III. ET D'ASSUMER LA FORTE CONTRAINTE PESANT SUR LES DÉPENSES PUBLIQUES

La programmation des finances publiques passe par une contrainte forte sur les dépenses publiques.

Il faut donc prendre la mesure de l'effort financier programmé sur la période et s'interroger sur la trajectoire de plus long terme qu'il suppose.

La norme des dépenses publiques fait apparaître une telle rupture avec les tendances passées qu'elle semble difficile à respecter avec discernement sans un effort d'évaluation qui reste largement à accomplir.

La norme d'évolution des dépenses publiques , qui fixe une croissance en volume limitée à 0,6 % l'an, exige une rupture avec les tendances passées . Pour reprendre l'expression d'un ancien directeur du Budget, la norme d'évolution des dépenses de l'Etat témoigne, par exemple, « d'une exigence sans précédent » , ce qui invite à en apprécier le réalisme.

Le réalisme des hypothèses d'évolution des dépenses publiques peut être apprécié en fonction de leur progression historique et de la capacité démontrée dans le passé à respecter les prévisions de dépenses associées aux projets de loi de finances.

Sous cet angle , les données ci-après (tableau n° 6) parlent d'elles-mêmes .

Tableau n° 6
ÉCART ENTRE LE TAUX DE CROISSANCE DES DÉPENSES PUBLIQUES
EN VOLUME (DÉFLATÉES PAR L'IPC HORS TABAC)
PRÉVUES PAR LES PLF ET CELUI RÉALISÉ

2002

2003

2004

2005

PLF 2003

3,2 %

1,5 %

Réalisation

3,7 %

2,3 %

Écart (en points de %)

0,5

0,8

PLF 2004

2,2 %

1,1 %

Réalisation

2,3 %

1,7 %

Écart (en points de %)

0,1

0,6

PLF 2005

1,6 %

1,6 %

Réalisation

1,7 %

2,4 %

Écart (en points de %)

0,1

0,8

PLF 2006

1,7 %

Réalisation

2,4 %

Écart (en points de %)

0,7

Sources : PLF 2003, PLF 2004, PLF 2005, PLF 2006, calculs OFCE

On peut aussi l'apprécier , en rappelant que les dépenses publiques sont affectées d'une certaine inertie. Aussi, la seule progression des dépenses de pensions et des charges de la dette préempte la totalité de la marge créée par une progression des dépenses budgétaires inférieure d'un point à l'inflation (c'est-à-dire une dépense budgétaire dont le volume augmente de 0,75 point).

Il existe de nombreuses autres dépenses rigides, notamment les dépenses liées à l'exonération des cotisations sociales sur les bas salaires, dont la progression en ligne avec celle de la masse salariale, devrait être d'autant plus élevée que les salaires gagneraient en pouvoir d'achat.

Une norme de faible progression en volume des dépenses publiques suppose donc des arbitrages au terme desquels les dépenses « malléables » doivent baisser en volume .

Le tableau ci-après (tableau n° 7) montre les marges de manoeuvre dont il faut se priver dans l'hypothèse d'une réduction du déficit public comme celle décrite par la programmation pluriannuelle.

Tableau n° 7
CROISSANCE EN VOLUME DES DÉPENSES PUBLIQUES

(en %)

2008

2009

2010

2011

Cumul

I - Scénario central avec amélioration du solde structurel annuel de 0,5 point de PIB

+ 0,6

+ 0,4

+ 0,7

+ 0,7

+ 2,4

II - Scénario tendanciel avec impulsion nulle

+ 2,0

+ 2,0

+ 1,9

+ 1,9

+ 8,0

III - Écarts (en euros constants 2007)

13,8

16,1

12,5

12,7

55,1

A l' horizon 2011 , qui est celui des projections de votre Délégation, la réduction cumulée des moyens de l'intervention publique s'élève à 55,1 milliards d'euros constants de 2007 .

Chaque année, il faudrait « économiser » 0,8 point de PIB de dépenses publiques par rapport à une situation où les dépenses publiques évolueraient au rythme de la croissance potentielle de l'économie française . Cela représente, par exemple, l'équivalent de ce qui sépare notre effort de recherche-développement de l'objectif de le porter à 3 points de PIB.

Une difficulté majeure dans les arbitrages à rendre consistera à identifier les dépenses publiques économiquement et socialement moins utiles que l'utilité collective du désendettement public qui les justifie, ou que les dépenses privées qui s'y substitueraient .

Le niveau des dépenses publiques dans notre pays est théoriquement le résultat de choix collectifs sur le sens et l'étendue de l'intervention publique.

Des économies de gestion peuvent intervenir mais il est incertain qu'elles suffisent à concourir à la diminution de la place des dépenses publiques dans notre organisation collective.

Des choix de périmètre devront donc être probablement entrepris. Quoi qu'il en soit, la définition d'orientations touchant les dépenses publiques, qui pourrait utilement faire l'objet d'une loi, suppose de réunir les instruments d'un gouvernement éclairé de ces dépenses.

Votre Délégation, qui devrait prochainement présenter un rapport de réflexion sur la dimension économique de la dépense publique et qui a appelé de ses voeux une institutionnalisation enfin efficace de l'évaluation des politiques publiques, saluant la démarche d'audit entreprise au sein du MINEFI, n'imagine toutefois pas qu'un tel objectif de dépenses publiques puisse être atteint sans que les moyens d'une réflexion approfondie sur les dépenses publiques soient réunis.

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