Rapport d'information n° 72 (2016-2017) de M. Marc LAMÉNIE , fait au nom de la commission des finances, déposé le 25 octobre 2016

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N° 72

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 25 octobre 2016

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur l' Institution nationale des Invalides ,

Par M. Marc LAMÉNIE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Bernard Delcros, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Eblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel .

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Les principales recommandations

Recommandation n° 1 : « Maison des combattants âgés, malades ou blessés au service de la patrie », l'Institution nationale des Invalides (INI), par son exceptionnelle valeur symbolique, et l'importance de ses activités opérationnelles, mérite la plus grande considération, une protection sans relâche et un plein soutien. Préservée dans son existence, après une période difficile qui a pu favoriser un certain attentisme mais a été marquée également par l'élaboration très active d'un nouveau projet d'établissement impliquant fortement son conseil d'administration, elle doit désormais prendre un nouvel élan. Cette exigence implique de respecter, dans leur diversité, les missions de l'INI, tout en n'excluant pas, au contraire, des évolutions souhaitables. Celles-ci doivent continuer à faire l'objet d'une ample consultation, qui a démontré par son exemplarité toute son utilité.

Recommandation n° 2 : La situation financière de l'Institution nationale des Invalides, dont la dégradation a été principalement due à une certaine inertie des soutiens des ministères concernés, doit tendre vers un meilleur équilibre de la section de fonctionnement. Celle-ci ne doit plus être financée par le fonds de roulement qui, pour avoir été substantiel dans le passé, était appelé à couvrir les besoins de trésorerie mais également les investissements, trop longtemps retardés et devra à l'avenir être employé en respectant ces vocations.

Recommandation n° 3 : L'effort de maîtrise des dépenses qui a été entrepris doit se prolonger en s'appliquant à toutes les composantes de la dépense de l'INI (fonctionnement et achats de services extérieurs, notamment) dans un contexte où le volume des effectifs doit être proportionné aux activités de l'établissement, tout en considérant les besoins exceptionnels d'accompagnement de patients et pensionnaires souvent lourdement handicapés. Les besoins d'investissements doivent être satisfaits, les reports liés à la situation financière de l'INI et aux incertitudes sur son devenir n'ayant que trop duré.

Recommandation n° 4 : Les ressources de l'INI doivent suivre la réalité de ses coûts, dans leurs diverses composantes, dès lors que ceux-ci sont maîtrisés. Les modalités de revalorisation des deux dotations ministérielles doivent se conformer aux principes qui les encadrent, le passage à un mode de tarification à l'activité pour calculer la contribution du ministère de la Santé, pour envisageable qu'il soit, devant être gelé dans la période de transition qui s'ouvre et tenir compte des spécificités de l'activité de l'INI.

Recommandation n° 5 : Pour les contributions des personnes accueillies à l'INI, l'écart en défaveur des hébergés mériterait être mieux justifié.

Recommandation n° 6 : L'ouverture de l'Institution à son environnement, qui se traduit déjà par sa participation à un ensemble de réseaux, doit se poursuivre et être encouragée. L'accessibilité de l'établissement est déjà très forte pour les activités médicales. Il peut légitimement être envisagé de l'étendre, dans la mesure des capacités d'accueil, au centre des pensionnaires, en particulier pour les personnes civiles victimes d'attentats et participant à la préservation de la sécurité nationale. Quant aux activités de l'INI, leur intégration dans un « parcours du blessé » faisant intervenir une pluralité d'acteurs, doit être saluée. Par cette ouverture, l'INI, établissement « entièrement à part » deviendra aussi un « établissement à part entière ».

Recommandation n° 7 : Les grandes orientations du nouveau projet d'établissement appellent une approbation d'ensemble. En particulier, le recentrage des activités médicales de l'INI sur ses avantages comparatifs dans un mouvement d'intensification de sa contribution au système général de santé doit être encouragé. Dans cet esprit, la fermeture, très discutée du bloc opératoire de l'INI, compte tenu de son emploi effectif et de certains risques, est justifiée dès lors que des offres alternatives sûres et de qualité sont accessibles. À cet effet, une vigilance absolue devra être suivie pour assurer d'éventuels transports vers les hôpitaux d'intervention.

Recommandation n° 8 : Les financements nécessaires au nouveau projet devront être sécurisés avec un objectif de maîtrise rigoureuse de ses coûts. Une interrogation sur la contribution du ministère de la santé à ces investissements, aujourd'hui non prévue, doit être formulée. En toute hypothèse, le principe d'une contribution de l'INI, par son fonds de roulement, et des ministères concernés s'impose.

Recommandation n° 9 : Les coûts de fonctionnement de l'INI devront être proportionnés au nouveau plan de charge de l'établissement, qui devra poursuivre ses efforts de rationalisation de certains de ses coûts de fonctionnement.

Recommandation n° 10 : L'INI devra rechercher une plus complète utilisation de ses capacités, certains refus opposés à la demande d'accès à ses services de soins ne s'expliquant pas bien.

Recommandation n° 11 : La fidélisation du personnel doit progresser tant pour réduire l'absentéisme que pour combler les déficits d'effectifs dans certaines strates de la pyramide des âges. La contribution des bénévoles à l'animation de l'établissement doit continuer à bénéficier de la reconnaissance de la direction.

Recommandation n° 12 : Certaines activités doivent être mieux valorisées. La composante mémorielle de l'INI doit permettre des transmissions précieuses pour la cohésion nationale.

AVANT-PROPOS

Fondée par un édit royal d'avril 1674, l'Institution nationale des invalides (INI) est la « maison des combattants âgés, malades ou blessés au service de la patrie ».

Elle a été érigée en établissement public à caractère administratif (EPA) en 1991 (loi n° 91-626 du 3 juillet 1991), qualifiée d'opérateur de l'État au sens de la loi organique sur les lois de finances et placée sous la tutelle du ministre chargé des anciens combattants.

Ces choix institutionnels ont de fortes incidences sur l'INI qui s'en trouve nettement singularisée.

Ils influent sur les conditions de sa direction, le conseil d'administration de l'INI étant ouvert à une représentation de parties prenantes remarquablement impliquées.

Ils colorent vivement la personnalité et la culture de l'établissement qui évolue dans un contexte à bien des égards exceptionnel par rapport à d'autres établissements analogues.

Cette exceptionnalité doit être préservée, d'abord, comme un témoignage de reconnaissance de la Nation à ses combattants, ensuite, parce que, plus simplement, les missions de l'INI le réclament d'un point de vue fonctionnel.

Pour autant, si l'INI doit demeurer entièrement à part, elle doit aussi devenir un établissement de santé à part entière, c'est à dire tout à fait ouvert sur son environnement et pleinement responsable dans l'accomplissement de ses missions.

L'établissement a vécu une période difficile marquée par des évolutions de contexte touchant la définition du système général de santé mais aussi du système de santé des armées mais aussi par des incertitudes sur l'avenir d'un établissement affecté par des fragilités internes.

Cette période semble sur le point de se conclure pour l'INI par une sortie par le haut qui devrait lui permettre de mieux valoriser ses atouts en résorbant ses points de vulnérabilité.

Le processus qui est sur le point de s'achever n'est encore que dans sa phase initiale de définition d'un nouveau projet. Il a été marqué par des consultations exemplaires, grâce en particulier à l'implication du conseil d'administration de l'INI. Il faut le souligner car elles sont sans doute pour beaucoup dans le large consensus qui paraît aujourd'hui prévaloir entre des acteurs aux points de vue de départ parfois éloignés.

Pour la suite, la réussite est suspendue à des conditions dont la réunion n'est pas acquise d'emblée.

I. UNE RECONNAISSANCE LÉGISLATIVE ET RÉGLEMENTAIRE PROFUSE

Du fait de sa singularité, l'Institution nationale des Invalides bénéficie d'un statut légal et réglementaire propre détaillé dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG) mais aussi dans différents autres codes. En sa qualité d'établissement public singulier, l'INI bénéficie d'un statut législatif, aux termes duquel la loi organise son fonctionnement, son organisation et fixe ses missions.

A. LES DISPOSITIONS DU CODE DES PENSIONS MILITAIRES D'INVALIDITÉ ET DES VICTIMES DE LA GUERRE

Les dispositions du code confèrent à l'INI le statut d'un établissement public sui generis à forte reconnaissance législative, doté d'une autonomie juridique couronnant sa singularité.

1. Un établissement public administratif

La qualité d'établissement public administratif conféré à l'INI a une signification négative : l'INI n'est pas soumise aux obligations et ne bénéficient pas des prérogatives particulières aux établissements publics de santé. Il n'est pas davantage une structure relevant du service de santé des armées.

Par ailleurs, la qualité d'établissement public administratif de l'INI entraîne l'application de dispositions positives d'organisation de haut niveau puisque législatives. C'est ainsi que la composition et les attributions du conseil d'administration de l'INI sont définies aux articles L. 530 et L. 531 du CPMIVG.

S'agissant de la composition du conseil d'administration, des évolutions successives ont conduit à l'élargir pour compléter la représentation des différents « acteurs » de l'INI.

Le conseil d'administration, présidé par une personnalité nommée par le Président de la République, est composé par des représentants des autorités publiques intéressés (gouverneur des Invalides, directeur du budget, directeur du service central des armées et directeur de l'administration générale du ministère des anciens combattants), rejoint, désormais, par un représentant du ministère de la santé.

Initialement, celui-ci n'était pas représenté au conseil, situation pour le moins singulière étant donné les modalités de financement de l'INI (voir infra ).

Longtemps, il a été complété par quatre membres nommés pour trois ans par décret en conseil des ministres à des sièges qui permettent, pour deux d'entre eux au moins, d'assurer une représentation du monde combattant. En effet, deux de ces quatre membres étaient nommés sur proposition des associations représentatives de grands invalides.

Dorénavant, cinq personnalités qualifiées représentant le monde combattant sont nommées pour trois ans parmi lesquelles trois sont proposées par des associations représentatives de grands invalides titulaires d'une pension et deux par le ministre chargé des anciens combattants.

La loi assure en outre la participation des personnels au conseil d'administration, deux sièges étant occupés, l'un par un élu des personnels médicaux, l'autre par un élu personnels paramédicaux tandis qu'un troisième siège est occupé par un élu des autres personnels de l'INI.

Enfin, la loi assure la représentation des usagers dans leurs différentes composantes avec un représentant des pensionnaires et un représentant des usagers du centre médico-chirurgical.

Le conseil d'administration définit l'organisation et la politique générales de l'INI. Il répartit les capacités d'accueil entre les différents centres de l'établissement (voir ci-dessous). Il vote le budget, approuve les comptes et autorise les acquisitions, les aliénations et les emprunts.

Il lui revient encore de fixer les tarifs d'hospitalisation, de consultations et de soins.

De même, il arrête les conditions de participation des pensionnaires dans la limite d'un plafond déterminé par un décret pris en application de l'article L. 537 du CPMIVG.

L'INI est placé sous le contrôle administratif et financier de l'État et ses comptes sont soumis pour contrôle à la Cour des comptes.

Dans l'exercice de ses attributions de répartition des lits des différents centres, l'INI est tributaire de la confirmation par un arrêté conjoint du ministre du budget et du ministre chargé des anciens combattants. Il en va de même pour la fixation des différentes contributions mises à la charge des patients et des pensionnaires.

Enfin, une fois définies les compétences exécutives du directeur général de l'INI, la loi détermine encore la structure des recettes et des charges de l'établissement.

En recettes, l'INI porte à son compte les subventions publiques accordées par l'État, en particulier, la subvention pour charges de service public du programme 169 de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », les recettes tirées des facturations pour ses prestations à ses patients et pensionnaires, ainsi que le produit des emprunts.

Ses charges recouvrent toutes les dépenses nécessaires à l'accomplissement de ses missions.

2. Des missions diversifiées

Aux termes des articles L. 528 à L. 537 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, l'Institution nationale des invalides a pour mission :

- d'accueillir dans un centre de pensionnaires , à titre permanent ou temporaire, les invalides ressortissants du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Il s'agit, pour l'essentiel, des anciens combattants souffrant d'une invalidité d'au moins 80 % et d'anciens militaires retraités ayant au moins soixante ans, qui n'ont d'autres ressources que leur pension ;

- de dispenser dans un centre médico-chirurgical des soins en hospitalisation ou en consultation, en vue de la réadaptation fonctionnelle, professionnelle ou sociale des patients. Cet accueil est prioritairement destiné aux bénéficiaires du CPMIVG mais il peut être étendu à d'autres populations sous réserve que le ministre de tutelle, qui prononce les admissions, garantisse leur prise en charge ;

- de participer aux études et à la recherche sur l'appareillage des handicapés, dans le cadre de conventions.

B. LES AUTRES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

En dehors des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, l'Institution nationale des invalides est concernée par les dispositions législatives de différents codes dont certaines, importantes, ont connu des évolutions récentes.

- Le code de la santé publique prévoit notamment (article L. 6112 -2) que l'INI peut être chargée d'assurer ou de contribuer à assurer, en fonction des besoins de la population appréciés par le schéma régional d'organisation des soins , les missions de service public définies à l'article L. 6112-1 de ce code (missions des établissements de santé liées au service public hospitalier) dans le cadre des missions de l'Institution fixées au 2° de l'article L. 529 du CPMIVG (c'est-à-dire les activité médicales) ;

- Le code de la sécurité sociale prévoit notamment que l'ensemble des activités de soins de l'INI est pris en compte dans l'objectif des dépenses d'assurance maladie défini annuellement (article L. 174-1-1), (il s'agit de l'ONDAM), que les dépenses d'hospitalisation de l'ensemble des activités de soins de l'INI sont financées sous la forme d'une dotation annuelle, dont le montant, qui présente un caractère limitatif, est fixé par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale (articles L. 174-15-1 et L. 174-15-2), et qui prévoit des dispositions relatives à la prise en charge, par les régimes d'assurance maladie, des dépenses afférentes aux soins médicaux dispensés par l'INI.

Enfin, il y a lieu de mentionner que l'article 222 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation du système de santé prévoit qu'une ordonnance mette en cohérence les dispositions relatives à l'INI et celles de la loi.

On rappelle que ladite loi comporte des transformations importantes avec notamment la redéfinition du service public hospitalier, la création du service territorial de santé au public, une évolution des projets régionaux de santé et plus largement de l'organisation des agences régionales de santé, et l'habilitation à faire évoluer le droit des autorisations ainsi que le droit des groupements de coopération sanitaire.

S'agissant de l'ordonnance, il est prévu qu'elle devra renforcer la contribution de l'INI à la politique de santé publique dans le cadre d'une redéfinition de l'offre de soins du service de santé des armées et de l'INI et tirer les conséquences de ces réorganisations sur les dispositions relatives aux statuts et positions des personnels militaires et civils et aux pensions de retraites des fonctionnaires mis à disposition de groupements de coopération sanitaire par lesquels s'opèrent les processus de mutualisation entre différents établissements de santé.

Ces objectifs assurent une traduction, plus ou moins complète, du souhait de la direction générale de l'offre de soins (DGOS) d'une meilleure insertion de l'INI dans l'offre de soins régionale, sous l'égide de l'Agence régionale de santé d'Île-de-France (ARSIF), souhait congruent avec celui des « Armées » de conférer à l'INI un rôle à part entière dans le « nouveau service de santé des armées ».

II. LES MODALITÉS CONCRÈTES D'ORGANISATION DE L'INI

A. TROIS CENTRES D'ACTIVITÉ

Pour remplir ses missions, l'Institution est organisée en trois centres qui exercent des missions séparées mais en interrelations évidentes.

Le centre des pensionnaires est la raison d'être de l'INI selon les termes du ministère. Il suppose un accompagnement médical particulièrement conséquent dont votre rapporteur a été le témoin impressionné lors de sa visite de l'établissement.

Le centre médico-chirurgical est doté d'un plateau technique complet et assure quelques spécialités médicales particulières en lien avec la nature des blessures dont peuvent souffrir les combattants mais aussi avec les affections dont sont frappés les pensionnaires.

Enfin, le centre d'appareillage réalise des recherches, contribue à l'innovation et façonne les instruments pour répondre aux situations de handicap.

1. Le centre des pensionnaires

Le centre des pensionnaires accueille de grands invalides bénéficiaires du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG) satisfaisant aux conditions fixées par le décret en Conseil d'État visé à l'article L. 537 dudit code.

Plus précisément, le centre des pensionnaires est destiné aux grands invalides titulaires d'une pension militaire d'invalidité et bénéficiant :

- soit d'un taux de pension au moins égal à 100 % et des dispositions de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

- soit d'un taux de pension au moins égal à 85 % au titre des articles L. 36 - blessure de guerre ou L. 37 - blessure en service.

Selon les réponses fournies par le responsable de programme au questionnaire de votre rapporteur spécial, les prestations offertes par le centre s'inscrivent dans le contexte suivant.

D'une capacité maximale de 91 lits, mais dont le format a été réduit pour être ramené à 83 lits, le centre accueillait en 2013 des pensionnaires issus principalement des combats de la deuxième Guerre mondiale et des conflits d'Indochine et d'Algérie pour une moyenne d'âge de 85 ans.

Les admissions prononcées depuis, en lien avec des blessés en opérations extérieures (OPEX) - il s'agit de deux soldats âgés de 38 ans -, ont fait baissé cet âge moyen à 82 ans. Au total, environ la moitié des pensionnaires se situe dans la tranche d'âge « 90 ans et plus », dont trois centenaires, un quart des pensionnaires est dans la tranche d'âge « 80-89 ans », un huitième des patients se situe dans la tranche d'âge « 20-59 ans ».

Les pensionnaires de l'INI souffrent de pathologies généralement très lourdes en lien avec leur passé combattant et (ou) avec leur situation d'âge. Leur taux de dépendance, apprécié sur la base du référentiel AGGIR (grille d'autonomie gérontologique groupe iso-ressources) est élevé avec un niveau moyen de 870.

Par exemple, les blessures corporelles touchent 60 % des pensionnaires. Elles font suite à des plaies par éclats d'obus, de grenades ou mortier ou sont la conséquence de faits accidentels en service.

Elles imposent au personnel soignant de maîtriser une prise en charge spécialisée dans la continuité de la rééducation fonctionnelle afin de répondre à une problématique spécifique :

- gestion des douleurs neuropathiques type « membre fantôme » ;

- troubles vésicosphinctériens et du transit intestinal ;

- complications cutanées de la station allongée ou assise prolongée ;

- troubles locomoteurs liés à la paralysie ;

- crises d'épilepsies chez le traumatisé crânien ;

- crises d'hypertension artérielle chez le blessé médullaire ;

- appareillage des patients amputés.

En outre, on peut mentionner la fréquence élevée de certains troubles. Ainsi, les troubles cognitifs touchent 50 % des pensionnaires et ne concernent pas seulement les personnes âgées. Ils sont aussi présents chez les jeunes victimes de traumatismes crâniens graves. De même, les troubles sensoriels sont très répandus (55 % des patients), tandis que les psycho-traumatismes affectent 60 % des patients du centre des pensionnaires. Ils font suite à des actes de déportation ou de tortures, à des internements ou encore à des traumatismes crâniens et engendrent un syndrome anxio-dépressif et, pour certains, des troubles graves du comportement.

Le centre des pensionnaires se singularise ainsi par une typologie médicale exigeant une charge en soins très importante tant du point de vue numérique que technique.

Selon le ministère, il ne peut être comparé à un service d'EHPAD qui compte en moyenne seulement 2 % de patients en situation de handicap préalable aux effets du vieillissement.

Outre la prise en charge médicale, le service des pensionnaires assure un accompagnement paramédical quotidien, un projet de vie personnalisé, des animations, ainsi que le lien avec les familles et le monde militaire.

Le statut des pensionnaires demeure marqué par des obligations de discipline, au vrai surveillées avec bienveillance, et il comporte également des obligations de contribution financière aux frais de pensionnat (voir infra ).

2. Le centre médico-chirurgical (CMC)

Le centre assure en priorité les soins médicaux et chirurgicaux des pensionnaires et des anciens combattants, mais, comme précédemment indiqué, il est également ouvert à une patientèle de droit commun qui paraît être devenue très majoritaire.

Orienté vers la prise en charge des patients blessés médullaires, amputés ou cérébrolésés, il dispose d'un plateau technique de rééducation fonctionnelle, d'une piscine thérapeutique et d'un laboratoire spécialisé dans l'adaptation personnalisée de prothèses.

Selon le ministère, sa capacité d'accueil est de 74 lits auxquels s'ajoutent 14 places en hôpital de jour (en réalité, 10 apparemment, pour une capacité de 20 patients par jour).

Plus précisément, le centre dispose de 48 lits de médecine physique et de réadaptation (MPR), de 24 lits de chirurgie, de deux lits de soins de suite post opératoire et de ses capacités d'hôpital de jour.

Le service de MPR, qui comprend une unité sensori-cognitive, est axé sur la prise en charge des atteintes neurologiques centrales et périphériques, les séquelles neuro-orthopédiques de traumatisme, de pathologies orthopédiques et de l'appareillage. Il dispose d'une consultation de mémoire labellisée et d'une expertise dans le domaine de la basse vision.

Le service de chirurgie est spécialisé dans la chirurgie des escarres majeures, qui, au fil du temps, est devenue son activité exclusive.

Les activités transversales du centre médico-chirurgical mobilisent des personnels de rééducation (36 postes paramédicaux dans le cadre du plateau technique), de gestion et d'animation socio-thérapeutique.

La durée moyenne d'hospitalisation est relativement longue avec une période de 20 à 25 jours d'alitement, qui mobilise tout particulièrement les personnels.

3. Le centre d'études et de recherche sur l'appareillage des handicapés (CERAH)

Le CERAH réalise des appareillages, des aides techniques et dispense des formations à l'utilisation de ces matériels. Il conduit également des recherches et publie des études dans le domaine de l'appareillage et des aides techniques. Cette mission de participation aux études et à la recherche sur l'appareillage des handicapés attribuée au ministre chargé des anciens combattants est mentionnée à l'article L. 529 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

Le centre est localisé sur plusieurs sites : à Woippy dans la banlieue de Metz se situe un centre de recherche et de certification tandis qu'un site de production et de recherche est installé à Créteil.

B. UN ÉTABLISSEMENT HORS-NORME MAIS PAS HORS-SOL

Si le centre des pensionnaires de l'INI représente une forte singularité au service du monde combattant, et particulièrement de celui qui a été le plus éprouvé au service de la Nation, l'établissement n'en est pas moins de plus en plus ouvert sur son environnement en dépit d'un statut « entièrement à part ».

Il entretient des relations avec son environnement socio-médical et ses usagers sont, pour ce qui est de son offre de soins, de plus en plus extérieurs au périmètre des armées.

À part, l'INI n'en est pas pour autant refermée sur elle-même.

1. Un établissement à part...

• L'INI présente des caractères qui la singularisent très fortement en faisant une organisation sui generis soustraite à l'application du régime commun des établissements de santé.

En ce qui concerne le lien avec les acteurs de la santé dépendant du ministère des affaires sociales et de la santé , il convient de rappeler que l'INI n'est pas un Établissement Public de Santé (EPS), n'est pas soumise au régime du droit des autorisations et n'est pas rattachée au schéma régional d'organisation des soins (SROS) de la région Île de France.

L'INI ne participe pas non plus à la conférence de territoire de santé de Paris ou à d'autres structures de coopération de la région.

Néanmoins, la Haute Autorité de santé (HAS) exerce une compétence de certification sur l'INI.

• En ce qui concerne ses relations avec le ministère de la défense , l'INI n'est pas intégrée au service de santé des armées (SSA) et, de ce fait, l'INI ne s'insère pas dans les projets de coopération auxquels le SSA peut prendre part.

• Enfin, l'INI représente profondément, pour une part du monde combattant, pétrie de traditions, ce que la loi énonce nettement et que l'histoire a légué symboliquement, la « maison des combattants », ce qui en fait un territoire à part dans des représentations affectives qui dépassent largement les armées, même si, en pratique, elle est aussi, dans certaines de ses composantes, ouverte au monde civil (voir infra ).

2. ...mais qui n'est pas clos sur lui-même
a) De nombreux liens

Son statut particulier n'empêche pas l'INI de collaborer techniquement avec les hôpitaux d'instruction des armées (HIA) franciliens ainsi qu'avec d'autres établissements publics de santé.

Ainsi, l'Institution est inscrite dans plusieurs réseaux et est liée par conventions avec plusieurs structures civiles ou militaires qui ont des objets et des cadres diversifiés.

Ils comprennent :

- des actions communes en faveur des pensionnaires et des militaires blessés (Cercle sportif de l'INI (CSINI), Office national des anciens combattants et victimes de guerres (ONAC-VG), Cellule d'aide aux blessés de l'armée de terre (CABAT), etc...) ;

- des conventions inter-hospitalières :


avec le service de santé des armées (SSA), de nombreux partenariats existant dans le cadre d'un accord cadre qui a donné lieu à plusieurs conventions :

? soutien de l'activité spécifique de prise en charge médico-chirurgicale des escarres, y compris du suivi de toute la bactériologie particulièrement pointue dans ce type d'activité (nouvelle convention en cours avec deux acteurs, l'hôpital d'instruction des armées (HIA) Bégin et le centre hospitalier de Montreuil) ;

? partenariat de l'unité sensori-cognitive (USC) et du service de neurologie du Val-de-Grâce 1 ( * ) ;

? consultation d'urologie par des praticiens du Val-de-Grâce ;

? externalisation des analyses biomédicales (HIA Percy) ;

? projet commun d'éducation thérapeutique des patients et de leur entourage ;

? priorité des admissions en soins de suite des patients provenant des HIA ;

? appareillage des blessés OPEX (opérations extérieures en collaboration) avec l'HIA Percy, etc... ;


avec des établissements civils (inscription dans le réseau Trajectoire) :

? partenariat de l'unité sensori-cognitive (USC) avec la Pitié Salpêtrière ;

? Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (APHP) : hôpitaux de Garches, Lariboisière, Saint Louis, etc... ;

? Hôpital Léopold Bellan, Centre Jeanne Garnier...

- des participations à des réseaux :

? réseau COMETE de prise en charge des problématiques sociales des patients hospitalisés ;

? réseau polio en Île-de-France ;

? réseau des blessés médullaires d'Île-de-France ;

? réseau de prise en charge des traumatisés crâniens graves en Ile-de-France.

À travers ces relations, l'INI, au-delà de sa spécificité, a incontestablement développé ses capacités, et sa participation active, à une offre de soins à laquelle l'établissement contribue sur des bases, qui, pour être contractuelles et volontaires, n'en sont pas moins actives et solides.

b) Une patientèle diversifiée et une contribution précieuse à la résilience de la Nation

La population bénéficiaire de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre bénéficie d'une priorité d'admission au centre médico-chirurgical de l'INI.

L'article L. 115 dispose que les titulaires d'une pension militaire d'invalidité attribuée au titre du code se voient garantir par l'État le droit à des soins médicaux, paramédicaux, chirurgicaux et pharmaceutiques gratuits pour les infirmités qui ont causé cette attribution.

Mais les patients accueillis par l'INI débordent largement cette priorité.

De fait, l'INI accueille également des ressortissants de régimes d'assurance maladie obligatoire, avec ou sans liens, avec le monde combattant.

La patientèle s'étend, en premier lieu, aux personnels du monde ancien combattant ou combattant ainsi qu'aux patients des hôpitaux militaires couverts par la Caisse nationale militaire de sécurité sociale.

Celui-ci peut relever de différents régimes de couverture maladie 2 ( * ) .

Mais l'INI offre également ses soins à des patients sans lien aucun avec les armées.

De fait, malgré la priorité qui leur est réservée, la très grande majorité des patients reçus en hospitalisation par l'INI ne relèvent pas de la catégorie des ayants droit statutaires de l'article L. 115 .

Au contraire, ceux-ci sont très minoritaires, ne représentant plus que 11 % du total des journées d'hospitalisation en 2008 contre 86 % pour les assurés sociaux .

Parmi ceux-ci, la patientèle couverte par la Caisse nationale militaire de sécurité sociale représentait 20 % des volumes en 2008, en progression assez nette.

Mais, finalement, ce sont près des trois quarts des journées d'hospitalisation qui sont le fait d'assurés sociaux civils.

De la même manière , l'activité du centre d'appareillage est majoritairement liée à des patients relevant du régime général d'assurance maladie.

Au total, force est de constater que les activités médicales de l'INI sont principalement destinées à des patients ne relevant pas du monde combattant, ni, de ce fait, des financements qu'il justifie .

Incidemment, on relèvera que les patients accueillis sont souvent des patients « de proximité », près de la moitié des patients venant de Paris intra-muros (80 % de la région Île-de-France), dont 56,5 % d'arrondissements limitrophes de l'Ouest parisien (7 e , 15 e et 16 e arrondissements).

Si l'ouverture des services médicaux à des patients ne relevant pas du monde combattant doit être saluée, le tropisme géographique de la clientèle appelle sans doute quelques évolutions.

Cependant, cette dimension territoriale de l'INI n'épuise pas sa nature.

L'INI démontre dans des conditions, hélas, toujours tragiques savoir remplir des missions médicales essentielles au service de la Nation en accueillant des blessés atteints de graves traumatismes, médullaires notamment.

Très récemment, à l'occasion des odieuses attaques perpétrées contre notre pays, l'INI a pu accueillir plus de vingt-deux des blessés des attentats de novembre , dont seize étaient encore suivis en rééducation à la date de rédaction du présent rapport.

De la même manière, plusieurs victimes de l'attentat perpétré à Nice ont été pris en charge dans ses murs.

En ces occasions, l'INI a pleinement démontré sa capacité à contribuer à l'une des missions fondamentales du service de santé des armées (SSA), la résilience de la Nation , malgré sa non-intégration formelle au SSA.

III. D'UN ACTEUR ENTIÈREMENT À PART À UN ACTEUR À PART ENTIÈRE ?

L'INI a traversé des moments difficiles illustrés par un mouvement social plutôt inhabituel survenu en 2014 ainsi que par le blocage de son cadre de gestion (le contrat d'objectifs et de performances restant en attente de renouvellement, le contrôleur budgétaire et comptable ministériel répétant des observations critiques sur les conditions d'établissement et d'exécution du budget de l'établissement) et de décisions pourtant nécessaires pour son avenir.

Pour reprendre une formule du médecin général des armées Jean-Marc Debonne, directeur du service central de santé des armées, l'INI apparaît comme un acteur entièrement à part confronté au projet (mais aussi au défi) de devenir un acteur à part entière.

À l'aube du contrôle budgétaire effectué par votre rapporteur spécial, celui-ci a pu constater que l'Institution nationale des invalides se trouvait confrontée à la question de sa pérennité. Ce constat était d'ailleurs partagé par le conseil d'administration de l'INI, ce dont témoigne assez la lecture des comptes rendus de ses réunions.

La crise latente traversée par l'INI s'ordonnait autour d'une série de fragilités internes mais aussi des évolutions de son environnement.

A. UNE SITUATION INCERTAINE, SOURCE D'ATTENTISME ET DE GASPILLAGE DE MOYENS

En réponse aux questions de votre rapporteur spécial, la tutelle de l'établissement a fait valoir que l'INI était confrontée à plusieurs risques dans sa gestion actuelle et pour son avenir :

• un risque financier : l'éventualité d'une réduction de la dotation annuelle de financement (DAF) versée par le ministère des affaires sociales et de la santé (voir infra ) conduisait à la perspective d'une fragilisation accentuée de l'équilibre financier de l'INI, alors que la situation budgétairement très tendue du ministère de la défense était peu compatible avec son engagement dans la prise en charge le comblement de l'écart entre produits et charges qui s'en serait trouvé encore accru (voir infra ) ;

• un risque social : la recherche d'économies sur les moyens de fonctionnement par une réduction des effectifs de l'INI qui aurait dû être de grande ampleur s'il avait fallu trouver dans cette voie le chemin d'un équilibre financier aurait nécessairement impliqué un plan d'accompagnement social ;

• un risque politique : toute évolution du dispositif actuel risquait d'être incomprise et refusée par le monde des anciens combattants, dès lors que des garanties suffisantes attachées à cette évolution, permettant la préservation des missions spécifiques de l'INI, n'auraient pas été réunies.

Votre rapporteur spécial a pu constater qu'il fallait ajouter à ces risques un risque fonctionnel associé, d'une part, à la nécessité de mettre à niveau les équipements généraux de l'établissement et, d'autre part, à une situation d'activité médico-chirurgicale en deçà des normes usuelles pour certaines interventions.

S'agissant de l'agencement général de l'établissement , il convient, en particulier, de mentionner l'urgence des travaux de mise de l'établissement aux normes de sécurité incendie ainsi que d'autres aménagements visant à mieux garantir les conditions d'hygiène.

Sur le premier point, il faut rappeler que les aides à l'investissement versées à l'INI avaient dans le passé permis de financer une première phase des travaux nécessaires de sécurité incendie d'un bâtiment où elle est particulièrement nécessaire mais que la situation financière de l'INI n'avait pas permis d'achever les mises à niveau indispensables.

Par ailleurs, en ce qui concerne les activités médico-chirurgicales , les problèmes rencontrés concernaient particulièrement le bloc opératoire dont le taux d'utilisation avait chuté à un niveau anormalement bas. Cet état de fait, en plus de poser des problèmes fonctionnels, représentait une forme de gaspillage des moyens techniques et des investissements réalisés dans le passé pour conforter le centre médico-chirurgical de l'établissement. Ceux-ci n'avaient toutefois pas été jusqu'au bout d'une logique pleinement satisfaisante puisque, alors que les patients accueillis pouvaient être considérés comme particulièrement fragiles, les équipements de réanimation y étaient sommaires.

Au total, ces incertitudes fonctionnelles peuvent être résumées dans les inquiétudes que suscitait la perspective d'un nouvel examen de certification par la Haute Autorité de santé (HAS).

Celle-ci était intervenue en 2008 puis en avril 2011 dans le cadre d'une démarche volontaire alors engagée par la direction puisque l'INI n'étant pas un établissement de santé ne se trouvait pas couvert par une obligation de cet ordre. La dernière certification délivrée par la HAS s'était accompagnée de réserves, notamment sur le point de la gestion des médicaments par l'établissement. Mais, la perspective d'un nouvel examen semblait s'accompagner de celle d'un retrait de la certification pour des motifs plus profonds, notamment ceux liés au fonctionnement du bloc opératoire.

Cet exercice devait se dérouler au cours de l'année 2015 conformément au calendrier quadriennal suivi par la HAS. Selon le ministère de la défense, la HAS a pris du retard sur son programme si bien que la date de visite de l'INI a dû être reportée d'un an. Fixée au mois de mars 2016, elle a été à nouveau ajournée d'un commun accord entre les partenaires pour des raisons plus acceptables que celles invoquées lors de la précédente déprogrammation. Il s'agit en effet de tirer les conséquences du nouveau projet d'établissement de l'INI (voir infra ) qui va bouleverser les activités médicales de l'établissement.

En toute hypothèse, il était amplement temps que l'INI sorte de la situation aveugle qui était la sienne quant à son avenir.

B. DES ÉQUILIBRES FINANCIERS FRAGILES

Le budget de l'INI dépasse désormais les 30 millions d'euros (33,8 millions d'euros de ressources en 2014).

Il est marqué par des déséquilibres répétés d'année en année au point que les budgets de l'INI ont donné lieu régulièrement à des observations très critiques du contrôleur budgétaire et comptable ministériel.

La progression des dépenses, relativement modérée mais dans un contexte qui a favorisé sa maîtrise, a été plus rapide que celle de ses recettes alors même que celles-ci ont fait l'objet d'un effort de dynamisation de la part de l'établissement quand les dépenses de l'INI se sont trouvées contenues par des reports de charges liés aux hésitations relatives au devenir de l'établissement.

Un effet de ciseaux s'est produit qui a conduit à solliciter le fonds de roulement de l'établissement pour combler les déficits et financer des dépenses de fonctionnement récurrentes.

Par ailleurs, la structure des dépenses mérite quelques observations, en raison, notamment, des mécanismes de financement de l'INI, qui sont fondés sur des données de comptabilité analytique 3 ( * ) . L'analyse des dépenses, pour autant que les données transmises par le ministère en réponse aux questions de votre rapporteur spécial la permette, tend à faire ressortir que le poids prépondérant des dépenses de personnel est principalement lié à des effectifs non-médicaux, dont un volet important est affecté à des missions dites de support, tandis que les dépenses d'investissement, pourtant nécessaires, ont longtemps stagné au détriment de la nécessaire adaptation des installations de l'INI.

1. Les dépenses de l'INI, une progression dans un contexte globalement favorable à leur maîtrise

Votre rapporteur spécial considère qu'il serait inapproprié de présenter l'INI comme un opérateur dispendieux. La visite de l'établissement à laquelle il a procédé le 10 octobre dernier suffirait à en convaincre tout un chacun.

On doit même d'une certaine manière s'inquiéter des conditions dans lesquelles l'établissement remplit ses missions, c'est-à-dire au mieux de capacités qu'il faudrait sans doute développer pour répondre plus pleinement aux besoins de ses usagers et mieux exploiter les atouts de l'INI.

Pour autant, dans un contexte de contrainte budgétaire, il est toujours possible de juger l'évolution des dépenses de l'INI avec plus ou moins d'exigence et il est normal de rechercher des voies d'amélioration.

a) Des difficultés de se rallier sans supplément d'expertise aux diagnostics tendant à réduire fortement les effectifs de l'INI

Il est fréquent d'entendre que l'Institution nationale des Invalides bénéficierait d'un personnel particulièrement, voire excessivement, nombreux et de ratios d'encadrement des patients anormalement élevés.

De fait, le ratio de personnel par lit ressort comme sensiblement supérieur aux normes en vigueur et le taux d'encadrement des patients et pensionnaires excède des valeurs moyennes constatées dans certains établissements analogues.

Mais il ne faut pas conférer a priori à ces comparaisons une excessive significativité.

Outre que les normes en usage peuvent faire l'objet de critiques sur tel ou tel point, elles paraissent sans réelle pertinence pour certaines unités de l'INI du fait des particularités de l'établissement.

En soi, elles ne permettent pas d'apprécier la situation de l'INI, et doivent être complétées par des analyses plus fines tenant compte des conditions réelles d'activité.

Cependant, il convient de rappeler les orientations stratégiques du précédent contrat d'objectifs et de performance de l'INI qui, pour les dépenses de support, en appelaient à réduire certaines surcapacités.

Aux yeux de votre rapporteur spécial, celles-ci, à supposer qu'une étude fine les confirme, appellent, de toute façon, des rationalisations structurelles visant à profiter mieux des opportunités de mutualisation que l'ouverture plus franche de l'INI à son environnement devraient permettre d'exploiter davantage.

Quant aux effectifs de soin, leur envergure doit dépendre, c'est l'évidence, de l'évolution de l'offre de santé proposée par l'INI.

b) Les dépenses de l'INI ont progressé dans un contexte a priori favorable à leur maîtrise

Sur le long terme, les charges de l'INI ont sensiblement progressé, malgré des efforts d'investissement très fluctuants.

Elles correspondent pour 95 % à des charges de personnel et de fonctionnement, cette proportion pouvant fluctuer en fonction de la réalisation du programme d'investissement, qui, dans les faits se révèle évolutive.

Les dépenses de l'INI sont ainsi étroitement tributaires, dans leur évolution, de sa masse salariale.

Or, celle-ci a été relativement dynamique alors que certains éléments étaient favorables à des économies.

(1) Une dynamique des dépenses structurellement dépendante des charges de personnel

Comparées aux 28,472 millions d'euros de 2005 , les dépenses de l'INI en 2015 , telles que comptabilisées dans le compte financier de l'établissement, ont atteint 36,9 millions d'euros , soit une augmentation apparente, de date à date, de 30 % (+ 2,6 % par an) .

Toutefois, au cours de cette période, des modifications structurelles sont intervenues si bien que l'évolution décrite qui s'est produite dans un périmètre changeant n'est pas significative de l'évolution réelle de la masse salariale. La principale modification a été le transfert de 57 ETP lors de l'année 2010 du fait de l'intégration du CERAH, année où le plafond d'emplois de l'établissement a été porté de 403 à 460 unités 4 ( * ) .

Sur une période plus homogène, entre 2010 et 2014 , les charges de l'INI ont progressé de 2,0 % par an .

Au total, les seules charges de personnel ont représenté 71,5 % des dépenses du compte de résultat de 2015 où elles s'élevaient à 25,7 millions d'euros sur un total de dépenses (hors investissement) de 35,9 millions d'euros.

Ces dépenses déterminent donc largement les évolutions des charges de l'établissement même si les dépenses de fonctionnement méritent une attention particulière d'autant qu'une sorte d'effet de vases communicants semble s'être produit par lequel la contention relative des dépenses de personnel a pu exercer des effets inflationnistes sur les charges de fonctionnement supportées par l'INI.

(2) Une augmentation continue des charges de personnel mais également de certaines dépenses de fonctionnement

Les dépenses de personnel ont connu une augmentation constante mais, selon la période considérée, d'autres charges ont également été dynamiques au point qu'il faut se demander s'il n'existe pas une sorte d'effet de vases communicants entre les dépenses de personnel et certaines dépenses de fonctionnement de sorte que celles-ci paraissent réduire les économies dégagées sur les premières.

• Les charges de personnel sont principalement composées de rémunérations de personnel non médical (personnels infirmiers, aides-soignants, spécialistes de la rééducation, personnels des services de soutien, ingénieurs et techniciens, en particulier pour le CERAH).

Les personnels de l'INI

L'état des ressources humaines de l'INI peut être appréhendé à partir des données suivantes :

• 436 ETP passés à 430,9 au 1 er mars 2015 dont 93,3 contractuels ;

• Effectifs physiques : 452 dont 107 contractuels (23,7 % des emplois) ;

• Médecins, pharmaciens, dentistes : 20 ETP ;

• Personnels paramédicaux : 290 ETP ;

• CERAH : 50 ETP ;

• Administration et support : 95 ETP ;

• Personnel du service de santé des armées : 8 ETP ;

• Personnels physiques par catégorie : catégorie A : 115 ; catégorie B : 112 ; catégorie C : 217, ouvriers de l'État : 8 ;

• Le quart des effectifs (122 emplois), est composé d'aides-soignants, le nombre d'infirmiers civils de soins généraux de catégorie A s'élève à 49 tandis que pour ceux qui ont opté pour le maintien en catégorie B, ils sont au nombre de 24 (pour un total de 72 emplois).

On relève le niveau relativement élevé des personnels affectés aux fonctions de support , services à propos desquels le ministère déclare que la politique de rationalisation a été poursuivie ces dernières années.

En toute hypothèse, si l'on additionne les charges sociales liées aux rémunérations des personnels non médicaux, cette catégorie de dépenses atteint près de 90 % des dépenses de personnel de l'INI.

Les rémunérations nettes des personnels médicaux s'élèvent, quant à elles, à 1,5 million d'euros. Elles ne représentent que 11,7 % des mêmes rémunérations versées au personnel non médical et 4,4 % du total des dépenses de l'INI.

Pour la période allant de 2010 à 2014 , couverte par un référentiel comptable homogène, si l'on y observe une augmentation des dépenses de l'INI de 2,5 millions d'euros , hors dotations aux amortissements, provisions et charges exceptionnelles (soit une croissance de 8,2 % ), on peut attribuer aux 1,8 million d'euros de progression des charges de personnel (+ 7,8 % ) les trois quarts de l'augmentation des dépenses de l'établissement.

L'augmentation de la masse salariale brute a été de 1,9 % par an , ce qui, compte tenu des objectifs de diminution des dépenses publiques, peut être considéré comme relativement élevé. Il convient toutefois de rappeler qu'en soi une progression de cet ordre n'a rien de discordant par rapport aux différentes cibles fixées à l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) non plus qu'avec l'évolution des prix. Par ailleurs, l'alourdissement des charges sociales, en lien notamment avec la question du financement des retraites doit être considéré.

On relèvera, par ailleurs, que cette contribution est un peu inférieure au poids relatif des dépenses de personnel dans les charges de l'INI, ce qui témoigne moins d'économies sur ce poste de dépenses que du dynamisme d'autres charges, qui, dans une certaine mesure ont pris le relais des dépenses de personnel.

En bref, s'il a pu arriver que, dans le passé, la politique salariale de l'INI puisse faire l'objet de critiques de la part du contrôle budgétaire et comptable ministériel, sous certaines réserves exposées ci-après, une forme de normalisation a été enclenchée, qu'il convient de poursuivre.

Toutefois, elle n'enlève rien au constat d'une contribution majeure des dépenses de personnel à l'évolution des charges de l'établissement.

• La progression des dépenses de l'INI s'explique également par le dynamisme des dépenses de fonctionnement.

Entre 2010 et 2015, les charges de fonctionnement ont augmenté de 12,3 % (+ 2,5 % par an), soit un rythme nettement plus rapide que celui du total des charges de l'INI (amortissements compris), dont l'alourdissement aura été de 5,5 % sur la période. L'inflation des charges de fonctionnement a également été plus forte que celle des dépenses de personnel (+ 7,3 %).

Les différentes catégories de charges de fonctionnement ont fluctué d'une année à l'autre dans des proportions parfois importantes mais ce sont les services extérieurs qui ont connu la plus forte progression.

Les frais de restauration ont, en particulier, beaucoup progressé. Ils comptent pour un tiers des services extérieurs. Ils se sont alourdis d'un quart de leur niveau initial entre 2010 et 2014 de 1,3 à 1,6 million d'euros). De même les frais de nettoyage ont nettement augmenté, de 18 % entre 2012 et 2014. Il est vrai qu'en 2012 ils avaient atteint un bas niveau historique. Pour autant, leur progression dépasse les 2 % par an. Une mise en évidence des frais de transport s'impose du fait de l'éventualité d'un alourdissement de ce poste de dépenses à l'avenir (voir infra ). Ils s'élevaient à 105 303 euros en 2010 puis avaient baissé pour atteindre 93 304 euros en 2011. Depuis, ils ont nettement progressé. Avec 136 000 euros en 2014, ils ont cru de 46 % de date à date.

L'établissement indique avoir en portefeuille un très grand nombre de procédures de marché public pour ses fournitures extérieures. Par ailleurs, l'Institution dit avoir engagé depuis plusieurs années dans le cadre du contrat d'objectifs et de performance (COP) une démarche de rationalisation et de modernisation de sa fonction achats.

Les procédures mutualisées employées pour les achats extérieurs de l'INI

L'INI n'utilise pas le programme AIDA mais, comme le service de santé des armées (SSA), l'INI a adhéré (en mars 2010) au GIP RESAH-IDF (Réseau des acheteurs hospitaliers d'Île-de-France) qui est l'un des principaux opérateurs spécialisés dans la mutualisation et la professionnalisation des achats du secteur sanitaire et médico-social public et privé non lucratif.

Actuellement l'INI a adhéré à près de 400 marchés du RESAH. Ces marchés portent sur tous les segments propres au milieu hospitalier :

Fournitures :

- Usage unique stérile ;

- Usage unique non stérile ;

- Hygiène ;

- Électricité ;

- Diététique ;

- Médicaments ;

- Dispositifs médicaux ;

- Fournitures d'atelier (électricité, plomberie, quincaillerie...).

Prestations de service :

- Vérifications et contrôles techniques ;

- Intérim paramédicaux ;

- Location et entretien du linge...

Lorsque le RESAH ne dispose pas d'offre ou que l'offre ne correspond pas aux besoins de l'INI, l'UGAP (Union des groupements d'achats publics) est sollicitée. Ainsi, l'INI passe commande à l'UGAP si celle-ci dispose d'une offre correspondant aux besoins. Cela concerne les achats suivants :

- Assurance flotte automobile, y compris le véhicule auto-école ;

- Entretien de la flotte automobile ;

- Location des photocopieurs ;

- Postes de travail informatique ;

- Une partie de l'infrastructure réseaux du schéma directeur des systèmes d'information ;

- Mobiliers ;

- Fournitures de bureau...

Depuis la mise en oeuvre de cette démarche, l'INI indique avoir pu dégager des économies substantielles.

Celles-ci ne ressortent pas comme particulièrement documentées dans les données fournies à votre rapporteur spécial.

L'optimisation des achats extérieurs par l'INI reste donc un objectif à atteindre, d'autant plus que certains services extérieurs devraient être davantage sollicités à l'avenir dans le cadre du nouveau projet de l'établissement, en particulier les services de transport.

En toute hypothèse, il ne faudrait pas que les efforts de l'INI pour maîtriser sa masse salariale soient altérés pas des coûts trop vite croissants des services externalisés.

(3) Un contexte plutôt favorable à des économies de dépenses

L'augmentation des charges de l'INI s'est produite dans un contexte plutôt favorable à une maîtrise des dépenses .

• Il en est allé ainsi pour la masse salariale dont la croissance est intervenue dans un environnement où, pourtant, un certain nombre d'éléments étaient réunis pour favoriser une plus forte maîtrise.

Ainsi, les effectifs employés ont légèrement diminué , passant de 446 en 2010 à 439 en 2015 (- 7 emplois, soit une diminution des effectifs de 1,5%) 5 ( * ) .

Le coût du travail par personne employée a ainsi progressé plus vite que la masse salariale totale (+ 2,1 % par an) .

Par ailleurs, l'adaptation des mesures de revalorisation du dernier protocole concernant la fonction publique hospitalière du 2 février 2010, dit « Bachelot », a tardé à intervenir, allégeant d'autant les coûts de personnel de l'établissement qui devraient connaître un ressaut dans les exercices à venir quand l'ensemble du protocole sera mis en oeuvre.

Le calendrier a été le suivant :

- infirmiers en soins généraux et spécialisés : septembre 2010 dans la fonction publique hospitalière (réforme LMD « Licence Master Doctorat » : classement en catégorie A avec revalorisations indiciaires en 2010, 2012 et 2015). Transposition au ministère de la défense et notamment à l'INI, fin juillet 2014 , en raison des difficultés liées aux modalités de mise en oeuvre de cette transposition (question du droit d'option, c'est-à-dire du maintien en catégorie B contre le bénéfice du départ en retraite au titre de la catégorie active) ;

- cadres de santé : 2012 dans la fonction publique hospitalière (revalorisations indiciaires en 2012 et 2015) et transposition en mars 2015 pour les cadres de santé du ministère de la défense ;

- techniciens paramédicaux dans la spécialité ergothérapie : août 2015 dans la fonction publique hospitalière (réforme LMD : classement en catégorie A avec revalorisation indiciaire) et transposition en cours au ministère de la défense.

La lenteur de la transposition du protocole doit être observée ainsi que le décalage entre son application dans la fonction publique hospitalière et à l'INI.

• Par ailleurs, même s'il est difficile à appréhender avec une totale pertinence, le plan de charge de l'INI a plutôt connu une stabilisation, voire une baisse, au cours de la période sous revue.

En toute hypothèse, des fluctuations parfois amples ont touché l'activité de l'INI. Certaines années ont même été marquées par une chute dans certains départements. Il en a été ainsi, en particulier, pour le centre des pensionnaires en 2012 qui, cette année-là, avait perdu 2 555 journées par rapport à l'année 2010, soit une baisse considérable de l'activité du centre de près de 10 %. Au-delà, un certain redressement s'est produit sans pour autant que le centre retrouve le niveau d'activité de début de période.

Ces évolutions ont prolongé une tendance installée de longue date.

Le centre des pensionnaires qui, au milieu des années 2000, accueillait de 91 personnes a vu ses capacités d'accueil réduites de 8 lits (83 lits théoriques) et son activité tourne désormais autour de 80 personnes accueillies. La baisse d'activité trouve une traduction concrète dans les évolutions de l'indicateur de performance publié dans les annexes budgétaires. Ainsi, pour 2014, le coût de la journée d'un pensionnaire à l'INI avait atteint 397 euros mais avait dès 2015 connu une forte augmentation pour se situer à 418 euros. Cette augmentation de 5,3 % d'une année à l'autre a été due à la baisse de fréquentation constatée. La réduction des capacités d'accueil du centre des pensionnaires mise en oeuvre au cours de la période la plus récente semblant n'avoir pas été suivie des ajustements d'effectifs qui, théoriquement, auraient pu l'accompagner.

Quant au centre médico-chirugical , au milieu des années 2000, il réunissait cinquante-deux lits dans son service de médecine physique et de réadaptation, trente-quatre lits de chirurgie et six lits dans son unité d'évaluation sensori-cognitive (92 lits au total).

Actuellement, le nombre des lits a été ramené à quarante-huit en médecine physique et de réadaptation, vingt-quatre lits en chirurgie et deux lits en soins de suite post opératoire auxquels il convient d'ajouter quatorze lits théoriques, mais en réalité dix lits en hospitalisation de jour (84 lits dont 10 en hôpital de jour).

Il faut également relever que la prise en charge des urgences qui, selon la Cour des comptes avait été fixée comme une perspective de l'INI, n'a finalement pas été mise en oeuvre sinon de façon très exceptionnelle ou, encore, l'externalisation du laboratoire d'analyses médicales.

• Enfin, pour quitter le champ des dépenses courantes, les dépenses d'investissement ont été modérées pendant la période dans le contexte d'une suspension de la réalisation du schéma directeur d'infrastructures à la suite d'un audit interministériel en 2014.

Celui-ci avait pourtant été défini en fonction du contrat d'objectifs et de performance 2009-2014 sur la base de diagnostics concluant pour certaines installations à forts enjeux de sécurité à leur obsolescence.

Les investissements avaient nettement progressé en 2013 atteignant un pic, à 4,6 millions d'euros contre une moyenne de 1,6 million d'euros entre 2010 et 2012. L'année 2014 a connu un repli sensible du fait de la décision mentionnée. Les dépenses d'investissement sont retombées à 6 % du total des dépenses de l'INI (2,1 millions d'euros). En 2015, un léger sursaut les a portées à 2,8 millions d'euros. Le compte financier en compte 2,79 millions d'euros tandis qu'en 2005, ils s'étaient élevés à 3,67 millions d'euros. Sur un plan plus méthodologique, on peut être amené à s'interroger sur les conditions dans lesquelles l'établissement recense ses besoins de renouvellement de ses actifs. Il paraît suivre une politique d'inscription comptable de ses amortissements qui conduit à minorer ses charges réelles.

Le ralentissement des investissements a pu être justifié par les tutelles, dans le passé, par l'absence de besoins.

En réalité, cette justification ne peut être considérée comme valide au vu de la réalisation concrète des investissements qui s'est accompagnée d'un report de satisfaction de besoins élémentaires.

La préparation du nouveau schéma pluriannuel de stratégie immobilière de l'INI en cours d'achèvement témoigne d'ailleurs abondamment des retards accumulés.

Il apparaît finalement que les vraies guides de la politique d'investissement de l'INI ont été, et sa situation financière, et les mesures de suspension prises à la suite des observations du contrôle de gestion appliqué à l'établissement.

En conclusion, les niveaux successifs des investissements annuels ont été inférieurs, de beaucoup, aux besoins , situation intenable à terme et qui appelle des correctifs.

2. Un mode de financement complexe et insuffisant pour couvrir les charges de l'INI

Le mode de financement de l'INI ressort comme complexe et marqué par une dualité des dotations budgétaires qui suscite parfois quelques confusions.

En toute hypothèse, le financement de l'INI s'est révélé insuffisant pour assurer un équilibre satisfaisant de son fonctionnement courant, débouchant sur des incidents regrettables.

a) Un mode de financement complexe, source de confusions

Les recettes courantes de l'établissement sont structurées par deux subventions versées, l'une, par le ministère de la défense (la subvention pour charges de service public imputée sur le programme 169 de la mission « Anciens combattants), l'autre par le ministère des affaires sociales et de la santé (dite « dotation annuelle de financement » - DAF).

Selon les comptes financiers annuels, la première était de 11,839 millions d'euros en 2014 et la seconde de 11,827 millions d'euros .

À elles deux, elles représentaient 70 % des ressources courantes de l'établissement.

Par rapport aux valeurs mentionnées ci-dessus, le projet de loi de finances pour 2017 maintient à peu près inchangé le niveau de la subvention versée par le ministère de la défense (11,8 millions d'euros). Il en irait de même pour la DAF.

La dotation versée par le ministère des affaires sociales et de la santé n'a vocation qu'à couvrir les charges du centre médico-chirurgical au profit des assurés sociaux à l'exclusion des autres activités de l'INI.

Son régime est fixé par le code de la sécurité sociale qui prévoit son inclusion dans l'ONDAM ainsi que ses modalités de revalorisation .

L'article R. 174-23 du code de la sécurité sociale dispose que la DAF est calculée sur la base de la dotation versée l'année précédente modulée selon un taux prenant en compte les coûts et l'activité de l'INI . L'arrêté annuel pris en ce sens peut être révisé en cours d'année pour tenir compte d'évolutions de toute nature.

Ces dispositions feraient l'objet d'une application peu rigoureuse de la part du ministère de la santé.

Le service du contrôle budgétaire et comptable ministériel près le ministère des anciens combattants dans une note à la direction du budget du 27 mars 2012 mentionne les réticences de la direction de l'hospitalisation et de l'offre de soins qui « gèle de facto, depuis 2005, le montant de la dotation annuelle de fonctionnement servie à l'Institution » , au motif que l'INI s'inscrirait de manière insuffisante dans le schéma régional d'organisation sanitaire.

Votre rapporteur spécial considère que ce motif ne saurait justifier l'inertie de la DAF quand les textes organisent sa revalorisation.

Dans ces conditions, selon les réponses apportées au questionnaire de votre rapporteur spécial, la DAF serait sous-évaluée.

Cette sous-évaluation, si elle devait être vérifiée par confrontation avec la réalité des coûts exposés par l'INI, doit être corrigée.

En toute hypothèse, la dualité des dotations budgétaires versées à l'INI pour assurer son fonctionnement favorise des situations plus ou moins conflictuelles.

Celles-ci paraissent d'autant plus promptes à se développer que, d'une part, les modalités de calcul guidant la dotation du ministère de la santé supposent des appréciations comptables toujours complexes et paraissent, admettre quelques marges d'appréciation.

En outre, il faut tenir compte des différences de « cultures » entre les deux financeurs.

Il apparaît en particulier que le ministère de la santé souhaiterait appliquer à l'INI ses principes habituels de tarification qui supposent une tarification sur la base des activités, et non sur la base des coûts.

Une telle évolution vers l'application par le ministère de la santé d'une tarification à l'acte, si elle devait voir le jour, devrait à tout le moins tenir compte des particularités des activités de soin de l'INI.

Au total, dans ce cadre dual, une sorte de jeu de rôles a pu prévaloir avec des effets particulièrement regrettables.

L'INI avait, semble-t-il, pris l'habitude de budgéter une dotation du ministère de la santé conforme à ses demandes mais, en pratique, loin de correspondre à celle finalement attribuée à l'INI.

Il en était résulté une forme d'insincérité budgétaire dénoncée comme telle par le service du contrôle budgétaire et comptable ministériel.

Il semble difficile de renoncer à un système de financement dual qui reflète la réalité de l'activité de l'INI. Pour autant, celui-ci ne doit pas déboucher sur des concurrences entre administrations visant à reporter les charges de financement l'une sur l'autre. Votre rapporteur spécial n'a pas qualité pour se prononcer sur l'opportunité d'une modification des modalités de détermination de la DAF versée par le ministère de la santé. Il souhaite que, au moins dans la période intercalaire correspondant à la mise en place du nouveau projet de l'INI, les conditions qui prévalent réglementairement aujourd'hui, soient mieux respectées.

b) Une insuffisance structurelle de financement

Depuis quelques exercices, les moyens de l'établissement sont marqués par une certaine stabilité en niveau malgré les efforts entrepris pour diversifier les ressources.

• L'INI a entrepris un effort de diversification de ses ressources propres dont, toutefois, la portée pratique ne doit pas être surestimée.

Quatre postes de recettes alternatives aux dotations ministérielles liées aux activités de l'établissement apportent des moyens significatifs.

Il s'agit :

- au titre du centre des pensionnaires , du forfait soins et des redevances pour, respectivement, 3,2 et 1,6 millions d'euros (4,8 millions d'euros) ;

- au titre du centre médico-chirurgical , d'un poste « produits des activités » pour 3,7 millions d'euros ;

- au titre du CERAH , de 1,1 million d'euros.

Au total, ces 9,6 millions d'euros comptent pour un peu plus de 28 % des ressources de l'INI .

Les modalités de contribution des usagers de l'INI

Le décret n° 92-105 du 30 janvier 1992 fixe les modalités selon lesquelles les pensionnaires contribuent à leur hébergement. Il est prévu qu'ils versent une redevance en fonction de leurs revenus à laquelle s'ajoutent éventuellement des frais accessoires comme ceux de blanchisserie et de téléphone. Au 30 juin 2016, la redevance journalière moyenne est de 62,04 euros .

Les hébergés 6 ( * ) paient une contribution journalière (prestation hôtelière et soins de confort), dont le montant est approuvé en conseil d'administration. Pour l'année 2016, cette participation s'élève à 143 euros/jour .

On rappelle que le coût moyen de la journée d'un pensionnaire de l'INI a été estimé à 418 euros en 2015.

L'écart entre la contribution des pensionnaires et celle des hébergés, en défaveur de ces derniers mériterait d'être mieux justifié.

S'agissant de la prise en charge par le centre médicochirurgical (CMC), les bénéficiaires de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et victimes de la guerre sont pris en charge quel que soit leur motif d'hospitalisation au soit au titre des soins médicaux gratuits, soit par le régime général d'assurance maladie dont ils dépendent. Ils ne participent qu'à hauteur des frais accessoires (téléphone, etc.).

Pour les patients de droit commun du CMC, les frais d'hospitalisation restant à leur charge dépendent du motif d'hospitalisation. Dans la majorité des cas, ces frais sont supportés par les différents régimes d'assurance maladie dont ils dépendent. Seul le forfait journalier hospitalier reste à leur charge ainsi que, très rarement, le ticket modérateur. Ces frais résiduels sont la plupart du temps couverts par une assurance maladie complémentaire.

Aux produits ci-dessus énumérés s'ajoute un forfait soins versé par la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS) dont le niveau atteignait 111 euros en 2014.

Si les produits résultant du volume d'activités de l'établissement ont connu une augmentation, au contraire des dotations ministérielles qui ont subi une légère érosion au cours de cette période, leur part dans le financement de l'INI demeure minoritaire (28,4 %) et les ressources qu'ils apportent sont soumises à des variations annuelles importantes.

Celles-ci touchent plus particulièrement les produits d'activités du centre médical qui, après un pic en 2011 (environ 4 millions d'euros), ont connu une brusque diminution l'année suivante (3,2 millions et même 2,8 millions en 2013) pour se redresser en 2014.

Par ailleurs, une part importante de l'augmentation des ressources propres de l'INI est venue des recettes du CERAH (+ 678 600 euros) qui a contribué aux deux tiers de cet accroissement. Or, malgré le dynamisme du centre, les recettes du CERAH ne sont pas extensibles à merci. Au demeurant, ses recettes pour l'année 2015 avaient été inscrites en réduction sensible par rapport aux réalisations de 2014 (750 000 euros contre 1 111 351 euros selon les informations transmises à votre rapporteur spécial).

Autrement dit, en moyenne, les ressources propres de l'INI financent au mieux quelque 25 % de l'activité de l'établissement et ne sont guère malléables.

Incidemment, votre rapporteur spécial s'interroge sur la justification de l'application de contributions journalières inégales entre les pensionnaires et les personnes hébergées tandis que les conditions dans lesquelles la contribution des pensionnaires est modulée en fonction de leur revenu paraissent appeler une certaine attention.

• Les recettes de l'INI sont moins dynamiques que ses dépenses.

Même si entre 2010 et 2014 une progression des ressources en nominal doit être relevée (+ 4,6 % environ pour 1,5 million d'euros), elle correspond à une légère érosion une fois l'inflation prise en compte.

En outre, les ressources de l'établissement connaissent des fluctuations certaines au point que leur niveau de 2014 n'était supérieur à celui atteint en 2011 que de 240 000 euros. Quant aux recettes du budget initial de l'établissement de 2016, elles sont moins élevées que celles de 2015 et même de 2014.

Cette inertie des ressources est attribuable au faible dynamisme des dotations versées par les ministères, c'est à dire de la dotation versée par le ministère de la santé pour couvrir les coûts du centre médico-chirurgical mais aussi de la subvention pour charges de service public en provenance du programme 169 de la mission « Anciens combattants ».

La première a été très légèrement revalorisée jusqu'en 2013 pour être stabilisée par la suite à 11,827 millions d'euros. Quant à la subvention du programme 169, elle a suivi une trajectoire baissière continue. De 12,387 millions d'euros en 2010, elle est passée à 11,8 millions en 2014 pour se redresser un peu lors de l'exécution 2015 (12,1 millions d'euros).

Force est donc de constater que si la DAF versée par le ministère de la santé a subi les effets d'un gel peu justifiable, de son côté, la subvention pour charges de service public versée par le ministère de la défense a été peu dynamique.

À ce constat s'ajoute celui d'une cessation pendant plusieurs exercices de toute attribution de dotation particulière pour financer les investissements.

En effet, à partir du budget pour 2012, la composante des soutiens de l'État destinée au financement de l'investissement a disparu, au motif alors énoncé d'un défaut de besoin particulièrement contestable.

Au total, on constate qu'entre 2010 et 2015 les dépenses courantes de l'INI ont progressé de 2,6 millions d'euros, soit une croissance de 8,5 % (+ 1,6% par an) à comparer avec des ressources qui n'ont progressé que de 1,6 million d'euros 5,0 % soit une moyenne annuelle inférieure à 1 %.

Dans ces conditions, la section de fonctionnement de l'INI a vu ses équilibres se dégrader.

Et, malgré le ralentissement des investissements, il a fallu de plus en plus compter sur le fonds de roulement de l'INI, déjà sollicité par les déficits courants de l'établissement, pour assurer leur financement.

3. Le fonds de roulement a été largement sollicité ces dernières années

Le fonds de roulement de l'INI s'élevait à 25,234 millions d'euros à la fin de l'exercice 2010 . Il s'élèverait aujourd'hui à environ 16 millions d'euros.

En 2011, il avait été porté à 26,584 millions d'euros (+ 1,3 million d'euros) et avait encore progressé en 2012 pour se situer à 26,863 millions d'euros .

Il atteignait alors environ une année pleine de charges de fonctionnement de l'établissement.

Depuis , le fonds de roulement a été considérablement sollicité pour financer les besoins de financement récurrents de l'INI alors même que les investissements ont dû être contenus.

Les documents budgétaires annexés aux projets de loi de finances n'informent pas sur le niveau du fonds de roulement de l'INI, ce qui doit être regretté.

Toutefois, selon les informations transmises à votre rapporteur spécial, le fonds de roulement de l'INI a reculé très significativement pour ne plus réunir que 16,6 millions d'euros après les prélèvements effectués depuis l'exercice 2013. Celui-ci, et les exercices suivants, a prolongé l'extinction du versement à l'INI de tout soutien à l'investissement.

Après le prélèvement de 1,2 million d'euros enregistré dans les comptes de 2015, le budget initial pour 2016 prévoyait un prélèvement de 4,685 millions d'euros. Pour 2017, une nouvelle ponction du fonds de roulement est programmée.

Votre rapporteur spécial relève que le fonds de roulement de l'INI avait été calibré dans la perspective du financement des investissements nécessaires. Or, les différents prélèvements ont largement excédé les investissements réalisés et le fonds de roulement a été ponctionné pour couvrir des déficits courants dont la responsabilité n'incombe pas tant à une quelconque dérive des charges qu'à l'inertie des dotations versées par les ministères.

L'état du fonds de roulement de l'INI peut faire l'objet d'appréciations diverses.

D'un côté, il ressort comme largement suffisant pour couvrir les besoins théoriques de disponibilités financières. Sur la base d'un coût quotidien de fonctionnement de l'ordre de 80 000 euros, le niveau du fonds de roulement dépasse de beaucoup les ressources nécessaires pour couvrir trois mois d'activité. Le niveau de la trésorerie de l'INI (différence entre le fonds de roulement disponible et le besoin de fonds de roulement) était d'ailleurs élevé en 2014 (20,5 millions d'euros) et produisait des revenus pour l'établissement.

D'un autre côté, les besoins de financement correspondant aux investissements prévus dans le cadre du futur projet d'établissement excèderont nettement le disponible de sorte que l'INI devra compter pour les financer sur une reprise de la politique d'attribution de subventions d'investissement en provenance du budget général. C'est d'ailleurs ce que programme le projet de loi de finances pour 2017 qui porte une nouvelle subvention d'investissement de 5 millions d'euros. Mais, avec ce niveau, il ressort que la sollicitation du fonds de roulement de l'INI rejoindra un niveau tout juste suffisant pour satisfaire aux critères de prudence financière.

À l'avenir, il faudra veiller à ce que l'INI n'ampute pas sa capacité de financement par des prélèvements destinés à financer son fonctionnement courant, ce qui suppose une consolidation des ressources versées par les ministères et de poursuivre autant que possible la mise à niveau de ses ressources propres.

IV. POUR UN NOUVEAU DÉPART DANS LE RESPECT DE LA VOCATION DE L'INI

Selon les informations réunies par votre rapporteur spécial au cours de sa mission de contrôle budgétaire, l'horizon de l'INI semble désormais sur le point de se dégager dans un contexte où il serait conduit à devenir un acteur du projet « Service de santé des armées 2020 ».

Le rôle qui semble se dessiner à l'avenir pour l'INI présente des novations importantes pour le projet médical de l'établissement, tout en préservant sa vocation d'accueil prolongé des invalides et mutilés dont, hélas, la population tend à se renouveler, évolution que l'INI doit pleinement prendre en considération.

Dans ce contexte évolutif, scandé au cours même de la mission de contrôle budgétaire de votre rapporteur spécial par l'adoption du projet médical de l'INI pour les années à venir par le conseil d'administration de l'établissement dans son vote du 17 juin 2016, il reste des incertitudes à dissiper et des conditions à réunir afin que l'INI, fidèle à sa tradition, continue à accomplir pleinement ses missions ainsi rénovées.

A. POUR UN NOUVEAU PROJET D'ÉTABLISSEMENT PASSANT PAR UNE REDÉFINITION DE L'OFFRE DE SOINS AMBITIEUSE ET RESPECTUEUSE DE LA DEMANDE

1. Plusieurs scénarios semblent avoir été envisagés

Le rapport des trois inspections générales mentionné ci-dessus et déclenché à la suite des observations du contrôleur budgétaire et comptable ministériel sur les équilibres du schéma immobilier de l'établissement n'avait, semble-t-il pas envisagé l'hypothèse d'une fermeture complète de l'INI.

Votre rapporteur spécial emploie sur ce point les précautions qui s'imposent puisqu'en dépit de ses demandes répétées ce rapport ne lui a pas été transmis, ce qu'il déplore très vivement.

Il semble que plusieurs hypothèses aient alors été envisagées :

- pour le centre des pensionnaires : soit une réduction de sa capacité d'accueil autour d'une cinquantaine de lits et sa relocalisation dans un bâtiment unique, soit le maintien de ses capacités actuelles d'accueil pour un coût estimé, pour le ministère de la défense, de l'ordre de 30 millions d'euros ;

- pour l'offre médicale : un transfert des actes de chirurgie, l'INI conservant, et même développant, les soins de suite (de 48 à 80 lits), ou l'arrêt total des activités de soin de l'établissement qui auraient été confiées à d'autres hôpitaux.

Les effets sur l'emploi de ces différents scénarios paraissent avoir été appréhendés dans les termes suivants : une cible de 50 lits pour le centre des pensionnaires aurait entraîné la nécessité de reconvertir une cinquantaine de personnes ; il en serait allé de même dans le projet de fermeture du bloc chirurgical avec augmentation de l'activité de réadaptation. Enfin, la cessation de toutes les activités médicales de l'INI (y compris celles du CERAH) aurait supposé la reconversion de 250 personnes.

Au total, la question centrale tournait autour du niveau de l'offre de soins de l'INI et de sa nature, question d'autant plus aigüe dans un contexte de redéfinition du format du service de santé des armées que l'INI, comme le Val-de-Grâce, dont ce fut la principale raison de la fermeture, devait faire face à des besoins d'investissement importants afin de mettre à niveau ses prestations et, en particulier, son offre de soins.

Ces différentes questions sont sur le point de recevoir des réponses.

Votre rapporteur spécial s'en félicite tout en regrettant les délais pris pour formuler le cadre d'un nouveau projet. Il est vrai que la haute valeur symbolique de l'Institution et la nécessité d'un changement de culture acceptée par les différentes parties prenantes ont sans doute joué. Mais il faut souhaiter que le processus, désormais engagé, ne se heurte pas à de nouveaux obstacles et que sa phase de concrétisation s'engage maintenant en pratique.

2. Le nouveau projet d'établissement de l'INI s'inscrit dans un mouvement d'ouverture de l'INI sur son environnement

Le nouveau projet d'établissement de l'INI comporte un projet médical dont la définition permettra l'engagement d'aménagements immobiliers importants.

a) Un nouveau projet médical recentré sur les avantages comparatifs de l'INI et ouvert sur son environnement

Aucune des hypothèses envisagées dans le rapport des inspections et rappelées ci-dessus ne serait appliquée à la lettre. Toutefois, une voie moyenne semble avoir été suivie.

Elle implique que l'INI occupe une place bien déterminée dans un « parcours du blessé » où elle apporterait tout le poids de ses avantages comparatifs, à savoir ses capacités à prendre en charge la réadaptation fonctionnelle. Dans ce contexte, l'initiative heureuse d'ouvrir un centre spécialisé dans le traitement des troubles psychiques doit être soulignée.

Au total, dans les grandes lignes qui sont les siennes aujourd'hui, le nouveau projet médical de l'INI doit être approuvé.

Le nouveau projet médical de l'INI

Le plan de réforme du projet médical comporte de nouveaux axes stratégiques et un plan de mise en oeuvre opérationnel qui se décline comme suit :

Un projet répondant aux attentes du ministère de la défense

- intégration au schéma opérationnel mis en oeuvre par le service de santé des armées (SSA) ;

- légitimation du projet de l'INI ;

- co-développement du post-rôle 4 ;

- prise en charge du blessé dans un hôpital d'instruction des armées ;

- accompagnement du blessé jusqu'à l'autonomie.

Un projet conforme aux orientations des tutelles


• Intégration des acteurs de la réhabilitation qui constitueront pour partie la maison des blessés demandée par le ministre associant l'INI :

- aux cellules d'aide aux blessés ;

- à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONAC-VG) ;

- au cercle sportif INI.


• Ouverture territoriale pour sa mise en oeuvre et concernant :

- la prise en charge des paraplégiques partagée avec le SSA ;

- la création d'un centre des amputés traumatiques.


• Vrai projet inter-établissements avec :

- le SSA en priorité et majoritairement ;

- des partenaires civils (hôpital de Garches).

Les grands principes du projet reposent sur :


• La création d'un post-rôle 4 au sein du SSA pour les militaires blessés en opération, dispositif stratégique permettant d'assurer un parcours performant et complet de la phase initiale à la gestion des séquelles, et intégrant :

- la complexité des blessures de guerre ;

- les blessures physiques et/ou psychiques (intégration des troubles psychiques post-traumatiques) ;

- les spécificités professionnelles.


• La prise en charge médicale et socio-professionnelle :

- l'INI, a un rôle de référent national au sein d'une filière de réadaptation et de réinsertion.


• La co-localisation et la synergie des acteurs de la réinsertion :

- multiplicité des acteurs : ONAC-VG, cellules d'aide aux blessés, action sociale des armées (ASA), cercle sportif (CSINI) ;

- intérêt et vocation historique du site des Invalides.


• Ouverture potentielle aux autres bénéficiaires :

- membres de la communauté de défense ;

- agents de l'État blessés dans l'exercice de leurs fonctions ;

- police, pompiers ;

- victimes d'attentats (pouvant être bénéficiaires à terme d'une pension militaire d'invalidité (PMI) au titre de l'article L115) ;

- assistance publique hôpitaux de Paris (APHP) ;

- international : collaborations.

Le nouveau projet médical de l'INI :

Son fondement repose sur le centre des pensionnaires, associé à un pôle de « Réhabilitation post-traumatique de la Défense ».


• Les bases du nouveau projet :

- redéfinition de la mission du Centre médico-chirurgical, qui implique l'arrêt des activités de courts séjours (temps opératoire de la chirurgie) ;

- création d'une nouvelle offre de soins amenant à la création d'un centre de prise en charge des syndromes post-traumatiques.


• Spécificités :

- une mise en oeuvre en commun avec le SSA ;

- une ouverture territoriale de recours et de résilience partagée.

En imbrication forte avec les missions de la Plateforme Hospitalière Militaire Île-de-France (PHM-IF), il constitue un projet commun avec :


• Une logique des parcours des militaires blessés selon un schéma global :

- aigu => Plateforme hospitalière Militaire Île-de-France (PHM-IF) ;

- rééducation, réadaptation et réinsertion à moyen et long terme => INI.


• Une coordination et une gouvernance à développer :

- parcours des patients ;

- parcours des professionnels ;

- stratégies logistiques.

La composition du centre de réhabilitation post-traumatique :

Médecine Physique de rééducation et réadaptation :

- secteur conventionnel avec 40 lits ;

- transformation du service de chirurgie : service de soins de suite post-opératoires (SSPO), soit 10 lits à terme en cible ;

- unité Sensori-Cognitive (USC) en hôpital de jour ;

- plateau technique partagé redéfini avec 10 lits en hôpital de jour et les activités médico-techniques recentrées sur le besoin (dentisterie, radiologie, pharmacie) ;

- service de réadaptation psychique de 20 lits avec son plateau dédié adapté et un plateau technique spécifique.

Le Centre d'Études et de Recherches sur l'Appareillage des Handicapés (CERAH) :

- maintien du site et des missions de Woippy (57) ;

- transfert du site de Créteil pour la fabrication et la recherche sur le site de l'INI, au niveau du plateau technique et permettant à terme la création d'un centre pour amputés, référent régional avec celui de Garches.

On relèvera qu'un évènement majeur interviendrait avec la fermeture du bloc opératoire de l'INI . Cette décision a été au coeur de discussions légitimes.

Il faut en effet prendre en considération l'expérience acquise dans le domaine de la chirurgie des escarres par les équipes chirurgicales et, plus largement, dans celui des suites de traumatisme médullaire. Par ailleurs, les difficultés de transport des blessés et invalides hébergés par l'INI sont incontestables et supposent une vigilance absolue.

Néanmoins, certaines données doivent être prises en compte. En premier lieu, force est de constater que les conditions d'utilisation du bloc opératoire présentent des anomalies. Historiquement, deux-cents opérations y étaient pratiquées contre une norme générale fixant un seuil de cinq cents actes. Dans les dernières années, une inflexion a encore aggravé la situation puisque désormais, ce ne sont plus qu'environ cent opérations qui seraient réalisées au point que le bloc chirurgical n`est plus mobilisé que deux jours par semaine. Au demeurant, la sécurité les entourant ne serait pas au niveau requis, du fait, notamment, de l'absence d'équipements de réanimation suffisants. En second lieu, votre rapporteur spécial a reçu des assurances sur l'existence d'offres alternatives accessibles dans des conditions suffisantes de sécurité pour les patients. Il lui a été fait valoir que l'hôpital militaire Percy ou encore l'établissement de Garches pourrait les accueillir en cas de besoin sans que les délais de route n'exposent les patients à des dangers supplémentaires.

Dans ces conditions, tout en saluant le travail des équipes de l'INI, qui pourront continuer à oeuvrer dans leurs spécialités, il apparaît raisonnable et justifié de procéder à la fermeture d'une unité pour laquelle existent des solutions alternatives.

Il faudra, dans ce cadre, veiller à la mise en oeuvre d'un système de transport de la plus haute qualité.

b) Des investissements immobiliers d'une réelle ampleur

Le prochain schéma pluriannuel de stratégie immobilière de l'INI reprendra intégralement le nouveau schéma directeur d'infrastructure en cours de rédaction, en application du nouveau projet médical voté au conseil d'administration du 17 juin 2016 et du futur projet d'établissement qui devrait être soumis au vote du prochain conseil d'administration prévu à la en octobre 2016.

L'encadré ci-dessous développe les investissements immobiliers nécessaires. Ils revêtent une réelle ampleur. Mais, c'est pour avoir été reportés que ces investissements doivent désormais être entrepris. Par ailleurs, même s'ils s'inscrivent dans le projet de l'INI, on voit mal comment les travaux décrits auraient pu être évités.

En revanche, il faut plaider pour que les réalisations demeurent compatibles avec une certaine diversité des modes d'occupation des espaces historiques occupés par l'établissement et, bien entendu, pour que les coûts soient tout à fait maîtrisés et fidèles aux estimations initiales (voir infra pour celles-ci).

Le nouveau schéma pluriannuel de stratégie immobilière de l'INI

Ce nouveau SPSI, au même titre que le précédent, comportera les deux mêmes volets.

Volet de remise à niveau des installations techniques

Ce volet a été établi après le diagnostic des installations techniques réalisé depuis 2009 qui a conclu à leur obsolescence (notamment les installations électriques et les moyens de production de froid). Leur remise à niveau se poursuit avec la remise aux normes prévue des deux ascenseurs et le changement de l'armoire à haute tension du bâtiment central.


• Volet de modernisation et de recomposition du patrimoine hospitalier

Les orientations

Ce volet a été établi à partir des orientations suivantes :

- poursuite de la mise en sécurité incendie ;

- mise en conformité de l'accessibilité aux personnes handicapées (création de liaisons verticales) ;

- prise en compte de l'évolution de l'offre de soins prévue dans le nouveau projet médical et de l'évolution de l'état physique des patients (notamment grand handicap, vieillesse, dépendance) ;

- rationalisation et simplification des circuits des patients et des circuits logistiques ;

- passage à un taux de 80 à 90 % de chambres à un lit avec sanitaires dans le centre médico-chirurgical (CMC) ;

- regroupement du centre des pensionnaires sur deux sites, facilitant leur prise en charge ;

- intégration de l'antenne du Centre d'Études et de Recherches sur l'Appareillage des Handicapés (CERAH) de Créteil (plateau d'analyse de la marche et laboratoires de fabrication de prothèses) et déploiement des locaux administratifs dans ceux libérés (bâtiment 08) par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG).

Les travaux prévus

Rationalisation et optimisation des flux et des soins

Le projet prévoit d'affecter les pensionnaires les plus jeunes et les plus autonomes au sein du bâtiment central ( 30 places ) et de conserver le bâtiment Robert de Cotte pour les plus anciens ( 50 places ).

Le bâtiment sud, occupé actuellement par les services administratifs et logistiques, accueillera le pôle de psychiatrie de postcure et d'accompagnement à la réinsertion de 20 lits . Ce bâtiment accueillera tous les lieux de vie nécessaires au bien-être de la patientèle et un plateau technique dédié ainsi qu'un appartement thérapeutique. La crèche, dont une remise aux normes est prévue, et la pharmacie, qui sera redimensionnée, occuperont également le bâtiment sud au rez-de-chaussée (RDC). Ce bâtiment abritera également dix chambres d'hébergement au profit des familles de pensionnaires et d'hospitalisés.

Une remise aux normes (incendie et accessibilité des personnes à mobilité réduite) d'une grande partie du bâtiment 08 (ex-ONAC-VG) attribué à l'INI, avec notamment la création d'un ascenseur et une adaptation des sanitaires, est prévue. Ce bâtiment recevra 90 % des services administratifs et logistiques auparavant logés au sein du bâtiment sud et les cellules d'aide aux blessés des armées (Air et Marine).

L'occupation du bâtiment central, dédié au centre médico-chirurgical, sera rationalisée. L'hospitalisation sera regroupée au 1 er étage. Le rez-de-chaussée sera dédié à l'activité externe et ambulatoire et au plateau technique commun. Les locaux seront également rationalisés avec, entre autres, la création d'une zone accueil/secrétariat unique.

La mise en conformité incendie

Toutes les préconisations de la préfecture de police de Paris seront prises en compte dans les travaux prévus : désenfumage, reprise des évacuations, recoupement des escaliers, etc.

La préconisation la plus lourde consistera à recouper les combles et à débarrasser toutes les installations techniques obsolètes présentes. Cette opération nécessitera, pour le bâtiment central de l'INI, la destruction de toutes les chambres situées au 1 er étage.

Accessibilité aux personnes handicapées et dignité des patients

Toutes les préconisations établies pour l'amélioration de l'accessibilité aux personnes handicapées sont prises en compte dans les travaux. De plus, l'Institution a prévu, grâce à l'augmentation de chambres à un lit avec sanitaires, de respecter les exigences de la haute autorité de santé (HAS) en matière de dignité des patients. L'INI avait réussi à lever la réserve sur ce sujet émise en 2008 en procédant, notamment, à la mise en place de paravents télescopiques dans les chambres, mais cette solution avait été présentée à la HAS comme provisoire, compte tenu des travaux à venir.

Intégration de l'antenne du Centre d'Études et de Recherches sur l'Appareillage des Handicapés (CERAH)

Les zones de marche et notamment la plateforme d'analyse de la marche seraient situées au rez-de-chaussée du bâtiment central dans les locaux occupés actuellement par le bloc opératoire. La solution consistant à positionner ces zones dans le bloc opératoire s'est imposée car la hauteur sous plafond y est suffisante et le local ne doit pas être exposé à la lumière du jour. Les box de consultation et les locaux de fabrication de prothèses seraient implantées dans l'aile d'hospitalisation « Morand » toujours au RDC.

Adaptation des locaux libérés par l'ONAC-VG

Le rez-de-chaussée de ce bâtiment serait occupé par les cellules d'aide aux blessés de l'armée de l'Air et de la Marine. Le reste des locaux devrait accueillir les services administratifs et logistiques ainsi que deux logements concédés par nécessité absolue de service actuellement situés dans le bâtiment sud, destiné à accueillir le pôle de psychiatrie de postcure et d'accompagnement à la réinsertion.

Les locaux modulaires

Pour mettre en oeuvre l'ensemble des travaux, la mise en place de locaux modulaires provisoires est nécessaire pour éviter l'arrêt d'activité, tant pour le centre des pensionnaires que pour le CMC.

B. LES CONDITIONS DU SUCCÈS

Le nouveau projet de l'INI et le confortement de son avenir supposent la réunion des ressources financières nécessaires au financement de ses travaux mais aussi une redéfinition du format de son personnel.

Par ailleurs, des aspects plus qualitatifs devront être pris en compte afin de dessiner des perspectives de progrès largement partagées.

1. Mettre à niveau les moyens de l'INI en ne négligeant pas certaines sources de financement par économies récurrentes
a) Le budget devra être abondé et sécurisé

Inévitablement, l'accomplissement du programme de travaux de l'INI occasionnera des besoins de financement.

Selon les estimations transmises à votre rapporteur spécial, le coût prévisionnel brut du projet décrit ci-avant serait de 50 millions d'euros ce qui est une somme importante au regard du budget de l'établissement et des dépenses d'investissement constatées en moyenne.

Le coût des travaux se répartit comme suit : bâtiment central : 35 millions d'euros, bâtiment sud : 12 millions d'euros ; bâtiment 08 : 3 millions d'euros. Les travaux devraient s'étaler sur cinq ans avec un achèvement en 2021.

Le plan de financement des travaux d'infrastructure désormais envisagés table sur une contribution du fonds de roulement de 10 millions d'euros, le reliquat devant être financé par le seul ministère de la défense.

La sollicitation du fonds de roulement telle qu'elle est prévue semble de bonne logique compte tenu des réserves qu'il offre et qui, précisément, avaient été constituées dans l'optique du financement de telles dépenses. Il faudra cependant veiller à ce que le besoin de fonds de roulement correspondant à la nécessité d'honorer les dépenses courante soit couvert par les disponibilités.

Par ailleurs, il convient de souligner le devoir d'équilibrage de la section de fonctionnement du budget de l'INI qu'implique le financement prévu. Il implique de rompre avec l'habitude des déficits courants et de leur financement par prélèvement sur la trésorerie de l'INI.

Cette contrainte implique aussi que la contribution des ministères au financement des activités de l'INI soit maintenue, dans un contexte intercalaire où, inévitablement, les activités de l'établissement seront plus ou moins légèrement ralenties. Il faudra, en particulier, que la DAF versée par le ministère de la santé soit consolidée.

À cet égard, il peut sembler étonnant que le financement des travaux soit assumé par le seul ministère de la défense, dans la mesure où, même si l'offre de soins de l'INI est dirigée prioritairement vers le monde combattant, elle profite majoritairement à des personnes extérieures à lui.

b) La mise à niveau nécessaire des moyens humains

En l'état, malgré des coefficients de besoins humains plus élevés que pour des établissements réputés analogues, l'INI ne fait pas état d'un déficit de personnel.

Le tableau ci-dessous présente les besoins de l'INI en personnels infirmier et aide-soignant compte tenu de l'offre de soins actuelle.

Centre des pensionnaires

83 lits

MPR/USC

48 lits

Chirurgie

24 lits

SSPO

+ 2lits

Hôpital de jour MPR/USC/CHIR

14 lits jour

(9h-17h)

Total

Activités trans-verses

Total

Effectifs pour

171 lits

Cible

Requis

Cible

Requis

Cible

Requis

Cible

Requis

Requis

Requis

Réel

IDE 7 ( * )

Matin

5

9

6

10

3

5

1

2

26

10

Après-midi

4

7

4

7

2

4

18

Nuit

2

5

2

5

2

5

15

TOTAL

59

10

69

A.S. 8 ( * )

Matin

13

22

11

18

3

5

2

4

49

Après-midi

9

15

5

9

2

4

28

Nuit

6

15

3

8

1

3

26

TOTA

103

103

Les besoins semblent assez largement couverts aujourd'hui.

Les réorganisations de l'offre de soins de l'INI s'accompagnent de la projection des besoins en ressources humaines de l'INI consécutifs à la mise en oeuvre du nouveau projet d'établissement. Elles font état d'une réduction de 41 postes, soit une baisse des effectifs de 10 %.

Cette réduction est un peu inférieure à celle apparemment évoquée dans le rapport des trois inspections générales mentionné plus haut qui, dans un scénario avec un quasi doublement des lits de MPR (de 48 à 80 lits), escomptait une réduction de 50 emplois.

Or, le plan de charge de l'INI résultant du nouveau projet médical semble devoir être plus léger que celui associé aux hypothèses envisagées dans le rapport tripartite. Par ailleurs, la fermeture du bloc opératoire qui pouvait mobiliser, et immobiliser, des personnels relativement nombreux, pour une faible activité, doit être prise en compte. Elle devrait permettre de restructurer les emplois dans un sens favorable à la productivité générale de l'établissement.

Il semble donc à votre rapporteur spécial que quelques marges de manoeuvre peuvent sans doute exister encore pour proportionner les personnels médicaux aux besoins nouvellement définis.

Surtout, il lui apparaît souhaitable que les fonctions de support soient davantage mutualisées dans le cadre du rapprochement de l'INI avec son environnement. Elles réunissent une centaine d'emplois dont certains doublonnent sans doute avec des ressources du service de santé des armées.

Des adaptations des effectifs un peu plus amples que celles prévues semblent accessibles. Il convient de mes explorer tout en satisfaisant une exigence, absolue aux yeux de votre rapporteur spécial, celle de préserver la qualité des soins fournis à l'ensemble des usagers de l'établissement, exigence qui suppose que les personnels eux-mêmes ne soient pas exposés à des tensions excessives.

c) Mieux gérer certains frais de fonctionnement

La section de fonctionnement de l'INI et, en particulier, les achats de services extérieurs ont fait l'objet de quelques observations plus haut dans le présent rapport.

Certains frais généraux mériteraient par ailleurs d'être considérés. Il apparaît, par exemple, que l'INI doive gérer une crèche avec des coûts élevés (750 000 euros par an). S'il faut se réjouir que des personnels sollicités par des horaires atypiques puissent accéder à cette indispensable facilité, il faut envisager des solutions visant à rationaliser la prise en charge de ce service afin de réduire la pression financière qu'il exerce, dans le maintien d'une offre d'accueil des enfants de qualité.

Enfin, d'après certaines informations transmises à votre rapporteur spécial, l'efficacité de l'INI gagnerait sans doute à l'informatisation d'un certain nombre de processus.

2. Demeurer attentif à des dimensions qualitatives importantes
a) Cibler une utilisation plus forte des capacités de l'établissement.

Selon certaines données , le nombre des bénéficiaires potentiels du centre des pensionnaires aurait chuté de 25 % entre 2009 et 2013 pour passer de 17 655 à 13 000 personnes.

Votre rapporteur spécial s'interroge sur la fiabilité de ces estimations.

Certes, la démographie des invalides suit une tendance déclinante. Toutefois, les chiffres avancés paraissent très éloignés de ceux qui résument la population des titulaires de pensions militaires d'invalidité (plus de 200 000 personnes). Par ailleurs, il faut, hélas, compter avec l'éventualité d'un renouvellement des besoins dans un contexte marqué par l'engagement de nos forces sur de nombreux terrains de conflit et par la récurrence d'actes de terrorisme sur le sol national. La visite de l'INI par votre rapporteur spécial lui a permis de constater combien le centre des pensionnaires pouvait devoir être sollicité pour faire face à ces besoins. Enfin, il ne faut pas négliger l'éventualité, certes discutée, d'une ouverture à d'autres catégories de victimes lourdement blessées dans des opérations de sécurité nationale, en particulier des forces de police.

En toute hypothèse, les capacités de l'INI sont très nettement inférieures à la population actuellement recensée de ses éventuelles bénéficiaires si bien que même si celle-ci devait être correctement résumée par les données mentionnées, elle excèderait, de loin, les capacités d'accueil de l'établissement.

On ne peut donc se rallier à l'appréciation selon laquelle celles-ci seraient surdimensionnées.

En revanche, il convient de rechercher une meilleure utilisation de ces capacités.

Il est difficile de les apprécier précisément compte tenu des travaux d'ores et déjà entrepris qui ont conduit à geler certaines d'entre elles.

Il n'y a guère, les capacités du centre des pensionnaires calculées sur la base d'une offre de 91 lits, aujourd'hui ramenée à 83 lits, faisaient état d'une capacité théorique de 33 215 journées, le volume des journées effectivement enregistrées étant généralement compris entre 25 000 et 30 000 journées. Dans ces conditions, le taux d'occupation était de l'ordre de 80 %.

La réduction du nombre de lits s'est accompagnée d'une augmentation de ce taux, qui, d'une certaine manière, s'est trouvé artificiellement redressé.

Compte tenu des besoins potentiels, votre rapporteur spécial souhaite que l'INI préserve ses capacités d'accueil en renforçant l'effectivité de son offre. Ceci peut passer par un élargissement des publics accueillis.

Les mêmes observations valent pour les activités strictement médicales de l'INI. En ce domaine, la demande ne manque pas qu'elle provienne du monde combattant ou soit liée aux tragiques événements auxquels la France fait face ou qu'elle soit le fait d'usagers de droit commun. Or, l'INI est loin de répondre à celle-ci.

Sont indiquées ci-dessous, à titre d'exemple, les statistiques du service de médecine physique et de réadaptation depuis 2010. Le taux de refus, qui n'a cessé de s'élever, atteignait 88,9 % en 2014. Le ministère indique que les motifs de refus sont principalement dus à des demandes de prise en charge qui ne correspondent pas aux spécialités de l'INI, ou concernent des patients trop lourds pour une prise en charge en toute sécurité à l'INI.

Il ajoute que les autres motifs de refus concernent l'absence de place disponible.

Années

Demandes

Accord

%

Refus

%

Service de Médecine Physique et de Réadaptation

2014

837

93

11,11 %

744

88,89 %

2013

549

180

32,79 %

369

67,21 %

2012

593

190

32,04 %

403

67,96 %

2011

704

187

26,56 %

517

73,44 %

2010

767

197

25,68 %

570

74,32 %

Ces données semblent quelque peu paradoxales dans la mesure où l'évaluation du dernier contrat d'objectifs et de performance avait pu souligner que les objectifs d'activité fixés à la médecine physique et de réadaptation et à l'hôpital de jour n'avaient pas été atteints.

Des raisons économiques semblent pouvoir jouer dans la sélection des patients dans la mesure où les évolutions de la DAF qui couvre certains coûts de l'activité de santé de l'INI ne permettraient pas de financer les coûts auxquels l'établissement se trouve exposé dans l'accueil de sa patientèle civile.

Votre rapporteur spécial verrait dans ce biais de sélection, s'il devait être vérifié, une raison de plus pour normaliser les contributions des différents cofinanceurs de l'INI.

b) Fidéliser les personnels et l'ensemble des parties prenantes

D'un point de vue qualitatif, l'INI semble exposée à un problème de fidélisation de son personnel, la pyramide des âges faisant ressortir une concentration à la base et au sommet mais une sorte d'attrition des catégories en milieu de carrière. L'INI est attractive pour les jeunes agents mais, apparemment, moins pour les agents confirmés. Le taux de rotation des effectifs, qui obéit à une série de déterminants, dont certains sont mécaniques, est important et semble illustrer, en partie, cette situation.

Il convient de veiller à ce que l'attractivité de l'INI se prolonge dans le temps afin que des personnels confirmés puissent continuer à servir en son sein. Ceci suppose sans doute certaines réflexions sur le déroulement des carrières. À titre d'exemple, la mobilité interne pourrait sans doute progresser tandis que la titularisation dans un contexte de large recours aux contractuels (plus de 20 % des effectifs) pourrait entrer dans un projet de motivation et de fidélisation des personnels.

À cet égard, il est possible que le rapprochement de l'INI avec son environnement permette des ouvertures pour les agents.

Quant à l'absentéisme, votre rapporteur spécial note qu'avec un taux de 8 %, il ressort comme nettement moins élevé que dans les hôpitaux en général où il atteindrait 14 %. Il est en partie composé par des congés de maternité, paternité et adoption (9,2 % des absences en 2014). Cependant, il est équivalent à 34,9 agents à temps plein (8 % des effectifs) et appelle une vigilance certaine, représentant 16,5 jours d'absence par agent.

Les bénévoles sont une composante importante de l'animation nécessaire dans un établissement comme l'INI. Il est souhaitable que leur reconnaissance continue d'être pleinement consacrée par la direction de l'établissement.

c) Optimiser certaines activités

La valorisation des activités du CERAH, en particulier, de celles consacrées à la recherche, a connu quelques développements intéressants au cours de ces dernières années. Le transfert d'une partie des activités du centre dans les nouveaux locaux pourrait favoriser la poursuite de cette tendance. Par ailleurs, comme acteur de la recherche sur les appareillages le CERAH pourrait sans doute s'appliquer à davantage valoriser les fruits de cette recherche. Celle-ci n'est actuellement pas brevetée et les conventions passées entre le CERAH et des fournisseurs industriels sont essentiellement des contrats où le centre se présente en client. Il faut envisager des relations plus diversifiées, le savoir-faire du centre méritant d'être valorisé.

La réinsertion professionnelle des pensionnaires a longtemps été une préoccupation seconde de l'INI, situation normale compte tenu des caractéristiques de cette population. Dans la mesure où l'établissement renouvellerait ses usagers en accueillant des personnes plus jeunes, comme c'est actuellement le cas, il conviendra de poursuivre les initiatives pour les accompagner dans la réinsertion professionnelle, et, plus largement, sociale.

Enfin, l'INI, lieu d'accueil et de soins est également un lieu de mémoire, trop peu connu dans ses activités d'hébergement et de santé. Dans toute la mesure des volontés et des possibilités des pensionnaires, il est souhaitable que cette mémoire se transmette pleinement.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une réunion tenue le mardi 25 octobre 2016, sous la présidence de M. Richard Yung, vice-président, la commission a entendu la communication de M. Marc Laménie, rapporteur spécial de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » sur le contrôle budgétaire relatif à l'Institution nationale des Invalides (INI).

M. Marc Laménie , rapporteur spécial . - Le contrôle budgétaire sur l'Institution nationale des Invalides (INI) a été largement motivé par la situation d'incertitude, sinon de crise, que traverse cet établissement depuis quelque temps. L'INI, maison des combattants âgés, malades ou blessés au service de la patrie, est l'une de ces institutions qui, par son histoire et sa haute valeur symbolique, appartiennent au patrimoine de la Nation. Il faut aussi considérer l'utilité de ses missions, à savoir l'accueil des invalides les plus lourds et les prestations de ses services de soins, dispensés dans trois centres.

Le centre des pensionnaires accueille les invalides du monde combattant. La moyenne d'âge y est élevée mais, avec les OPEX et les attentats, elle tend, hélas, à baisser un peu. Le centre chirurgico-médical a une patientèle très diversifiée avec, désormais, une majorité de patients non militaires. Enfin, une unité appelée le Centre d'études et de recherche sur l'appareillage des handicapés (CERAH) réalise des travaux sur les appareillages et mène des travaux de recherche.

Les unités de soin de l'INI sont de plus en plus fréquentées par des civils malgré la priorité d'accès réservée au monde combattant. Cela témoigne de l'excellence acquise dans certaines spécialités médicales liées à l'invalidité, en particulier pour toutes les pathologies médullaires et la réadaptation consécutive à des traumatismes souvent très lourds.

Le régime juridique de L'INI, lui confère une authentique singularité et autonomie administrative. Celle-ci est un établissement public administratif sui generis : cela signifie non seulement qu'elle est dirigée par un conseil d'administration où sont représentées les parties prenantes, mais également qu'elle n'est pas un établissement de santé et qu'elle n'est pas soumise à l'ARS. Elle n'est pas non plus formellement intégrée au service de santé des armées. Enfin, un grand nombre des règles s'appliquant à l'INI sont de niveau législatif.

Bien qu'unique, l'INI n'est pas séparée de son environnement. Elle est acteur d'un grand nombre de réseaux. Outre l'ouverture de ses unités médicales au monde civil, elle contribue à la résilience de la Nation qui est l'une des missions naturelles des services de santé des armées. L'implication de l'INI dans la réponse apportée à la suite des tragiques événements qu'a connus notre pays l'a amplement démontré. Établissement hors norme, l'INI n'est pas un établissement hors sol.

Force est pourtant de constater que l'INI, sur fond de réorganisation générale de l'offre de soins, s'est trouvée confrontée à une période difficile, marquée par des incertitudes sur le périmètre de ses missions et par des déséquilibres financiers. Ceux-ci ont été moins le résultat de dépenses trop fortement croissantes que de l'inertie de ses grands financeurs. Le contexte d'ensemble n'a sans doute pas été pour rien dans l'entrée de l'INI dans une période de turbulences. Celle-ci s'est manifestée par l'absence de renouvellement du contrat d'objectifs et de performance depuis l'expiration du dernier, en date de 2014, et par la décision de suspendre la réalisation du schéma immobilier de l'INI, à la suite des observations négatives du contrôle budgétaire et comptable ministériel.

Quant au contexte, il a été marqué par la préparation, la discussion, puis l'adoption d'un nouveau texte sur la santé, ainsi que par la réorganisation du service de santé des armées dans le sens d'une réduction de ses capacités. L'emblématique Val-de-Grâce n'a pas survécu à cette dernière évolution, et on pouvait s'inquiéter pour les Invalides, une inquiétude d'autant plus prononcée que les équilibres financiers de l'INI s'étaient dégradés au cours de la période.

La dégradation de la situation financière de l'INI se résume en deux chiffres, ceux de la croissance de ses dépenses courantes et de ses recettes de fonctionnement au cours de la période 2010-2015. Les premières ont augmenté de 8,5 % et les secondes de 5 %. La croissance des dépenses de l'INI peut être jugée diversement. Elle est certes dynamique dans un contexte où l'on souhaite réaliser des économies budgétaires. En même temps, elle respecte l'objectif national d'augmentation des dépenses d'assurance maladie (Ondam), qui est la norme de dépenses pertinente, et n'aboutit pas à un alourdissement en termes d'euros constants. Cette évolution doit cependant être appréciée en fonction d'un certain nombre de paramètres qui auraient pu peser davantage sur la dynamique des dépenses. Celles-ci sont à 75 % des dépenses de personnel. Or l'INI a réduit légèrement ses effectifs au cours de la période. Par ailleurs, la transposition du protocole « Bachelot » a été très tardive, si bien que des facteurs d'alourdissement des charges de personnel n'ont pas encore joué pleinement.

Enfin, des externalisations se sont produites dans un contexte où le plan de charges de l'INI semble avoir été réduit. De leur côté, les dépenses de fonctionnement, prenant sans doute parfois le relais des dépenses directes de personnel, ont augmenté significativement, dans des conditions parfois difficiles à comprendre. Ainsi en est-il pour les dépenses de restauration.

En toute hypothèse, et là réside l'essentiel de la responsabilité de la dégradation de la situation financière de l'INI, les ressources de l'établissement n'ont pas suivi. Celui-ci a mis en place différentes actions pour donner de l'élan à ses ressources propres, mais celles-ci ne couvrent que le quart de ses recettes et sont freinées dans leur dynamique par des contraintes diverses.

L'essentiel du financement du fonctionnement courant de l'INI repose sur deux dotations ministérielles, celle du ministère de la santé et la subvention pour charges de service public versée par le ministère de la défense. Or l'inertie de ce financement dual ne peut être approuvée. Le financement apporté par le ministère de la défense est demeuré stable ces dernières années, sous la barre des 12 millions d'euros. Il en est de même de la dotation annuelle de financement versée par le ministère de la santé. Celle-ci obéit à un calcul règlementaire. Elle doit suivre les coûts exposés par l'INI dans son activité de soins. Or elle n'a pas été revalorisée comme il l'aurait fallu, le ministère de la santé motivant le gel de la dotation par l'insuffisante participation de l'INI au système d'offre de soins piloté par l'ARS d'Île-de-France. Cette position contrevient aux dispositions règlementaires.

L'ambition du ministère de la santé est apparemment, de faire prévaloir son mécanisme général de financement à l'activité en lieu et place de celui qui prévoit de fixer la dotation du ministère selon les coûts de l'INI. De plus, la très grande majorité des coûts des services de soin de l'INI sont liés à une activité en faveur du monde non combattant, ce qui justifie un accompagnement financier à due proportion. Mais la subvention pour charges de service public provenant du ministère de la défense est restée gelée dans un contexte de progression des dépenses de l'établissement. Bref, une sorte de jeu de rôles s'est imposée au terme de laquelle chacun des financeurs a tenté de rejeter sur l'autre la charge du financement de l'INI.

Dans ces conditions, l'établissement a pris l'habitude, dénoncée par le contrôle budgétaire, d'inscrire à son budget prévisionnel une recette liée à l'intervention du ministère de la santé déconnectée de la pratique suivie par lui et lui semblant correspondre à sa créance. Il en est résulté une forme d'insincérité des budgets primitifs de l'établissement et, in fine , un enchaînement insoutenable. La section de fonctionnement de l'INI s'est révélée couramment déficitaire, obligeant à ponctionner un fonds de roulement qui avait été constitué pour financer les besoins de trésorerie, mais aussi, et surtout, les investissements de l'INI. Celui-ci a fondu, passant de plus de 25 millions d'euros en 2010 à quelque 16 millions d'euros désormais. Certes, il est amplement suffisant pour couvrir les besoins de trésorerie de 1'INI, mais il a été dilapidé à des fins étrangères au motif de sa constitution. Les investissements ont été ralentis par rapport aux besoins, et la situation financière de l'INI a entraîné un gel de l'important programme de modernisation qui est nécessaire.

Si l'on ajoute à ces éléments, la délivrance d'une certification par la Haute Autorité de santé assortie de réserves et dont le renouvellement, apparemment très incertain, a été différé pour des raisons qui ne sont pas toutes compréhensibles, force est de constater qu'il était grand temps que l'INI se donne les moyens de sortir d'une forme d'impasse.

C'est heureusement ce qui semble sur le point de se produire. Aujourd'hui même, le conseil d'administration de l'INI doit examiner le nouveau projet d'établissement ayant donné lieu à une élaboration concertée assez longue mais, finalement, très utile puisqu'une forme de consensus semble prévaloir. Un nouveau projet de santé a été approuvé par le même conseil d'administration courant juin. Il a été décidé de fermer le bloc opératoire qui fonctionnait trop peu et présentait des risques. Cela a été le point difficile. On peut le comprendre dans la mesure où il procède surtout à des actes de chirurgie en lien avec des atteintes médullaires. Cependant, il semble que ceux-ci puissent être réalisés dans de bonnes conditions dans des établissements d'Île-de-France. C'est une condition impérative, comme de veiller à la perfection absolue des transports des quelques pensionnaires qui peuvent être concernés par ce type d'opérations. Le projet médical, détaillé dans le rapport, semble équilibré autour du concept de « parcours du blessé » dans une interrelation avec les autres unités du service de santé des armées, avec, pour l'INI, l'exploitation de ses avantages comparatifs dans les soins de réadaptation. S'ajoutera la prise en charge des traumatismes psychiques dont le nombre est hélas assez croissant.

Dans ces conditions, le programme d'investissement pourra enfin être réalisé. Il n'est pas négligeable, puisqu'il représente 50 millions d'euros. Il serait financé à hauteur de 10 à 15 millions d'euros par le fonds de roulement, le reste étant pris en charge par dotation du ministère de la défense. Ce projet d'ensemble appelle quelques observations. On peut s'interroger sur la participation exclusive des budgets militaires au financement du projet dans la mesure où la patientèle de l'INI est principalement civile. Ce choix est sans doute un élément parmi d'autres des équilibres existants entre le ministère de la défense et celui de la santé qui a apparemment sanctuarisé la poursuite de sa contribution au coût de fonctionnement de l'INI. C'est, à mes yeux, bien le moins. Par ailleurs, il faudra parvenir à un équilibre de la section de fonctionnement pour que tout cela soit viable. Il est bien entendu souhaitable que la dotation de financement versée par le ministère de la santé reflète mieux les coûts qu'elle est appelée à financer. Mais il faudra aussi tirer la conséquence logique d'un reformatage de l'INI et de sa plus grande intégration au système de santé de droit commun. L'INI est constamment accusée de disposer d'un personnel pléthorique. La visite de l'établissement que j'ai faite confirme que, pour ce qui est des soins et de l'accompagnement des pensionnaires, cette accusation est injuste. Il reste que la fermeture du bloc opératoire et la redéfinition des capacités de l'INI doivent avoir des effets sur le volume du personnel. Une quarantaine d'emplois seraient supprimés. Il est sans doute possible d'aller un peu au-delà en mobilisant certaines réserves de productivité dans les services de support qui peuvent être mieux mutualisés, en réduisant un absentéisme qui, pour être inférieur au taux constaté dans les établissements hospitaliers (14 %), reste, avec 9 %, trop élevé, et en baissant certaines charges de fonctionnement.

Enfin, l'INI devra sans doute optimiser certaines de ses activités, en ouvrant davantage son centre de pensionnaires, en valorisant plus ses recherches dans le domaine de l'appareillage et en recourant aux procédés numériques pour gérer ses patients et pensionnaires.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . Votre rapport démontre que l'INI a eu des difficultés à évoluer, mais peut-on garder en activité un bloc opératoire ne réalisant qu'une centaine d'opérations par an avec des moyens de réanimation insuffisants ? En revanche, l'INI dispose d'un réel savoir-faire, notamment lorsqu'elle accueille les victimes d'attentats qui, parfois, doivent suivre une rééducation très lourde.

La commission a donné acte au rapporteur spécial de sa communication sur l'Institution nationale des Invalides et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Institution nationale des invalides (INI)

- Mme Martine de BOISDEFFRE, présidente du conseil d'administration ;

- M. Bertrand RACT MADOUX, général d'armée, gouverneur des Invalides ;

- M. Christian PLOTTON, médecin général inspecteur, directeur ;

- M. Philippe HAVIL, adjoint au directeur ;

- Mme Bénédicte DESPRETZ, directrice des soins.

Ministère de la défense

- M. Jean-Paul BODIN, secrétaire général pour l'administration ;

- M. Frank BARRERA, chef de cabinet, secrétariat général pour l'administration ;

- M. Alexandre COYO, cabinet du secrétariat général pour l'administration.


* 1 Désormais sans objet, du fait de la fermeture du Val-de-Grâce.

* 2 La couverture santé des militaires est assurée par différents régimes. Il s'agit schématiquement de l'affiliation des personnes concernées, et de certains ayants droit, au régime spécial géré par la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS) ou, pour les grands invalides, s'ils ne sont pas assurés sociaux et ne bénéficient pas de la gratuité des soins, de leur rattachement à la section « Invalides de guerre » du régime général de la sécurité sociale - un montant de 85,2 millions d'euros de crédits est inscrit à ce titre dans le projet de loi de finances pour 2017.

* 3 Il n'est pas sûr que les coûts des différentes activités de l'INI puissent être strictement observés dans la mesure où un suivi entièrement strict de ces coûts supposerait des contrôles systématiques renouvelés fréquemment. Un tel contrôle finirait pas coûter cher et pourrait se révéler démotivant pour des équipes distraites de leurs missions. Le recours à des procédés indirects de calcul, même s'ils peuvent admettre quelques imprécisions est préférable et donne des indications généralement fiables. En toute hypothèse, alors que cela pourrait être logique l'INI n'est pas découpée en budgets annexes correspondant à ses différents activités.

* 4 En réalité, selon les informations transmises à votre rapporteur spécial, le transfert effectif aurait été un peu moindre, de 55 agents.

* 5 Sur plus longue période, à périmètre constant, les effectifs de l'INI ont augmenté de 9 unités.

* 6 Le statut des hébergés est précisé à l'article D. 568 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Il s'agit de mutilés qui sont recueillis par l'INI mais n'ont pas pour autant le statut de pensionnaire. La durée de leur séjour est, théoriquement, limitée à 8 jours mais elle peut être renouvelée s'il y a lieu.

* 7 Infirmiers diplômés d'État.

* 8 Aides-soignants.

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