B. UN TOILETTAGE BIENVENU DES STRUCTURES ET DES PROCÉDURES

La démarche de modernisation poursuivie par le présent gouvernement conduit à un toilettage bienvenu, et inédit, à cette échelle, des structures et des procédures de l'Etat.

Votre commission des finances a souhaité au cours des auditions organisées au premier semestre 2006 réaliser un premier bilan de l'utilisation des instruments de modernisation annoncés pour certains dès 2003. En organisant la confrontation entre les équipes d'audit et les administrations chargées de mettre en oeuvre leurs préconisations, votre commission des finances a pu mettre en évidence le caractère prometteur des audits de modernisation . Certaines économies mise en évidence ont d'ores et déjà été constatées. Des dysfonctionnements, comme ceux relatifs au recouvrement des amendes, sont désormais reconnus par les administrations qui essaient ainsi de les résoudre.

Il faut souligner néanmoins qu'entre le moment où est créé un nouvel « instrument de modernisation », nouvelle gestion immobilière par exemple, entre le moment où est rendu un audit de modernisation, et celui où des résultats tangibles peuvent être constatés, de nombreux mois peuvent parfois s'écouler, ce qui suppose une volonté politique sans faille, et un engagement résolu des administrations concernées.

1. La mise en place progressive des instruments de la modernisation

Quatre « instruments de modernisation » ont fait l'objet d'une audition par votre commission des finances : nouvelle gestion immobilière, nouvelle gestion des achats, partenariats public-privé, rémunération au mérite. Les chantiers sont tous engagés, certains, comme la rémunération au mérite, de manière plus timide que d'autres, et leur généralisation est aujourd'hui souhaitable.

a) La réforme de la gestion immobilière et de celle des achats est engagée

S'agissant de la réforme des achats, issue d'un audit déjà ancien, M. Philippe Delleur, directeur de l'agence centrale des achats de Bercy, a montré lors de son audition devant votre commission des finances, le 21 mars 2006, que l'audit avait montré de fortes disparités de prix d'achat entre les directions du ministère pour les mêmes produits, ce qui pouvait s'expliquer à la fois par la différence de taille des directions et leurs volumes respectifs d'achats. Il a considéré que des économies pouvaient être réalisées afin d'amener le rendement global du ministère à un niveau au moins égal à celui de la direction la plus performante pour chaque référence. De même, il a estimé que les différences de consommation d'un même produit par agent et par direction devaient être normalisées.

Il a par ailleurs souligné que le coût de traitement des commandes était élevé au regard du taux important de commandes à faible prix. Le coût unitaire moyen de traitement d'une commande, en temps de travail d'un fonctionnaire, était de 100 euros, alors que la moitié des commandes du ministère avait une valeur inférieure ou égale à 100 euros.

Cette seule donnée justifiait une réforme mettant en oeuvre trois leviers : un effet de globalisation des commandes, la maîtrise des consommations et la simplification des procédures. La distinction entre deux grandes fonctions, l'achat et l'analyse de l'offre d'une part, l'approvisionnement, d'autre part, doit permettre de dégager d'importantes économies. Pour cette raison, une généralisation de la réforme des achats à tous les ministères est désormais prévue, et la présentation d'une plan de modernisation des achats envisagée à court terme. Toutefois, la recherche de l'efficience de la commande publique doit s'accompagner d'une grande vigilance sur l'origine des sources d'approvisionnement.

S'agissant de la gestion de l'immobilier, la réforme doit être considérée comme encore plus avancée. Généralisée à l'ensemble des ministères, elle engendre depuis 2005, après une année de mise en place des outils de modernisation, des gains significatifs pour le budget de l'Etat. Compte tenu des négligences mises au jour dans un passé récent, de la part de l'Etat, en ce qui concerne la gestion et l'entretien de son patrimoine immobilier, de même que le manque de détermination des ministères à entreprendre une politique énergique de cessions, il a fallu plusieurs rapports parlementaires pour que s'opère une prise de conscience en la matière, dont les premiers effets peuvent être observés.

Lors de leur audition le 11 avril 2006, M. Daniel Dubost, chef du service France Domaine, de M. Jean-Pierre Lourdin, secrétaire général du conseil de surveillance de l'immobilier de l'Etat, ont ainsi évoqué la création, dans la loi de finances initiale pour 2006, du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » , de même que l'expérimentation de loyers budgétaires auprès de trois ministères (le ministère des affaires étrangères, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministère de la justice). Dès l'automne 2005, plusieurs ventes importantes ont été réalisées , en particulier celle de l'îlot de la rue du Bac, à Paris, jusqu'alors occupé par l'administration des douanes et dont le produit de cession s'est élevé à 165 millions d'euros. Le patrimoine immobilier de l'Etat a été transféré au service France Domaine, succédant à l'ancien service des domaines, à la suite de l'annonce de cette mesure par le Président de la République dans son allocution prononcée, à Metz, le 6 janvier 2006.

Tandis que, durant la période 1993-2003, le produit global des cessions d'actifs immobiliers de l'Etat avait représenté, chaque année, environ 100 millions d'euros, ce produit a atteint 170 millions d'euros en 2004 et s'est élevé, en 2005, à 630 millions d'euros . Selon les prévisions de la loi de finances initiale pour 2006, les cessions devraient atteindre, en 2006, 480 millions d'euros. Ce résultat devrait correspondre à un grand nombre d'opérations, chacune ayant un montant individuel limité, au contraire des ventes, peu nombreuses mais d'un enjeu financier important, réalisées en 2005.

Ces résultats, s'ils sont liés à une volonté politique évidente, reposent également sur un dispositif d'incitation aux cessions , par intéressement au produit de celles-ci, introduit en direction des ministères. Dans l'hypothèse de cessions d'immeubles inoccupés, les ministères bénéficient d'un « droit de tirage », sur les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », à hauteur de 50 % du produit net de cession.

Dans le cas de cessions donnant lieu à relogement de services, les ministères perçoivent 85 % du produit de cession pour leurs opérations de relogement ou, si leurs dépenses réelles s'avèrent inférieures, pour d'autres dépenses immobilières, hors dépenses de personnel. Une opération visant à redéployer les bureaux d'une administration, c'est-à-dire une « relocalisation », a donc vocation à dégager une plus value nette pour le budget de l'Etat, et pour le désendettement, de 15 %. En exploitation, l'opération doit évidemment rester neutre budgétairement.

Lors de la même audition, M. Antoine Poullieute, directeur général de l'administration du Quai d'Orsay, a montré combien l'amélioration de la gestion du patrimoine immobilier, s'agissant des implantations françaises à l'étranger, facilitait le passage d'une diplomatie d'héritage à une diplomatie d'avenir.

La démarche de modernisation de la gestion de l'immobilier de l'Etat est approfondie par les audits. Certains toutefois, mettent en doute des actions entreprises récemment, comme « les loyers budgétaires ». Ainsi , la mission d'audit sur la gestion du patrimoine immobilier de l'Etat considère que le loyer budgétaire, expérimenté dans quelques ministères en 2006, et qui a vocation à s'appliquer à tous les immeubles d'administration centrale en 2007, constitue « un mécanisme complexe pour des avantages attendus modérés ». Le rapport souligne que « tel qu'il est expérimenté aujourd'hui, le loyer budgétaire nous semble un mécanisme fragile qui ne peut à lui seul réussir à atteindre l'objectif de rationalisation de l'occupation du patrimoine contrôlé par l'État qui lui est fixé. En effet, l'écart entre le niveau des loyers de marché et des loyers budgétaires, qui résulte aussi bien de l'imprécision des évaluations des immeubles inscrites au tableau général des propriétés de l'Etat que du choix du taux de 5,12%, biaise les arbitrages attendus entre la location et l'occupation domaniale mais aussi entre deux occupations domaniales. Situés au-dessus des loyers de marché, les loyers budgétaires pourraient inciter à des prises à bail injustifiées qui auraient pour conséquence d'alourdir les charges de fonctionnement de l'État ; situés en dessous des loyers de marchés, ils pourraient au contraire figer toute incitation à déménager ou à réduire les surfaces occupées ».

La mission souligne par ailleurs que « le choix de faire payer aux administrations occupantes des loyers s'accompagnant de flux monétaires réels induit des coûts de recouvrement non négligeables, plus importants que ceux induits dans les entreprises par des flux retracés en comptabilité analytique ».

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