ESPAGNE

par M. Juan de la CRUZ FERRER,
professeur à l'Institut Jean Monnet de Droit européen et de droit administratif,
Université Complutense de Madrid

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I - Introduction

Comme chacun sait, le modèle d'« Autorités ou Agences indépendantes » trouve son origine à la fin du XIX ème siècle, dans le Droit administratif nord-américain. Il s'agissait de rompre, dans certaines matières, avec l'Administration appelée regular , dont la caractéristique est d'être directement liée aux décisions du Président de la Nation. La première des Public Authorities ou Independent Agencies (comme on les appelle aux États-Unis) a été la Interstate Commerce Commission , créée en 1887 pour assurer la régulation et le contrôle de tout ce qui était relatif au commerce et aux transports entre les différents états. Ce sont, en fait, des Organismes publics intégrés formellement au Pouvoir Exécutif, mais qui conservent une liberté partielle par rapport à celui-ci, étant donné qu'ils dépendent à la fois de l'Exécutif et du Législatif, en vertu de la dynamique du système constitutionnel américain de « pouvoirs partagés » (« shared powers »).

II - Apparition des « autorités administratives indépendantes » au sein de l'organisation administrative espagnole

Influence du Droit communautaire

En Espagne, l'on a intégré le modèle anglo-saxon d' Administrations indépendantes pour la première fois en 1980 lors de la création de la Commision de Sécurité Nucléaire , conçue comme un « Organisme de Droit Public, indépendant de l'Administration Centrale, jouissant d'une personnalité juridique et d'un patrimoine propre, indépendant de ceux de l'État et seul Organisme compétent en matière de sécurité et de protection radiologique ».

Toutefois, le modèle d' Administrations indépendantes s'affirme dans certains secteurs avec le processus de libéralisation mené sur les instances de la réglementation de l'Union Européenne ; c'est alors qu'apparaissent la plupart des Organismes dotés d'une autonomie spéciale : la Commission Nationale du Marché des Valeurs , la Commission du Marché des Télécommunications , la Commission Nationale de l'Énergie , etc. Une Loi de 1980 accorde un certain degré d'autonomie à la Banque d'Espagne en fixant la durée du mandat de son Gouverneur et de son Sous-gouverneur à 4 ans - renouvelable - et en précisant expressément les causes possible de leur révocation. Mais c'est en 1994, alors qu'on introduit les prévisions du Traité de l'Union Européenne relatives à la politique monétaire, que l'on concède la pleine autonomie à la Banque dans ce domaine-là (une autonomie qui s'est matérialisée avec le début de la seconde phase de l'Union Économique et Monétaire) et que l'on renforce de même l'autonomie des organes de gouvernement de la Banque.

Le fondement logique et rationnel à la base de ces nouvelles formes d'Administration se trouve dans l'opportunité d'avoir des organismes régulateurs de surveillance et de contrôle des nouveaux marchés pour garantir leur bon fonctionnement et le principe de libre concurrence, grâce à une neutralité politique lors de la prise des décisions. L'on atteint ce but en accordant aux entités régulatrices une autonomie de gestion spéciale face à l'Administration active et en s'appuyant sur un personnel professionnel et hautement spécialisé.

En Espagne, il existe traditionnellement d'autres Administrations indépendantes, comme le sont les Universités Publiques, les Collèges Professionnels ainsi que les Chambres d'Industrie, de Commerce et de Navigation. Dans le présent travail, nous ne nous occuperons cependant pas de ces Administrations, la raison principale de leur autonomie spécifique se trouvant dans la nécessité de garantir leur « autogouvernement », vu leur nature corporative.

La législation espagnole se réfère aux Organismes dotés d'une autonomie spéciale comme à des « Entités rattachées à l'Administration » en les différenciant des Organismes « dépendants ».

La Loi 6/1997, du 14 avril, sur l'Organisation et le Fonctionnement de l'Administration Centrale (LOFAGE) considère comme dépendants de l'Administration Centrale les deux grands groupes d'Organismes publics qu'elle réglemente dans ses articles : les Organismes Autonomes et les Entreprises Publiques . Ces deux types d'Organismes « exercent des activités dérivées de l'Administration Centrale elle-même, en tant qu' organisations instrumentales différenciées et dépendantes de celle-ci ». Concrètement, « ils ont pour objet la réalisation d'activités d'exécution ou de gestion, qu'elles soient administratives - de développement ou de prestation - ou qu'elles aient un contenu économique, réservées à l'Administration Centrale ; ils en dépendent et sont rattachés, directement ou à travers un autre Organisme public, au Ministère correspondant à leur domaine, à travers l'organe que l'on détermine cas par cas ». La différence essentielle entre eux, c'est que les Organismes Autonomes sont régis entièrement par le Droit public alors que les Entreprises publiques sont soumises aux règles du Droit privé.

La LOFAGE envisage aussi des Entités distinctes de celles dont nous venons de parler. Elle prévoit en effet l'existence d'« Organismes Publics dotés d'un régime juridique particulier » et qui ont, de par la Loi, une indépendance fonctionnelle ou une autonomie de gestion spéciale par rapport aux organes centraux du Pouvoir exécutif (Gouvernement et Administration Centrale de l'État). Ce sont ces entités-là que la doctrine appelle « Administrations indépendantes ».

Le Tribunal de Défense de la Concurrence se trouve dans une position institutionnelle particulière car la législation lui confère la nature d' Organisme Autonome rattaché au Ministère de l'Économie et des Finances (il s'agit donc d'un Organisme public dépendant de l'Administration Centrale ) mais, en même temps, on lui reconnaît expressément une pleine indépendance dans l'exercice de ses fonctions.

Les principales Administrations indépendantes (dotées d'une autonomie spéciale) dans le cadre de l'État sont : la Banque d'Espagne , la Commission Nationale du Marché des Titres , Le Conseil de Sécurité Nucléaire , l' Entreprise publique de Radio et de Télévision Espagnoles - RTVE -, l' Agence de Protection des Données , la Commission Nationale de l'Énergie , la Commission du Marché des Télécommunications et le Tribunal de Défense de la Concurrence .

III - Caractéristiques générales du rÉgime juridique des Administrations indépendantes

1. Création des « Administrations indépendantes »

Dans le cadre de l'État, la création d'un Organisme public doté d'indépendance fonctionnelle ou d'une autonomie spéciale - ou bien la reconnaissance d'une telle indépendance ou autonomie spéciale à un Organisme préexistant - doit toujours se faire par l'intermédiaire d'une Loi formelle du Parlement, comme c'est le cas pour la création de tout type d' Organisme public ayant une personnalité juridique.

D'ordinaire, la Loi créant l'Organisme contient elle-même la réglementation fondamentale de son organisation et de son fonctionnement (Statut), même s'il arrive que l'on renvoie cette réglementation au Gouvernement. Pour ce qui n'est pas prévu par le Statut, l'on appliquera les règles du Droit public ou du Droit privé en fonction de ce que le Statut lui-même dispose, ou, s'il ne prévoit rien, l'on appliquera les règles relatives aux Organismes publics dépendants qui, pour chaque situation, seront considérées comme pertinentes, en tenant compte des caractéristiques de chaque Organisme. En tout cas, l'exercice des pouvoirs de l'Administration est sujette au Droit public.

2. Position des Administrations indépendantes par rapport au pouvoir législatif, exécutif et judiciaire

A. Pouvoir législatif

Les « Administrations indépendantes », ainsi qu'on les nomme, sont sujettes au pouvoir législatif en ce qui concerne leur existence même, car, comme nous l'avons dit, leur Statut de création doit être approuvé par une Loi formelle.

B. Pouvoir Exécutif

La caractéristique principale de ces Administrations réside dans leur indépendance, ou autonomie spéciale, par rapport au Pouvoir Exécutif (Gouvernement ou Administration territoriale à laquelle elles sont rattachées). Cette indépendance fonctionnelle, ou autonomie spéciale, n'a pas le même degré pour chaque Entité, et elles ne doit pas forcément exister pour toute son activité . La LOFAGE dit expressément que cette autonomie spéciale peut se référer à des « aspects précis » (concrets) de l'activité de l'Organisme et, en fait, c'est ce qui se passe normalement. Par ailleurs, certaines Entités sont formellement rattachées à l'Administration Centrale (c'est le cas de la Commission du Marché des Télécommunications ou de la Commission Nationale de l'Énergie ). Il faut aussi remarquer que les Statuts de quelques Organismes indépendants prévoient pour certaines décisions le même régime de recours impropres que celui qui existe pour certains Organismes dépendants de l'Administration territoriale (le régime de recours impropre permet de saisir les actes de l'Administration indépendante devant le titulaire de l'Administration territoriale à laquelle celle-ci se trouve rattachée).

C. Pouvoir Judiciaire

En Espagne, il n'y a pas d'actes administratifs exempts de contrôle judiciaire. Donc, tous les actes des Administrations indépendantes sont sujets au contrôle judiciaire, dans les mêmes termes que le sont ceux des Administrations territoriales. Pour les matières où le Statut de l'Administration indépendante soumet son action au régime de Droit privé (par exemple, pour la gestion de ses employés), le contrôle judiciaire correspond à la Juridiction civile ou aux Prud'hommes et non pas à la Juridiction administrative.

3. Régime de recours contre les actes des Administrations indépendantes

On peut recourir contre les actes des Administrations indépendantes directement auprès de ces entités, sans qu'un recours formel contre ces actes soit possible, en principe, auprès de l'Administration territoriale à laquelle elles sont rattachées. Cela s'explique parce que la technique de la personnalité juridique comporte précisément une séparation d'unités administratives aux effets d'imputation formelle des actes respectifs ; en sont exclus, bien sûr, les cas où la loi prévoit expressément le contraire, et cela n'affecte pas le régime de recours impropres dont nous avons parlé auparavant.

4. Capacité à interjeter un recours contentieux contre l'activité de l'Administration publique à laquelle elles sont rattachées

Les Entités dotées d'indépendance, ou autonomie spéciale, (Administrations indépendantes) peuvent déposer des recours contentieux contre l'activité de n'importe quelle Administration publique territoriale (y compris l'Administration à laquelle elles sont rattachées), conformément à ce qu'établit la Loi réglementant la Juridiction Administrative.

5. Régime de recours en cas de responsabilité extra-contractuelle

La responsabilité patrimoniale pour les dommages causés par les Entités indépendantes est invoquée uniquement, en principe, auprès de ces Entités, sans qu'une responsabilité patrimoniale directe de l'Administration à laquelle elles sont rattachées soit possible. En effet, l'Administration ne dirigeant pas l'activité de ces Organismes dotés d' autonomie spéciale , il n'est pas possible d'évoquer un lien de cause nécessaire entre le dommage et l'activité de l'Administration territoriale. Remarquons toutefois que cette responsabilité exclusive de l'« Administration indépendante » existera seulement (même si la législation espagnole ne dit rien expressément à ce sujet) dans les cas où les Organismes auxquels nous nous référons jouissent réellement d'autonomie dans leur action.

De façon générale, la législation espagnole envisage la responsabilité concurrente de plusieurs Administrations publiques dans les termes suivants : il y aura une responsabilité solidaire lorsque le dommage résultera de la gestion conjointe de plusieurs Administrations publiques, bien que l'on prévoie que l'instrument juridique réglementant l'action conjointe pourra déterminer le partage de la responsabilité entre ces différentes Administrations. Dans l'hypothèse d'un dommage produit par plusieurs Administrations, la responsabilité sera déterminée pour chacune d'entre elles en s'en tenant aux critères de compétence, de tutelle de l'intérêt public et d'importance de l'intervention ; il y aura une responsabilité solidaire lorsqu'une telle détermination sera impossible.

6. Nomination de leurs membres

Il appartient au Gouvernement, sur proposition du Ministre ayant compétence en la matière, de nommer (ou désigner) les membres de ces Organismes. Le Ministre, avant de faire une proposition, devra paraître devant la Chambre des Députés pour information sur les personnes qu'il prétend proposer. Dans le cas du Conseil de Sécurité Nucléaire , il est prévu, en plus, que la Chambre des Députés puisse opposer un veto justifié. Dans le cas de la Banque d'Espagne, il n'existe d'obligation d'information que pour les charges de Gouverneur et de Sous-gouverneur de la Banque.

Pour la nomination du Directeur de l' Agence de Protection des Données et pour les membres du Tribunal de Défense de la Concurrence , il n'est pas prévu que le Ministre comparaisse préalablement devant la Chambre.

En ce qui concerne l' Entreprise publique de la Radio et de la Télévision Espagnoles (RTVE) , c'est le Gouvernement qui nomme son Directeur Général, alors que les membres de son Conseil d'Administration sont élus pour chaque législature à raison d'une moitié par la Chambre des Députés et de l'autre par le Sénat, avec une majorité des deux tiers dans les deux cas.

Les organes dirigeants des Administrations indépendantes seront nommés en fonction de leur compétence reconnue dans le secteur dont il est question.

En général, les mandats sont renouvelables une fois.

7. Garanties d'indépendance de leurs membres

Ne pas être soumis au Gouvernement ou à l'Administration Centrale de l'État et avoir un mandat pour une période déterminée constituent la principale garantie d'indépendance des membres des Administrations indépendantes. De façon générale, les causes de révocation du mandat sont les suivantes : fin de la période pour laquelle ils ont été désignés, âge limite, renonciations et certaines incompatibilités prévues par la Loi. Les Statuts des Organismes en question envisagent aussi que le Gouvernement puisse décider la révocation en cas d'incapacité permanente pour l'exercice de la charge, de non-accomplissement grave des obligations et de condamnation pour délit dolosif - dans le cas de la Banque d'Espagne, il suffit qu'il y ait mise en accusation. Pour ce qui est du Conseil de Sécurité Nucléaire , le Gouvernement pourra décider la révocation du mandat lorsqu'il considère qu'un membre n'a plus la capacité pour exercer ses fonctions ou qu'il a cessé de s'occuper avec diligence des devoirs de sa charge. Cette révocation devra être communiquée à la Chambre des Députés qui pourra s'y opposer.

Dans le cas de l' Agence de Protection des Données , l'organe de direction est unique, et son titulaire ne peut recevoir d'instructions d'aucune autorité, qu'elle soit interne ou externe.

Pour ce qui est du Directeur Général de l 'Entreprise Publique RTVE , la garantie d'indépendance est pratiquement nulle, vu qu'il peut être révoqué par le Gouvernement si celui-ci considère que son action n'a pas répondu aux objectifs et aux principes fixés, ce qui, en pratique, équivaut à la possibilité de le révoquer de façon discrétionnaire.

8. Pouvoirs publics

Certains organismes ont des pouvoirs de réglementation du secteur, alors que d'autres ont seulement des pouvoirs exécutifs, des pouvoirs de contrôle et de supervision, des pouvoirs disciplinaires, des pouvoirs de consultation et de conseil.

A. Pouvoir réglementaire

En Espagne, la garantie des droits fondamentaux et des libertés publiques (liberté et propriété) comprend l'existence d'une « reserva de Ley » dans la réglementation des différents secteurs d'activité. Cela signifie que c'est le Parlement qui doit, d'ordinaire, établir la réglementation. Lorsque le gouvernement édicte des Décrets Royaux ayant rang de Loi, en cas de nécessité extraordinaire et urgente, l'on exige que le Parlement les ratifie ultérieurement. C'est pour cela que la réglementation sectorielle que peuvent réaliser le Gouvernement et l'Administration sera soumise à une autorisation légale préalable, les règlements étant toujours subordonnés aux Lois.

Ceci étant dit, la Banque d'Espagne et la Commission Nationale du Marché des Valeurs se voient attribuer d'amples facultés de réglementation dans les secteurs où elles sont compétentes. La Banque d'Espagne a un pouvoir de réglementation dans les domaines suivants : le système de compensation et de liquidation des paiements ainsi que la sécurité et l'efficacité des systèmes et des instruments de paiements (dans l'exercice des fonctions qui lui incombent comme partie intégrante du Système Européen des Banques Centrales), et elle est compétente surtout en matière d'intervention et de discipline des établissements de crédit. Les autres Administrations indépendantes ne font que proposer l'approbation de nouvelles réglementations ou les instruire ; on leur reconnaît dans certains cas un pouvoir limité de réglementation sur des aspects ayant un fort caractère technique ( Conseil de Sécurité Nucléaire et Commission du Marché des Télécommunications ). Le pouvoir normatif de la Commission Nationale de l'Énergie est, quant à lui, pratiquement inexistant.

B. Pouvoir de contrôle et de supervision

- Le Conseil de Sécurité Nucléaire : il a d'amples facultés d'inspection et de contrôle en matière de sécurité nucléaire et radiologique.

- La Banque d'Espagne : elle a d'amples facultés de supervision et de discipline sur les établissements de crédit, avec la faculté d'intervenir et de remplacer des administrateurs.

- La Commission Nationale du Marché des Titres : elle a d'amples facultés de supervision et d'inspection sur les marchés des titres et sur l'activité de ceux qui y interviennent, avec la faculté d'intervenir et de remplacer des administrateurs.

- Le Tribunal de Défense de la Concurrence : il a d'amples facultés de contrôle, même si les facultés de surveillance sont exercées directement par l'Administration Centrale.

- L' Agence de Protection des Données : elle a d'amples facultés de contrôle et de surveillance sur respect de la législation sectorielle.

- La Commission du Marché des Télécommunications : elle a un pouvoir de contrôle et de surveillance limité à une partie de l'activité des opérateurs.

- La Commission Nationale de l'Énergie : elle a d'amples fonctions de surveillance et de contrôle des installations et des opérateurs des marchés de l'énergie.

C. Pouvoir disciplinaire

Le Conseil de Sécurité Nucléaire : il peut seulement proposer l'ouverture d'une enquête disciplinaire.

La Banque d'Espagne : elle est compétente pour instruire tout type de dossier disciplinaire entrant dans les matières et le territoire de sa compétence et pour imposer des sanctions pour les infractions graves et légères. En ce qui concerne les infractions très graves, c'est le Ministère de l'Économie et des Finances qui impose ces sanctions sur proposition de la Banque d'Espagne, sauf en cas de « révocation de l'autorisation de l'établissement » ; celle-ci sera imposée par le Conseil des Ministres.

La Commission Nationale du Marché des Valeurs : elle est compétente pour ouvrir et instruire tous les dossiers disciplinaires entrant dans le cadre des matières et du territoire de sa compétence. Il lui revient de même d'imposer les sanctions pour les infractions graves et légères. En ce qui concerne les infractions très graves, c'est le Ministère de l'Économie et des Finances qui impose ces sanctions sur proposition de la Commission , sauf en cas de « révocation de l'autorisation de l'organisme » ; celle-ci sera dictée par le Conseil des Ministres.

Lorsque l'organisme ayant enfreint la législation sur le marché des valeurs sera un établissement de crédit, le dossier de la Banque d'Espagne sera obligatoire pour imposer la sanction correspondante.

- La Commission du Marché des Télécommunications : elle exerce un plein pouvoir de sanction par rapport à certaines infractions très graves que peuvent encourir les opérateurs du secteur ainsi que par rapport à certaines infractions graves et légères. Dans les autres cas, il lui revient d'ouvrir les dossiers disciplinaires et de faire les démarches nécessaires.

- L' Agence de Protection des Données : elle a plein pouvoir disciplinaire.

- Le Tribunal de Défense de la Concurrence : il possède d'amples facultés résolutoires des dossiers disciplinaires.

- La Commission Nationale de l'Énergie : elle n'a pas de pouvoir disciplinaire.

Les fonctions de l' Entreprise publique RTVE consistent dans la direction et le contrôle des sociétés de marché de radio et de télévision de l'État.

Le Tribunal de Défense de la Concurrence exerce des fonctions de consultation par rapport aux opérations de concentration et aux aides publiques.

9. Modalités de contrôle de leur activité par les pouvoirs législatif et exécutif

La législation espagnole envisage différentes modalités de contrôle des Administrations indépendantes par les pouvoirs législatif et exécutif.

- Pour ce qui concerne le Pouvoir législatif, presque tous ces organismes doivent présenter annuellement - directement ou à travers le Gouvernement - un dossier sur le déroulement de leurs activités. Dans le cas de la Banque d'Espagne, ces informations sont relatives aux objectifs et à l'exécution de la politique monétaire ; à cet effet, le Gouverneur de la Banque pourra être convoqué devant toute commission de la Chambre des Députés ou du Sénat ou devant une commission mixte.

Par ailleurs, l'on peut intimer aux titulaires des organes de gouvernement des Administrations de prêter déclaration - de même que tout autre personne - devant les Commissions d'Enquête de la Chambre des Députés - ou des Parlement Autonomes respectifs - pour analyser des affaires d'intérêt général. C'est ce qui s'est passé, par exemple, dans le cas du scandale financier « Gescartera » où le Président de la Commission Nationale du Marché des Valeurs a été amené à déclarer devant la Chambre.

Le statut de l' Entreprise publique de la radio et de la Télévision Espagnoles prévoit un contrôle direct de la part de la Chambre des Députés sur l'activité de cet Organisme et de ses sociétés, bien que, lors de l'exercice d'un tel contrôle, l'on doive respecter son fonctionnement adéquat.

- Pour ce qui concerne le Pouvoir exécutif, la situation varie en fonction des différentes Entités :

Il n'est prévu aucun contrôle du Gouvernement ou de l'Administration Centrale de l'État sur l'activité du Conseil de Sécurité Nucléaire , de l' Agence de Protection des Données et de la Commission du Marché des Télécommunications.

Dans le cas de la Banque d'Espagne, il n'existe aucun type de contrôle direct du Gouvernement ou de l'Administration Centrale sur les fonctions de la Banque en matière de politique monétaire, bien que la Banque doive informer régulièrement le Gouvernement sur les objectifs fixés et leur exécution. Pour le reste des matières - y compris celles qui sont relatives à la supervision des entités financières et des Établissements de crédit -, bien que la Banque les exerce en toute autonomie par rapport aux autres organes de l'Administration Centrale, ses actes et ses résolutions administratives sont susceptibles d'un recours ordinaire devant le ministre de l'Économie et des finances.

Les résolutions de la Commission Nationale du Marché des Titres épuisent la voie administrative, sauf celles qui ont un caractère disciplinaire et sauf les mesures d'intervention et de remplacement des administrateurs de sociétés, contre lesquelles on peut recourir auprès du Ministère de l'Économie et des Finances.

L'activité de la Commission Nationale de l'Énergie est sujette à un contrôle d'efficacité de la part du Ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, et l'on peut recourir pratiquement contre toutes ses résolutions par la voie administrative auprès du titulaire du Département auquel elle est rattachée.

L'activité du Tribunal de Défense de la Concurrence est sujette elle aussi à un contrôle d'efficacité de la part du Ministère de l'Économie et des Finances auquel il est rattaché, mais l'on peut recourir directement contre les résolutions du Tribunal devant la Juridiction Administrative.

10. Garantie de leur indépendance financière

Ces entités ont un patrimoine propre, indépendant du patrimoine de l'État. Leurs principales sources de financement étant les taxes qu'elles peuvent prélever pour leurs services ainsi que les assignations du Budget général de l'État et les transferts provenant de l'Administration Centrale.

Bien que toutes les Autorités Indépendantes élaborent des avant-projets de leur budget, il revient au Gouvernement de les approuver postérieurement et de les intégrer au Budget Général de l'État pour qu'ils soient votés définitivement par le Parlement. Il n'y a que la Banque d'Espagne qui approuve son propre budget et qui le renvoie au Gouvernement afin qu'il soit transféré au Parlement pour approbation.

11. Résumé

Pour résumer, nous pouvons dire qu'en Espagne il existe un nombre significatif d'Administrations qui jouissent d'une indépendance ou d'une autonomie spéciale par rapport au Gouvernement. Leur création répond, dans la plupart des cas, à la nécessité de garantir la transparence et la neutralité de la réglementation et de la supervision des marchés nés lors du mouvement de libéralisation exigé pour intégrer l'économie espagnole à l'économie européenne. Parmi les Administrations indépendantes, se détachent la Banque d'Espagne et la Commission Nationale du Marché des Valeurs auxquelles l'on a attribué d'amples pouvoir de réglementation, d'exécution, de surveillance, de supervision, de contrôle et de sanction, dans leur domaine de compétence. D'autres Administrations indépendantes comme le Conseil de Sécurité Nucléaire , la Commission du Marché des Télécommunications , la Commission Nationale de l'Énergie ou le Tribunal de Défense de la Concurrence , jouissent de pouvoirs importants de supervision et de contrôle.

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ÉTATS-UNIS

par M. Guy SCOFFONI,
professeur à l'Université Paul Cézanne Aix-Marseille III

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Si les États-Unis peuvent être considérés comme les premiers promoteurs de l'intervention d'organes administratifs indépendants dans la sphère publique, ces « Agences réglementaires indépendantes » (selon une traduction littérale d'« Independant Regulatory Agencies ») n'ont jamais fait l'objet d'une définition officielle.

Ni la grande loi fédérale sur la procédure administrative de 1946 (« Administrative Procedure Act ») ni aucun autre texte ne précise la nature de ces organes.

De surcroît le terme d'« Agency » recouvre en droit américain plusieurs réalités administratives et ne peut en aucun cas être réservé aux seules « Agences » dites « indépendantes ». On trouve en effet, aussi bien des « Agences » au sein des départements de l'Exécutif qu'en dehors d'eux et ils présentent des degrés d'indépendance variables. Une identification préalable de ces organes (au niveau fédéral) s'impose donc (Cf. infra I).

On peut toutefois noter d'ores et déjà qu'un consensus existe aux États-Unis pour considérer qu'une « Agence réglementaire indépendante » doit être avant tout composée de membres non susceptibles de révocation par le Président, sauf cause sérieuse c'est-à-dire que toute révocation discrétionnaire, de nature politique, est par principe, impossible. Par ailleurs, une telle « Agence indépendante » doit être dirigée par un organe collégial dont le nombre des membres appartenant à un même parti est le plus souvent limité. Elle doit en dernier lieu posséder à la fois un pouvoir réglementaire et un pouvoir quasi-juridictionnel, les modalités de contrôle de son activité par les pouvoirs législatif ou exécutif devant être définies par la loi fédérale spéciale qui l'organise.

Seront successivement analysées les conditions d'organisation et d'indépendance de ces organes (II) puis leurs missions et le contrôle qui les caractérise (I). Il convient de présenter au préalable les éléments principaux du contexte américain de développement de ces « Agences réglementaires indépendantes ».

SECTION PRÉLIMINAIRE
LE DÉVELOPPEMENT DES « AGENCES RÉGLEMENTAIRES INDÉPENDANTES » DANS LE CADRE FÉDÉRAL AMÉRICAIN

Le système américain des autorités de régulation a été organisé en réponse aux insuffisances du cadre de l'économie de marché. Il s'agissait d'abord de remédier aux situations privilégiées injustifiées de certaines entreprises et d'introduire davantage d'équité dans la régulation. Il s'agissait ensuite de mettre en place un ensemble de règles de nature à apporter des garanties de prévisibilité et sécurité aux opérateurs dans le système.

Plusieurs décennies plus tard, des pressions inverses se manifestèrent pour remettre en cause, avec un succès variable le système établi et amorcer le mouvement de dérégulation. Certaines de ces pressions venaient de groupements de consommateurs, d'autres d'entreprises mécontentes du niveau d'avantages qu'elles retiraient du système. Le contexte américain d'insertion de ces organes de régulation est donc fait d'allers-retours et de compromis idéologiques et circonstanciés.

I. L'origine du système des « Agences réglementaires indépendantes »

A. Si les débuts du système fédéral de régulation remontent au XVIIIème siècle, l'encadrement des interventions des acteurs économiques s'impose véritablement au lendemain, seulement, de la guerre de Sécession, dans une période d'industrialisation croissante.

La première Agence réglementaire indépendante est la Commission du Commerce entre États (« Interstate Commerce Commission »), instituée par le Congrès en 1887 pour limiter le pouvoir des entreprises de transport ferroviaire d'imposer des tarifs élevés aux fermiers ou autres clients qui utilisaient ces services.

Au début du XX ème siècle, d'autres organes sont crées à des fins de régulation économique, dans les secteurs du commerce (Federal Trade Commission, 1914) des communications (Federal Communications Commission, 1934), de l'énergie (Federal Power Commission, 1935) ou des transports maritimes (Federal Maritime Commission, 1936) ou aérien (Civil Aeronautics Board, 1938) Comme on peut le voir, la plupart de ces premières agences indépendantes sont apparues durant la grande dépression comme le moyen de parvenir à un équilibre entre les nécessités des industries émergentes et les besoins de protection des citoyens.

Ces organes se présentent avant tout comme des instruments du Congrès dans la mesure où ils sont institués en dehors de la sphère de contrôle du Président. Ils vont encore se développer à partir des années soixante dans les domaines de la régulation sociale.

B. Les États-Unis adoptent en effet dans cette période, de nombreux programmes en matière de santé, d'aide sociale ou de sécurité des citoyens.

Ainsi, à la fin des années soixante, les accidents industriels constituaient une première cause de décès aux États-Unis et le Congrès adopta en conséquence l'« Occupational Safety and Health Act » de 1970. Le but était de réduire le nombre d'accidents mortels dans l'industrie et leurs conséquences. Pour atteindre cet objectif, est créée « l'Occupational Safety and Health Review Commission » dont la mission est de définir des standards de protection, d'élaborer des réglementations, de contrôler le bon respect de ces standards et règles, de poursuivre les responsables et proposer des sanctions en cas de violation. Depuis lors, cette « Agence » a adopté près de deux mille pages de règles et de standards divers...

Cet impressionnant pouvoir réglementaire n'était pas l'apanage des « agences » indépendantes créées dans le premier tiers du XX ème siècle, en raison de la doctrine libérale dominante de « laisser faire ». La Federal Trade Commission se voyait par exemple confier la mission de lutter contre les « pratiques concurrentielles injustes » par le « Clayton Act » de 1914 mais ne reçut qu'au début des années soixante-dix un véritable pouvoir réglementaire, et ne dispose toujours pas du pouvoir de sanction... Par contre, ces « Agences » apparaissent plus « indépendantes » que celles instituées à partir de 1960 qui se trouvent soumises à un contrôle plus marqué du Président...

La multiplication des « Regulatory Agencies » dans les années soixante et soixante-dix c'est-à-dire jusqu'au début de la Présidence Reagan n'entraîne pas ainsi une augmentation corrélative de nombre des « Agences indépendantes ».

En effet, si ces « Regulatory Agencies » passent de 28 en 1960 à 56, soit un doublement, en 1980, la plupart des nouvelles « Agences » créées ne répondent pas aux critères d'indépendance et apparaissent plus liées à l'Exécutif.

II. L'évolution du système des « Agences réglementaires indépendantes »

Durant les années soixante-dix, de nombreuses études tendent à démontrer que le système de régulation fédérale constitue un obstacle à la croissance économique, limitant notamment la concurrence au sein du secteur privé. Ces préoccupations légitiment ainsi le mouvement de « déréglementation » (« dérégulation ») fondé sur un retour aux principes de libre-concurrence et à la recherche de tarifs moindres pour le consommateur qui va caractériser la période récente.

La première illustration est la loi sur la déréglementation du transport aérien de 1978 « Airline Deregulation Act » adoptée sous l'administration Carter.

Un autre élément majeur d'évolution se trouve dans le rôle croissant du Président en matière de régulation et de contrôle des Agences fédérales. Les deux mandats du Président Reagan, fortement hostile au système de régulation, consacrent ainsi l'encadrement du phénomène, à travers notamment la nomination à la tête des Agences fédérales, de personnes totalement acquises aux exigences de « déréglementation ».

L'impact de la Présidence Clinton en matière de régulation apparaît limité. Une certaine continuité avec l'ère Reagan se manifeste, avec toutefois davantage de flexibilité dans les relations entre l'Exécutif et les Agences fédérales et donc une marge d'autonomie plus grande pour ces dernières.

Enfin, l'arrivée au pouvoir de George W. Bush se traduit sans surprise par une hostilité renouvelée au système de régulation et un resserrement, souhaité par les milieux d'affaire, du contrôle de l'Exécutif sur les Agences fédérales, notamment dans le secteur de l'énergie...

A. Modalités d'organisation et indépendance des « Agences réglementaires indépendantes » (I.R.A.)

Les « Independant Regulatory Agencies » (IRA) s'inscrivent dans un ensemble fédéral composé de trois types d'organes :

- Le bureau exécutif du Président (Executive Office of the President) crée en 1939 : il comprend 1600 agents répartis autour de treize services, incluant notamment l'« Office of Management and Budget » (OMB), le « National Security Conseil » (NSC), le « Council of Economic Advisers » (CEA) et l'« Office of the Vice-Président ».

Ces organes sont considérés comme « staff agencies » qui à la différence de « line agencies » n'ont aucune fonction d'administration proprement dite, leur seule mission étant de conseiller le Président.

- Les Agences de niveau « ministériel » (« Cabinet-level Agencies ») au nombre de quatorze.

Elles emploient 1,6 million d'agents.

- Les Agences réglementaires indépendantes et les autres organismes gouvernementaux autonomes. On en recense une soixantaine regroupant plus d'un million d'agents.

Après une croissance régulière, en termes d'effectifs, depuis le milieu du XX ème siècle, cet appareil administratif fédéral voit sa taille décliner depuis une quinzaine d'années. En 1980, il comptait ainsi 2,9 millions d'agents contre 2 750 000 aujourd'hui, la différence s'expliquant principalement par la privatisation d'un certain nombre de services...

Au sein de cet ensemble, les « Agences réglementaires indépendantes » répondent à des critères d'identification spécifiques et occupent une place originale par rapport aux pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire.

Il convient d'analyser ainsi, successivement les modalités d'organisation de ces Agences et leurs conditions d'indépendance effective.

1. Les modalités d'organisation

a) La distinction entre « Agences réglementaires indépendantes » et « Agences exécutives »

1- La définition du terme « Agence » (Agency) apparaît particulièrement extensive selon la loi sur la Procédure administrative (A.P.A.) de 1946 : Toute « autorité du gouvernement des États-Unis » exerçant une compétence fédérale est ainsi visée.

Le Congrès et les tribunaux fédéraux font partie des exceptions expresses et ne peuvent être une Agency. Le Président des États-Unis n'étant pas mentionné, parmi les exceptions, pourrait-il être qualifié d'« Agency ». La question n'a été tranchée par la Cour Suprême qu'en 1992, dans une décision « Franklin v. Massachusetts » (505. US. 788) qui considère que ce dernier n'est pas une « Agence » au sens de la loi sur la Procédure administrative, ne pouvant être par principe directement chargé par une loi de l'application de celle-ci...

Une autre catégorie d'« autorités gouvernementales » dont la qualification d'« Agence » apparaît problématique est celle des « Sociétés gouvernementales » (« Government Corporations »). Certaines sont expressément reconnues comme telles par la loi qui les organise. Il en va ainsi de l'« Overseas Private Investment Corporations » alors que pour d'autres, telles « Amtrak » sur la « Corporation for Public Broadcasting » la loi les instituant écarte la qualification d'« Agence ». En effet, lorsque le Congrès utilise la forme de « société anonyme » pour prendre en charge ce qui serait autrement une affaire « gouvernementale », il entend généralement éviter que soient applicables à ces entités, les procédures administratives relatives aux « Agences »...

Au total, le terme d'Agence recouvre de multiples réalités administratives au niveau fédéral, comme au niveau local, d'ailleurs. Les différents départements « ministériels », Justice, Intérieur, Transports etc... sont des « Agences » et d'autres organes situés à l'intérieur de ces départements ou à l'extérieur (« Freestanding Agencies ») peuvent être qualifiés d'« Agences ». C'est dans le cadre de ces « Freestanding Agencies » qu'il faut à présent identifier plus particulièrement les « Agences réglementaires indépendantes » (I.R.A.).

2- Les critères d'identification des Agences réglementaires indépendantes

La plupart des entités ne s'inscrivant pas dans le cadre d'un « département » sont des Agences indépendantes (I.R.A). Certaines, cependant, ont une autre qualification celle d'« Agences exécutives », tout en étant parfois dotées de fortes compétences réglementaires. La confusion s'accroît encore dans la mesure où exceptionnellement, certains organes situés à l'intérieur d'un Département ministériel peuvent être néanmoins qualifiés d'« Agences réglementaires indépendantes ». Il en va ainsi de la « Commission réglementaire fédérale de l'énergie » (« Federal Energy Regulatory Commission ») qui pour des raisons matérielles ou de « logistique » administrative se trouve au sein du Département de l'énergie, mais qui exerce ses fonctions de manière indépendante.

Quatre critères d'identification des IRA peuvent être dégagés, tant de la loi sur la procédure administrative que de la pratique fédérale, souvent complexe.


• La nature collégiale de l'organe de direction

À la différence des « Agences exécutives », les Agences indépendantes sont en principe dirigées par un organe collégial et non par une seule personne. Il s'agit généralement de commissions, bureaux, conseils ou conférences (Commissions, Boards, Councils or Conferences) composés de cinq à sept membres, nommés par le Président des États-Unis après accord du Sénat. (Advice and Consent of the Senate). Cette procédure mixte de nomination (Président et Sénat) suivie pour tous les emplois fédéraux de niveau élevé, constitue un premier élément de légitimité fonctionnelle des Agences indépendantes.

La « Federal Communications Commission », la « Federal Trade Commission » ou le « National Labor Relations Boards » sont ainsi dirigées par un bureau de cinq membres. Toutefois, par exception, certains organes dépourvus de direction collégiale peuvent entrer en raison de leur importante fonction autonome de régulation dans le champ des agences indépendantes. C'est le cas notamment de l'« Occupational Safety and Health Review Commissions », qui se situe, elle, de surcroît, au sein du Département du Travail (Department of Labor)...


• L'exigence de composition pluraliste

Si les dirigeants d'Agences exécutives sont généralement membres du parti du Président, les lois créant les Agences réglementaires indépendantes requièrent le plus souvent qu'une majorité simple de l'Agence seulement puisse émaner d'un même parti. En d'autres termes, dans une commission de cinq membres, trois seulement peuvent appartenir au même parti.


• L'exigence de mandats limités et décalés dans le temps

Les membres du bureau dirigeant d'une Agence indépendante sont nommés tout d'abord pour une durée prédéterminée, en général cinq ans, à la différence des personnels de direction d'une agence exécutive qui peuvent être désignés pour une période indéterminée et rester en fonction selon le bon vouloir du Président. De surcroît, les périodes de nomination des membres de l'Agence indépendante doivent être décalées pour éviter que le Président ne puisse dans le cadre d'un même mandat, remplacer d'un seul coup, l'ensemble d'une équipe dirigeante.


• L'absence de révocation discrétionnaire par le Président

Les membres du groupe de direction d'une Agence réglementaire indépendante ne peuvent être révoqués que pour motif sérieux et non à la discrétion du Président. Au contraire, les dirigeants d'une Agence exécutive peuvent être en général démis de leurs fonctions à tout moment et sans motif par le Président.

En conséquence, un désaccord d'ordre politique entre ce dernier et l'un des membres dirigeants d'une Agence indépendante ne saurait justifier sa révocation.

Ce critère apparaît décisif dans le contexte américain. Les Agences dirigées par des personnes que le Président ne peut pas révoquer à sa guise sont qualifiées d'« indépendantes ».

b. La structure des Agences réglementaires indépendantes

Après une présentation de synthèse des Agences réglementaires indépendantes présentes actuellement au niveau fédéral, sera plus particulièrement analysée la question de la composition des organes.

1- Présentation générale

S'il n'existe aucun recensement officiel des seules Agences Réglementaires indépendantes des États-Unis (« Independant Regulatory Agencies » 425 ( * ) , l'application des quatre critères dégagés précédemment peut permettre de dresser la liste potentielle ci-après. Cette tentative de recensement met notamment en évidence l'importance de l'intervention d'un texte législatif spécifique, à l'origine de la création de l'Agence. Une telle loi fédérale fixe en effet généralement la nature, les statuts et les missions de l'organisme. Elle conditionne également le contrôle qui sera exercé, marquant la position particulière de ces agences indépendantes entre Pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire.

Par ordre alphabétique, seront ainsi présentées les « agences réglementaires indépendantes » illustrant principalement le système américain :

- COMMODITY FUTURES TRADING COMMISSION


• Instituée comme Agence indépendante par le « Commodity Futures Trading Commission Act » de 1974 (7. U.S Code 4 a).


• Fonctionnant depuis 1975, son autorité pour réguler certains marchés a été renouvelée par le Congrès en 1978, 1982, 1986, 1992, 1995 et 2000.


• Comprend cinq commissaires (l'un d'eux étant désigné par le Président comme « Chairman ») nommés pour une période de cinq ans (Président et Sénat).

- CONSUMER PRODUCT SAFETY COMMISSION


• Instituée par le « Consumer Product Safety Act » (15 U.S Code 2051)/


• Intervient dans le cadre de la protection de la sécurité du consommateur et de la prévention des risques dans divers secteurs de consommation (en vertu notamment du « Hazardous Substances Act » ou du « Poison Prevention Packaging Act » de 1970).


• Comprend cinq commissaires dont un Chairman (nomination par le Président et le Sénat) nommés pour sept ans. Emploie près de mille agents dont treize avocats répartis sur trois divisions régionales.

- DEFENSE NUCLEAR SAFETY BOARD


• Instituée en 1988 par le « Atomic Energy Act » de 1984 amendé en 1987.


• Compétente en matière de sûreté nucléaire.


• Comprend un bureau de cinq membres (nomination par le Président et le Sénat) choisis parmi des experts américains reconnus en ce domaine.

- EQUAL EMPLOYMENT OPPORTUNITY COMMISSION,


• Instituée par le Civil Rights act de 1964- Title IV (42 U.S. Code 2000 e-4)


• Chargée de veiller à la bonne application des exigences fédérales, de non-discrimination en matière d'emploi.


• Comprend cinq commissaires nommés par le Président des États-Unis après accord du Sénat, pour cinq ans, le Président désignant le « Chairman » et « Vice-Chairman ». La Commission emploie plus de 3600 agents dont 144 avocats répartis sur cinquante divisions régionales.

- FEDERAL COMMUNICATIONS COMMISSION


• Instituée par le « Communications Act » de 1934 (47 U.S Code 151).


• Compétente en matière de régulation de l'ensemble des communications intérieures ou vers l'étranger.


• Composée de cinq membres, nommés pour cinq ans (par le Président et le Sénat), elle emploie près de 2300 agents dont 250 avocats, répartis sur cinq divisions régionales.

- FEDERAL ELECTION COMMISSION


• Instituée par le « Federal Election Campaign Act » de 1971 (2 U.S Code 437 c).


• Chargée de l'application de la réglementation des campagnes électorales.


• Composée de six commissaires nommés pour six ans (par le Président et le Sénat), elle emploie 270 agents dont 42 avocats.

- FEDERAL MARITIME COMMISSION


• Instituée par une loi de 1981 et dotée de compétences notamment par le « Shipping Act » de 1984 et le « Shipping Practices Act » de 1988.


• Chargée de la régulation des activités commerciales maritimes américaines.


• Composée de cinq commissaires nommés selon les modalités précédentes.

- FEDERAL MINE SAFETY AND HEALTH REVIEW COMMISSION


• Instituée par le « Federal Mine Safety and Health Act » de 1977 (30 U.S Code 801).


• Veille au respect des standards de santé et de sécurité définis pour l'ensemble des activités minières du pays.


• Composé de cinq commissaires nommés pour dix ans, l'un d'entre eux étant désigné « Chairman » par le Président.

- FEDERAL RETIREMENT THRIFT INVESTMENT BOARD


• Instituée comme Agence indépendante par le « Federal Employees Retirement System Act » de 1986 (5 U.S Code 8351).


• Chargée d'administrer un système d'épargne retraite bénéficiant aux agents fédéraux.


• Composée de cinq membres au niveau du Bureau (Board) qui nomment un « Executive Director ».

- FEDERAL TRADE COMMISSION


• Instituée en 1914 par le « Federal Trade Commission Act » (15 U.S Code 41-58).


• Chargée de réguler les pratiques commerciales et promouvoir la concurrence.


• Composée de cinq commissaires nommés pour sept ans (par le Président et le Sénat), elle emploie plus de deux mille personnes dont 311 avocats répartis en dix divisions régionales.

- NATIONAL LABOR RELATIONS BOARD


• Instituée par le « National Labor Relations Act » de 1933 (Wagner Act, 29 U.S Code 167).


• Chargée de veiller au respect des droits des salariés du secteur privé dans les relations du travail.


• Composée de cinq membres du bureau nommés pour sept ans, elle emploie plus de 3000 personnes dont 650 avocats répartis sur dix divisions régionales.

- NUCLEAR REGULATORY COMMISSION


• Instituée par l'« Energy Reorganization Act » de 1974 (42 U.S Code 5801)


• Chargée de réguler l'utilisation civile de l'énergie nucléaire à des fins de protection de la santé et de l'environnement.


• Composée de cinq commissaires nommés pour cinq ans (par le Président et le Sénat), elle emploie plus de 3000 personnes dont 65 avocats, répartis sur cinq divisions régionales.

- OCCUPATIONAL SAFETY AND HEALTH REVIEW COMMISSION


• Instituée par l'« Occupational Safety and Health Act » de 1970 (29 U.S Code 651-678).


• Chargée d'assurer le règlement des conflits relatifs à des conditions de travail dangereuses.


• Comprend trois commissaires, dont un « Chairman », nommés pour six ans.

- SECURITIES END EXCHANGE COMMISSION


• Instituée par le « Securities Exchange Act » de 1934 (15 U.S Code 78 a-785)


• Intervient pour garantir la sécurité des marchés financiers et des transactions.


• Composée de cinq commissaires, nommés pour cinq ans (par le Président et le Sénat), elle emploie près de 2200 personnes dont 710 avocats répartis en neuf divisions régionales.

- UNITED STATES INTERNATIONAL TRADE COMMISSION


• Instituée en tant qu'Agence indépendante par une loi de 1916 modifiée par le « Trade Act » de 1974 (19 U.S Code 2231).


• Chargée de réguler les pratiques commerciales internationales et garantir notamment le respect des règles de concurrence dans l'importation de marchandises aux États-Unis.


• Composée de six commissaires nommés pour neuf ans, trois au maximum pouvant appartenir au même parti, elle est dirigée par un « Chairman » désigné pour deux ans et dont le successeur ne pourra appartenir au même parti politique.

Les quinze Agences réglementaires indépendantes qui précèdent, répondent de manière classique aux quatre critères d'identification dégagés. De nombreuses Agences peuvent être qualifiées d'« indépendantes » dans le cadre fédéral américain mais ne constituent pas pour autant des « Independant Regulatory Agencies » en raison de leur trop faible pouvoir réglementaire ou quasi-juridictionnel.

2- Les problématiques de composition des organes dirigeants des Agences indépendantes

a) Le caractère pluraliste de la composition de l'organe dirigeant, appelé « Board » ou « Commission » pour refléter sa collégialité, constitue, comme nous l'avons vu précédemment, un critère décisif d'identification des Agences indépendantes.

Tous les organismes dotés d'une structure de direction collégiale entrent dans la catégorie des « Independant Regulatory Agencies » et presque tous ceux dirigés par une seule personne sont des « Exécutives Agencies ».

Le choix de structure reflète en effet, dans une large mesure politique, le choix politique à l'origine de la création de l'Agence et sa situation institutionnelle. Un organe dirigeant unique traduit une préoccupation première de responsabilité : soit la responsabilité de l'administrateur lui-même pour faute, négligence voire simple désaccord avec le Président, soit celle du Président pour avoir recruté ou maintenu à son poste le fautif ou l'incompétent...

À l'inverse, une structure collégiale est de nature à garantir l'indépendance de l'organe et de promouvoir sa neutralité et sa moindre vulnérabilité à l'égard des groupes d'intérêts (lobbys) ou de l'influence présidentielle.

En définitive, si le but est de développer un management de type « scientifique », une structure pluraliste de « Commission » sera retenue dans le cadre d'une I.R.A. Si la priorité est la responsabilité et le contrôle politique, un organe dirigeant unique sera institué dans le cadre d'une « Executive Agency ».

b) Des remises en cause du mode de composition des Agences indépendantes sont apparues dans la période récente. Soit parce que la qualité des commissaires se succédant dans telle ou telle Agence apparaissait médiocre, soit parce que le manque d'indépendance se révélait patent. Les controverses entourant le fonctionnement de l'importante Federal Trade Commission en constituent une bonne illustration.

- Depuis la création de l'agence en 1914, les commissaires ont été souvent recrutés sur seuls critères politiques, la Maison Blanche ou le Congrès se désintéressant parfois du degré de compétence des intéressés. Le manque de commissaire en matière de législation anti-trust est ainsi souvent relevé 426 ( * ) ... Le manque de diversité des formations des commissaires pour une Agence au champ d'action aussi étendu, est également contesté.

Ainsi aujourd'hui, la Direction de l'Agence compte quatre juristes et un militaire (aucun économiste, gestionnaire ou ancien chef d'entreprise...)

- Les insuffisances du système de nomination tiennent pour une bonne part au fait que les Présidents américains nomment, souvent sur ces postes, des amis politiques, « recalés » par exemple du suffrage universel...

Sur les soixante-quinze commissaires recrutés à la Federal Trade Commission depuis l'origine, près de la moitié ont été auparavant gouverneurs d'un État, membre du Congrès ou administrateur de la Maison Blanche ou au Congrès...

Or la répartition des commissaires rejaillit inévitablement sur l'image de l'Agence auprès du public ou du monde des affaires. Si les commissaires sont respectés, leurs décisions et l'ensemble du travail de l'Agence le sera aussi. Dès lors certaines propositions de réformes ont été émises.

La nomination des membres de l'organe dirigeant par le Président confère une autorité renforcée et demeure la meilleure des solutions. Toutefois un consensus se fait sur la nécessité pour le chef de l'Exécutif de mieux prendre en compte la compétence spécialisée et l'expérience nécessaires pour chaque poste et de ne pas considérer souvent ces fonctions comme des récompenses politiques. Par ailleurs, la réduction du nombre de membres à trois au lieu de cinq ou sept a été envisagée. Dans le cadre d'un rapport sur la Federal Trade Commission l'American Bar Association a ainsi proposé une telle réforme qui permettrait d'éviter notamment une dilution du pouvoir et pourrait davantage attirer, des experts reconnus, en raison d'une influence accrue des commissaires 427 ( * ) .

Un filtrage des candidats par une commission extérieure, à caractère professionnel avant leur désignation par le Président, a aussi été envisagé pour apporter davantage de rationalité dans le système...

B. Les missions et le contrôle exercé sur les Agences réglementaires indépendantes

Si l'élément d'« indépendance » se rapporte aux liens entre les Agences et les pouvoirs législatif et exécutif et au contrôle exercé (2), par les « Agences réglementaires indépendantes » s'identifient aussi à travers les missions qui leur sont confiées (1).

1. Les fonctions exercées par les Agences réglementaires indépendantes

A. La nature des activités exercées

Pour entrer dans la catégorie des I.R.A, il faut que l'Agence dispose d'une véritable mission de régulation. De nombreux organismes administratifs indépendants intervenant en matière de médiation, de conseil, de telle ou telle activité, (...), ne peuvent donc recevoir cette qualification.

Deux types de missions se retrouvent ainsi prises en charge par les Agences réglementaires indépendantes.

a) La régulation d'activités privées dans l'intérêt général

La protection des consommateurs ou de l'environnement, la prise en compte de la santé ou la sécurité des personnes, la régulation des marchés ou divers objectifs socio-économiques justifient principalement l'octroi par le Congrès fédéral de missions réglementaires aux I.R.A.

Ainsi, la Consumer Product Safety Commission tend à protéger les consommateurs contre les risques « déraisonnables » de blessure, élabore des règles uniformes de sécurité, mène des enquêtes sur les causes de maladies ou accidents.

La Nuclear Regulatory Commission a pour mission de délivrer des licences et de réglementer l'usage civil de l'énergie nucléaire afin de protéger la santé publique et l'environnement.

De même, le National Transportation Safety Board est chargé de veiller à la sécurité de l'ensemble des modes de transport. Cet organisme définit les procédures à suivre pour les cas d'accident et conduit les enquêtes en matière de catastrophe aérienne, maritime, ferroviaire ou autre...

La Federal Trade Commission a quant à elle pour mission de veiller à la bonne application des lois en matière de concurrence ou d'information du consommateur et de manière générale à la régulation des pratiques commerciales.

Autre exemple, la puissante Securities and Exchange Commission est chargée de l'application des lois fédérales en matière de placements financiers. Elle doit ainsi garantir la sécurité et la transparence des marchés financiers en prononçant le cas échéant les sanctions nécessaires.

b) Les fonctions quasi-juridictionnelles

Certaines Agences indépendantes se voient confier par le Congrès d'importantes missions en matière de poursuite ou de jugement.

Ainsi, l'Equal Employment Opportunity Commission, chargée d'appliquer les dispositifs fédéraux anti-discriminatoires, conduit à cette fin des enquêtes pour dégager les éléments de preuve et entamer le cas échéant des poursuites judiciaires. La Federal Maritime Commission assure de son côté, entre autres fonctions, une importante mission de règlement alternatif des conflits (Alternative Dispute Resolution).

En ce qui concerne les activités quasi-juridictionnelles, la Federal Mine Safety and Health Review Commission règle, dans sa formation de justice administrative, sous la direction d'un Chief Administrative Law Judge, les litiges liés à l'application du Federal Mine Safety and Health Act de 1977.

Elle tranche ainsi des requêtes émanant de l'Administration de tutelle aussi bien que des exploitants miniers, des mineurs ou de leurs représentants.

De même, l'Occupational Safety and Health Review Commission est chargée de trancher des litiges renvoyés par le Département du Travail et concernant des violations aux règles de sécurité constatées par l'Administration dans des entreprises. Les employeurs ont la possibilité d'intenter une action pour contester les résultats de l'enquête et les employés ou leurs représentants peuvent de leur côté remettre en cause les mesures correctrices prévues par l'Administration ou leurs délais de réalisation.

D'autres enfin, comme la Securities Exchange Commission, ont à la fois une fonction de poursuite des infractions devant les tribunaux et un pouvoir de sanction sur le plan professionnel des auteurs des infractions.

B. La diversité des modes d'intervention

Au regard des champs d'activité précédemment évoqués, trois types d'intervention caractérisent principalement le système des I.R.A.

a) Le pouvoir réglementaire des I.R.A

Il s'agit d'un véritable pouvoir de décision à portée générale qui constitue un des critères d'identification des I.R.A. La plupart son dotées d'un tel pouvoir dont l'ampleur varie selon les organes considérés. On notera toutefois quelques exceptions, par exemple celui de l'« Equal Employment Opportunity Commission » qui si elle exerce un pouvoir quasi-juridictionnel, ne dispose pas, dans son domaine, d'un tel pouvoir réglementaire.

La Nuclear Regulatory Commission compte en revanche parmi les Agences indépendantes dotées d'un important pouvoir réglementaire lié à l'octroi des autorisations nécessaires à l'utilisation de l'énergie nucléaire à des fins civiles.

De même, la « Securities and Exchange Commisssion » fixe les règles entourant les pratiques boursières et définissant les situations de fraude et les moyens de les prévenir.

b) Le pouvoir quasi-juridictionnel des Agences

Le Congrès américain a doté certaines Agences de pouvoir trancher les litiges relatifs au domaine spécialisé considéré. Comme un tribunal, l'Agence applique alors la règle existante à une situation de fait après l'avoir interprétée. Il s'agit le plus souvent de déterminer si tel organisme, objet de la surveillance, n'a pas violé une règle définie par la loi ou par une réglementation de l'Agence elle-même.

Ce dispositif d'« adjudication » peut aussi être utilisé pour déterminer si un individu ou une entreprise remplisse les critères nécessaires pour recevoir tels permis ou aides ou bien doivent se les voir refuser.

Ainsi la Federal Maritime Commission règle des litiges en matière de commerce maritime après avoir tenu des audiences et entendu les arguments des parties en présence en vertu des règles de procédure administrative quasi-contentieuse prévues par la loi sur la Procédure Administrative de 1946.

De même la Federal Mine Safety and Health Review Commission statue sur des litiges relatifs à l'application des mesures de sécurité ou de sanctions touchant les exploitations minières. Elle se prononce également sur toutes actions en réparation intentées par les mineurs à leurs représentants.

Autre exemple d'Agence indépendante dotées d'importants pouvoirs quasi-juridictionnels, l'« Occupational Safety and Health Review Commission » se prononce sur les actions intentées par des employeurs ou employés du secteur privé ou leurs représentants. La procédure devant les « juges administratifs » de la Commission débute lorsqu'une citation à comparaître émise à l'encontre d'un employeur après inspection menée par la Commission elle-même, est contestée dans les quinze jours. À l'audience, il incombe au Département du Travail (Secretary of Labor) d'apporter la preuve de la violation de la loi fédérale de 1970 sur la sécurité du travail.

Après audience, le juge désigné rend une décision motivée en fait et en droit. Celle-ci est susceptible d'appel devant l'organe de direction de l'Agence, composé des trois commissaires, dans les trente jours.

Toute partie intéressée peut après décision finale rendue par le Commission, porter l'affaire devant la « United States Courts of Appeals ».

c) Le pouvoir d'enquête

Des missions d'enquête se trouvent confiées à la plupart des Agences réglementaires indépendantes.

Elles sont en effet généralement chargées de déterminer s'il y a eu violation de la loi fédérale qu'elles doivent appliquer ou des réglementations qu'elles ont émises.

À cette fin, elles peuvent disposer du pouvoir de contraindre des personnes à communiquer certaines informations ou d'inspecter les locaux où ces personnes travaillent ou résident.

Elles utilisent notamment « subpoena power », c'est-à-dire le pouvoir de citer une personne à comparaître avec l'obligation de produire des documents ou objets demandés à des fins d'inspection.

La Federal Trade Commission peut ainsi ordonner la production de tous éléments de preuve documentaire et la déposition de témoins. Elle peut ensuite utiliser l'information recueillie pour déterminer s'il y a eu violation de la loi sur le commerce fédéral qui interdit toutes pratiques anti-concurrentielles ou déloyales. Elle peut aussi recueillir à des fins d'études ou rapports avant notamment l'élaboration de règles ou directives.

Le Congrès peut aussi doter une Agence indépendante du pouvoir d'ordonner la communication régulière et périodique d'informations détenues par des entités privées sous contrôle. À ce titre, l'Occupational Safety and Health Commission peut ordonner à tout employeur de lui transmettre les informations relatives à la maladie ou au décès de ses employés. Cette communication permet à l'Agence de déclencher ainsi une procédure spécifique visant à déterminer s'il y a eu ou non violation de la réglementation. De même, cette Agence indépendante peut mener des investigations régulières dans les locaux privés, afin de vérifier l'application de la loi.

Si un employeur refuse l'accès de ses services à un inspecteur, l'Agence utilisera un « inspection power » pour l'y contraindre.

Autre exemple, la Federal Communications Commission peut mener toute enquête sur une action ou une carence d'un opérateur, sur la bonne application des exigences de sécurité ou de protection des personnes handicapées, etc...

La Securities and Exchange Commission peut de même enquêter sur toute opération susceptible de constituer une violation des réglementations financières fédérales. Elle peut de surcroît mener ses investigations au-delà du territoire américain. Elle a été ainsi habilitée à négocier des conventions bilatérales d'échanges d'informations avec des organismes ou États étrangers. Des conventions ont été ainsi passées entre bourses américaines et bourses étrangères et pour mettre en place des mécanismes de coopération en matière de recherche d'infractions.

On notera enfin que l'« United States International Trade Commission » a été avant tout instituée pour mener des enquêtes sur toutes pratiques commerciales affectant les relations internationales des États-Unis. Elle contrôle ainsi notamment la bonne application des règles en matière d'importation.

2. Le contrôle exercé sur les Agences réglementaires indépendantes

Trois formes de surveillance ou de contrôle s'exercent sur les Agences indépendantes. Il s'agit successivement de contrôle politique, budgétaire ou juridictionnel.

A. Le contrôle politique

a) Les principes

Toutes les Agences fédérales américaines, qu'elles soient qualifiées d'« Executive » ou d'« Independent » entretiennent des relations suivies tant avec la Présidence que le Congrès. Ces relations relèvent souvent autant de la politique que du droit.

Historiquement, les Agences fédérales indépendantes apparaissent d'abord liées au Congrès. Celui-ci les institue par une loi spéciale et surtout entend les placer hors d'atteinte de l'Exécutif, en prévoyant dans leur statut que le Président ne peut discrétionnairement révoquer les dirigeants d'une I.R.A. il les nomme avec l'avis et le consentement du Sénat mais ne peut mettre fin à leurs fonctions qu'à leur demande ou pour une faute professionnelle patente.

Un consensus s'est toutefois opéré aux États-Unis pour considérer que les principes constitutionnels de séparation des pouvoirs et d'équilibre des pouvoirs fédéraux conduisent à admettre au moins une parité entre les interventions respectives du Congrès et du Président à l'égard des Agences indépendantes 428 ( * ) . Les arguments en faveur de l'unicité du pouvoir exécutif (« Unitory Executive ») consistent à faire valoir la nécessité pour le Président de contrôler les modes de fonctionnement des organes exécutifs pour contrebalancer le pouvoir du Congrès de déterminer leur structure générale.

La Cour suprême a entériné une telle conception de l'équilibre entre les pouvoirs en matière d'Agences indépendantes, dans une importante décision « Buckley v/ Valeo » de 1976 429 ( * ) . Dans cette affaire, était en cause une disposition du « Federal Election Act » qui prévoyait la possibilité de nominations directes par le Congrès de membres de la « Federal Election Commission ». La Cour considère à cette occasion que dans la mesure où la Commission n'a pas seulement une fonction d'enquête mais aussi une fonction réglementaire, qui constitue une compétence traditionnelle de nature exécutive et qu'à ce titre elle ne peut être confiée qu'à des agents nommés par le Président ou autres autorités exécutives, avec le cas échéant avis et consentement du Sénat.

b) La pratique

Dans ce contexte, le Congrès exerce une première série de contrôles sur les Agences dont il détermine la structure et le statut :

- Demande de rapports périodiques aux Agences indépendantes ;

- Conduites d'enquêtes par les Commissions du Congrès sur l'action des Agences ;

- Tenues d'audiences permettant de parfaire l'information du Congrès et d'obtenir justifications et contenus des actions menées.

De surcroît, le Congrès dispose de l'arme budgétaire, l'affectation des crédits étant un moyen d'influence important et suscitant par la suite maintes vérifications budgétaires.

Un dernier argument souligne dans la pratique l'influence potentielle du Congrès et ses diverses commissions disposent généralement d'une « durée de vie politique » plus grande que celles de l'Exécutif, gage de relations continues et étroites entre contrôleur et contrôlés.

Toutefois, dans la période contemporaine, le contrôle de l'Exécutif sur les Agences indépendantes s'est régulièrement renforcé, sous-tendu par les exigences constitutionnelles de séparation et d'équilibre des pouvoirs rappelées par la Cour Suprême dans la décision précitée de 1976 « Buckley v. Valeo ».

Il faut tout d'abord relever plusieurs éléments marquant une certaine dépendance des Agences à l'égard de l'Exécutif.

- Les biens des I.R.A, comme ceux des autres Agences Exécutives, sont administrés par la « General Services Administration » rattachée à l'Exécutif et les contrats passés s'inscrivent dans le même régime juridique fédéral.

- Le Département de la justice représente les Agences indépendantes dans les procédures judiciaires. Celles-ci ne disposent pas généralement du pouvoir d'agir en justice et doivent donc demander au Département de la Justice de les représenter. Si ce dernier refuse ou adopte des positions différentes de celle de l'Agence, seul le Président peut intervenir alors auprès de l'Attorney general pour débloquer la situation. En outre, dans l'hypothèse où quelques Agences, comme le National Labor Relations Board disposent d'un pouvoir d'agir directement en justice, il se limite au niveau de l'appel, les actions devant la Cour Suprême étant prises en charge par le « Solicitor General » qui travaille directement en accord avec l'Attorney General et donc le Président.

- L'« Office of Personnel Management » et le « Merit System Protection Board » sont chargés de réguler pour l'ensemble des services, y compris ceux des Agences indépendantes, les recrutements de personnels, grilles de rémunération et créations de postes de cadres... L'affectation de locaux aux Agences dépend de même, pour une bonne part, de l'Exécutif fédéral.

- La protection du secret dans un but d'intérêt national est assurée par le biais d'Executive Orders pris par le Président qui définissent les actes concernés, les conditions d'accès et l'étendue de la confidentialité. Il revient également à l'administration fédérale de déterminer la liste des personnes autorisées dans chaque Agence à accéder à certaines données confidentielles.

- L'Office of Management and Budget (OMB) qui fait partie du Bureau Exécutif du Président (Executive Office of the Président) joue par ailleurs un important rôle de coordination en matière de demande de crédits par les Agences, dans le cadre de la formulation d'un projet de budget exprimant les priorités retenues par le Président.

De manière générale, des relations privilégiées vont ainsi s'établir entre l'Exécutif et les Agences indépendantes d'abord parce que le contrôle du Congrès peut être aussi politique que celui du Président et avec 535 membres du Congrès, beaucoup plus compliqué. Il peut être utile par ailleurs pour ces Agences d'avoir l'Exécutif pour allié, lorsqu'elles sont confrontées aux investigations du Congrès.

Elles partagent ainsi avec l'Exécutif, la même volonté d'administrer la chose publique dans l'intérêt général et sont souvent très enclines à être associées aux choix de l'Exécutif dans divers secteurs de politique nationale. Toutefois, dans la mesure où elles détiennent par statut, un pouvoir décisionnel, elles obtiennent ainsi le respect par le Président, de l'indépendance d'exercice de ce pouvoir.

En définitive, le contrôle exercé par le Président se manifeste par trois voies principales :

- Le pouvoir de nomination permet au Président de tisser des liens particuliers avec les membres des organes dirigeants des Agences et en particulier le Chairman qu'il désigne seul. Il peut exercer ainsi à travers lui un certain contrôle politique efficace des orientations de l'Agence. De manière générale, l'étroitesse des relations s'explique aussi par le désir des membres des Agences indépendantes d'être renouvelés dans leurs fonctions par le Président, à l'expiration de leur mandat.

- Le pouvoir de demander aux membres des Agences indépendantes de rendre des comptes par écrit sur leurs activités constitue une seconde prérogative de contrôle présidentiel. Qualifiés d'« Officers of the United States », depuis la décision « Buckley v. Valeo », ils doivent produire sur demande du Président, comme tout responsable d'un organe exécutif fédéral, tout rapport d'information, (« opinion in writing »). Le Président dispose donc comme le Congrès d'un pouvoir d'information et de contrôle à l'égard des Agences indépendantes.

- Le pouvoir de veiller à la bonne application des lois fonde enfin un troisième mode de contrôle du Président. Ce pouvoir (« Responsability of the President to take care that the laws be faithfully executed ») prévu par l'article II, § 3 de la Constitution fédérale, se trouve au coeur de la conception unitaire du pouvoir exécutif (« United Executive »). Il implique la nécessité pour le Président d'avoir des relations régulières avec l'ensemble des organes fédéraux chargés de l'exécution des lois. Il veille ainsi à promouvoir la coordination et l'efficacité des mesures fédérales et autres programmes d'application des lois. On considère en effet généralement aux États-Unis que les Agences indépendantes n'ont pas une responsabilité politique et une légitimité fonctionnelle suffisantes pour assurer ces tâches isolément.

B. Le contrôle budgétaire

Les Agences indépendantes se trouvent sous la surveillance et le contrôle tant du Congrès que de l'Exécutif, en matière budgétaire.

Le Congrès vote le budget de l'Agence. Il détermine le montant total des dépenses autorisées et prévoit parfois certains crédits pour des programmes spécifiques. Il peut ainsi être amené à évaluer certaines activités afin de juger les mérites de programmes d'action souvent coûteux.

Il ne s'agit toutefois que de possibilités relativement marginales, le Congrès étant pour l'essentiel amené à accepter en bloc ou à réduire en bloc les demandes de crédits des Agences indépendantes et à contrôler la régularité de leurs comptes. L'arme budgétaire s'avère donc à la fois décisive mais peu maniable.

Le Président américain dispose également de la possibilité de contrôler les I.R.A à travers le budget. Il peut ainsi recommander au Congrès de réduire ou d'augmenter les fonds d'un organisme même si le Congrès n'est jamais tenu de suivre une telle recommandation. Le Président ne fait ainsi qu'exprimer une volonté politique qui aura plus ou moins de poids selon le contexte politique du moment.

Il peut par contre agir de manière plus efficace par l'intermédiaire de l'Office of Management and Budget (OMB). Ce dernier, placé sous l'autorité de la Présidence, négocie avec l'ensemble des Agences indépendantes, les demandes d'allocation de crédits. L'OMB n'analyse pas en général les demandes dans le détail et se contente le plus souvent d'indiquer l'enveloppe globale et la répartition entre les principaux services internes à l'Agence. L'OMB exerce également une influence à travers les circulaires et guides qu'il publie, dans le cadre de l'application des règles de comptabilité publique.

C. Le contrôle juridictionnel

Qu'il s'agisse de l'exercice de leurs pouvoirs réglementaire ou quasi-juridictionnel, les Agences indépendantes se trouvent soumises au contrôle juridictionnel général.

Les tribunaux fédéraux sont ainsi amenés en particulier à vérifier qu'en ordonnant la production d'informations, ou la déposition de témoins, en menant des enquêtes ou en réglementant certains secteurs privés d'activités, une Agence fédérale n'a pas outrepassé les limites du pouvoir qui lui est attribué par le Congrès ou violé certaines garanties constitutionnelles fédérales.

Quelques éléments de spécificité marquent toutefois ce contentieux fédéral.

- Si toute décision d'une Agence est par principe susceptible de recours, la loi sur la Procédure Administrative de 1946 prévoit cependant la possibilité pour le Congrès d'y déroger de manière limitée.

- En second lieu, la loi de 1946 comme la common law fédérale impliquent que soit seule susceptible de recours, la décision de l'Agence réputée « définitive » ou après que le requérant a épuisé l'ensemble des recours administratifs disponibles.

Le requérant doit par ailleurs présenter un intérêt pour agir suffisant. Sous ces réserves, trois séries de contentieux se dégagent principalement :


• Cas où l'agence aurait dépassé ses compétences statutaires ou constitutionnelles.


• Cas où la décision de l'Agence serait dépourvue de base factuelle suffisante.


• Cas où l'Agence n'aurait pas fourni une motivation suffisante pour justifier son action.

Le contrôle juridictionnel peut s'avérer très important, notamment à l'égard des Agences dotées de pouvoirs quasi-juridictionnels. Ainsi les juridictions fédérales sont-elles saisies par de nombreux recours concernant par exemple les « jugements » rendus par la Federal Trade Commission. Elles se trouvent dès lors amenées à préciser le sens des lois anti-trust et les pouvoirs de la Commission. Ainsi, après avoir reconnu, depuis notamment une décision de 1966 430 ( * ) , la prééminence de la Commission pour déterminer ce qui constitue une méthode déloyale de concurrence, la Cour suprême a sensiblement réduit en ce domaine l'autorité de la F.T.C 431 ( * ) .

En guise de conclusion, on relèvera le problème particulier posé par l'insertion de ces Agences réglementaires indépendantes dans le contexte constitutionnel américain de séparation des pouvoirs. Ces organes tendent à combiner en effet souvent les trois fonctions législative, exécutive et judiciaire.

De surcroît, ces Agences qualifiées parfois de « Headless Fourth Branch of Government », ne sont pas directement responsables devant l'électorat. Le droit administratif américain a ainsi tendu depuis la Seconde Guerre mondiale à mieux encadrer leurs pouvoirs pour compenser, dans l'intérêt de la protection des personnes, ce manque de légitimité démocratique.

En définitive, au-delà de l'absence de modèle institutionnel unique qui se dégage de l'expérience américaine, cette diversité, qui caractérise aussi les situations européennes 432 ( * ) , se trouve tempérée aux États-Unis par un régime commun de procédure et des exigences de transparence et de responsabilité.

* 425 Se trouve seulement disponible dans le cadre de l'U.S Government Manual, une liste de l'ensemble des services ou organismes fédéraux avec les organigrammes et coordonnées administratifs correspondants.

* 426 Cf. W.E. KOVACIC, « The quality of appointments and the capability of the Federal Trade Commission », Administrative Law Review 49, 1997, p. 930.

* 427 Cf. Report of the American Bar Association, section of Antitrust Special Committee, Study on the role of the Federal Trade Commission, 1989.

* 428 Voir sur ce point l'article qui fait autorité en ce sens aux États-Unis de P/L. Strauss, « The place of Agencies in Government : Separation of powers and the Fourth Branch », Columbia Law Review, vol. 84, April 1984, n° 3 pp. 573-669, et en particulier p. 650 et s.

* 429 Buckley v. Valeo, 424 U ? S.1 (1976).

* 430 « Federal Trade Commission v. Brown Shoe Company », 384 U.S. 316 (1966).

* 431 Voir not. Continental TV. Inc v. GTE Sylvania Inc, 433. U.S. 36 (1977).

* 432 V. sur ces points, D. Gerardin « The development of European Regulatory Agencies : What The E.U Should learn from American Experience », 11, Columbia Journal of European Law, L1, (Winter 2004-2005).

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