'Etat.

" A partir de la leçon de la tragédie de Tchernobyl, tragédie qui atteint non seulement l'Ukraine et l'Europe proche -mais concerne l'ensemble de l'humanité par ses conséquences- je propose que la communauté internationale, sous une forme à définir, ait autorité pour contrôler et garantir la sûreté des installations nucléaires et que chaque Etat soit tenu de s'y soumettre.

" Le Conseil de l'Europe me paraît fondé à étudier et à proposer les voies et les moyens qui doivent permettre, d'une part, de réduire les conséquences malheureuses de la catastrophe de Tchernobyl et, d'autre part, d'éviter que ne se renouvelle une telle tragédie.

" L'humanité doit se protéger de toute aventure scientifique ou technologique qui conduirait à un suicide collectif. "

M. Nicolas ABOUT, sénateur (Ap. RI) , prend à son tour la parole en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, un incident entraînant une contamination de deux à sept fois supérieure aux normes tolérables s'est produit hier à Tchernobyl, marquant ainsi dramatiquement le dixième anniversaire de la catastrophe. Personne pourtant ne peut dire aujourd'hui que l'accident d'hier était imprévisible et imparable.

" Je ne m'attarderai pas sur les nouvelles responsabilités, mais comment ne pas être inquiet  ? Faut-il attendre une nouvelle catastrophe annoncée pour donner un commencement de réalisation aux engagements solennellement réitérés, et encore tout récemment, au cours d'un G7 + 1 extraordinaire à Moscou.

" Je ne peux que souscrire aux recommandations que contient le projet de résolution qu'à préparé notre collègue M. Staes. J'approuve également les amendements déposés par nos collègues MM. Roseta, Birraux, Jacquat et Daniel.

" Pour ma part, je voudrais rappeler le constat avant d'affirmer, comme notre rapporteur, les objectifs indispensables et enfin, m'interroger sur les moyens de concrétiser enfin ces objectifs.

" Le constat tout d'abord : faut-il rappeler qu'il y a dix ans, c'est une cinquantaine de tonnes de combustibles nucléaire, sous forme de très fines particules de matière radioactive qui se sont échappées du réacteur n° 4 ? Faut-il rappeler également qu'en Ukraine, mais également en Biélorussie et en Russie, pour ne pas parler de régions plus lointaines, quelque vingt millions de personnes ont été exposées à cette radioactivité ? Faut-il rappeler enfin que de très nombreux enfants sont actuellement soignés pour des cancers de la thyroïde ?

" Ce constat est encore aggravé par la lenteur de diffusion de l'information dans les jours qui ont suivi la catastrophe retardant les mesures techniques de confinement et les actions de santé publique.

" Les objectifs sont aujourd'hui admis par tous. Déjà, des conventions internationales font obligation de notifier les mesures prises pour garantir la sécurité des installations et, le cas échéant, informer rapidement des incidents survenus. Je souhaiterais pour ma part que notre Assemblée appelle à l'élaboration d'une convention complémentaire qui s'avère indispensable pour une gestion sûre des déchets radioactifs, interdisant notamment l'immersion en mer.

" Pour des questions de temps, je n'ai pas pu déposer d'amendement. Peut-être notre rapporteur accepterait-il d'ajouter un paragraphe V à l'alinéa 17 de sa résolution par lequel l'Assemblée inviterait tous ses Etats membres "à élaborer une convention sur la sûreté des déchets radioactifs, interdisant notamment l'immersion en mer".

" Quant aux objectifs réaffirmés au G7 + 1 extraordinaire du 20 avril à Moscou, il reste à souhaiter qu'ils connaissent enfin une mise en œuvre rapide de part et d'autre, aide financière occidentale, réalisation des mesures techniques de mise aux normes ou de démantèlement sur les sites dangereux.

" Si le constat donc, et les objectifs eux-mêmes font l'objet d'un consensus, je m'interroge cependant sur les méthodes.

" Comment expliquer que nous en soyons presque au même point dix ans après l'accident et que puissent encore se produire des événements comme ceux d'hier ? Je crains malheureusement que la réunionnite propre aux organisations internationales n'ait considérablement ralenti l'action nécessaire. Je voudrais croire qu'il n'y a pas eu de retard dû à un "patriotisme institutionnel" de certaines organisations privilégiant, quoiqu'il arrive et quoiqu'il en coûte leurs procédures bureaucratiques sur toutes considérations d'efficacité, qui sont pourtant en l'espèce des exigences de santé publique.

" Mon excellent collègue Claude Birraux a démontré les retards dus à ces cheminements bureaucratiques. Je partage entièrement son option en faveur de jumelages entre institutions techniques et scientifiques. Les organisations internationales et notamment les bailleurs d'aide, devraient se borner à définir le plan de remise aux normes de sécurité, à valider les compétences des candidats à des actions de démantèlement ou de modernisation et à coordonner les différentes interventions.

" Enfin, je souhaiterais que se développe un véritable partenariat, notamment dans l'élaboration des options techniques, associant pleinement les compétences des scientifiques et des médecins en Ukraine, en Biélorussie et en Russie, afin d'aboutir, sur le modèle des "conférences de consensus des médecins" à des solutions sur mesure.

" Prenons garde à ne pas méconnaître les compétences et le souci du bien public qui existent chez nombre de responsables dans ces pays et doivent pouvoir participer à la restauration de la sécurité due à leurs populations, comme à celles de la grande Europe dont ils font partie. "

Enfin, M. Denis JACQUAT, député (UDF), rapporteur de la Commission des questions sociales, de la santé et de la famille, saisie pour avis , reprend la parole pour répondre aux orateurs en ces termes :

" J'ai écouté avec beaucoup d'attention tous mes collègues. Tout le monde reconnaît que cette catastrophe n'aurait jamais dû avoir lieu si un essai inopportun -j'insiste sur le mot inopportun- n'avait pas été effectué, si les installations avaient été conformes et si l'information avait circulé.

" Au sujet des conséquences sanitaires, quelqu'un a employé tout à l'heure le mot "minime", s'agissant des cancers de la thyroïde de l'enfant, et ce mot m'a fait sursauter. Tout simplement parce qu'il ne devrait pas être prononcé. Il ne devrait pas y avoir du tout de malade. C'est un point extrêmement important. Les cancers de la thyroïde de l'enfant dans les trois pays sont dus à l'iode 131 qui s'est échappé par le nuage radioactif. J'étais au Congrès de Minsk où l'on a parlé de ces conséquences sanitaires et tout le monde est d'accord sur ce point. 1 250 enfants sont malades, j'insiste à nouveau sur ce point, et 25 % ont des métastases. Mais s'ils sont soignés, 95 % seront guéris. Tout le reste est faux. "

MM. Denis JACQUAT, député (UDF), et Christian DANIEL, député (RPR) , ont présenté un amendement ainsi rédigé :

" Dans le projet de résolution, paragraphe 8, supprimer les mots "et les maladies, souvent incurables, survenues ou potentielles ".

Amendement que M. Denis JACQUAT a soutenu en ces termes :

" A la lecture du paragraphe 8 du projet de résolution, j'ai été un peu "crispé" à la deuxième ligne. C'est pourquoi j'ai proposé deux sous-amendements.

" Je lis au paragraphe 8 : "Par ailleurs, l'augmentation impressionnante des cancers de la thyroïde chez les enfants, et les maladies, souvent incurables, survenues ou potentielles, qui sont imputables aux irradiations subies par les populations"... Dans le cas particulier, il ne peut s'agir que de cancers de la thyroïde chez des adultes. Pour le moment, et j'insiste sur ce point, on ne peut pas dire que d'autres maladies sont dues à la catastrophe. Même si l'on peut parfois avoir quelques soupçons, il faudra du recul pour pouvoir le définir avec précision.

" Dans mon esprit, l'augmentation très importante des cancers de la thyroïde, en particulier chez les enfants, est imputable "aux irradiations subies par les populations et en particulier par les 800.000 personnes qui se sont relayées sur le site". Je ne puis admettre qu'on écrive : "et les maladies, souvent incurables, survenues ou potentielles", parce que c'est tout mélanger, y compris les psychoses. Il en existe de très nombreuses. Tout le monde en a. Même des gens qui se trouvaient à des milliers de kilomètres au sud pourraient dire qu'ils se trouvaient dans les environs de Tchernobyl le jour de la catastrophe.

" Sur le fond, je ne suis pas du tout contre le paragraphe 8, mais je souhaite qu'il soit très légèrement modifié. C'est pourquoi j'ai proposé deux sous-amendements. C'est une question de forme, pas de fond.

" Le problème des conséquences sanitaires est trop important pour qu'on se dispute sur un tel amendement. J'ai une interprétation médicale sur ce point. Même s'il s'agit d'un problème de terminologie, comme on vient de l'expliquer, la psychose est une maladie.

" Je préciserais simplement : "l'augmentation importante des cancers de la thyroïde, en particulier chez les enfants", et je laisserai le reste. Il faut bien insister sur le rôle des "liquidateurs". Ce sont les enfants et les liquidateurs qui ont eu des cancers de la thyroïde.

" Pour ce qui concerne les psychoses, je suis entièrement d'accord. Ce que je ne voulais pas, c'est parler de leucémie et d'autres maladies. Pour le moment, il n'y a rien de démontré, il n'existe que quelques soupçons. C'est un problème médical qui ne justifie aucune guérilla. Peut-être une petite rectification à tendance médicale  ? Mais, ce n'est pas parce que nous sommes au dixième anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl qu'il ne faut pas rester serein. Il n'y a pas lieu à dispute. Je retire donc mes deux amendements, sur lesquels je me suis expliqué. "

M. Claude BIRRAUX, député (UDF ) , avait déposé un amendement aux termes duquel il demandait, dans le projet de résolution, paragraphe 15, à supprimer l'alinéa ii et insérer un nouvel alinéa rédigé invitant les responsables "à s'assurer que les deux nouveaux réacteurs nucléaires dont la construction fait partie intégrante de l'accord mentionné ci-dessus, correspondent aux normes en vigueur de l'Agence internationale de l'énergie atomique".

" L'exposé des motifs de cet amendement faisait valoir que l'Ukraine a déjà engagé la construction de deux réacteurs qui utilisent une autre technologie, différente du type RBMK. Demander à l'Ukraine de tout abandonner reviendrait à lui réclamer un effort financier énorme. La raison la plus importante, je la gardais pour la fin. L'achèvement des deux réacteurs en remplacement des tranches 1 et 3 de Tchernobyl, fait partie intégrante du protocole d'accord signé il y a quelques mois en décembre entre le G7, la Commission européenne et l'Ukraine. Il y a donc une contradiction évidente entre l'alinéa i où il est demandé exactement que l'accord soit respecté, et celui-là.

" Le protocole, tout le monde le sait, est l'aboutissement de longs et difficiles pourparlers. Demander maintenant sa renégociation, et c'est ce qui est en réalité, c'est courir de grands risques. Si une partie du protocole est remise en discussion, l'Ukraine serait en droit de remettre en question l'engagement de fermer la centrale de Tchernobyl avant l'an 2000.

" Le texte du protocole, clair, concerne l'achèvement de deux réacteurs aux centrales de Rovno et Khmelnitski en remplacement des tranches 1 et 3 de Tchernobyl avec beaucoup de contreparties -la construction d'un nouveau sarcophage, la fermeture des réacteurs 1 et 3, notamment. C'est une partie d'un ensemble, je crois qu'il serait mauvais de l'éliminer. "

Cet amendement est adopté.

M. Claude BIRRAUX, député (UDF) , présente un deuxième amendement afin d'inviter les autorités responsables "à prendre immédiatement des mesures ayant comme but l'amélioration rapide de la culture de sûreté, notamment en matière de formation du personnel".

" L'exposé des motifs fait valoir que la référence à une culture de la sûreté fait aussi partie du patrimoine de notre Assemblée. Je ne vais pas relire ici le rapport d'il y a trois ans. La recommandation votée à l'unanimité comportait un point sur l'amélioration de la culture de sûreté et parlait des mesures qui pouvaient être introduites facilement et assez rapidement. D'abord, combler les lacunes en matière de lois et de normes, ensuite motiver et former le personnel, par exemple.

" Ce qui est important c'est que l'Ukraine puisse prendre des initiatives plus larges, le plus rapidement possible, pas trop difficiles à mettre en place, afin qu'elle sache mieux prévenir tout incident et réagir si un incident survient. D'ailleurs, je suis sûr que ces initiatives recevraient un fort soutien non seulement de l'AIE, mais aussi de toutes les organisations concernées.

Cet amendement est adopté par l'Assemblée.

Enfin, M. Claude BIRRAUX, député (UDF) , a déposé un troisième amendement afin d'inviter les Gouvernements "à planifier des jumelages entre centrales nucléaires des pays d'Europe centrale et orientale et celles des pays occidentaux, afin de développer en commun la culture de sûreté ;"

" L'exposé des motifs de cet amendement souligne que son objet se réfère à l'histoire de l'Assemblée, puisque l'alinéa que je souhaite ajouter au projet de résolution a déjà été voté ici.

" La recommandation 1209 (1993), adoptée il y a deux ans et demi, incite aux jumelages, aux projets bilatéraux entre centrales des pays occidentaux et des pays de l'Europe de l'Est, ainsi qu'à d'autres actions.

" Ce que je reprends dans mon amendement appartient, en quelque sorte au patrimoine de l'Assemblée. Certains de nos collègues des pays d'Europe centrale et orientale ont trouvé la proposition intéressante et sont d'accord pour la "remettre sur le tapis" et l'inclure dans le texte du projet de résolution. "

L'amendement est adopté comme les deux précédents, puis, à l'issue du débat portant sur le rapport 7538, la résolution n° 1087 est adoptée, amendée .

14. Le processus de paix au Proche-Orient (Vendredi 26 avril)

Le rapporteur rappelle que l'Assemblée a toujours suivi avec attention le processus de paix au Proche-Orient : la Commission des questions politiques et sa Sous-commission spécialisée ont élaboré plusieurs rapports. Dernièrement, cinq "task forces" ont été mises sur pied pour préparer la contribution du Conseil à ce processus et, en septembre, l'Assemblée devrait adopter ce texte.

Les récents événements du Sud-Liban font redouter un recul et l'Assemblée ne pouvait donc rester silencieuse. Le rapporteur regrette simplement que ce débat d'urgence intervienne à l'extrême fin de la partie de session, en l'absence de nombreux parlementaires. De ce point de vue, il ne peut approuver la décision du Bureau.

L'escalade de la violence vient à un moment extrêmement délicat, où les Palestiniens sont aux prises avec des extrémistes tandis qu'Israël pleure M. Rabin. De grands progrès avaient été réalisés pourtant, dont témoigne la récente révision de la Charte de l'OLP. Visiblement, l'objectif du Hezbollah est de provoquer une déstabilisation et des réactions indiscriminées pour rendre impossible la mise en œuvre des accords de paix. Il convient donc d'exercer des pressions sur des pays comme la Syrie et le Liban qui soutiennent ou tolèrent ces terroristes. En ce qui concerne Israël, il faut condamner un recours à la force qui s'est soldé par de nombreuses victimes innocentes.

Un accident comme le bombardement de zones sous protection de l'ONU n'aurait jamais dû se produire. La communauté internationale doit le condamner fermement.

L'escalade de la violence au Proche-Orient profite aux extrémistes. Il convient que l'Assemblée parlementaire réaffirme son soutien aux actions contribuant à promouvoir la paix, le dialogue et la négociation. Elle doit appeler les Libyens et les Syriens à s'engager à désarmer le Hezbollah. Dès que les menaces contre Israël auront cessé, ce pays devra retirer ses forces armées du Sud-Liban. Une zone de sécurité et le déploiement de forces internationales sont à prévoir. Israël doit ensuite poursuivre la réalisation des accords israélo-palestiniens.

Le projet de résolution demande un règlement définitif de la paix.

A l'issue du débat, la résolution n° 1088 contenue dans le rapport 7540 a été adoptée, amendée .

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