J. LOI N° 2015-994 DU 17 AOÛT 2015 RELATIVE AU DIALOGUE SOCIAL ET À L'EMPLOI

Au cours de l'année 2016, le Gouvernement a poursuivi la mise en application de la loi du 17 août 2015, dont la quasi-totalité des décrets a été publiée.

L'une des mesures essentielles de cette loi, la création par son article 1 er de commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI) destinées à représenter les salariés et les employeurs des TPE, doit s'appliquer à compter du 1 er juillet 2017. Votre commission avait déploré l'an dernier que leurs modalités de mise en place et de fonctionnement ne fussent pas encore connues.

C'est finalement un décret du 27 avril 2017 154 ( * ) qui est venu définir les règles de répartition des sièges parmi les représentants des salariés et des employeurs et de désignation des membres par leurs organisations respectives. S'agissant de l'activité des CPRI, en application de l'article L. 23-114-3 du code du travail issu de ce même article 1 er , un employeur devant maintenir le salaire d'un de ses salariés membre d'une CPRI au titre des heures de délégation dont celui-ci dispose et qui n'aurait pas été remboursé dans un délai de trois mois par l'organisation syndicale qui a désigné ce dernier, pourrait procéder à une retenue sur son salaire, dès lors qu'il l'en a informé au moins trente jours à l'avance. Un second décret du 9 mai 2017 155 ( * ) a quant à lui défini la composition des CPRI de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon qui, au lieu de compter vingt membres 156 ( * ) , en compteront respectivement dix, quatorze et huit.

Le Gouvernement a, en outre, pris les dispositions réglementaires relatives à la modernisation du dialogue social en entreprise et à la simplification du fonctionnement des institutions représentatives du personnel (IRP). Un décret du 12 avril 2016 157 ( * ) est notamment venu préciser les conditions dans lesquelles le comité d'entreprise, le comité central d'entreprise, le comité de groupe et le comité de groupe européen, lorsqu'ils se réunissent en visioconférence ( article 17 ), peuvent procéder à un vote à bulletin secret, dès lors que la confidentialité des données transmises est garantie et que le vote a lieu de manière simultanée pour tous les participants. Il fait application de ces règles aux réunions communes à plusieurs IRP ainsi qu'à celles du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et de l'instance de coordination des CHSCT réalisées par visioconférence. Il fixe également, en l'absence d'accord, un délai de quinze jours au secrétaire du comité d'entreprise pour établir le procès-verbal de ses réunions et l'adresser à l'employeur, hors consultation obligatoire de cette IRP dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi (dans ce cas précis, le délai est réduit à trois jours).

Le décret du 29 juin 2016 158 ( * ) a, quant à lui, tiré les conséquences de la clarification des attributions du comité central d'entreprise et du comité d'établissement ( article 15 ) et des règles de fonctionnement du CHSCT ( article 17 ) ainsi que de la rationalisation des consultations obligatoires du comité d'entreprise ( article 18 ) et des négociations annuelles obligatoires , y compris en matière d' égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ( article 19 ). En l'absence d'accord, il prévoit que le CHSCT dispose d'un délai d'un mois, ou deux mois en cas d'intervention d'un expert, pour rendre ses avis. Alors même que ce sujet n'a pas été abordé lors des débats parlementaires, le décret autorise la prorogation du mandat des membres sortants d'un CHSCT au lendemain du renouvellement des élus au comité d'entreprise jusqu'à la désignation d'une nouvelle délégation du personnel au CHSCT, dans la limite de six mois. En particulier, lorsque l'employeur doit consulter à la fois le comité central d'entreprise (CCE) et un ou plusieurs comités d'établissement, ce décret fixe les délais de consultation accordés à la première institution. En l'espèce, sauf accord entre l'employeur et le CCE, ces délais sont ceux de droit commun applicables au comité d'entreprise, et qui varient entre un et quatre mois selon la thématique abordée.

Dans les entreprises dépourvues de délégué syndical , l' article 21 de la loi avait donné la priorité aux élus du personnel mandatés par une organisation syndicale représentative pour conclure un accord collectif , à condition toutefois que cet accord soit ensuite approuvé par les salariés 159 ( * ) . Le décret du 20 décembre 2016 160 ( * ) est venu fixer les règles de cette consultation , en précisant notamment qu'elle devait avoir lieu dans un délai de deux mois après la conclusion de l'accord.

A l' article 23 , en raison de l'absence d'accord entre organisations patronales avant la date-butoir du 15 novembre 2015 pour modifier les règles de répartition des crédits et de gouvernance du fonds paritaire de financement des partenaires sociaux les concernant, le Gouvernement disposait d'une habilitation à légiférer par ordonnance sur ce sujet avant le 18 août 2016. Cette habilitation n'a toutefois pas été utilisée et est devenue caduque du fait des dispositions de l'article 35 de la loi « Travail » 161 ( * ) qui a notamment pris en compte le nombre de salariés des entreprises adhérentes à une organisation patronale représentative pour modifier les règles d'affectation des crédits du fonds paritaire précité à ces organisations.

L' article 24 prévoyait un aménagement spécifique des règles de représentativité syndicale de droit commun au profit des agents de direction des organismes de protection sociale comme la mutualité sociale agricole (MSA) et le régime social des indépendants (RSI), qui ne peuvent pas voter aux élections des représentants du personnel en raison de leur fonction hiérarchique, et ne disposent donc pas de représentants pour négocier la convention collective spéciale qui leur est applicable. Face à cette difficulté, l'article 24 dispose que la mesure de l'audience des représentants des agents de direction sera appréciée au regard des suffrages exprimés lors de l'élection des membres représentant ce personnel aux commissions paritaires nationales. Votre commission regrette à nouveau que le Gouvernement n'ait pas pris le décret en Conseil d'État prévu à cet article, alors que ce dernier est issu d'un amendement adopté au Sénat et présenté par trois groupes politiques, de la majorité comme de l'opposition 162 ( * ) .

L'organisation, les missions et la composition du Conseil d'orientation des conditions de travail (Coct) et de ses déclinaisons régionales ont en revanche étaient fixées par un décret du 22 décembre 2016 163 ( * ) , comme le prévoyait l' article 26 de la loi. En particulier, un groupe permanent d'orientation des conditions de travail a été créé au niveau national par le Gouvernement, sans base législative spécifique, afin notamment de proposer au ministre chargé du travail de présenter les grands axes des prochains plans santé au travail.

En application de l' article 27 de la loi, le Gouvernement a pris, le 7 juin 2016, un décret pour améliorer la reconnaissance en maladie professionnelle des pathologies psychiques comme l'épuisement au travail ( burn-out ). Les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) peuvent désormais bénéficier de l'expertise d'un professeur des universités-praticien hospitalier spécialisé en psychiatrie lorsque les demandes de reconnaissance portent sur des cas d'affections psychiques. Le Gouvernement n'a toutefois pas remis au Parlement le rapport , prévu à l' article 33 , sur l'intégration des affections psychiques dans le tableau des maladies professionnelles ou l'abaissement du seuil d'incapacité permanente partielle pour ces affections.

Le Gouvernement n'a pas non plus rédigé le rapport , prévu à l' article 34 , sur la situation des artistes et techniciennes intermittentes du spectacle, alors que la date-butoir de remise était prévue le 18 août 2016. Ce retard confirme l'analyse de votre commission, qui avait douté de la pertinence de ce rapport.

L' article 36 , introduit à l'Assemblée nationale au stade de la commission en première lecture, vise à conférer une compétence exclusive à un organisme collecteur paritaire agréé au niveau national, par dérogation aux règles de droit commun, pour percevoir les contributions au financement de la formation professionnelle des entreprises appartenant à des secteurs employant des intermittents du spectacle , des artistes-auteurs et des pigistes, y compris dans les départements d'outre-mer, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin. Votre commission constate que le ministère du travail n'a toujours pas pris le décret fixant la liste des secteurs concernés par cette dérogation.

L' article 40 de la loi avait par ailleurs réformé la formation aux activités privées de sécurité, en encadrant les conditions d'exercice des organismes de formation, soumis à un agrément par le Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps) et en introduisant une obligation de formation continue pour les titulaires de la carte professionnelle requise pour exercer une activité de surveillance ou de recherche privée. Le décret du 26 avril 2016 164 ( * ) a précisé les conditions d'autorisation de ces structures, en particulier les documents à fournir, la durée - cinq ans - de leur autorisation, ainsi que les obligations qu'ils doivent respecter afin notamment d'éviter toute confusion avec un service public. Il les astreint, pour obtenir le renouvellement de leur autorisation, à une obligation de certification.

L'entrée en vigueur de ces dispositions était fixée par le décret au 1 er juillet 2016. Les organismes de formation agréés avant cette date devaient initialement se soumettre avant le 1 er juillet 2017 à ces nouvelles obligations. De même, l'obligation pour les agents de sécurité privée de suivre une formation continue préalablement au renouvellement de leur carte professionnelle ne devait être applicable qu'à partir de cette même date. Un décret récent du 21 avril 2017 165 ( * ) a toutefois reporté de six mois, jusqu'au 1 er janvier 2018, la date d'entrée en vigueur de ces deux mesures.

A l' article 39 de la loi, le législateur avait habilité le Gouvernement, pour une durée de dix-huit mois à compter de sa promulgation, à transformer par ordonnance l' association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) en établissement public à caractère industriel et commercial (Epic). C'est finalement dans un délai de quinze mois que ce texte a été publié : l'ordonnance du 10 novembre 2016 166 ( * ) a créé un établissement public chargé de la formation professionnelle des adultes. Elle a été ratifiée par une loi du 21 février 2017 167 ( * ) .

Enfin, votre commission constate que le Gouvernement n'a pas respecté l'obligation de remettre au Parlement avant le 18 février 2016 le rapport prévu à l' article 61 , censé dresser un bilan provisoire de la prime d'activité créée par la présente loi.


* 154 Décret n° 2017-663 du 27 avril 2017 relatif aux modalités de mise en place et de fonctionnement des commissions paritaires régionales interprofessionnelles pour les salariés et les employeurs des entreprises de moins de onze salariés.

* 155 Décret n° 2017-900 du 9 mai 2017 relatif à la composition des commissions paritaires régionales interprofessionnelles de Saint-Barthélemy et Saint-Martin et de la commission paritaire territoriale interprofessionnelle de Saint-Pierre-et-Miquelon.

* 156 Dix représentants des salariés et dix représentants des employeurs.

* 157 Décret n° 2016-453 du 12 avril 2016 relatif à certaines modalités de déroulement des réunions des institutions représentatives du personnel.

* 158 Décret n° 2016-868 du 29 juin 2016 relatif aux modalités de consultation des institutions représentatives du personnel.

* 159 A défaut, un salarié élu du personnel non mandaté ou, en son absence, un élu du personnel mandaté peuvent signer un accord.

* 160 Décret n° 2016-1797 du 20 décembre 2016 relatif aux modalités d'approbation par consultation des salariés de certains accords d'entreprise

* 161 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 162 Le groupe Les Républicains, le groupe socialiste et républicain, le groupe du Rassemblement démocratique et social européen.

* 163 Décret n° 2016-1834 du 22 décembre 2016 relatif à l'organisation, aux missions, à la composition et au fonctionnement du Conseil d'orientation des conditions de travail et des comités régionaux.

* 164 Décret n° 2016-515 du 26 avril 2016 relatif aux conditions d'exercice des activités privées de sécurité et au Conseil national des activités privées de sécurité.

* 165 Décret n° 2017-606 du 21 avril 2017 relatif aux conditions d'exercice des activités privées de sécurité, art. 8.

* 166 Ordonnance n° 2016-1519 du 10 novembre 2016 portant création au sein du service public de l'emploi de l'établissement public chargé de la formation professionnelle des adultes.

* 167 Loi n° 2017-204 du 21 février 2017 ratifiant l'ordonnance n° 2016-1519 du 10 novembre 2016 portant création au sein du service public de l'emploi de l'établissement public chargé de la formation professionnelle des adultes.

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