3. Bilan du contrôle a posteriori exercé par la Cour des comptes

18.1.7. L'actualité du contrôle de la Cour des comptes par rapport au besoin de contrôle sur les Autorités administratives indépendantes. Puisqu'il a été sur de très nombreux points souligné que l'évolution acquise du droit des Autorités administratives indépendantes, et l'évolution qui se profile (notamment en matière d'accroissement des pouvoirs, d'attribution de personnalité morale, d'indépendance budgétaire), ne sont bénéfiques et supportables que si les Autorités administratives indépendantes rendent des comptes sur l'usage qu'elles font de leur pouvoir d'une façon efficace et proportionnée au regard de la mission que le législateur leur a confiée. Cette reddition des comptes ne peut être faite au Gouvernement, car la reddition se transformerait alors en contrôle. La première institution à laquelle on pense est naturellement la Cour des comptes. En effet, celle-ci a pleins pouvoirs pour élaborer des rapports sur les Autorités administratives indépendantes, et elle y procède régulièrement. Par exemple, des rapports ont été menés à propos de l'ART ou de la COB. On pourrait donc estimer que l'institution devant laquelle la reddition des comptes doit s'opérer est trouvée. Pourtant, la difficulté vient du fait que la Cour des comptes passe assez lentement d'un contrôle de la régularité de l'usage des moyens budgétaires à un contrôle de l'efficacité de cet usage, notamment au regard de la mission de l'Autorité examinée.

18.1.8. La potentialité du contrôle de la Cour des comptes par rapport au besoin de contrôle sur les Autorités administratives indépendantes. Pour que la Cour des comptes remplisse pleinement son rôle, il convient qu'elle achève sa mue, c'est-à-dire se transforme en évaluateur d'efficacité. Cela suppose d'ailleurs des outils dont la Cour ne dispose pas, car il est très délicat et coûteux d'opérer une mesure de la part de l'action des Autorités administratives indépendantes sur l'état d'un secteur ou d'une situation sociale, etc. tel qu'on peut le mesurer.

18.1.9. Les trois stades requis pour une évaluation rencontrant une reddition des comptes par les Autorités administratives indépendantes. L'exercice est des plus difficiles, puisqu'il faut tout d'abord évaluer la situation (par exemple, ouverture effective à la concurrence, prévention effective des risques, détection effective des défauts d'un système, amélioration effective des discriminations, etc.), puis il faut mesurer ce que l'Autorité examinée a fait en la matière, en utilisant les moyens dont elle dispose pour cela, non seulement les moyens budgétaires, mais encore les moyens normatifs, juridiques, humains, etc., et enfin il faut reconstituer les causalités entre cette utilisation des moyens et l'état de la situation sur laquelle la mission de l'Autorité porte. Une véritable accountability des Autorités administratives indépendantes requiert ces trois très difficiles stades. Pour l'instant, il ne semble pas que la Cour des comptes, qui serait l'institution publique légitime à le faire, soit en mesure de le faire, ceci requérant tout à la fois une nouvelle conception de ce qu'est un contrôle d'efficacité, et l'attribution de nouveaux moyens, notamment d'expertise, à la Cour des comptes. Si l'on peut tirer conséquence du fait que la Cour des comptes est pourtant une institution publique légitime pour y procéder, et si l'on tire espoir des mutations observables de la Cour, alors il faut que le législateur prévoie à son bénéfice les moyens nécessaires pour une expertise d'une telle ampleur, qui dépasse très largement la seule question du contrôle de l'efficacité budgétaire. Ce souhait laisse encore libre la voie pour une réflexion sur une accountability , qui offrirait en outre une légitimité renforcée au bénéfice des Autorités administratives indépendantes, du fait qu'elle pourrait s'opérer directement vis-à-vis du Parlement.

18.1.10. Les indicateurs de performance. On sait que la LOLF a pour objectif la rationalisation de la gestion des finances de l'Etat en faisant passer les finances publiques d'une logique de moyen à une logique de résultat. Efficience et efficacité doivent être, pour toutes les autorités publiques, le moteur de l'utilisation des deniers qui leur sont alloués par la loi de finances. Ainsi, comme toute autorité administrative, les AAI doivent s'engager sur des résultats par la rédaction d'un projet annuel de performances. Ce projet devra présenter les actions, les coûts associés et les objectifs poursuivis ainsi que les résultats obtenus et attendus pour les années à venir, mesurés au moyen d'indicateurs précis dont le choix sera justifié. La rédaction d'un tel rapport est d'une importance capitale pour le contrôle parlementaire des AAI par le biais du vote de la loi de règlement qui fera apparaître les écarts entre les objectifs attendus de l'autorité, ses prévisions budgétaires et la réalité des dépenses engagées.

En matière budgétaire du moins, sincérité, efficacité et responsabilité sont les pendants de l'indépendance et de l'autonomie d'action des AAI.

SECTION 19 : LE SUIVI DE L'ACTIVITÉ DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES : LA REDDITION DE COMPTES

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