N° 36

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 18 octobre 1995.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des États-Unis d'Amérique en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d' impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un échange de lettres), signée à Paris le 31 août 1994, et un échange de lettres complétant l'article 29 de ladite convention, signé à Washington les 19 et 20 décembre 1994,

Par M. Emmanuel HAMEL.

Sénateur

(1) Cette commission est composée de MM, Christian Poncelet, président ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, vice-présidents ; Mme Marie-Claude Beaudeau, MM, Emmanuel Hamel, René Régnault, François Trucy, secrétaires ; Alain Lambert, rapporteur général ; MM, Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM, Roger Besse, Maurice Blin, Joél Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Philippe Marini, Marc Massion, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Alain Richard, Maurice Schumann, Michel Sergent, Henri Torre, René Trégouêt,

Voir le numéro :

Sénat : 408 (1994-1995)

Traités et conventions

Les conventions fiscales internationales bilatérales ont deux objets directs :

- clarifier la répartition des droits d'imposer entre les deux États concernés ;

- éviter la fraude et l'évasion fiscale.

Ainsi, l'objectif de toute convention fiscale est tout à la fois d'éviter que le fisc ne soit un obstacle aux mouvements de personnes, de biens et de capitaux et que ces derniers permettent de prendre à contre-pied les règles fiscales des États.

Exercices de conciliation d'abord entre des objectifs parfois contradictoires, les conventions fiscales bilatérales le sont également entre des volontés étatiques souvent opposées.

Car quand bien même le fisc se caractériserait universellement par des Propriétés qui lui seraient particulières, les cultures fiscales nationales sont fréquemment fortement individualisées.

Dans ces conditions, il n'y a rien d'étonnant à ce que le fragile équilibre atteint par une convention fiscale bilatérale soit longtemps préservé contre des modifications que l'écoulement du temps rendrait nécessaire. De la même manière, il s'impose comme une nécessité que la négociation d'un nouvel accord s'inscrive dans le temps long.

Ces deux phénomènes ont marqué l'histoire de la convention entre la France et les États-Unis dont il nous est demandé d'approuver la ratification.

La précédente convention datait du 28 juillet 1967 et la négociation au texte ici examiné s'est étalée sur quatre ans de 1989 à 1994.

Les particularités du droit fiscal américain, la très forte volonté américaine de lutter contre la fraude ont nécessité les délais qu'on a vus.

A ce propos, il convient de souligner combien la pratique conventionnelle américaine est prudente dans le domaine fiscal. Les États-Unis ne sont ainsi liés que par une trentaine de conventions contre quelques conventions signées par la France.

Dans ces conditions, il faut se féliciter autant de la conclusion de l'accord sous revue que de sa ratification intervenue aux États-Unis en juillet de cette année même si l'on doit rappeler qu'au contraire des principes de notre droit public, il n'existe pas aux États-Unis de supériorité des traités sur la loi interne

I. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER

A. LA SITUATION DE L'ÉCONOMIE AMÉRICAINE

Après une croissance du PIB de 4,1 % en 1994, l'économie américaine a donne des signes de ralentissement marqués au début de 1995

La production industrielle a reculé sous l'effet d'une chute des exportations de biens manufactures vers le Mexique et d'une baisse de la consommation des ménages en biens durables.

La capacité de l'économie américaine à absorber le choc constitué par la crise mexicaine - les exportations vers le Mexique représentent 10% du total des exportations américaines - est une variable-clé de l'orientation conjoncturelle aux États-Unis. A ce propos, il semble que la politique délibérée de dépréciation du dollar - quelque coûteuse qu'elle soit pour les Partenaires des États-Unis - soit de nature à alléger la contrainte extérieure en Permettant aux États-Unis de s'adjuger un avantage compétitif par rapport à leurs concurrents.

Le sort de la consommation des ménages est également douteux. Soutenue en 1994 par les gains significatifs enregistres par le pouvoir d'achat du revenu disponible des ménages et par un surcroît d'endettement (+ 14,7 %), la consommation des ménages américains devrait décliner en 1995. La progression de l'emploi et des salaires devrait être moins vive qu'en 1994, alors que le relèvement des taux d'intérêt à court terme devrait accentuer la contrainte de financement pesant sur les ménages.

La dégradation des perspectives de croissance devrait déboucher sur un ralentissement des dépenses d'investissement des entreprises. Celles-ci ont Progressé en 1994 au rythme très rapide de 13,7 %. L'inflexion de la demande devrait réduire ce rythme en 1995 malgré la bonne situation financière des entreprises américaines dont les profits ont crû de 11,7 % en 1994.

La politique budgétaire américaine se caractérise par une volonté de rééquilibrage qui s'est exprimée par l'adoption par le Congrès à l'été 1993 d'un Plan de réduction du déficit budgétaire. Partant d'un niveau de 3,4 % du PIB en 1993, le déficit des administrations publiques a été ramené à 2 % du PIB en 1994. La politique des finances publiques est donc fortement contre-cyclique, mais le débat aux États-Unis se polarise sur les questions relatives à aménagement structurel des finances publiques avec, en particulier, les projets visant à réduire la dimension du budget fédéral

Quant à la politique monétaire, en dépit de l'absence de risques inflationnistes sérieux, elle est également restrictive, mais modérément Les taux d'intérêt réels s'établissent à environ 2 %. La perspective d'un ralentissement économique plus marque pourrait toutefois conduire la Banque centrale américaine à un assouplissement plus marqué.

B. LES RELATIONS BILATÉRALES

Inscrites dans un cadre peu formel, les relations franco-américaines, parfois tendues, se caractérisent dans l'ensemble par une tonalité d'amitié réciproque

Hors crédits de l'Agence pour l'Enseignement français à l'étranger, les moyens consacres par le ministère des Affaires étrangères à destination des États-Unis s'élèvent en 1995 à 22,9 millions de francs. Compte tenu de la dimension des États-Unis, ces moyens sont évidemment insuffisants, mais ils sont secondés par les efforts des intervenants non publics.

Sur le plan économique, si des contentieux subsistent après la conclusion des accords du GATT les États-Unis souhaitant un désarmement douanier toujours plus poussé de la part de l'Europe, les échanges commerciaux sont assez actifs (en 1994, 107,7 et 91 milliards de francs pour les importations et les exportations françaises respectivement) et se caractérisent par un déficit structurel au détriment de la France.

Aggravé au gré des fluctuations du dollar à la baisse, ce déficit provient principalement de la dépendance technologique de l'économie française vis-à-vis des biens d'équipement professionnels produits aux États-Unis.

Sur le front des flux bilatéraux d'investissements, il convient d'observer que les États-Unis sont le premier pays d'accueil de l'investissement français à l'étranger si bien qu'en 1993, avec plus de 1.200 sociétés françaises présentes sur le territoire américain, le stock d'investissement français aux États-Unis s'élevait à 28,5 milliards de dollars. De façon générale, les sociétés françaises jugent qu'une présence permanente aux États-Unis est indispensable pour y développer des courants d'échanges durables.

Quant à eux, les États-Unis sont le premier investisseur étranger en France sous l'angle du nombre d'opérations. Cependant, notre pays n'est que le septième pays d'accueil des investissements américains avec 23,5 milliards de dollars. Le bilan des relations économiques franco-américaines apparaît donc contraste. Améliorer notre commerce extérieur bilatéral et attirer plus d'épargne américaine en France sont les deux objectifs qu'il nous faut Poursuivre.

Les dispositions de la convention à l'examen desquelles est consacrée la deuxième partie de ce rapport peuvent nous y aider

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