EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 25 octobre 2023 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a examiné le rapport de M. Christian Klinger sur la proposition de loi n° 920 (2022-2023) visant à associer les épargnants à la transmission des exploitations agricoles françaises.

M. Claude Raynal, président. - Mes chers collègues, nous entamons notre réunion par l'examen du rapport sur la proposition de loi visant à associer les épargnants à la transmission des exploitations agricoles françaises, présentée par notre collègue Vanina Paoli-Gagin.

M. Christian Klinger, rapporteur. - Mes chers collègues, nous prenons peu à peu la mesure du déclin progressif de notre secteur agricole. Je ne voudrais pas dresser un tableau apocalyptique de la situation, mais entre les conditions de travail pas toujours enviables des agriculteurs, une rémunération globalement insuffisante, des enjeux environnementaux de plus en plus prégnants et la concurrence de pays qui ne sont pas soumis aux mêmes normes que nous, mais dont, paradoxalement, nous importons les produits, c'est l'ensemble de la philosophie de notre politique agricole qui doit être repensée. Face à ce diagnostic très largement partagé, la réaction du Gouvernement se fait encore attendre, même si on nous annonce un futur projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles.

Cette situation est d'autant plus inquiétante qu'elle contribue à stigmatiser un secteur déjà durement pénalisé par son manque d'attractivité. En moins de soixante-dix ans, le nombre d'exploitants agricoles a été divisé par cinq, passant de 2,5 millions en 1955 à 496 000 en 2020. On estime par ailleurs qu'environ 43 % des travailleurs du secteur agricole pourraient partir à la retraite d'ici à 2033.

Le sujet du renouvellement générationnel est donc majeur, alors que plus de la moitié des candidats à l'installation ne sont plus issus du milieu agricole et, donc, du modèle d'exploitation familial traditionnel. Dans leur majorité, ces nouveaux entrants ne disposent pas d'un capital foncier agricole. Ce constat doit nous amener à faire évoluer notre politique agricole pour tenir compte de ces transformations, parmi lesquelles la question du foncier occupe une place centrale.

Les politiques publiques doivent ainsi préserver une agriculture de proximité pour que cohabitent plusieurs modèles agricoles, tout en permettant l'accès au secteur agricole de ceux qui ne disposent pas d'un capital foncier, pourtant indispensable. Les leviers à activer pour atteindre ces deux objectifs sont multiples. Les personnes que j'ai entendues dans le cadre de mes travaux ont effectivement souligné qu'une politique agricole en faveur de l'installation et de la transmission devait s'intéresser à tous les freins, qu'il s'agisse du coût des investissements, du droit du travail, de la concurrence ou encore de l'accompagnement des cédants. Au final, le but doit bien être de rétablir la souveraineté alimentaire française... Un horizon lointain !

La présente proposition de loi de notre collègue Vanina Paoli-Gagin s'inscrit dans ce contexte. Elle ne prétend pas résoudre l'ensemble des difficultés que je viens de soulever - qui le pourrait, d'ailleurs ? - mais elle s'attache à une modalité précise de soutien à l'installation et à la transmission des exploitations agricoles, celle du portage collectif du foncier.

Le dispositif proposé vise ainsi à créer une nouvelle voie de financement et d'accès au foncier agricole, à travers des groupements fonciers agricoles d'épargnants (GFAE), dont les parts de capital social seraient ouvertes à la souscription du public.

Cette initiative repose également sur l'idée que l'abondance d'épargne privée des Français - l'auteur parle d'environ 1 700 milliards d'euros - devrait pouvoir être mobilisée au profit de formes d'investissement « éthiques », au service des agriculteurs, de la souveraineté alimentaire et d'un « retour à la terre ». Je crois que nous pouvons tous ici partager cet objectif.

J'ai pour ma part considéré que la création d'un nouveau véhicule d'investissement, les groupements fonciers agricoles d'épargnants, était une solution parmi d'autres pour renforcer nos outils d'aide à l'installation et à la transmission. Ce véhicule, innovant, peut répondre à la situation de certains exploitants agricoles, selon leurs besoins, leurs secteurs d'activité, mais aussi le coût du foncier dans leur territoire.

J'ai donc abordé la création des GFAE comme une piste de réflexion intéressante, mais sans doute modeste. Avant de vous présenter plus en détail les dispositions de la proposition de loi, il me faut toutefois rappeler un point, s'agissant d'un produit financier. Les risques que tout épargnant peut être amené à prendre dans le cadre de ses investissements doivent être bien compris, admis et établis : un investissement non risqué, même quand le projet est jugé « éthique », cela n'existe pas. Il faut garder cet élément à l'esprit, car le dispositif proposé transforme la nature même des groupements fonciers agricoles.

L'article 1er du texte procède donc à la création de groupements fonciers agricoles d'épargnants, c'est-à-dire des groupements fonciers agricoles (GFA) dont les parts du capital social pourraient faire l'objet d'une offre au public. Le régime juridique des GFAE s'inspire de celui des groupements forestiers d'investissement (GFI) - avec, notamment, un strict encadrement des offres au public. Toutefois, et je souligne la sagesse de l'auteur sur cet aspect primordial, les règles de fonctionnement des GFA, très protectrices des associés personnes physiques et des exploitants agricoles, seraient conservées.

Les GFAE constitueraient ainsi un nouveau véhicule d'investissement relevant de la catégorie des fonds d'investissement alternatifs (FIA). Les sociétés de gestion et les distributeurs de ce produit seraient assujettis à la supervision de l'Autorité des marchés financiers (AMF), tout comme les offres au public. Les GFAE seraient par définition des produits peu liquides - le foncier agricole est donné en bail à long terme - et aux perspectives de rendement faibles - sauf à consentir une hausse de loyers pour les exploitants agricoles preneurs de baux, ce qui n'est pas souhaitable.

Parmi les neuf amendements que je vous propose, l'amendement COM-3 vise à préciser la composition de l'actif des GFAE, en prévoyant que ceux-ci puissent accepter des liquidités, en plus des immeubles à destination agricole. Cette disposition donnerait un peu plus de souplesse aux sociétés de gestion.

Par ailleurs, outre les caractéristiques de ce véhicule d'investissement, j'insiste sur le changement de nature entre le GFA « local » et le GFAE. C'est pourquoi il me semble important de trouver une qualification plus adaptée : je vous propose quatre amendements en ce sens - les amendements COM-1, COM-4, COM-6 et COM-7 requalifient les GFAE de groupements fonciers agricoles d'investissement, ou GFAI.

L'article 2 de la proposition de loi vise par ailleurs à adapter les prérogatives des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural, les Safer, à ce nouveau groupement. Ces structures, qui ont fêté cette année leurs 63 ans, ont vu leurs compétences s'élargir, avec l'objectif, notamment, de leur permettre de préempter davantage le foncier rural agricole. L'article 2 élargit donc le droit de préemption des Safer, le cas échéant à la totalité des parts des nouveaux GFAE. Sur cet article, je propose également à la commission un amendement COM-5 tendant à ramener de trois ans à deux ans le délai dont disposeraient les GFAE pour mobiliser les apports en numéraire au profit d'investissements à destination agricole.

Je serai bien plus bref sur les trois derniers articles.

L'article 3 porte des mesures de coordination au sein du code monétaire et financier. Il vise également à appliquer aux GFAE les modalités de répartition des droits de vote propres aux GFA. Ces règles sont en effet plus favorables aux associés personnes physiques, avec un droit de vote « double ».

L'article 4 a pour objet d'étendre aux parts de GFAE deux dispositifs fiscaux favorables déjà existants pour les parts de GFA : les donataires de parts de GFAE bénéficieraient d'une exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) et les détenteurs de ces parts d'une exonération totale ou partielle d'impôt sur la fortune immobilière (IFI). Il s'agit là, à mon sens, d'un simple alignement du régime fiscal des GFAE sur celui des GFA. De tels avantages fiscaux seraient également de nature à inciter davantage d'épargnants à souscrire à ce produit, en compensation de rendements limités.

J'espère, mes chers collègues, que vous soutiendrez la démarche de ce texte : proposer une nouvelle voie d'accès au foncier agricole. Je précise que, conformément à nos usages, les amendements que je vous soumets ont été déposés en accord avec notre collègue et auteur de la proposition de loi.

Mme Vanina Paoli-Gagin, auteur de la proposition de loi. - Vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur, cette initiative parlementaire du groupe Les Indépendants - République et territoires découle de plusieurs constats : d'une part, il est impératif, dans le contexte géopolitique que nous connaissons, de restaurer une certaine autonomie en matière alimentaire ; d'autre part, une part croissante des élèves de lycée agricole ne sont pas des enfants d'agriculteurs, d'éleveurs ou de viticulteurs et, en conséquence, ne pourront bénéficier d'une transmission familiale de foncier. S'ajoutent à cela la baisse du nombre d'agriculteurs, le vieillissement de cette population et l'extension de la taille des exploitations.

Nous avons donc souhaité proposer un levier d'action supplémentaire, correspondant davantage, me semble-t-il, à l'esprit des jeunes générations, qui sont plus tournées vers une économie de l'usage. Il s'agit de leur permettre de s'installer, y compris s'ils ne disposent pas des moyens financiers pour investir dans le foncier.

Il y a encore de l'argent disponible dans notre pays ! Il se trouve non pas dans les caisses d'un État surendetté, mais dans la sur-épargne des Français, constituée notamment pendant la période de pandémie. Ce nouveau type de GFA a pour ambition de drainer une part de cette épargne, estimée à 300 milliards d'euros.

L'idée a circulé dans le cadre des concertations conduites par le ministre de l'agriculture sur le pacte et la loi d'orientation et d'avenir agricoles. Nous avions opté pour le vocable « épargnants », pour mettre en avant la logique collective du GFAE, appuyé sur la sur-épargne des Français, mais le terme « investissement » retenu par le rapporteur est sans doute plus adapté à la nature du produit.

Je tiens d'ailleurs à le remercier pour le travail constructif et bienveillant qu'il a mené dans un délai très contraint. Comme indiqué, j'accepte bien volontiers tous les amendements proposés.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je voudrais remercier à la fois l'auteur de la proposition de loi et le rapporteur pour son travail de qualité dans un laps de temps très réduit.

Au travers de cette proposition de loi, on cherche à répondre à plusieurs problématiques : améliorer l'offre et l'autonomie alimentaires de la ferme France et traiter les difficultés importantes en matière d'accès et de maîtrise du foncier - en agriculture comme dans le domaine de l'urbanisme, qui tient le foncier tient l'avenir. Les outils permettant au monde agricole de continuer à maîtriser le foncier présentent un intérêt certain, surtout s'ils permettent de mieux mobiliser l'épargne au bénéfice de l'outil de production.

Je salue donc ce travail collégial, qui s'inscrit parfaitement dans cette logique, et pourra trouver une application quelle que soit la taille de l'exploitation.

Mme Isabelle Briquet. - Tout en remerciant l'auteur et le rapporteur du texte pour le travail réalisé, j'exprimerai un sentiment quelque peu différent. Si l'on peut partager l'idée d'une continuité du foncier agricole, notamment en raison de la baisse du nombre d'exploitants, du vieillissement des agriculteurs et de l'accroissement de la taille des exploitations, la méthode proposée dans ce texte ne nous semble pas la plus opportune, non plus, d'ailleurs, que les amendements du rapporteur.

En s'adressant avant tout aux personnes qui recherchent des investissements défiscalisés, on fait un pas de plus vers la financiarisation du foncier agricole, sans résoudre les problèmes d'installation et en laissant de côté le seul levier permettant de répondre globalement à l'enjeu : la régulation foncière. En outre, ce texte repose à nouveau sur une baisse de recettes fiscales. On ne peut continuer à renoncer à des recettes quand les finances publiques sont dans le rouge ! Enfin, le prochain projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles devrait permettre d'aborder plus exhaustivement ce sujet.

Pour toutes ces raisons, le groupe SER votera contre la proposition de loi.

Mme Nathalie Goulet. - J'ajouterai deux questions aux remerciements que j'adresse au rapporteur pour son travail.

Avons-nous prévu un contrôle particulier pour les investissements étrangers ? La financiarisation serait effectivement contreproductive si elle conduisait à voir apparaître des investisseurs chinois ou d'autres nationalités.

Par ailleurs, au moment où le poids des sociétés d'aménagement foncier et d''établissement rural (Safer) est renforcé, ne serait-il pas opportun de mettre en place des déclarations d'intérêts pour les personnes qui dirigent ces structures, comme cela avait été suggéré voilà quelques années ?

M. Marc Laménie. - Je remercie l'auteur et le rapporteur de la proposition de loi. En quoi consisteraient les contrôles de l'AMF dans le cadre de ce nouvel outil ? Par ailleurs, j'appuie la remarque de Nathalie Goulet concernant les Safer, dont le rôle est très important dans les choix d'installation. Comment s'inscriraient-elles précisément dans le dispositif ?

M. Arnaud Bazin. - Voilà peu, la presse se faisait l'écho d'investissements étrangers massifs dans des terres agricoles qui, ensuite, étaient confiées, non pas à des exploitants agricoles, mais à de grandes sociétés de travaux agricoles. Dans la lignée de la question de Nathalie Goulet, j'aimerais savoir si un mécanisme est prévu pour que les investissements de nos épargnants bénéficient bien à d'authentiques exploitants agricoles ? J'ajoute que je partage la préoccupation exprimée sur la nécessité de faire infuser une culture déontologique dans les Safer.

M. Éric Bocquet. - Je salue l'initiative de notre collègue Vanina Paoli-Gagin, la maîtrise du foncier agricole soulevant une véritable question. Je m'inquiète néanmoins du changement de dénomination proposé par le rapporteur. Passer d'« épargnants » à « investissement » n'est pas anodin, d'autant que le contexte actuel est marqué par un fort mouvement de financiarisation des terres agricoles en France. Ce mot est donc préoccupant : je ne dis pas qu'il faut l'interdire ; je m'interroge sur la nécessité d'une plus forte régulation. Le jeu de la financiarisation fait exploser le prix des terres à l'hectare, ce qui complique encore l'installation des jeunes agriculteurs. L'idée me semble donc bonne, mais il manque d'après moi quelques garde-fous pour rendre le texte conforme à l'objectif.

Mme Ghislaine Senée. - Mon intervention sera dans la même veine. Parler de GFAI, c'est mettre des mots justes sur la réalité : il s'agit bien d'investissements ! Il existe déjà des GFA citoyens ou solidaires, permettant aux épargnants de participer à l'acquisition de foncier et à l'installation de nouveaux exploitants. Nous exprimons donc de très fortes craintes face à ce projet. Si de tels groupements devaient se mettre en place, il faudrait au moins prévoir quelques conditionnalités, par exemple en matière de nombre d'emplois ou de pratiques agricoles vertueuses.

S'agissant des Safer, nous souhaiterions qu'elles puissent jouer un rôle plus important dans les mouvements fonciers.

Compte tenu des risques de financiarisation, nous ne voterons pas cette proposition de loi.

M. Michel Canévet. - Je voudrais, moi aussi, remercier très vivement l'auteur de la proposition de loi pour avoir mis en avant un problème particulièrement aigu. Nous sommes tous attachés à ce que l'activité agricole prospère dans notre pays. Compte tenu de la réduction importante du nombre d'agriculteurs, il est urgent d'apporter des solutions.

Cela a été mentionné, le niveau d'épargne est élevé et il convient, autant que faire se peut, d'orienter cette épargne vers le système productif existant. Nous pourrions d'ailleurs avoir une approche identique pour le secteur maritime, confronté à la question du renouvellement des flottes de navires de pêche...

Dans le secteur agricole, notamment l'élevage, nous observons une capitalisation croissante, ce qui oblige à trouver des formules de financement pour garantir la transmission des exploitations. D'où cette question : les bâtiments d'élevage sont-ils couverts par le dispositif ?

M. Christian Bilhac. - Je remercie à mon tour l'auteur et le rapporteur de la proposition de loi.

J'observe que nous avons déjà un outil avec le GFA et je ne vois pas bien pourquoi un épargnant, devant les offres multiples et variées qui lui sont proposées, irait investir dans des secteurs ne rapportant rien, si ce n'est pour un motif de défiscalisation.

Les problèmes de transmission d'exploitation sont, d'après moi, liés à la question du revenu. S'il n'y a plus d'agriculteurs, c'est parce que leurs revenus sont insuffisants pour vivre, c'est parce que, malgré les lois récemment votées, des milliers d'entre eux vendent à perte tous les jours, dans l'indifférence générale !

M. Grégory Blanc. - Il me semble que le problème rencontré par l'agriculture française tient moins à la capitalisation qu'à la trésorerie. Notre modèle, on le sait, repose sur la concentration des capitaux jusqu'au départ à la retraite et, en même temps, l'enjeu au moment de l'installation est de réduire le risque et faciliter l'accès aux prêts. Peut-être existe-t-il à cet endroit une tension... Une réflexion a-t-elle été menée pour savoir comment mobiliser l'épargne en faveur d'un renforcement de la trésorerie des agriculteurs ?

M. Victorin Lurel. - Les marins-pêcheurs ne possèdent pas la mer et, pourtant, travaillent avec elle... Il en va différemment dans le domaine agricole, où l'on veut être propriétaire, ce qui représente un coût important dans le bilan de l'exploitation.

S'agissant de la proposition avancée, je suis quelque peu sceptique sur la rentabilité de ces groupements. Compte tenu des rendements à attendre, qui aurait intérêt à investir ?

On cherche une voie pour pouvoir mettre à disposition du foncier, soit par la vente, soit par la location. On va donc créer un GPA en utilisant des fonds d'épargnants, puis on va louer le terrain à l'agriculteur, en lui proposant probablement de prendre des parts, et peut-être de devenir propriétaire à l'issue de ce bail à long terme, avec, qui plus est, un loyer encadré. La seule motivation pour participer à une telle opération ne peut être que la défiscalisation !

Enfin, le droit de préemption de la Safer serait a priori préservé dans le cadre du GFAE. Quelle est l'utilité de ce nouveau produit si la Safer continue de pouvoir en préempter les parts, comme pour les GFA ? Je ne vois donc pas non plus la plus-value par rapport aux instruments existants.

M. Christian Klinger, rapporteur. - S'agissant de la régulation foncière, il s'agit d'une problématique bien plus large, qui excède le périmètre de la proposition de loi.

L'outil envisagé n'a en effet pas vocation à répondre à toutes les problématiques : il est complémentaire des dispositifs déjà existants pour soutenir les candidats à l'installation.

Dans le cadre du pacte et de la loi d'orientation et d'avenir agricoles, qui viendront certainement en débat en début d'année prochaine, un module consacré à l'installation et à la transmission a déjà permis d'aborder le sujet que nous examinons aujourd'hui. D'autres outils ont été évoqués, tels que les diagnostics de transmission ou la refonte des aides à l'installation.

Par ailleurs, on ne peut pas parler véritablement de pertes de recettes fiscales, puisqu'il s'agit d'un nouveau dispositif. Il n'y a donc pas de pertes, mais une absence de perception de recettes potentielles.

Concernant le contrôle des investissements étrangers, je devrais pouvoir rassurer sur le sujet. Le GFAI serait considéré comme un fonds d'investissement alternatif et, à ce titre, pourrait être commercialisé auprès de toute personne domiciliée dans l'Union européenne, sans condition de nationalité. La commercialisation des parts ne pourrait avoir lieu qu'en France pour les clients non professionnels et dans l'Union européenne pour les clients professionnels. Pour les personnes morales, seules seraient autorisées à souscrire aux parts du GFAI les Safer, les sociétés civiles agréées par le ministère de l'agriculture et le ministère chargé des comptes publics, les entreprises d'assurance, les coopératives agricoles et les sociétés d'intérêt collectif agricole.

Il a été question de la déontologie des Safer. Effectivement, en tant que suppléant d'une d'entre elles, je peux attester qu'il s'agit d'un cercle un peu fermé. Aucun système de déclaration d'intérêts n'est prévu. Cela étant, quand une vente est proposée à l'un des membres, la personne en question ne participe pas aux délibérations.

Le GFAE, je le redis, est calqué sur les groupements forestiers d'investissement, qui existent déjà et ont fait leurs preuves. Cela explique, aussi, le changement de dénomination proposé et le remplacement du terme « épargnants » par « investissement ». Ce changement a le mérite d'attirer l'attention de l'épargnant sur le fait que l'investissement est peu liquide et a une rentabilité faible. Tous les épargnants ne recherchent d'ailleurs pas systématiquement les rentabilités les plus élevées, ils peuvent vouloir consacrer une partie de leur portefeuille à des investissements éthiques ou à des produits de la finance solidaire.

Je veux aussi vous rassurer en indiquant que le fonctionnement du GFAI est parfaitement identique à celui du GFA. L'épargnant achète des parts, ensuite gérées par le fonds de gestion. Les biens agricoles font toujours l'objet d'un bail à long terme entre l'agriculteur exploitant et le groupement. Ce bail est, au minimum, de 18 ans et, souvent, de 25 ans. , Dans le cadre de la réglementation des baux ruraux, le prix du fermage est établi en fonction d'un barème établi par le préfet du département.

Je le redis, nous parlons ici d'un outil complémentaire aux aides existantes, visant à améliorer l'accès au foncier, surtout pour les personnes souhaitant s'installer en dehors de tout cadre familial. Le terme « financiarisation » m'apparaît excessif, d'autant qu'on pourrait tout à fait l'utiliser pour les GFA. L'ouverture des GFA aux épargnants permettra peut-être même de protéger certaines exploitations de l'appétit de grandes sociétés ou d'investisseurs étrangers...

Dans le cadre de mes travaux, j'ai été interpellé par l'audition des représentants des Jeunes agriculteurs, durant laquelle ils nous ont expliqué que l'accession à la propriété n'était plus un objectif prioritaire pour les jeunes agriculteurs, qu'ils soient issus d'une famille d'exploitants agricoles ou non. Ils veulent pouvoir exploiter un terrain pour faire le métier qu'ils aiment, et ce durant une période de temps donné, qui ne recouvrira pas forcément toute leur carrière. Un changement s'opère ; peut-être devons-nous aussi changer notre propre vision.

Je confirme qu'un bâtiment d'élevage peut entrer dans le dispositif du GFAE.

Pourquoi investir alors que cela ne rapporte pas ? Chacun est libre d'investir son épargne où il veut, et on peut considérer cet outil comme un dispositif d'épargne solidaire et éthique, au bénéfice de la souveraineté alimentaire française. Effectivement, il ne réglera pas le problème des revenus des agriculteurs, mais un GFA « classique » ne le règle pas non plus.

Je ne pense pas en revanche que les épargnants disposés à mettre de l'argent dans la trésorerie d'une entreprise soient très nombreux.

Je reconnais à nouveau que les perspectives de rendement de ce produit sont faibles, mais c'est le propre des investissements sur les terres agricoles, et que l'opération est peu liquide. Sur le modèle des GFA, la compensation de ces deux risques prend la forme d'exonérations partielles ou totales de droits de mutation à titre gratuit et d'impôt sur la fortune immobilière.

M. Claude Raynal, président. - En application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, le rapporteur propose un périmètre indicatif de la proposition de loi.

Ce périmètre comprend les dispositions relatives au régime juridique et fiscal des groupements fonciers agricoles d'épargnants ; les dispositions relatives au rôle des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) dans les groupements fonciers agricoles et les groupements fonciers agricoles d'épargnants ; les dispositions relatives aux modalités de calcul des droits de vote des associés aux groupements fonciers agricoles d'épargnants ; les dispositions relatives aux groupements fonciers agricoles  et les dispositions relatives aux véhicules d'investissement et aux véhicules financiers destinés à faciliter la transmission des exploitations agricoles françaises.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

M. Christian Klinger, rapporteur. - L'amendement COM-1 concerne le changement de la dénomination des groupements fonciers agricoles d'épargnants en groupements fonciers agricoles d'investissement.

L'amendement COM-1 est adopté.

L'amendement de précision rédactionnelle COM-2 est adopté.

M. Christian Klinger, rapporteur. - L'amendement COM-3 vise à préciser la composition de l'actif des GFAE, en leur permettant d'accepter des liquidités.

L'amendement COM-3 est adopté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

L'amendement de coordination COM-4 est adopté.

M. Christian Klinger, rapporteur. - L'amendement COM-5 tend à réduire de trois ans à deux ans la période au terme de laquelle les apports en numéraire devront avoir été utilisés pour des investissements à destination agricole.

L'amendement COM-5 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3

L'amendement de coordination COM-6 est adopté.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 4

L'amendement de coordination COM-7 est adopté.

M. Christian Klinger, rapporteur. - L'amendement COM-8 complète l'article 4 en gageant la perte de recettes publiques pour l'État qui résulterait des exonérations de DMTG et d'IFI.

L'amendement COM-8 est adopté.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 5

M. Christian Klinger, rapporteur. -L'amendement COM-9 vise à supprimer l'article 5, correspond au gage financier de la proposition de loi, compte tenu de l'adoption de l'amendement COM-8.

L'amendement COM-9 est adopté.

L'article 5 est supprimé.

La proposition de loi a été adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

TABLEAU DES SORTS

Article 1er

Auteur

Sort de l'amendement

M. KLINGER, rapporteur

1

Adopté

M. KLINGER, rapporteur

2

Adopté

M. KLINGER, rapporteur

3

Adopté

Article 2

Auteur

Sort de l'amendement

M. KLINGER, rapporteur

4

Adopté

M. KLINGER, rapporteur

5

Adopté

Article 3

Auteur

Sort de l'amendement

M. KLINGER, rapporteur

6

Adopté

Article 4

Auteur

Sort de l'amendement

M. KLINGER, rapporteur

7

Adopté

M. KLINGER, rapporteur

8

Adopté

Article 5

Auteur

Sort de l'amendement

M. KLINGER, rapporteur

9

Adopté

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