II. TIRANT LES LEÇONS DES EXPÉRIENCES PASSÉES, LA PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE VISE À FACILITER LE RECOURS AU RÉFÉRENDUM D'INITIATIVE PARTAGÉE

Afin de faciliter le recours à des dispositions constitutionnelles qui n'ont pas encore connu d'application concrète depuis leur entrée en vigueur il y a huit ans, la proposition de loi constitutionnelle déposée par Yan Chantrel tend à apporter cinq modifications à l'article 11 de la Constitution.

A. ÉLARGIR LE CHAMP DU RÉFÉRENDUM RELATIF AUX PROJETS DE LOI COMME AUX PROPOSITIONS DE LOI

La proposition de loi constitutionnelle vise à élargir le champ du référendum de l'article 11 à deux égards.

1. L'intégration de la politique fiscale

Pour les auteurs de la proposition de loi constitutionnelle, non seulement « le champ d'application du référendum [est] trop restreint », mais aussi, « il fait l'objet d'une appréciation particulièrement stricte de la part du juge constitutionnel »10(*).

Sans avoir exclu qu'une proposition de loi ayant un objet uniquement fiscal puisse constituer une réforme relative à la politique économique, le Conseil constitutionnel a ainsi considéré que la proposition de loi portant création d'une contribution additionnelle sur les bénéfices exceptionnels des grandes entreprises ne portait pas sur une réforme relative à la politique économique de la nation11(*).

2. La suppression du terme de « réforme »

Récemment, le non-respect du critère de la « réforme » a conduit le Conseil constitutionnel à déclarer non conformes à la Constitution deux propositions de loi référendaires. Il a rappelé à ces occasions que :

- la notion de réforme a été conçue comme « renvoyant à des projets législatifs d'une certaine ampleur, porteurs de changements importants pour les citoyens appelés à participer à la consultation référendaire »12(*) ;

- le caractère de réforme de la proposition de loi référendaire s'apprécie « par rapport au droit existant, et non à un état futur de ce droit, alors même qu'il serait en voie de concrétisation »13(*).

B. ABAISSER LES SEUILS DE SIGNATURES DE PARLEMENTAIRES ET DE SOUTIENS D'ÉLECTEURS REQUIS

Estimant que le seuil d'un dixième du corps électoral prévu aujourd'hui par le troisième alinéa de l'article 11 « paraît inaccessible »14(*), et regrettant le non-aboutissement de la procédure pour la proposition de loi référendaire relative à Aéroports de Paris en dépit même de la mobilisation de plus d'un million de citoyens, les auteurs de la proposition de loi constitutionnelle souhaitent abaisser ce seuil à un million d'électeurs, soit 2 % du corps électoral.

Est également proposé l'abaissement de moitié du nombre de signatures de parlementaires requis : seules 93 signatures, contre 185 aujourd'hui, suffiraient ainsi à déclencher la première étape de la procédure dite du référendum d'initiative partagée.


* 10 Exposé des motifs de la proposition de loi constitutionnelle, p. 4.

* 11 Dans sa décision n° 2022-3 RIP du 25 octobre 2022, le Conseil constitutionnel a considéré que la proposition de loi avait « pour seul effet d'abonder le budget de l'État par l'instauration jusqu'au 31 décembre 2025 d'une mesure qui se borne à augmenter le niveau de l'imposition existante des bénéfices de certaines sociétés ».

* 12 Commentaire de la décision n° 2022-3 RIP du 25 octobre 2022.

* 13 Commentaire de la décision n° 2023-4 RIP du 14 avril 2023.

* 14 Exposé des motifs de la proposition de loi constitutionnelle, p. 4.

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